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16/05/2008

Société de consommation.

Il y a environ vingt ans j’ai fait mon mémoire de maîtrise d’Histoire contemporaine sur un thème proche de mes préoccupations et de mes interrogations politiques : « L’Action française de Mai 68 à mai 71 : du renouveau à la « dissidence ». » Mon directeur de maîtrise était Michel Denis dont j’ai déjà évoqué la figure dans une précédente note, et que je considère comme un de mes « maîtres » en Histoire même si nous ne partagions pas les mêmes opinions politiques. Il m’a laissé entière liberté pour travailler sur le thème que j’avais choisi, sans faire pression d’aucune sorte : c’était un historien qui cultivait l’art de la liberté de pensée et de parole en une époque où commençait à s’imposer le « politiquement correct » dont nous subissons aujourd’hui toute la lourdeur.

 

Ce mémoire de maîtrise a été tiré à quelques exemplaires et il en circule quelques tirages « pirates » dont l’un illustré de photos et d’images militantes que je n’ai, d’ailleurs, jamais vu : cela m’amuse et la commémoration actuelle m’a incité à le relire, avec un œil critique et je me suis promis d’en récrire quelques pages et, surtout, de le compléter : j’ai commencé à regrouper les tracts monarchistes de l’époque pour en faire une sorte de cahier d’annexes au texte du mémoire.

 

Mardi dernier, justement, Arnaud Guyot-Jeannin m’a invité à son émission de Radio-courtoisie sur le thème des réactions de Droite face à Mai 68 : outre ma modeste personne, se trouvaient dans le studio le maurrassien Gilbert Comte, François Bousquet, et, par téléphone, le directeur de la « Nouvelle Revue d’Histoire », Dominique Venner. Il me faudra reparler des analyses brillantes de Gilbert Comte et de Bousquet, et des présentations fort judicieuses d’Arnaud Guyot-Jeannin. L’émission durait une heure et demi, mais je me suis contenté de parler une dizaine de minutes sur les positions des royalistes d’AF, en particulier à l’égard de la société de consommation qu’ils dénonçaient de la façon la plus ferme qui soit, sans aucune démagogie, comme on peut le constater à la relecture des écrits de Pierre Debray publiés dans « Aspects de la France » (l’hebdomadaire monarchiste d’Action Française) et « l’Ordre Français » (revue non moins monarchiste de réflexion et de prospective) dans les années 60. Je n’ai pas eu assez de temps pour citer des extraits significatifs d’un article majeur de Debray, publié dans « Aspects » en janvier 1969, et intitulé « Paris n’est pas Washington ». Ce blogue est l’occasion de le faire, car je pense que ce texte mériterait d’être relu, diffusé et commenté.

 

En voici donc quelques lignes : « Quand l’école d’Action française condamne la société de consommation, (…) il s’agit de la révolution copernicienne opérée par Ford le jour où il a compris que désormais il ne fallait plus produire pour consommer mais consommer pour produire. C’est que le grand problème n’est plus de fabriquer mais de vendre (…). Comment écouler les milliards d’objets qui sortent chaque jour des usines sinon par l’organisation scientifique du gaspillage ? Nous entrons dans l’ère du gadget, ce qui ne sert à rien, voilà le produit idéal, puisqu’il n’est pas besoin de l’utiliser pour avoir besoin de le remplacer. Chacun peut acheter autant de gadgets qu’il en a envie. Le seul problème est précisément de lui en donner envie. La publicité s’en charge. »

 

Cette analyse de la société de consommation et de son système reste d’une actualité brûlante, quarante ans après : mais, quand Mai 68 a finalement renforcé la société de consommation que les émeutiers prétendaient combattre, l’AF n’a pas cédé sur ce point : la consommation, en tant que telle, n’est pas un péché et c’est même une nécessité humaine ; ce qui est condamnable c’est que consommer soit devenu la finalité principale dans notre société et que l’on vaut, dans celle-ci, par ce que l’on consomme, véritable triomphe de l’Avoir et de la Marchandise sur l’Être et l’échange, le partage, les solidarités actives et naturelles…

 

En définitive, à relire les articles de Gérard Leclerc ou de Pierre Debray de l’époque, il est facile de constater, ce que soulignait Arnaud Guyot-Jeannin l’autre jour, que les monarchistes ont été à la fois plus conséquents et plus « révolutionnaires » que les « soixante-huitards » aujourd’hui reconvertis dans les médias ou la pub… Il n’en est que plus rageant, il faut bien l’avouer, d’avoir eu raison « trop tôt » ou « trop seuls », d’une certaine manière… Cela ne doit pas être, pour autant, l’occasion de se défiler ou de renoncer à vouloir « changer la vie », pour reprendre un slogan de Mai 68…

 

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