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07/02/2011

Electricité.

Les chiffres donnés il y a quelques jours par le Réseau de transport d'électricité sur la consommation électrique en France sont fort significatifs et auraient mérité une plus grande publicité à l'heure où la question énergétique est devenue déterminante pour l'avenir des sociétés et, au-delà, de la planète, et qu'elle est rentrée dans les programmes de géographie de Seconde...

« La consommation d'électricité continue de progresser en France », résumait le journal « La Croix » dans son édition du 21 janvier dernier, en expliquant ensuite qu'elle avait progressé en 2010 de 5,5 % pour l'ensemble du pays mais de 7 % pour les ménages, de 3,7 pour la grande industrie et de 3 % pour les PME. « Cette augmentation est clairement une tendance de fond. Première raison, le nombre de foyers qui se chauffent à l'électrique continue de progresser, ce qui demeure une spécificité française avec un tiers des logements équipés. Mais il y a aussi l'arrivée des nouveaux usages, notamment les équipements de télécommunication qui poussent à la consommation. » Ainsi, malgré toutes les campagnes en faveur des économies d'énergie, malgré la crise qui touche les classes moyennes fortes consommatrices de nouvelles technologies énergivores et malgré la rengaine sur « le développement durable » (oxymore ?), rien n'y fait : notre dépendance à l'électricité augmente toujours !

Or, cela a des conséquences, parfois fort ennuyeuses pour l'économie comme pour l'écologie : par exemple, l'achat d'électricité chez nos voisins (lors de quelques épisodes climatiques rigoureux, en particulier) alors même que notre pays reste encore (mais de moins en moins) exportateur.

Alors, que faire pour ralentir la progression de la consommation électrique, en attendant mieux, c’est-à-dire la diminution de cette même consommation ?

 

Sans doute faudrait-il déjà que l’Etat commence par balayer devant chez lui ! Depuis quelques années, l’informatique est devenue « incontournable » dans les établissements scolaires : partout sont installés des ordinateurs, des tableaux numériques, tandis que, dans le même temps, on n’incite plus les élèves à chercher dans les rayonnages des bibliothèques les trésors qui s’y trouvent, que l’on renonce à conseiller la lecture des livres et des encyclopédies papier, préférant conseiller systématiquement (ou presque) les ressources de la toile alors qu’il faudrait, justement, apprendre la variété des sources documentaires et de leur support… Ce n’est qu’un petit exemple parmi d’autres, bien sûr !

 

Mais, que faire pour enrayer la progression chez les particuliers ? Certes, il y a toutes ces campagnes dites d’information pour inciter les consommateurs à être plus économes de l’énergie, mais, si elles ne sont pas inutiles, elles ne sont visiblement pas suffisantes. Alors, faut-il augmenter le prix de l’électricité de façon notable pour alerter les consommateurs ? Je doute que cela soit très efficace et, surtout, cette mesure est fondamentalement injuste puisqu’elle pénaliserait d’abord les moins favorisés de nos compatriotes.

 

En fait, la question nous renvoie surtout au mode de vie que favorise la société de consommation qui, par principe même, pousse à consommer toujours plus et, en particulier toujours plus individuellement, même si cela se traduit par un « endettement énergétique » de plus en plus marqué. Sans doute mutualiser certaines demandes électriques peut-elle aider à diminuer la consommation générale en diminuant la consommation individuelle, mais cela n’est pas forcément simple car des habitudes désormais bien établies ne se perdent pas si facilement. Mais il faudra bien y réfléchir, au risque sinon de voir bientôt notre pays perdre son indépendance électrique, obligé d’attendre des autres son « électricité quotidienne », cette forme de dépendance qui nous scotche parfois devant l’ordinateur ou la télé même lorsque nous n’y trouvons aucun plaisir, au lieu de prendre le temps de se promener, de lire, de parler aux autres…

 

 

16/09/2009

Zola, chantre des grands magasins ?

J’ai un vieux contentieux avec Emile Zola : il remonte à la fin des années 70, plus précisément à l’hiver 1978, 2ème trimestre de l’année scolaire. Dans un devoir remis à mon professeur de français, madame S., je comparais deux livres du susdit Zola, trouvant des qualités au « Bonheur des Dames » quand « Le ventre de Paris » m’avait fort déçu… A la remise des copies corrigées, j’eus droit à un véritable « savon » de la part de l’enseignante qui me jugeait fort présomptueux de critiquer ainsi l’un des monuments de la littérature française et des programmes scolaires… Cette indignation professorale me valait donc un 7/20 dans une matière dans laquelle, d’ordinaire, je n’étais pas trop mauvais !

 

J’ai rouvert « Au Bonheur des Dames » presque trente ans après cet incident : je n’ai pas été déçu par l’écriture mais plutôt par le message qui en ressort. En effet, Zola semble fasciné par le progrès symbolisé par les grands magasins et n’a guère d’égards pour le petit commerce, définitivement condamné par le cours du temps et le progressisme de l’écrivain. Là où on aurait pu attendre la défense des « petits » contre le triomphe de l’Argent, on a, en fait, la démonstration de la victoire de la grande distribution : victoire désirée, victoire flattée…

 

D’ailleurs, la lecture des carnets de Zola confirme cette impression : « Je prendrai … un mercier, une lingère, un bonnetier, et je les montrerai ruinés, conduits à la faillite. Mais je ne pleurerai pas sur eux, au contraire, car je veux montrer le triomphe de l’activité moderne : ils ne sont plus de leur temps, tant pis. » Ainsi, il forcera le trait, présentant une image qui, sans être forcément irréaliste, n’est pas vraiment juste et, surtout, est trop partiale pour être totalement convaincante, du moins pour l’historien. Cela étant, Zola n’écrit pas pour les historiens mais pour le « grand public » qui, lui aussi, est fasciné par la marchandise « facile », celle-là même qui attire la clientèle, en particulier féminine à l’époque, par l’entremise de la « réclame » des grands magasins.

 

Zola est effectivement de son temps : il est dans cette logique, nouvelle pour les sociétés du XIXe siècle, selon laquelle la mode se confond avec le progrès et le renouvellement permanents, cette « néophilie » dénoncée par Konrad Lorenz, et qui présente, en définitive, la consommation permanente comme l’apanage de la « femme moderne ». La modernité sans frein, la consommation sans fin, voire « sans faim »…

 

Ce qui peut paraître surprenant, c’est que dans le même temps, Zola dénonce l’exploitation ouvrière, celle-là même qui permet la production à bas coût de produits de plus en plus nombreux et de moins en moins chers pour les consommateurs ainsi « ferrés » : le triomphe de la compétitivité et de la logique des « profits capitalistiques » (c’est-à-dire « privatisés » pour quelques uns).

 

Le coût social du « Bonheur des Dames » (représentation du « Bon Marché » parisien, « le » grand magasin par excellence en 1883, date de la publication du livre) n’est pas totalement négligé mais apparaît comme une sorte de mal nécessaire à un Zola qui voit l’existence et l’extension des grands magasins comme l’affirmation d’un monde où le culte de la marchandise remplace « utilement » (y compris à travers le superflu) celui des figures du Passé, divines comme historiques, ces figures fondatrices qui doivent disparaître devant les forces nouvelles du matérialisme et de la modernité : c’était aussi l’intuition (sans regret) d’un Karl Marx.

 

Rêves (ou illusions ?) d’un Zola dont on aimerait savoir, un siècle après, s’il apprécierait encore ce monde né du triomphe de la « marchandise facile »…

 

 

27/02/2009

La montée du chômage.

Depuis quelques mois, les chiffres du chômage ne cessent d’augmenter et cela de plus en plus rapidement : alors qu’on évoquait déjà une catastrophe sociale en novembre lorsque le nombre de chômeurs avait bondi de 64.000, on parle désormais de « choc » ou de «  tsunami social » (Le Monde, 27 février 2009) pour les chiffres de janvier qui annoncent 90.200 demandeurs d’emploi supplémentaires, soit un bond de 4,3 % par rapport au nombre total de chômeurs au mois précédent. Depuis 6 mois, c’est ainsi 296.200 chômeurs de plus en France, avec un bond pour les plus jeunes (moins de 25 ans) de 23,1 % en un an.

 

Derrière la froideur des chiffres, il ne faut jamais oublier qu’il y a des hommes et des femmes, victimes d’une crise née loin d’ici mais sans doute alimentée par un système économique (mais aussi sociétal) capitaliste qui est depuis fort longtemps mondialisé.

 

Dans son livre « L’art du gaspillage » publié dans les années 60, Vance Packard évoque l’une des raisons majeures de la crise que le monde vit aujourd’hui, avec une prescience assez extraordinaire, en s’appuyant sur la situation des Etats-Unis dans les années de l’après-guerre et en signalant que ce modèle est appelé alors à s’étendre rapidement aux pays d’Europe, avec les mêmes risques et conséquences : « Les Américains sont à califourchon sur un tigre. Ils doivent consommer toujours plus, sinon leur admirable machine économique les dévorera. Il faut les inciter à augmenter sans cesse leur consommation individuelle, même s’ils n’ont aucun besoin des produits qu’on leur offre. Leur économie en perpétuelle expansion l’exige. » Ainsi, la formule fordienne du capitalisme contemporain, c’est-à-dire du « Consommer pour produire », montre désormais et gravement ses limites et ses dangers, au détriment de nos sociétés et de nos industries (entre autres) car, dès que la consommation ralentit, c’est tout le système qui se grippe : dans la société de consommation contemporaine, « la consommation doit augmenter sans cesse. Des experts de marchés ont annoncé que le citoyen moyen devra accroître ses achats de cinquante pour cent au cours des douze années à venir, pour ne pas mettre en péril l’économie du pays. »

 

La mondialisation des dernières décennies a étendu ce système aux pays émergents, mais n’a pas fondamentalement changé le principe même de la société consumériste et l’aurait bien plutôt renforcé !

 

Aujourd’hui, le résultat est une double catastrophe, au-delà même de l’économie : catastrophe écologique (prélèvements trop importants sur les matières premières et autres ressources naturelles, végétales comme animales) et catastrophe sociale (déséquilibres sociaux et dépendance totale à l’égard des marchés mondiaux, chômage endémique et même structurel dans les pays développés, etc.).

 

Alors, que faire, à notre échelle, dans notre pays ? La question ne signifie pas que nous nous désintéressions des autres mais simplement qu’aider les « plus proches » est la condition première pour pouvoir, aussi et ensuite, aider les « plus lointains ».

 

Il n’y a pas une solution unique au problème du chômage, mais bien plutôt un faisceau de solutions, complémentaires les unes des autres :

 

1.     un nouvel aménagement dynamique du (des) territoire(s) qui, par l’installation de quelques familles dans des endroits aujourd’hui en déshérence, permet de rouvrir des classes, des commerces, de travailler des terres parfois inexploitées, de prendre le relais des agriculteurs retraités ou sur le départ, de rendre vie à des villages, etc. ;

 

2.     une orientation des industries automobiles vers de nouvelles formes de circulation et de locomotion, par la reconversion de certaines usines en fabrication de véhicules destinés au transport en commun de « moindre quantité » (entre 8 et 20 personnes) ou en automobiles « vertes » grâce à l’exploitation des énergies motrices renouvelables, par exemple ;

 

 

3.     une Education nationale qui ne néglige pas les métiers manuels, ou ne les marginalise pas, comme c’est encore trop souvent le cas, mais les valorise : métiers de bouche, de construction et de rénovation, de la terre, etc. ;

 

4.     la mise en place de véritables filières de reconversion qui permettent aux chômeurs (mais aussi aux autres) de se former dans un autre métier que celui de leur précédent emploi, en particulier dans des secteurs aujourd’hui en forte demande de main-d’œuvre : certaines existent déjà mais restent encore fort marginales et, surtout, pas assez dynamiques et réactives au regard des enjeux actuels ;

 

 

5.     l’interdiction des délocalisations spéculatives des entreprises qui vendent en France leurs produits fabriqués ailleurs (ce qui ne veut pas dire qu’il s’agit d’interdire toute délocalisation : celles qui délocalisent pour fabriquer au plus proche de leurs marchés ne sont pas forcément, en soi, choquantes, sauf si elles entraînent un transfert de savoirs faire et de technologies préjudiciables à notre pays…) ;

 

Ces quelques propositions sont bien sûr susceptibles de débats et tout à fait amendables, et je tiens à souligner que cette petite liste est évidemment incomplète : difficile dans le cadre d’un blogue de tout développer de mes idées sur ce sujet, particulièrement vaste.

 

Mais, au-delà de ces propositions, il paraît nécessaire de repenser le rapport même de nos sociétés à la consommation et de poser la question d’une économie plus équilibrée, d’abord au service des hommes et non d’un système qui ne raisonnerait qu’en termes de profits…