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18/08/2008

Le conflit russo-géorgien (1).

Soljenitsyne est mort à temps… Il a eu ainsi droit à des hommages mérités et remarqués, avec parfois une pointe de réserve à l’égard de son patriotisme russe, considéré comme une sorte d’anachronisme à l’heure de la Démocratie mondiale. Son cadavre à peine froid, une grande partie de la presse européenne, dans un réflexe de défiance à l’égard de la Russie, « forcément impériale », condamnait « l’agression russe » avec des mots et des expressions qui fleuraient bon les « on vous l’avait bien dit », « la Russie semblable à elle-même », ou « on n’est jamais assez prudent avec cet embarrassant voisin »… Ainsi, le même Bernard-Henri Lévy qui tressait des lauriers à Soljenitsyne la veille (oubliant sans doute qu’il l’avait dénoncé quelques années auparavant comme un dangereux slavophile antidémocrate…) s’est-il fendu, avec son ami André Glucksmann, lui aussi maoïste repenti, d’un article vengeur contre la Russie dont l’absence de mesure dessert même la cause auprès d’une Opinion qui n’est quand même pas si naïve…

D’ailleurs, dans le quotidien « Libération » du lundi 18 août que je parcours en ce moment, crayon en main, l’essayiste Alain Minc lui répond avec quelques arguments simples, en rappelant combien les réalités historiques et géopolitiques européennes nécessitent prudence et raison dans leur approche : « ils [BHL et Glucksmann] savent qu’il existe des problèmes sans solution et que l’intelligence collective consiste parfois à vivre avec eux ».

Du coup, Alain Minc souligne quelques « erreurs » dans les propos des deux auteurs : « « Qui a tiré, cette semaine, le premier ? La question est obsolète », écrivent-ils. Etonnante affirmation. Comment faire abstraction du faux pas du président Saakachvili, déclenchant une opération militaire en Ossétie du Sud ? Ses meilleurs avocats prétendent qu’il est tombé dans un piège, les Russes l’ayant poussé à agir en lui faisant miroiter leur non-intervention. Piètre excuse. Quand on dirige un Etat à l’ombre de l’Empire de Pierre le Grand et de Vladimir Poutine, on se méfie et on ne prend pas pour argent comptant les propos amènes des représentants du tsar. Le président géorgien aurait dû chercher ses modèles du côté de l’exemplaire démocratie finlandaise, qui a su préserver ses libertés et son indépendance à portée de tir de l’Union soviétique : les principes et la retenue ne sont pas incompatibles. Ce peut être même la quintessence de l’art politique. » Des lignes que l’on pourrait croire écrites par Charles Maurras dont le « réalisme géopolitique », en particulier lisible dans son ouvrage « Kiel et Tanger », serait bienvenu à la tête de l’Etat et, en particulier, du Quai d’Orsay… D’ailleurs, il me semble que M. Sarkozy, dans cette affaire et jusqu’à présent, n’a pas trop mal joué, malgré son tropisme atlantiste, en évitant de diaboliser la Russie et en cherchant à inscrire le cessez-le-feu dans la durée, sans préjuger du lendemain. Reste à voir si cela durera vraiment et si les vieux démons de la précipitation et de l’esprit brouillon céderont définitivement la place à la mesure et à la patience, qualités indispensables à toute diplomatie digne de ce nom.

 

 

(à suivre)