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15/09/2008

Ecole et conservatismes syndicaux.

La question de l’école est en train de revenir sur le devant de l’actualité ces jours derniers, entre la proposition de M. Darcos de donner des médailles aux bacheliers et les prochaines annonces de réforme au sein de l’éducation nationale, sans oublier les tout aussi prochaines journées d’action des syndicats enseignants…

Dans l’édition de samedi dernier (13 septembre) du journal « Le Parisien », une page est consacrée à « l’école idéale en Europe » et la question « Par quel dispositif éducatif européen êtes-vous séduit ? » est posée à quelques lecteurs qui, comme une certaine Aurélie Chauvin (homonyme sympathique au fort joli minois mais sans aucun rapport avec ma personne…), sont attirés par des exemples étrangers qui à mon avis, ne sont pas vraiment, en leur forme actuelle, transposables dans notre pays. C’est d’ailleurs ce que dit avec beaucoup d’à-propos un autre lecteur, un certain M. Tilloy (oui, oui, c’est bien lui, pour ceux qui connaissent les temps anciens de la « génération Maurras » des années 90…) dont je me permets de citer ici les remarques pertinentes : « Evitons d’appliquer les méthodes des autres pays. Chacun sa culture et son histoire. Commençons d’abord par revaloriser le métier d’enseignant, cela me semble primordial. Ce n’est pas un métier comme les autres, c’est une vocation. Il faudrait donner les moyens aux professeurs d’accompagner les élèves d’une façon plus individualisée pour éviter l’échec scolaire. » Effectivement, revaloriser le métier d’enseignant, pas forcément en augmentant les salaires (même si cela peut être utile) mais d’abord en redonnant du crédit aux professeurs, à leur rôle dans la société et en les soutenant, concrètement et non par de grands discours pontifiants, dans leur travail quotidien, voilà qui est nécessaire. Il s’agit aussi de redonner confiance à des enseignants qui se sentent, aujourd’hui, mal aimés par la population ou, en tout cas, incompris, à tort ou à raison.

En fait, dans le corps enseignant, il y a, comme dans toute profession, des qualités différentes et quelques incompétences qui nuisent à la lisibilité et à la réputation de l’enseignement. Mais il y a aussi des structures qui, dans l’état actuel des choses, ne répondent plus exactement à toutes les nécessités de la société et à toutes ses envies, ce qui peut expliquer des incompréhensions mutuelles entre enseignants et enseignés, entre autres. Faut-il pour autant tout détruire ou céder aux modes de la « facilité » ? Je ne le pense pas car, là encore, il faut savoir raison garder, ce qui n’empêche pas de réfléchir à une profonde transformation du système scolaire.

Un véritable remodelage du système éducatif est possible, mais il est de multiples « conservatismes » à surmonter, et ils ne sont pas là où l’on croit : ces dernières années, les principaux syndicats ont eu à tendance à dire « non » là où il aurait été possible de dire « oui » et se sont tus quand il aurait fallu s’opposer fermement…

Ainsi, sur le problème des remplacements temporaires des collègues par d’autres professeurs du même établissement, qui est plutôt une bonne mesure à partir du moment où cela repose sur le volontariat enseignant et si cela ne porte que sur des périodes limitées. J’ai personnellement fait cette expérience l’an dernier, durant deux mois, avec quatre autres collègues : cela a permis à six classes de collège (soit environ 170 élèves) d’avoir cours d’histoire-géographie alors que, si nous n’avions pas proposé de faire cours en remplacement d’un prof qui n’aurait pu être remplacé autrement (faute de personnels disponibles, selon le rectorat), ces classes n’auraient pas eu d’enseignement de ces matières d’avril à juin… On imagine ce qu’aurait été, à juste titre, la colère (vaine) des parents d’élèves. D’autre part, le fait que ce soit surtout des professeurs de lycée qui enseignaient devant des élèves de collège a été très instructif pour nous et nous a permis de reprendre contact avec d’autres réalités que celles que nous connaissons dans nos classes de lycée, en général de bon niveau. Dernier point, d’ordre matériel : les heures supplémentaires ainsi effectuées nous ont permis de gagner quelques sous supplémentaires, ce qui n’est jamais totalement négligeable…

Or, cette mesure de remplacement temporaire a été très critiquée, lors de sa mise en place il y a quelques années, par les principaux syndicats enseignants, ce qui apparaît désormais comme une erreur, voire comme une faute car cela semblait montrer un refus d’ « en faire plus » et de rendre service (rémunéré) aux élèves…

C’est ce genre de refus syndical enseignant qui a participé au discrédit du corps professoral dans l’opinion et qui, désormais, fait que plus personne dans la société n’écoute ceux-ci ni ne cherche à comprendre les raisons des enseignants, même (et surtout…) quand elles sont justes. Quel gâchis ! C’est d’ailleurs pour cela que je ne m’associe pas à la prochaine « journée d’action » des syndicats enseignants car elle tombe à plat dans l’actualité, suscitant des « encore ! » agacés parmi les parents d’élèves et les salariés…

Il y aura d’autres moments où il sera nécessaire de parler haut et fort et, surtout, de se faire entendre… Mais ce ne sont pas les syndicats qui en donneront le signal.

11/06/2008

Bulletins scolaires détournés de leur fonction.

Dans la Drôme, des professeurs se sont servis des bulletins trimestriels pour mettre, en guise d’appréciation, des remarques purement et simplement politiques contre la réforme Darcos, comme « Nous ne sommes pas responsables des conséquences que les réformes mises en place auront sur l’avenir de vos enfants ». Cette action a évidemment provoqué la colère des administrations rectorales et de la fédération de parents d’élèves PEEP, ce qui me semble logique et justifié.

 

Bien sûr, la situation est rentrée dans l’ordre quelques jours après, mais parce que le rectorat a menacé de conseils de discipline les enseignants usant d’un tel procédé…

 

Personnellement, en tant que professeur, je trouve cette action malhabile, voire déplacée, car elle se sert des lycéens comme des supports (malgré eux…) du mécontentement enseignant, au risque d’oublier que les bulletins scolaires ne sont pas totalement anodins pour la suite des études des élèves. D’autre part, cette action décrédibilise les enseignants en les montrant sous un jour assez détestable au lieu de chercher à faire comprendre leur malaise, bien réel, face aux changements en cours et aux projets dont la commission Pochard a évoqué les principaux thèmes et propositions.

 

Si la République sarkozienne, qui reste la République contrairement à ce que certains tentent de faire accroire, a des velléités de transformer la nature de l’enseignement et d’abaisser la culture générale au niveau le plus bas, celui de la seule « efficacité » économique ou de la seule nécessité consumériste, elle ne doit pas être combattue par une autre forme de bêtise, mais par une action réfléchie qui montre tout l’intérêt d’un enseignement qui élève au lieu d’abaisser au « plus petit commun dénominateur » scolaire. Ce combat pour l’intelligence et pour la curiosité (sans laquelle aucun savoir ne saurait exister, comme l’affirmait Maurras) ne doit pas être négligé et doit user de moyens appropriés, comme un travail d’influence près des acteurs sociaux et politiques, ou comme des actions permettant de montrer toute l’importance des professeurs et de leur savoir-faire dans la formation des élites et des générations actuelles et prochaines.

 

Certains critiqueront mes propos en y voyant une attaque facile et une absence de propositions concrètes… Erreur ! Je suis le premier à participer à des actions d’influence, mais parfois la discrétion est de mise, d’une part, et, d’autre part, le mieux pour se faire entendre n’est pas de contester tout le temps mais de travailler sérieusement, d’en faire « plus » que ce qui est demandé (et payé…), et d’acquérir un droit à la parole (une véritable légitimité à parler) près des administrations et des acteurs du champ public par sa bonne volonté pour lancer des projets éducatifs, pour peser sur les décisions : quand la seule opposition à tout changement apparaît de plus en plus comme un refus de « bouger les choses », c’est en prenant des initiatives pour améliorer, par le fait, les résultats scolaires (cours supplémentaires sur tel ou tel thème ; soutiens scolaires ; projets d’intégration scolaire ; etc. : liste non limitative et ouverte à l’imagination et à la bonne volonté…), pour mettre un peu d’huile dans les rouages d’une Education nationale aujourd’hui victime de sa « réputation » et de son « bilan » (mais aussi de l’attitude de certains collègues qui oublient de « servir » avant de revendiquer), pour redorer son blason près d’une Opinion de plus en plus critique à l’égard d’un système éducatif considéré comme « bloqué » (ce qu’il est !) et « inefficace » (ce qui n’est pas vraiment exact…), que l’on pourra sauver ce qui doit l’être et permettre ce qui est nécessaire.

 

L’éducation des jeunes générations est un enjeu important pour le système républicain, pour cette société démocratique et « distractionnaire » (selon l’expression terrible de Philippe Muray) qui, à l’image de l’actuel président-gouverneur, n’aime pas « la princesse de Clèves » et préfèrerait faire de simples consommateurs que des « hommes libres » que, d’ailleurs, il n’appartient à aucun Etat de faire comme le rappelait opportunément Bernanos… Le vrai combat pour l’intelligence se gagnera par « l’intelligence politique d’abord », et non par des actions inconsidérées et vaines qui discréditent les profs et rendent plus difficilement acceptables leurs inquiétudes…