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29/07/2008

Colère...

Je suis toujours en colère après ce jugement d’un tribunal arbitral qui accorde à M. Tapie un dédommagement de 285 millions d’euros qui, avec les intérêts, sera porté à environ 400 millions d’euros : même si, en définitive, l’homme d’affaires (et je trouve que ce terme est bien approprié au personnage…) ne touchera « que » 20 ou 50 millions d’euros (la précision doit venir plus tard, semble-t-il), le scandale n’en est pas moindre et montre les défauts d’un système où la parole des puissants se joue du Droit au détriment de la justice, en particulier sociale…

 

Je ne méconnais pas et dénonce tout autant les méthodes des banques qui ont permis ce gâchis. Mais n’est-ce pas Bernard Tapie qui, habitué aux « coups » financiers, s’est pris à son propre piège ? N’est-ce pas le mécanisme d’un libéralisme que M. Tapie vante tant qu’il en est le bénéficiaire ? N’est-ce pas, aussi, le « copinage » entre ces gens bien élevés qui est en cause ?

 

Ce qui certain c’est que les contribuables feront les frais de ces méthodes et de ce « libéralisme » qui n’hésite pas à demander à l’Etat d’en assumer les pertes lorsque les choses tournent mal. Au moment même où l’Etat, d’ailleurs, doit faire face à l’endettement et demande aux Français de se serrer la ceinture (ce qui n’est pas forcément choquant si cela doit permettre de préserver l’intérêt commun) ; au moment où ce même Etat s’engage dans des politiques de restrictions qui ne sont pas forcément les bienvenues, en particulier dans la Défense, l’Ecole ou la Justice…

 

En lisant les interventions de M. Tapie, d’abord discret et aujourd’hui triomphant et agressif comme le montre l’entretien épique du « Parisien-Aujourd’hui en France » de samedi 26 juillet, c’est le côté « moi, je » du personnage qui me choque, surtout de la part d’un ancien ministre qui, d’ailleurs, avait alors bien rempli son rôle à l’époque du gouvernement Bérégovoy : on aurait pu attendre, sinon un profil bas (peu en accord avec le personnage, véritable comédien et « grande gueule »), au moins une attitude plus respectueuse des deniers de l’Etat et l’annonce (même symbolique) d’une participation à quelques œuvres sociales, ce qui aurait apaisé quelques ressentiments des contribuables punis pour des fautes qu’ils n’ont pas commises. Je rêve, bien sûr… Mais je préfère l’attitude d’un Bill Gates (pour qui je n’ai pas vraiment d’amitié) qui consacre une grande part de sa fortune à des programmes humanitaires en Afrique à celle d’un Tapie qui ne parle que de son hôtel particulier : ce n’est visiblement pas la décence qui étouffe ce monsieur !

 

Je suis intervenu sur quelques forums (je devrai écrire « fora » en bon latin…) pour donner mon point de vue sur cette triste affaire et je pense que ce scandale d’Etat, comme l’affirment la juge Eva Joly et le journaliste Laurent Mauduit (Nouvel Observateur, Mediapart), laissera des traces : il n’est pas impossible que cela ressorte dans les colères sociales qui s’annoncent pour l’automne.

 

En tout cas, lorsque j’ai entendu hier l’annonce du triomphe final de Bernard Tapie, je me suis écrié, furieux : « c’est la revanche de Fouquet ! ». Certains, dans le café, ont souri tout en hochant la tête…

 

 

18/07/2008

Le scandale Tapie.

Ainsi, Bernard Tapie vient de remporter un véritable succès devant un tribunal arbitral privé qui a décidé de lui accorder environ 285 millions d’euros, comme dédommagement de ses affaires ratées avec feu le Crédit lyonnais : en d’autres temps, cela aurait fait les gros titres de la presse, en particulier « d’opposition » ou « contestatrice », mais « L’Action française » quotidienne de Maurras et Daudet n’est plus là pour relever, chaque jour, les développements de l’affaire, comme en cette année 1934 qui a tant fait fantasmer (de peur…) les partis républicains et les démocrates d’affaires. Et « le Canard enchaîné », comme « Charlie Hebdo », restent d’une grande prudence à l’égard d’un Tapie si prompt à dégainer ses avocats avec la presse… Il n’y a, en gros, que « Le Nouvel observateur » et François Bayrou qui, dans une indifférence à peine polie, évoquent « le scandale Tapie » ! Quant au Parti socialiste, il est depuis longtemps aux abonnés absents…

 

En tout cas, cette affaire va coûter, selon les journalistes, entre 40 et 50 euros à chaque contribuable français, tout cela pour sauver de la « misère » (sic !) un Bernard Tapie qui, au final, gardera plusieurs millions d’euros. Les soutiens sarkozystes à l’ancien ministre mitterrandien ont beaucoup œuvré pour ce résultat, au moment même où les mêmes demandent aux Français de se serrer la ceinture et parlent de réduire les dépenses publiques. François Bayrou, avec raison, souligne que les 285 millions payés par l’Etat (sans compter les intérêts, ce qui devrait monter la somme à 400 millions d’euros) aux liquidateurs du groupe Tapie représentent « la totalité de tous les salaires annuels des 15.000 postes d’enseignants qui vont être supprimés l’an prochain » ou « l’effacement du déficit de l’hôpital public en France »…

 

Et M. Bayrou de clamer sa colère solitaire dans une République qui ne l’entend déjà plus !

 

En tout cas, cette affaire, ce scandale, mérite d’être dénoncé, encore et toujours, et disqualifie un Etat qui ne sait plus faire régner la justice et, ainsi, se discrédite aux yeux de l’opinion publique et, en particulier, aux yeux de ceux à qui il demande de faire des sacrifices pour faire diminuer la trop lourde dette publique. Contre un tel scandale, une telle injustice couverte par les plus hautes instances de la République, « même les pierres hurleraient » !

 

Et après, on voudrait que je sois républicain, bien sage et modéré, à croire à la République et à ses principes moraux ! En fait, la République, depuis Danton (le Tapie de l’époque…), n’a guère changé : c’est toujours « grands principes et petite vertu »… Je préfère, tout compte fait, un Louis XIV qui fait enfermer l’homme le plus riche de France, et confisque ses biens au bénéfice de l’Etat : aujourd’hui, c’est au contraire la revanche de Fouquet consacrée, d’ailleurs (clin d’œil de l’Histoire ?), le soir de l’élection présidentielle au… Fouquet’s !

 

26/05/2008

Main-mise allemande sur Airbus.

Il y a quelques années, Airbus était présenté comme le symbole de la construction européenne, autant dans les médias que dans les manuels scolaires : ces temps-là semblent bien révolus et, s’il doit être encore le symbole de l’Union Européenne, ce n’est guère rassurant, ne serait-ce qu’au regard des récents développements de l’actualité de l’entreprise EADS…

 

Dans « Le Parisien » du lundi 25 mai, une double page est consacrée aux « tensions franco-allemandes » au sein du groupe industriel, et ce que l’on n’y apprend mérite attention. En sous-titre : « les salariés français et les élus locaux s’inquiètent de l’hégémonie allemande au sein du groupe »… Un autre titre, extrait d’un entretien avec le député socialiste de Haute-Garonne : « On s’est fait rouler dans la farine ». En veut-on encore ? Voici un troisième titre : « Une note accuse l’Allemagne de « spolier » Airbus ». Et un sous-titre, encore, dans cette double page : « Menaces d’agressions physiques à Toulouse »…

 

En fait, il semble bien que les intérêts économiques (en particulier ceux des actionnaires) et les pressions de l’Allemagne, soucieuse de mettre la main sur l’industrie aéronautique française en jouant la carte « européenne », véritable alibi des démissions françaises et nouveau tabou qui évite d’avoir à réfléchir, sont en train d’entraîner « la fin de l’aéronautique française », comme il y a eu la mainmise de l’Indien Mittal sur Arcelor, celle de Lucent sur Alcatel, ou celle de l’entreprise canadienne Alcan sur Péchiney : c’est le député socialiste qui, dans son entretien avec le journal, déclare : « L’équilibre franco-allemand au plus haut niveau décidé à l’été 2007 par Sarkozy et Merkel est un marché de dupes. Louis Gallois [président français du groupe EADS] est isolé, les Allemands sont partout aux manettes. (…)

 

Louis Gallois se contente de faire du mécanoindustriel et de délocaliser dans les pays de la zone dollar. Pendant ce temps, sur le terrain, on est en train de dépecer la filière aéronautique française et de détruire des milliers d’emplois sans que le gouvernement dise un mot. C’est scandaleux. Il ne s’agit pas d’être antiAllemands, mais de constater qu’eux ont une véritable politique industrielle. En France, nous n’avons même pas de ministre de l’Industrie. Sur l’affaire Airbus, le gouvernement Fillon se met la tête dans le sable pour ne pas froisser Angela Merkel avant la présidence française de l’Union européenne. (…)

 

Nous nous sommes fait rouler dans la farine par les Allemands. Comme Nicolas Sarkozy s’y était engagé pendant la campagne de la présidentielle, le gouvernement doit reprendre en main l’avenir de la filière aéronautique. On ne peut pas accepter de voir disparaître l’un des fleurons de l’industrie française. (…) Pour l’instant, la ligne d’EADS aujourd’hui, c’est des dividendes pour les actionnaires et des larmes pour les salariés. » Terrible réquisitoire contre cette entreprise en passe de quitter la France, au nom de la « compétitivité », et contre une République sarkozienne oublieuse de ses promesses électorales qui, selon la formule célèbre, « n’engagent que ceux qui y croient »…

 

Les propos du député Gérard Bapt sont confirmés par cette « note blanche, confidentielle, insérée dans le dossier qu’a remis la chambre de commerce et d’industrie (CCI) de Toulouse à la ministre de l’Economie, Christine Lagarde, il y a une semaine » : elle ne laisse aucun doute sur les manœuvres dilatoires des dirigeants allemands d’EADS, dont le président Gallois se fait, en définitive, le complice (à moins qu’il n’en soit le prisonnier ?), en expliquant que « le simulacre de vente des usines allemandes est une honte. EADS devait savoir depuis longtemps qu’elles étaient invendables, que la société qui s’est porté acquéreur était « bidon » et que les allemands n’ont jamais eu l’intention de les vendre. On a tout de même laissé ce simulacre de processus se dérouler. » A hurler de colère, de rage !

 

Et la note de s’indigner justement en quelques phrases qu’il faudrait rappeler à tous nos gouvernements républicains qui font de la « gouvernance » quand il faudrait faire acte de gouvernement et œuvre d’Etat : « Va-t-on laisser longtemps encore l’Allemagne spolier ouvertement le savoir-faire et la part de travail qui revient à la France, laquelle grâce à Concorde, que les allemands n’ont pas financé, a permis le succès des programmes Airbus ? »

 

Relocalisons Airbus en France ! Après tout, pourquoi pas ? Il serait temps de sortir d’une logique purement comptable ou actionnariale pour penser une véritable politique industrielle française, avec ou sans un ministère attitré.