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23/05/2017

Pour une sortie apaisée du nucléaire : l'exemple suisse.

Ce dimanche 21 mai, les Suisses viennent de voter la sortie progressive du nucléaire après avoir refusé, en novembre dernier, d'arrêter les cinq réacteurs actuels (qui fournissent 35 % de l'électricité helvétique) avant 2029 : en somme, ils viennent de se donner du temps tout en envoyant un signal clair à l'Europe et aux pays qui, comme la France, s'appuient encore sur l'énergie de l'atome de façon disproportionnée. En fait, il ne s'agit pas de lâcher la proie pour l'ombre (c'est le cas de le dire !), mais d'engager la Confédération dans une politique énergétique fondée sur l'usage intelligent et élargi des énergies renouvelables et sur les économies d'énergie nécessaires, ne serait-ce que pour des raisons environnementales mais aussi d'indépendance énergétique à l'égard de ses voisins et de ses créanciers. 

 

Dans un article publié dans Le Figaro à la veille de la votation, Marion Moussadek précise la stratégie suisse en ce domaine : « Le paquet de mesures soumis au vote ce dimanche, dont la mise en œuvre est prévue par étapes jusqu'en 2035, vise à suivre la tendance européenne. Entre 2004 et 2014, la part des énergies renouvelables dans la consommation finale d'énergie (électricité, chaleur et transports) a augmenté de 8,5 % à 16 % dans l'UE. En conjuguant incitations financières à l'isolation des bâtiments et promotion des énergies hydraulique, solaire, éolienne, géothermique et de biomasse, tout en bridant les émissions des véhicules neufs, Berne table sur une réduction de la consommation des ménages et des entreprises de 43 % par rapport à 2000. « On peut diminuer notre consommation sans perte de confort », soutient la ministre en charge de l’Énergie et présidente de la Confédération, Doris Leuthard. » Quand les populistes locaux de l'UDC critiquaient vertement (le mot est-il approprié, dans leur cas ?) cette mesure en arguant d'un surcoût important pour les contribuables, la présidente avançait plutôt le chiffre de 40 francs suisses par an et par foyer pour le financement de cette politique, ce qui, effectivement, n'est pas trop cher payé, d'autant plus si l'on considère que c'est aussi un investissement pour l'avenir, et que cela réduira les déchets énergétiques (ici surtout les déchets nucléaires, toujours objets de vives controverses, y compris en France) et les rejets de gaz à effet de serre pour les carburants (transports et chauffage), ce qui est tout de même fort appréciable. 

 

La France serait bien inspirée de considérer l'exemple suisse et de préparer, rapidement et de la meilleure manière qui soit, une sortie apaisée du nucléaire avant d'y être contrainte plus rudement par l'augmentation des coûts d'exploitation et de démantèlement, ce dernier aspect étant sans doute le plus problématique et le plus dispendieux, ce qui ne laisse pas d'inquiéter les économistes et prévisionnistes financiers. 

 

Il aurait fallu faire de l'énergie nucléaire (dont je ne suis pas un militant), une fois qu'elle était valorisée pour des raisons d'indépendance énergétique nationale et pour l'avantage qu'elle ne relâchait pas de fumées polluantes dans l'atmosphère, une énergie de transition et non une finalité, cette dernière option étant celle qui, malheureusement, a été faite par une République incapable de se projeter dans l'avenir et souvent au-delà de deux quinquennats (élections obligent...) : nous en payons aujourd'hui un prix très lourd, en espérant qu'il ne soit pas aggravé par un accident type Tchernobyl ou Fukushima toujours possible, quoiqu'en disent certains partisans du nucléaire, aveuglés par un scientisme qui oublie trop souvent que « Science sans conscience n'est que ruine de l'âme ». 

 

D'autre part, la France qui, contrairement à la Suisse, dispose de longs littoraux, en métropole comme en Outre-mer, et d'espaces ensoleillés et venteux importants, a des possibilités énergétiques renouvelables absolument considérables qu'elle ne valorise pas assez, alors qu'elles pourraient remplacer en l'espace d'un quart de siècle, toutes les énergies fossiles et fissiles dont notre nation a besoin pour sa vie domestique comme pour sa production industrielle. La Suisse, qui n'est pas un pays arriéré, ni techniquement ni intellectuellement, nous montre une voie possible et, sans doute, souhaitable : la France, avec ses particularités et ses atouts, aurait tort de ne pas saisir l'occasion de relever le défi énergétique que lance, d'une certaine manière, notre voisin helvétique. 

 

Mais, malgré la présence de M. Nicolas Hulot au gouvernement, il est possible que les féodalités, qui depuis si longtemps « tiennent les rênes » de la politique française de l'énergie, ne veuillent pas renoncer d'elles-mêmes à la facilité et à leurs intérêts du moment : que n'avons-nous un Roi pour calmer les ardeurs de ces Fouquet de l'atome ! Là aussi, la Monarchie est regrettable de par son absence... 

 

 

18/11/2014

Quels grands projets souhaitables pour aujourd'hui et demain ?

 

Ainsi, lundi de cette semaine, la fameuse tour Triangle n'a pas reçu l'aval du Conseil de Paris, ce qui apparaît comme un véritable camouflet pour le maire de la capitale, madame Hidalgo, qui, mauvaise perdante, demande désormais l'annulation du vote pour vice de formes, elle qui avait décidé, pour éviter un désaveu municipal, que la décision serait prise à bulletins secrets, contre la règle habituelle qui est de voter à mains levées, publiquement. Au-delà de l'attitude assez peu glorieuse de l'édile, qui a une conception à géométrie variable de la démocratie, se posent la question des tours et de leur place dans le paysage urbain de Paris, mais aussi celle des grands projets immobiliers et d'équipement dans la capitale et, au-delà, dans les grandes villes de France.

 

Il est évident que, si le projet n'a pas enthousiasmé le Conseil de Paris (même si, d'un côté et de l'autre, les stratégies politiciennes ont aussi joué...), il y avait quelques bonnes raisons : construire un nouvel immeuble de bureaux dans un quartier déjà bien pourvu en la matière n'est pas très heureux et encore moins utile ! De plus, les remarques empiriques de madame Kosciusko-Morizet sur le sujet (Les échos, 17 novembre 2014) sont justes : « Une tour isolée ne crée pas d'activité, elle fait le vide autour d'elle. (…) Déclarer que la modernité passe nécessairement par les tours est justement très passéiste. Chaque ville doit créer sa propre modernité. Les arguments utilisés aujourd'hui en faveur de la tour Triangle sont ceux que l'on entendait il y a quarante ans sur la tour Montparnasse. Elle est aujourd'hui le monument le plus détesté des Parisiens. Ce n'est pas à l'aune d'une tour que se juge l'attractivité de Paris. » D'ailleurs, ce ne sont pas les tours de bureaux que viennent admirer les touristes à Paris ni celles-ci qui motivent l'installation de sièges sociaux, mais plutôt le patrimoine et sa richesse pour les uns, et les facilités fiscales (quand elles existent...) ou le prestige de l'adresse parisienne pour les autres.

 

Autre élément de débat : quels grands projets urbains ou d'équipements pour aujourd'hui et demain, et comment les préparer et les rendre acceptables, autant pour les populations que pour l'environnement ? Mon opposition virulente et mille fois affirmée à la construction de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, pour des raisons autant écologiques qu'économiques, ma grande réserve à l'égard de nombre de projets que l'on peut considérer inutiles et dispendieux, parfois fruits gâtés de pressions diverses et variées des milieux immobiliers ou financiers, ne m'empêchent pas de défendre ou de promouvoir d'autres projets qui me semblent mieux adaptés aux réalités contemporaines et aux nécessités de préservation environnementale : la Grande Gare de Paris, par exemple, qui permettrait à la capitale de disposer d'une gare centrale véritablement internationale (ce qui existe déjà dans de nombreux pays européens), ou de nouvelles centrales marémotrices qui s'inspireraient de l'actuel barrage de la Rance, près de Dinard, en tenant compte de l'expérience et des leçons de celui-ci, pour éviter certaines erreurs hier dommageables et aujourd'hui souvent connues et réparées ; des projets de champs d'hydroliennes, de centrales mobiles houlomotrices ou de panneaux solaires flottants installés sur les réserves d'eau des barrages hydroélectriques ou sur la mer ; sans négliger desprojets d'habitat évolutif de grands volumes et susceptibles d'accueillir des populations importantes mais aussi de grands programmes de réhabilitation de l'habitat rural et villageois (domaine largement oublié aujourd'hui par les pouvoirs publics) s'inscrivant dans une nouvelle politique d'aménagement des territoires et de redéploiement agricole qui privilégie les petites et moyennes structures mais sur une grande échelle, autant d'espaces que d'emplois ; etc.

 

Ce ne sont pas les projets intéressants et motivants qui manquent, mais plutôt la volonté politique et l'audace publique : dans une République marquée par les routines et soumise aux pressions, qu'elles soient financières ou économiques, l'imagination déserte le Pouvoir, si ce n'est pour se garder lui-même... On peut le regretter, mais c'est ainsi, et changer le numéro de la République n'y changera rien, en définitive : ce n'est pas une « Sixième » qu'il faut instaurer, mais bien plutôt, une « Monarchie des initiatives et des projets », capable d'engager une réelle politique d'aménagement des territoires et d'équipements urbains comme ruraux, marins comme terrestres, et ceci sur le long terme, suivant le fil dynastique, et non plus selon le seul calendrier électoral ou au gré des ambitions politiciennes des uns ou des autres... « L'imagination au pouvoir », réclamaient les manifestants de Mai 68 : au-delà du slogan, c'est une nécessité et c'est bien l'une des justifications fortes de la Monarchie à venir !

 

 

 

 

 

03/11/2014

Après le nucléaire...

 

Dans Alternatives économiques de l'été 2014, Guillaume Duval, tout en rappelant que la paix en Europe, même si elle nous semblait historiquement acquise, n'était pas forcément « un acquis irréversible », insistait sur d'autres réalités incontournables que nos sociétés et les États d'Europe semblent dangereusement méconnaître, au risque d'en payer un prix très lourd demain : « Au regard des véritables enjeux du XXIe siècle, les historiens, et nos enfants, jugeront en effet probablement sévèrement les heures, les mois, les années perdus dans ces discussions byzantines autour des 3 % de déficit...

 

La grande affaire de l'Europe, c'est, ou plutôt cela devrait être, d'accélérer enfin la conversion écologique de son économie. (…) Ici et maintenant, parce que nous sommes la zone au monde la plus dépendante de ressources extérieures qui vont être de plus en plus rares et chères (…). Nous occupons en effet l'espace le plus anciennement industrialisé de la planète et nous sommes pour cette raison ceux qui ont déjà le plus épuisé les ressources minières et les énergies fossiles de leur sol. L'économie européenne ne se redressera jamais durablement si nous ne sommes pas capables de réduire drastiquement et rapidement cette dépendance.

 

Or, un des effets les plus marquants de l'obsession « austéritaire » qui s'est emparée des Européens, y compris lorsqu'ils sont de gauche comme les dirigeants français actuels, c'est de freiner cette conversion en limitant et en retardant les investissements nécessaires. » Et de souligner, en conclusion de cet article et à propos du projet de loi sur la transition énergétique présentée par Mme Royal que « dans le contexte actuel, il paraît peu probable que les moyens dégagés puissent être à la hauteur des ambitions affichées », ce qui est confirmé par le débat parlementaire de ces semaines dernières sur ce sujet et les réactions qu'il a suscitées parmi ceux qui s'inquiètent des enjeux écologiques de demain pour la France comme pour le reste du monde. Au moment même où le GIEC tire le signal d'alarme sur un réchauffement climatique qui semble s'accélérer, non pour des raisons naturelles mais du fait des activités humaines, industrielles comme individuelles, c'est regrettable...

 

En fait, ce n'est pas tant l'abandon de l'écotaxe, abandon plutôt bienvenu au regard des conditions de sa récolte laissée à une société privée... autoroutière (70 % des parts d'Ecomouv' sont détenues par la société italienne Autostrade, ce qui est plutôt surprenant au regard de la taxe elle-même !), qui est le plus ennuyeux dans cette affaire de réchauffement climatique et de transition écologique (même si c'est de cela dont on a beaucoup parlé ces jours derniers) : ce qui est le plus inquiétant, c'est le flou des moyens pour atteindre les objectifs annoncés et la faiblesse de ces derniers au regard des enjeux. La montagne semble bien avoir accouché d'une souris...

 

C'est d'autant plus dommage que la France a un territoire (aussi bien terrestre que maritime) vaste et des milieux fort divers qui lui permettent d'exploiter toutes les énergies renouvelables possibles et imaginables : le vent au large de nos côtes, la houle non loin de celles-ci et les courants sous-marins, les algues qui peuvent devenir du carburant ou produire de l'électricité, la biomasse, etc. De nombreuses études sont faites en ce domaine mais, comme l'a bien vu Guillaume Duval, ce qui manque souvent à ces recherches, c'est le soutien fort de l’État et des investissements massifs qui, pourtant, seraient nécessaires pour aborder les défis contemporains et ceux de demain dans les meilleures conditions pour notre pays et les générations qui vont s'y succéder. Or, la France n'a que trop tardé en ce domaine comme en tant d'autres, en s'en remettant à (ou se réfugiant derrière) une Union européenne qui n'est souvent que le paravent de la paresse intellectuelle et politique des gouvernements de la République, plus occupés à préparer les prochaines échéances électorales qu'à envisager et à imaginer « cet avenir français que tout esprit bien-né souhaite à sa patrie », selon la formule heureuse de Maurras. La France avait, avec sa politique nucléaire (que l'on peut critiquer, bien sûr, pour des raisons environnementales ou de simple prudence...), un « coup d'avance » dans les années 1970-1980 : elle a perdu cet avantage en se contentant d'un « tout-nucléaire » périlleux et, là encore, paresseux dans les décennies qui ont suivi, alors même qu'il fallait mobiliser au maximum la recherche dans les énergies renouvelables mais aussi dans l'efficacité énergétique (améliorer les rendements énergétiques pour en diminuer l'impact sur les ressources et en favoriser l'économie) et les économies elles-même, pour préparer « l'après-nucléaire » inéluctable au regard de l'épuisement des matières fissiles.

 

Est-il désormais trop tard ? Sans doute non, mais il y a urgence, et l'on peut douter que la République soit capable de rattraper le temps perdu, au regard de son absence de stratégie claire sur le plan énergétique et au-delà de quelques déclarations de principes hypocrites sur le passage de la part du nucléaire dans la production d'électricité de 75 à 50 % d'ici 2025 (avant que l'on nous annonce 2030, dans le meilleur des cas...). Néanmoins, il est toujours possible, en attendant mieux, de penser et préparer la prochaine et nécessaire « révolution énergétique » qui, au-delà du politique, passera aussi par une révolution des esprits et des attitudes à l'égard des consommations énergétiques et, plus largement, de la société de consommation, « énergivorace » par essence, qu'il faudra bien remettre en cause si l'on veut que notre société et notre humanité survivent, tout simplement.