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28/08/2014

La République fatiguée...

 

La dernière crise gouvernementale a montré les limites d’une Cinquième République quand elle est gouvernée comme sous la Quatrième : l’indécision à la tête de l’Etat, l’instabilité politique et ministérielle, la grogne parlementaire au sein même de la majorité en place, le désaveu électoral répété à chaque élection, partielle ou générale, etc. Cela sent la fin de règne, comme l’on dit communément, alors même qu’il faudrait un Etat solide et, à sa tête, une magistrature suprême sûre d’elle-même et assurée du lendemain pour mieux affronter les immenses défis du moment ! Ainsi, le chômage, véritable fléau social, ne cesse-t-il de s’étendre à toutes les parties du territoire et à toutes les couches et générations de la société, au risque de défaire la cohésion nationale et d’inspirer des attitudes sécessionnistes au cœur du « vivre-ensemble », entre communautarismes et individualisme de masse : or, le Pouvoir actuel semble dépassé et impuissant et ne promet même plus un retournement prochain de la situation, comme si les jeux (fatals) étaient faits !

 

 

 

Cette crise discrédite un peu plus la parole politique, alors que c’est encore cette dernière qui peut limiter les abus de l’économique et éviter l’abandon du social à la fatalité d’une mondialisation qui n’a plus grand-chose d’heureux. Elle discrédite aussi une République qui a épuisé toutes ses capacités sentimentales à être aimée pour ses réalisations et ses résultats : ses politiciens, de droite comme de gauche (mais quel sens donner désormais à ces notions si vagues et si bousculées ?), ne suscitent plus que railleries et ressentiments, de façon parfois injuste mais qui traduit bien le discrédit, non seulement de la classe politique mais aussi du système qu’elle est censée animer et arbitrer…

 

 

 

Certains, par dépit, se réfugient dans l’idée d’une Sixième République dont on a quelque mal à comprendre ce qu’elle apporterait positivement de plus (ou de moins…) et ce qu’elle a de différent avec feue la Quatrième ou, pour les quelques robespierristes nostalgiques du Front de Gauche (ils n’y sont pas majoritaires, d’ailleurs), avec une Première dont les conséquences ne furent guère heureuses, ni pour la France ni pour les Français, ni pour la République elle-même qui mit plus de cinquante ans à s’en remettre, la Seconde (celle de 1848) évitant soigneusement de trop ressembler à celle qui l’avait précédée…

 

 

 

Il faudrait bien plutôt revenir à l’esprit qui avait présidé à l’établissement de la Cinquième, cet esprit monarchique qui voulait l’indépendance de l’Etat pour assurer l’indépendance de la France, et qui ne voyait les partis et les idéologies que comme des éléments du jeu politique mais non comme les acteurs principaux de la scène politique et de la décision d’Etat, réservée dans ses principales orientations à la magistrature suprême de l’Etat. Mais, ce que la Cinquième avait de monarchique, avec la tentation et le risque (pas toujours évités…) de tourner à la monocratie, s’est peu à peu dissous dans une République qui a renoué avec les mauvais côtés de la pratique partisane et qui s’est soumise aux féodalités économiques et financières que le général de Gaulle, lui, n’aimait guère et qu’il voulait, en un réflexe tout capétien, ordonner au service de l’Etat et du pays, et non l’inverse, dont nous voyons aujourd’hui les effets avec la nomination de M. Macron, si peu politique en tant que tel…

 

 

 

Si crise de régime il y a en cette fin de mois d’août 2014, comme l’évoquent certains éditorialistes de la presse parisienne, profitons-en pour poser la question institutionnelle et rappeler que rien ne peut se faire de durable en économie française si la magistrature suprême de l’Etat n’est pas assurée à la fois de la durée et de la continuité (qui n’est pas immobilisme, loin de là), et de l’indépendance statutaire à l’égard des puissances particulières, qu’elles soient économiques et financières ou politiciennes, indépendance qui permet de décider pour l’intérêt commun et non pour celui de quelques uns…

 

 

 

Au regard de l’actualité présente, la Monarchie active, si elle apparaît encore bien lointaine aux yeux de nos contemporains, pourrait néanmoins constituer une réponse crédible aux enjeux et aux défis d’un monde qui n’a pas cessé sa course pour regarder la ruine de la République hollandiste…

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

20/08/2014

Lorsque "Ouest-France" fait bouger les choses...

La lecture du quotidien Ouest-France est un rituel auquel je ne déroge pas lorsque je suis à Rennes : j’ai souvenir que, depuis le plus jeune âge, ce journal était sur la table du petit déjeuner et qu’il inaugurait, d’une certaine manière, la journée, d’abord par les aventures de Lariflette (personnage disparu des colonnes du quotidien, tout comme Hagar Dunor, dont je ne certifie pas l’orthographe…), puis, à l’adolescence, par la rubrique politique locale, d’ailleurs fort fournie à l’époque, si j’en crois mes souvenirs. Régulièrement, d’ailleurs, paraissaient des communiqués des mouvements ou cercles royalistes, en particulier lors des événements estudiantins ou lycéens, et cela nous donnait un peu plus de visibilité et de crédibilité encore, alors que de nombreux murs de Rennes affichaient (bien malgré eux…) un royalisme de bon aloi…

 

Mardi matin, justement, alors que je dégustais un petit café au prix moins douloureux qu’en région parisienne, une information apparemment anodine a attiré mon regard : il s’agissait du refus par la société GDF-Suez d’un chèque en breton rédigée par une Lanestérienne nonagénaire, pourtant correspondant à la somme demandée. Le fournisseur d’énergie a d’ailleurs aggravé son cas en menaçant, lors d’un deuxième courrier, d’interrompre le service à cette cliente, bretonnante depuis sa naissance… Bien sûr, cette vieille dame, soutenue par des militants de la cause bretonne, n’a rien cédé, étant dans son bon droit : « Cliente du Crédit mutuel de Bretagne, qui propose des chéquiers en breton depuis 1982, Luce Loyant assure qu’elle rédige « tous [ses] chèques dans cette langue. Je n’ai jamais eu de problèmes ». Elle a fait part de son « incompréhension » à GDF-Suez. Car d’après le code monétaire et financier, la langue utilisée pour remplir un chèque doit être celle pré-imprimée sur le titre lui-même. Soit, en l’espèce, le breton. »

 

Une fois la presse alertée et l’article paru dans Ouest-France, dans son édition de mardi, il semble que les choses se soient vite débloquées et la société a reconnu son erreur, acceptant et débitant enfin le chèque de la cliente… Cela aurait-il été si rapide si le principal quotidien régional n’avait évoqué cette affaire ? Personnellement, j’en doute ! L’influence de ce journal et de son groupe de presse n’est pas négligeable (c’est le moins que l’on puisse dire), surtout au plan local et régional (et pas seulement pour la Bretagne), ici pour le meilleur, parfois pour le pire (surtout quand il s’agit de la question européenne, Ouest-France se voulant l’héritière de la très européiste démocratie-chrétienne), et montre que la presse écrite reste encore, en particulier dans les régions et leurs différents échelons, un vecteur important de la politique qu’il serait hasardeux de négliger même si, effectivement, elle ne joue peut-être plus le rôle de jadis quand elle était la première source d’informations, et pas seulement locales, pour les lecteurs du petit déjeuner ou du bistrot… Elle représente aussi, en tout cas, une information de proximité qui répond aux attentes de nombreuses personnes, pas forcément pour l’information elle-même ou les opinions du journal, mais pour cette proximité qui rassure et qui met en valeur les gens « locaux » eux-mêmes, toujours soucieux de voir si, quelque part, ils ne seraient pas les « héros du jour », y compris pour des événements qui peuvent paraître bien anodins au regard de la « grande actualité »… Un pays réel et local bien loin des atermoiements et des centres d’intérêt du pays légal parisien ou parisianiste !

 

Au-delà de cette anecdote que j’ai évoquée et des quelques commentaires que j’en fais (je reparlerai d’ailleurs de la langue bretonne d’ici peu, plongé que je suis dans la lecture d’un livre fort intéressant sur l’interdiction de celle-ci par la République en 1902 dans les églises), mais aussi des études et recherches que je fais actuellement sur l’histoire du royalisme en France, il y a, sans doute, dans la disparition de la presse régionale monarchiste en France en deux temps (qui correspondent aux deux guerres mondiales, mais pour des raisons différentes) une explication majeure de l’effacement du royalisme politique et populaire au XXe siècle. Un effacement qu’il n’est pas, néanmoins, impossible de surmonter, les nouvelles technologies aidant et les anciennes à ne pas négliger : vaste défi pour les royalistes du XXIe siècle !

 

 

 

 

11/08/2014

La France face à la tragédie des minorités en Irak.

Depuis le mois de juin, la République commémore, non sans quelques bonnes raisons, des événements guerriers, du débarquement allié en Normandie de juin 1944 à la déclaration de guerre d’août 1914 en passant par l’assassinat de Jaurès à Paris le 31 juillet d’il y a un siècle, et c’est l’occasion pour le président Hollande d’en appeler au devoir de mémoire, à la paix éternelle et aux grands principes démocratiques, parfois sans beaucoup de respect pour l’histoire elle-même, beaucoup plus complexe que ne le laissent supposer les discours officiels. Il n’est pas inutile de se rappeler l’histoire mais cela ne doit pas être dans le même temps l’alibi ou la couverture pour ne rien voir ou ne rien faire au présent : l’histoire n’est pas un champ de ruines ou de gloire, elle est aussi ce vaste champ d’expériences qui devraient nous inciter à la prudence ou, au contraire, à l’audace ; elle est ce livre des hommes et de leurs combats, de leurs passions et de leurs injustices, du pire comme du meilleur ; elle est aussi cette vie des espaces politiques, des sociétés et des hommes qui les composent, cette vie qui peut s’avérer mortelle pour les uns comme pour les autres… L’histoire est cruelle et elle se joue souvent des bons sentiments et de la justice !

 

Au début des années 1990, certains néoconservateurs états-uniens annonçaient la fin de l’histoire : après la chute du communisme, le monde, pris dans le grand mouvement d’une globalisation désormais sans limites, accédait au stade final de son évolution qui ne pouvait être que la démocratie sur le modèle anglosaxon, les Droits de l’homme étendus à la planète bientôt « une et indivisible » et le libre-marché obligatoire avec son corollaire, le libéralisme mâtiné d’un esprit libertaire et consumériste dans lequel on pouvait « jouir sans entraves »… Le 11 septembre 2001 mit un terme à cette illusion millénariste, et pourrait être évoqué comme la naissance d’une guerre de cent ans, même s’il me semble que c’est l’invasion occidentale de l’Irak baassiste de 2003 (alors refusée avec panache par la France de MM. Chirac et Villepin, dans une posture capétienne et gaullienne…) qui ouvre véritablement une boîte de Pandore apparemment impossible à refermer aujourd’hui.

 

L’invasion menée par les Etats-Unis de M. Bush et ses alliés au début de 2003 a détruit une dictature laïque qui, malgré ses aspects terribles (la politique de terreur à l’égard des opposants politiques et des Kurdes indépendantistes) et ses injustices flagrantes, avait au moins le mérite de maintenir une certaine paix civile entre des communautés fort différentes (musulmanes sunnites et chiites, chrétiennes, etc.), obligées de s’entendre dans le cadre politique d’un nationalisme d’Etat qui sublimait les différences en un seul corps national. La logique démocratique a permis aux diverses communautés d’exercer une forme de « principes des nationalités » qui s’avère destructrice de la nature de l’Etat, le « vote ethno-religieux » prenant le pas sur le « vote politique » et assurant la « revanche » de la majorité chiite sur la minorité sunnite, provoquant en retour une radicalisation extra-électorale des perdants, celle-là même qui va favoriser, aujourd’hui, le ralliement d’une part importante de la population sunnite locale à l’Etat islamique nouveau qui se proclame califat… Dans cette affaire, les Etats-Unis ont commis les mêmes erreurs qu’en 1917-1919 en Europe, au nom des mêmes principes que la Révolution française et ses années républicaines comme impériales avaient mis en avant… avec les mêmes et sanglants résultats, comme sur notre continent quelques années seulement après les traités de paix de Versailles et des environs ! L’histoire oubliée ou négligée se venge durement de ceux qui ont cru pouvoir la modeler ou la contourner sans la respecter ou, du moins, l’écouter et en tirer les leçons…

 

Mais le drame des minorités chrétiennes, des yézidis ou des Chabaks en Irak ne doit pas être regardé de loin, avec quelques larmes de crocodile versées par ceux-là mêmes qui sont responsables de cette situation tragique, ou avec la bonne conscience de « ceux qui savent mais ne font rien pour ne pas aggraver les choses »… : au-delà de la bienvenue aide alimentaire et de l’accueil des plus faibles, la France peut agir aussi par une aide militaire appropriée qu’elle apporterait aux combattants kurdes et aux chrétiens désireux de protéger leurs terres et leurs familles, mais surtout en armant et entraînant les armées libanaise et jordanienne avant que les choses n’empirent et que les « califistes » ne déstabilisent toute la région par leurs violences et leurs offensives. Encore faudrait-il que la France ait une stratégie claire et sur le long terme, et une véritable politique étrangère qui ne soit pas dépendante des seuls choix états-uniens ou « européens » (l’Union européenne, d’ailleurs, brillant par son absence totale d’engagement sur ces questions orientales alors même que le Califat compte de nombreux combattants venant de celle-ci et, donc, « de citoyenneté européenne »…) : mais, au regard des hésitations et des revirements fréquents de la diplomatie hexagonale ces dernières années, on peut s’inquiéter de l’actualité tragique de la formule d’Anatole France qui, il y a un siècle déjà, expliquait en quelques mots que la République, par principe, n’avait pas et, surtout, ne pouvait pas avoir de politique étrangère digne de ce nom et inscrite dans la durée et dans l’histoire…

 

Sans doute serait-il utile d’engager quelques Rafales dans la bataille pour desserrer l’étreinte des troupes du Califat et protéger les minorités persécutées désormais réfugiées dans les montagnes du Sinjar ou dans la capitale du Kurdistan irakien : après tout, M. Hollande n’a pas hésité à lancer les troupes françaises contre les islamistes au Mali ou en Centrafrique, ce qui a évité au premier de ces pays et à ses voisins de connaître le sort que connaît aujourd’hui l’Irak ! De plus, la France, dans son histoire, a toujours été la protectrice des chrétiens d’Orient : en cette période de commémorations, comment pourrait-elle l’oublier ?

 

Pour l’heure, la France apparaît bien timide dans sa réaction à ce que de nombreux observateurs signalent comme un génocide des minorités chrétiennes, yézides, chabakes ou chiites turcomanes, et à la disparition programmée, après deux millénaires d’existence, de la présence et du patrimoine chrétiens, destinés à finir en gravats et cadavres par les califistes. Sans doute faut-il y voir aussi une des conséquences du « désarmement français » initié il y a déjà quelques années pour des raisons budgétaires mais aussi au nom de principes généreux mais bien imprudents, des raisons et des principes qui risquent bien, si l’on y prend garde, de mener à de nouveaux « Mai 1940 »…