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26/05/2008

Main-mise allemande sur Airbus.

Il y a quelques années, Airbus était présenté comme le symbole de la construction européenne, autant dans les médias que dans les manuels scolaires : ces temps-là semblent bien révolus et, s’il doit être encore le symbole de l’Union Européenne, ce n’est guère rassurant, ne serait-ce qu’au regard des récents développements de l’actualité de l’entreprise EADS…

 

Dans « Le Parisien » du lundi 25 mai, une double page est consacrée aux « tensions franco-allemandes » au sein du groupe industriel, et ce que l’on n’y apprend mérite attention. En sous-titre : « les salariés français et les élus locaux s’inquiètent de l’hégémonie allemande au sein du groupe »… Un autre titre, extrait d’un entretien avec le député socialiste de Haute-Garonne : « On s’est fait rouler dans la farine ». En veut-on encore ? Voici un troisième titre : « Une note accuse l’Allemagne de « spolier » Airbus ». Et un sous-titre, encore, dans cette double page : « Menaces d’agressions physiques à Toulouse »…

 

En fait, il semble bien que les intérêts économiques (en particulier ceux des actionnaires) et les pressions de l’Allemagne, soucieuse de mettre la main sur l’industrie aéronautique française en jouant la carte « européenne », véritable alibi des démissions françaises et nouveau tabou qui évite d’avoir à réfléchir, sont en train d’entraîner « la fin de l’aéronautique française », comme il y a eu la mainmise de l’Indien Mittal sur Arcelor, celle de Lucent sur Alcatel, ou celle de l’entreprise canadienne Alcan sur Péchiney : c’est le député socialiste qui, dans son entretien avec le journal, déclare : « L’équilibre franco-allemand au plus haut niveau décidé à l’été 2007 par Sarkozy et Merkel est un marché de dupes. Louis Gallois [président français du groupe EADS] est isolé, les Allemands sont partout aux manettes. (…)

 

Louis Gallois se contente de faire du mécanoindustriel et de délocaliser dans les pays de la zone dollar. Pendant ce temps, sur le terrain, on est en train de dépecer la filière aéronautique française et de détruire des milliers d’emplois sans que le gouvernement dise un mot. C’est scandaleux. Il ne s’agit pas d’être antiAllemands, mais de constater qu’eux ont une véritable politique industrielle. En France, nous n’avons même pas de ministre de l’Industrie. Sur l’affaire Airbus, le gouvernement Fillon se met la tête dans le sable pour ne pas froisser Angela Merkel avant la présidence française de l’Union européenne. (…)

 

Nous nous sommes fait rouler dans la farine par les Allemands. Comme Nicolas Sarkozy s’y était engagé pendant la campagne de la présidentielle, le gouvernement doit reprendre en main l’avenir de la filière aéronautique. On ne peut pas accepter de voir disparaître l’un des fleurons de l’industrie française. (…) Pour l’instant, la ligne d’EADS aujourd’hui, c’est des dividendes pour les actionnaires et des larmes pour les salariés. » Terrible réquisitoire contre cette entreprise en passe de quitter la France, au nom de la « compétitivité », et contre une République sarkozienne oublieuse de ses promesses électorales qui, selon la formule célèbre, « n’engagent que ceux qui y croient »…

 

Les propos du député Gérard Bapt sont confirmés par cette « note blanche, confidentielle, insérée dans le dossier qu’a remis la chambre de commerce et d’industrie (CCI) de Toulouse à la ministre de l’Economie, Christine Lagarde, il y a une semaine » : elle ne laisse aucun doute sur les manœuvres dilatoires des dirigeants allemands d’EADS, dont le président Gallois se fait, en définitive, le complice (à moins qu’il n’en soit le prisonnier ?), en expliquant que « le simulacre de vente des usines allemandes est une honte. EADS devait savoir depuis longtemps qu’elles étaient invendables, que la société qui s’est porté acquéreur était « bidon » et que les allemands n’ont jamais eu l’intention de les vendre. On a tout de même laissé ce simulacre de processus se dérouler. » A hurler de colère, de rage !

 

Et la note de s’indigner justement en quelques phrases qu’il faudrait rappeler à tous nos gouvernements républicains qui font de la « gouvernance » quand il faudrait faire acte de gouvernement et œuvre d’Etat : « Va-t-on laisser longtemps encore l’Allemagne spolier ouvertement le savoir-faire et la part de travail qui revient à la France, laquelle grâce à Concorde, que les allemands n’ont pas financé, a permis le succès des programmes Airbus ? »

 

Relocalisons Airbus en France ! Après tout, pourquoi pas ? Il serait temps de sortir d’une logique purement comptable ou actionnariale pour penser une véritable politique industrielle française, avec ou sans un ministère attitré.