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05/11/2021

La COP 26, si peu écologiste...

 

La COP 26 est une mascarade, piquée de quelques bonnes intentions et recouverte du voile graisseux de la bonne conscience sans lendemain… Le trait peut paraître exagéré, il n’en est malheureusement rien, si l’on se rapporte à ce qu’en disent les médias, autant de connivence que de résistance, et aux enseignements de l’histoire, y compris très récente : il suffit de relire les comptes-rendus des précédentes COP mais aussi les déclarations des candidats aux différentes élections occidentales depuis quelques années, et de les comparer aux réalisations concrètes et aux politiques environnementales des différents pays concernés ! Le constat d’échec et d’hypocrisie est clair et net, malgré quelques espérances persistantes et quelques projets aboutis mais trop épars et minoritaires face au rouleau compresseur de la globalisation, du consommateurisme triomphant (un « consommatorisme », en somme) et de la numérisation accélérée qui complète l’artificialisation des espaces vivants par celle des comportements et des esprits (1). Jamais la biodiversité n’a été autant en danger, et la sixième extinction (de la faune, mais la flore aussi est concernée) semble s’accélérer, y compris dans nos pays quand, dans le même temps, les dernières années n’ont jamais été aussi polluées et chaudes, au regard de l’histoire des derniers millénaires et des siècles de l’Anthropocène. Quant à la déforestation, elle n’a jamais cessé, et elle s’est même fortement étendue en Amazonie et en Afrique ces dernières décennies et cela même après la fameuse COP 21 (2015) que nombre d’observateurs veulent voir comme un « tournant écologique » majeur à travers l’Accord de Paris signé par nombre de grandes puissances qui, visiblement, ne l’appliquent pas. Et l’artificialisation des terres et désormais des mers (comme le prouve le chantier controversé des éoliennes marines dans la baie de Saint-Brieuc…) se poursuit sans relâche, à peine freinée par la crise sanitaire et, plus inquiétante encore pour le secteur de la Construction, par la pénurie de matières premières et celle à venir de sable coquillier.

 

Si l’arrivée en jets et autres aéronefs (peu réputés pour un bilan carbone faible) des principales délégations a été largement commentée et, souvent, moquée, cela n’est pas le plus grave, même si c’est très révélateur de l’hypocrisie des « donneurs de leçons » et de ces Chefs d’Etat qui, pourtant, ne devraient pas oublier leur devoir d’exemplarité qui confirme leur légitimité à parler sur ces sujets particuliers. Le plus inquiétant est la déferlante de promesses, typique des démocraties émotionnelles, et ces « coups de menton » qui, dès le lendemain, seront accompagnés d’un haussement d’épaules… Promesses sans lendemain, sans doute, mais qui seront l’occasion de grandes déclarations futures et d’un dirigisme (voire d’un étatisme) encore plus marqué à l’égard, pas forcément des Puissants du moment (les GAFAM, par exemple, associés le plus souvent aux politiques de « contrainte écologique » de certains Etats), mais bien plutôt des populations auxquelles l’on dénie de plus en plus des libertés que l’on accorde aux féodalités financières et économiques. De plus, lorsque le temps est venu des campagnes électorales, nombre des promesses « écologiques » des dirigeants des démocraties occidentales s’effacent devant les nécessités de la réélection ou de l’élection tout court : cela ne dure qu’un temps, sans doute, mais cela montre le peu de sérieux des stratégies politiques et, surtout, leur absence de prise en compte du long terme, pourtant nécessaire pour enraciner les « bonnes attitudes » environnementales des Etats, de leurs institutions et de leurs citoyens. Le philosophe Michel Serres, dans un entretien radiophonique d’il y a une dizaine d’années déjà, insistait sur cette absolue nécessité du long terme pour mener à bien les politiques d’Etat les plus efficaces sur ce sujet comme sur bien d’autres, mais il constatait, avec un certain dépit, que la République ne le permettait pas vraiment, en France…

 

Faut-il, après ce constat qui peut paraître défaitiste, renoncer à agir pour la préservation de l’environnement et laisser filer les choses dans une sorte de fatalisme désespérant ? Non, non et mille fois non ! Les générations d’aujourd’hui ont, elles aussi, un devoir à l’égard de celles de demain et du surlendemain, dans cette longue chaîne de la vie humaine et de la vie tout court. Dans cette pensée « dynastique » de l’environnement, il est aussi possible de penser la question de l’Etat en France le plus susceptible d’agir sur le long terme et de façon assez « exemplaire » pour pouvoir - malgré la puissance moyenne qui paraît la sienne au regard des grandes qui dominent les rapports géopolitiques et économiques dans le monde - entraîner les autres ou, du moins, leur indiquer un chemin plus vertueux, écologiquement parlant. Il y a peu, un militant royaliste expliquait à quelques auditeurs que « la France est sans doute le pays le plus susceptible d’appliquer le programme de l’écologie intégrale, celui évoqué par l’encyclique Laudato Si’ du pape François, le plus lu dans le monde de tous les textes et manifestes écologistes ». Pour cela, il y faut une volonté politique et, sans doute au-delà, des institutions qui la pérennisent sans la figer : en agissant dès maintenant sans attendre néanmoins qu’elles adviennent (mais en préparant ce recours politique essentiellement et éminemment royal), les politiques et les électeurs feraient gagner un temps désormais précieux à la France pour améliorer les choses, environnementalement parlant.

 

 

 

(à suivre)

 

 

 

 

 

Notes : (1) : lire à ce propos les derniers ouvrages de Guillaume Pitron, « L’enfer numérique » et de Fabrice Flipo, « La face cachée du numérique » et « La numérisation du monde, un désastre écologique ».

02/07/2020

L'écologie politique aujourd'hui. Partie 2 : Les Verts au risque de la gestion écologique municipale.

 

Les Verts élus maires pourront-ils appliquer une véritable politique écologiste au sein de leurs villes ? Il est évident que la question va vite connaître un commencement de réponse, dès les prochaines semaines, en particulier sur le plan de l’aménagement urbain : la construction de nouveaux ensembles immobiliers repose aussi sur des choix municipaux, et il sera intéressant de voir comment les nouveaux édiles pourront appliquer une politique de densification sans attenter aux équilibres des centres-villes anciens et de leurs paysages, par exemple. Des tours plus hautes ? Des rénovations plus nombreuses ? Quelles aides municipales pour ces dernières ? Le danger, éminemment social, serait que le coût des travaux à effectuer entraîne le départ définitif des populations les moins aisées ou les plus âgées, incapables de régler des factures d’isolation thermique et de ravalement de plus en plus élevées, et, par un effet mécanique d’aubaine, la gentrification accélérée de ces mêmes lieux, déjà bien entamée depuis plus de deux décennies. Or ce processus, favorable à la clientèle électorale des Verts, risque aussi de muséifier les cœurs de ville dans une sociologie de « bourgeoisie mondialisée », souvent liée au secteur tertiaire et aux métiers de l’informatique et de la communication, mais peu intéressée aux activités artisanales « physiques », qu’elles soient « industrielles » ou « de services ». La disparition des cafés populaires au profit de « bars lounge » ou de restaurants branchés, déjà bien avancée aussi, n’est pas forcément une bonne nouvelle pour la sociabilité des villes et le nécessaire « composé » social d’un tissu urbain équilibré. La « fracture territoriale » est déjà là, au cœur de cette évolution citadine qui paraît comme consubstantielle à la métropolisation, nationale ou mondiale…

 

Néanmoins, les Verts ont une occasion de briser ce cercle vicieux et, ainsi, de montrer que la question sociale n’est pas un « détail » pour eux mais, au contraire, une réelle préoccupation : la saisiront-ils, ou obéiront-ils à un tropisme bourgeois qui fut celui de la Révolution française dès les premiers émois de 1789 ? En ce sens, l’histoire, par sa connaissance et son étude, peut permettre d’éviter quelques écueils et de contourner quelques pièges que nos démocraties recèlent. Mais sans doute faudra-t-il qu’ils mènent une véritable « réforme intellectuelle et morale » en leur sein et, en particulier, parmi leurs équipes dirigeantes et d’encadrement, et qu’ils dépassent le strabisme politique qui fait loucher, ici, plus vers la gauche que vers la droite, au risque de ne pas avoir une juste vision des choses.

 

Sur la question de l’habitat urbain, qui n’est pas dissociable le plus souvent de la bonne gestion et préservation du patrimoine, en particulier historique (Poitiers, Tours, ou Lyon sont des cités fort riches en ce domaine, et qui méritent que l’on s’en préoccupe sans tomber dans les facilités du simple appât à touristes), sans doute faudra-t-il faire le choix d’une politique de long terme qui privilégie l’habitat plutôt que le ludique, le festif ou le simple commercial : redonner vie aux centres-villes passe par une politique de densification humaine, non pour l’entassement, mais pour la vie même des quartiers centraux au-delà des soirées ou des longues journées marchandes. Faut-il en évacuer l’automobile ? Si la tendance est à la piétonnisation générale, il me semble qu’un équilibre doit être néanmoins sauvegardé, ce qui n’empêche pas la « débitumisation » des places de stationnement et une meilleure protection des cyclistes comme des piétons. En ce domaine comme en d’autres, le dogmatisme s’avère être une erreur, et le pragmatisme raisonné une politique utile, destinée à améliorer les situations plutôt qu’à les bloquer. « Savoir raison garder » : la vieille formule des rois capétiens établit, à mon sens, la bonne stratégie, ce qui n’empêche ni la passion ni la discussion.

 

Les nouveaux édiles « Verts » sauront-ils tenir la barre d’une écologie municipale à la fois dynamique et populaire, ou céderont-ils au tropisme (clientéliste ?) de leur catégorisation sociale dominante, tropisme (et inquiétude) évoqué plus haut ? Si leur pratique se limite à quelques mesures vélocipédiques et à la démagogie du « politiquement correct », ils auront usurpé l’étiquette d’écologistes ; mais si leur politique valorise tous les aspects d’une écologie « du bon et du beau », des paysages à la biodiversité, des traditions locales à la projection dans l’avenir par le recours à la matière grise plutôt qu’aux énergies fossiles, leur crédibilité et leur légitimité pourraient s’en trouver bien établies dans le temps, c’est-à-dire utilement enracinées. Il revient aux royalistes de veiller à ce que l’écologie ne soit pas qu’un alibi facile pour un nouveau « pays légal » verdâtre quand il s’agit de répondre aux défis environnementaux contemporains et aux attentes d’un « pays réel » aujourd’hui déboussolé et inquiet devant des processus climatiques, économiques et politiques qui lui paraissent imposés, parfois sans juste mesure…

 

L’un des marqueurs de « l’écologité » de la politique des municipalités « vertes » pourra être, pour les royalistes, l’intérêt porté par celles-ci à la cause des arbres, mais il ne sera pas, bien évidemment, le seul critère d’appréciation. De plus, le rôle des royalistes devrait être de porter les couleurs d’une écologie intégrale qui n’oubliera ni la préservation des grands équilibres environnementaux et de tous leurs aspects, ni la défense d’une spécificité humaine contre les dérives transhumanistes. L’écologie intégrale n’est pas que la préservation de la nature comprise comme « environnement » mais elle l’est aussi de la nature humaine et de ses héritages historiques : l’écologie intégrale est aussi éminemment politique, et elle sera toujours du côté d’Antigone plutôt que de Créon, fût-il adoubé par les Verts…

 

 

 

(à suivre)