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03/05/2015

Cet heureux événement royal...

 

 

Il est des informations heureuses qui éclaircissent un ciel européen bien sombre et menaçant, et il serait fort dommage de ne pas s'en féliciter. La naissance d'une petite fille au sein d'une famille royale, cette fois outre-Manche, a occupé la scène médiatique samedi dernier, et j'ai levé mon verre, au soir de ce jour-là, à la santé de la nouvelle venue sur la grande scène dynastique de notre voisin anglais (au 5ème rang, je crois, pour ce qui la concerne), tout en écoutant la vieille chanson « Au 31 du mois d'août », pourtant peu favorable à la Couronne britannique...

 

Toute naissance est une fête pour la famille qui accueille le nouveau-né, garçon ou fille. Toute naissance royale est une fête pour la nation couronnée et pour toutes les familles qui la composent, et le cas de la monarchie britannique, l'une des plus anciennes et solides d'Europe, nous le montre ces jours-ci à l'envi : le « royal baby » (c'est-à-dire le « bébé royal », en français) appartient à la nation toute entière, au point qu'elle se l'approprie à travers les photographies et de multiples objets décorés à son image, et toute famille du pays peut, en fait et parfois inconsciemment, se reconnaître dans le bonheur domestique (mais public et largement médiatisé) des parents princiers... Certains se gausseront de cet engouement populaire, qui dépasse néanmoins très largement les frontières du Royaume-Uni, et ils auront tort : le sentiment d'identification des citoyens d'une nation à la famille régnante est aussi un élément fort de l'unité nationale, parfois plus fort que des principes qui valent ce que les gouvernements en font... Le petit être de chair devient l'objet de toutes les attentions et de toutes les tendresses des mères du pays qui y reconnaissent, d'une certaine manière, un peu de leur propre chair, et qui seraient prêtes à en assumer la « régence familiale », au moins sentimentalement. Toutes les mères se veulent, en se penchant symboliquement par l'intermédiaire des médias sur le berceau du nouveau-né, les bonnes fées des histoires anciennes et des temps présents !

 

Lorsque Jean Jaurès évoquait « le charme séculaire de la monarchie », sans doute n'oubliait-il pas cette dimension sentimentale de l'institution royale fondée sur la famille et son mode de transmission le plus naturel qui soit, entre amour et naissance : il savait que la monarchie, en France, n'avait pu être brisée que par les morts successives du « boulanger, de la boulangère et du petit mitron », ce dernier agonisant, seul et misérable, « enfant-roi » jeté au fond d'un immonde cachot de la République et privé de tout rapport avec cet « extérieur » qui était sa « famille par statut », c'est-à-dire les Français. Tuer l'enfant, c'était tuer, plus sûrement que le 21 janvier 1793, le lien filial entre la Monarchie et la France, la transmission entre un hier glorieux et le lendemain toujours incertain mais plein de promesses et d'espérances : ce lien, malgré les efforts des monarques qui régneront après 1814 (mais aussi ceux de Napoléon qui, empereur, avait compris le sens profond de la monarchie familiale à défaut de pouvoir la restaurer à son profit, et cela malgré le roi de Rome, hypothétique et malheureux Napoléon II...), ne sera pas renoué. Et pourtant, il manque à la France !

 

Nos contemporains, Français orphelins de famille royale depuis plus d'un siècle et demi, se consolent avec celle des autres : républicains affirmés, ils s'enthousiasment, même sans le dire ouvertement (et parfois en contestant, un peu trop bruyamment, cette attraction pour la dynastie des autres...), pour les enfants royaux, de Londres comme de Monaco... La naissance d'un enfant présidentiel, sous le règne de M. Sarkozy, n'a guère ému les foules hexagonales et n'a provoqué aucun mouvement économique dans le pays quand on annonce que celle de la fille du prince héritier William devrait rapporter quelques centaines de millions d'euros à l'économie britannique et qu'elle a braqué les regards des citoyens du monde entier vers la capitale du Royaume-Uni, véritable publicité touristique gratuite et bienvenue pour la ville de Londres, grande concurrente de Paris...

 

Décidément, Régis Debray, ce républicain paradoxal et amoureux passionné de la France, avait raison quand il écrivait, au milieu des années 1980 : « Il manque à la République une famille royale » ! Cette sorte de combinaison entre des institutions « républicaines » et la tradition monarchique est-elle possible ? Une nouvelle Monarchie, peut-être, qu'il nous reste à imaginer, à penser, à fonder...

 

Ce qui est certain, c'est que la naissance de la fille de Kate et William nous laisse quelques regrets de ne pas avoir, nous aussi et chez nous, aujourd'hui et maintenant, au-delà de nos différences et en France, au-delà de nos propres liens filiaux, une famille à aimer et qui, ainsi que nous sommes, nous aime...

 

 

 

 

02/05/2015

Privilégier la qualité du travail et des produits.

J'étais il y a quelques jours à Troyes, au cœur des anciennes foires médiévales de Champagne, et j'en ai profité pour déposer une gerbe de fleurs de lys, au nom du Groupe d'Action Royaliste et de l'Action Sociale Corporative, au pied de la statue en bois polychrome de saint Crépin et de saint Crépinien, patrons des cordonniers, en l'église Saint Pantaléon : il s'agissait, en fait, de rendre hommage au Travail (en tant que monde et qu'activité), aux travailleurs artisans et producteurs, mais aussi à des Métiers (au double sens du terme, à la fois socio-professionnels et corporatifs) que notre société de consommation oublie, préférant pousser à racheter des chaussures destinées à être « vite usées, vite remplacées » plutôt que de les faire raccommoder ou ressemeler. Or, le travail, et en particulier le travail « bien fait », doit être valorisé et pas seulement le fait de consommer, ou d'acheter pour assouvir un désir qui est, parfois, juste celui... d'acheter !

 

Cette obsession de la « belle ouvrage » est une caractéristique de l'esprit des corporations du Moyen-âge et des époques qui le suivent : peut-on dire que cela causera leur perte lorsque le XVIIIe siècle verra l'obsession de l'utilité désormais première du temps comptable et purement économique s'affirmer à travers la formule tristement célèbre de Benjamin Franklin, ce fameux « Time is money » qui allait triompher légalement avec la Révolution française, si fatale aux travailleurs et au Travail, par le décret d'Allarde de mars et la loi Le Chapelier de juin 1791 ? En tout cas, aujourd'hui, c'est « homo consumans » qui domine dans nos sociétés, au moins en nombre et en intentions, même si ces dernières naissent parmi le monde de la Finance, de l'innovation et de la publicité : le triomphe de Ford et de Séguéla, diraient certains... Comprenons-nous bien : il ne s'agit pas de dire que l'argent, la recherche et la réclame sont inutiles ou seulement néfastes, mais de regretter qu'ils ne soient pas à leur juste place, celle de moyens économiques et sociaux, de « facilitateurs » ou d'informateurs. Je ne regrette pas leur existence mais leur règne, tout simplement.

 

Préférer la qualité à la quantité, telle devrait être la politique de chacun, et en particulier de ceux qui veulent que la question sociale ne soit pas forcément indexée sur les seules rentabilité et compétitivité : mais cela suffit-il dans notre société mondialisée ? On peut en douter, ne serait-ce que du fait de la tentation permanente faite aux consommateurs qui est le ressort privilégié de cette société de consommation dans laquelle nous vivons. C'est là que l’État peut jouer son rôle d'arbitre social et de garant de la « justice sociale » (cette formule que nous devons à... Louis XVI !), en promouvant « la qualité française » et en aidant les entreprises, les artisans, les travailleurs indépendants de ce pays (en priorité mais pas forcément en exclusivité) par des politiques et des stratégies économiques adaptées à chaque secteur d'activité et sans négliger les débouchés de chacune de ces productions : en somme, un néo-colbertisme pour notre temps qui pourrait motiver un « renouveau corporatif », non pour répéter le passé mais pour en retrouver l'inspiration, celle qui privilégie le travail sans négliger les travailleurs...