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29/01/2008

L'affaire Société Générale.

L’affaire de la Société Générale est plus simplement l’affaire des dérives d’un capitalisme qui s’enivre de ses propres principes, au point de risquer le coma éthylique. Cette course au profit, à l’argent et à son accumulation entre les mains de quelques uns (aussi honorables soient-ils par ailleurs), tout cela n’est pas sain quand cela tourne au « systématique » et à une forme de darwinisme économique et social peu compatible avec les notions de justice et de solidarité.

 

Ce qui m’agace particulièrement, c’est cette curée médiatique contre le « trader » Jérôme Kerviel, désigné comme un « fou » ou un « terroriste » par le président de la Société Générale, Daniel Bouton, aujourd’hui lui-même sur la sellette. Je n’aime pas cette ambiance de lynchage qui méconnaît les droits de la défense et la dignité de la personne, et qui tend à faire diversion pour éviter des questions sur la gestion même de la banque et de ses activités boursières.

 

Ce qui me surprend (un peu seulement, au regard des tendances actuelles de nos sociétés), c’est l’absence de réaction des Français, si ce n’est au comptoir des cafés : pas de manifestation de colère dans les rues ou devant le siège de la Société Générale ; pas de banderoles vengeresses demandant des comptes à la direction ou dénonçant le gâchis financier de plusieurs milliards d’euros à l’heure où des millions de gens vivent avec moins de 1 000 euros par mois ; et, enfin, de timides déclarations des politiques apparemment impuissants devant les jeux d’une économie de Marché qui refuse tout contrôle des Etats et toute « contrainte » politique…

 

Il est un temps, pas si lointain, où une telle affaire aurait jeté des foules, souvent constituées de militants contestataires ou populistes, de citoyens contribuables furieux ou d’actionnaires floués, dans la rue. Ici, rien, si ce n’est un sentiment diffus de résignation et, parfois, de mépris…

 

En tout cas, il faudra bien réfléchir dans les temps qui viennent à une nouvelle organisation des rapports entre politique et économique, sinon la révolte qui monte dans les populations frustrées de ne pas participer au banquet risque d’être terrible et pas forcément juste, d’ailleurs : la BCE, par exemple, qui ne cesse de dénoncer les hausses de salaires dans les pays de la zone euro, pourrait bien l’apprendre à ses dépens, tout comme l’actuel gouvernement piégé par une situation qu’il a du mal à maîtriser. Cela ne doit pas empêcher, même si les événements ne sont guère propices à ce genre de réflexion, de penser aussi à un autre mode de vie et de consommation, plus économe des ressources de la nature. « Consommer moins et mieux », pourrait-on résumer… Il faut bien reconnaître que cette double réflexion (qui peut paraître paradoxale) sur le pouvoir d’achat et la nécessaire sobriété à l’égard de l’environnement n’est guère aisée et qu’elle ne pourra se concrétiser qu’à travers un Etat politique, en France, qui aura des reins sacrément solides et des racines profondes…

 

 

Commentaires

En étant un petit peu provocateur, je trouve bien étrange que vous vous offusquiez, d'un côté, du lynchage d'un individu pour, de l'autre, regretter l'absence de foules dans les rues.

Personnellement, ce qui m'attriste le plus dans ce « scandale », si tant est que c'en soit un, c'est la vacuité des « informations » fournies par la plupart des médias sur le sujet. Une majorité d'entre eux semblent se contenter de relayer des communiqués de presse (je ne parle même pas de ces équipes envoyées dans le village natal du trader... pour y chercher quoi ?) et de recueillir des réactions de personnes qui ne savent manifestement rien, ou qui ne désirent pas parler. On a pu entendre tout et son contraire : s'agit-il d'une fraude ? d'un vol ? quel montant ? comment ? Incapables de répondre à ces questions, dont les réponses ne sont pas forcément ni de leur ressort ni disponibles actuellement, beaucoup de journalistes se contentent de faire du bruit. Tout sauf le silence et le temps de la réflexion.

Pour moi, un sommet a été atteint durant un journal radiophonique ce matin, au cours duquel un journaliste se demandait si, une fois de plus, la « question » de la « moralisation » des marchés financiers ne se posait pas. Je pense que la morale n'a rien à voir dans cette affaire. Non pas parce que la finance serait immorale par nature, argument maintes fois entendu et répété par tous ceux pour qui une sorte de cynisme désabusé tient lieu de pensée devant le spectacle de l'actualité, mais parce je ne vois là qu'un aveu d'impuissance, l'aveu de l'individu devant le « système technicien » (notion de Jacques Ellul que je trouve terriblement d'actualité) qu'il ne comprend pas et dont il condamne les soi-disant « dérives » au nom d'une « morale » dont les règles ne sont jamais énoncées, d'autant qu'on ne sait pas si elles concernent l'individu ou « le système ».
Lorsqu'on fixe des limites de vitesse, peut-on appeler cela « moraliser » le code de la route ? Je trouve cela ridicule. Invoquer la morale pour condamner les actions d'un trader qui a pris des risques tels qu'ils menacent la société qui l'emploie, c'est vider la notion de morale de son sens. À ce compte-là, pourquoi ne pas invoquer les Droits de l'Homme ou le principe de précaution (autre notion juridique précise galvaudée par les médias) ? Dieu sait que la morale n'en n'a pas besoin...

Écrit par : Chaviro | 29/01/2008

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