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30/01/2018

Le développement au-delà de la propagande libérale.

Le programme de géographie de la classe de Seconde accorde une grande place au développement et à sa déclinaison dite « durable » (mais de quoi, en fait ?). A bien lire les manuels et les recommandations de l'Education Nationale sur ce thème, l'on peut aisément se rendre compte que, en ce domaine et peut-être plus encore qu'en histoire, la propagande en faveur du modèle de la société de consommation et de sa logique franklinienne (« Le temps, c'est de l'argent ») bat son plein, sans beaucoup de retenue ni même de pudeur : aucune photo (du moins dans les manuels disponibles dans mon lycée) d'enfants au travail à la mine ou à l'usine dès l'âge de cinq ans parfois dans certains pays dits « en développement » (formule d'ailleurs désormais remplacée par « intégration à la mondialisation », et valorisée par... la Banque mondiale et les grands groupes financiers), ni de ceux qui, adolescents en Chine, travaillent la nuit pour fabriquer les nouveaux modèles de téléphone utilisés dans nos cours de récréation, cela pour « permettre le développement » des pays concernés ; aucune photo de ces Indiens ou de ces Pygmées chassés de leurs terres et forêts ancestrales, toujours au nom du développement et au bénéfice d'une agriculture productiviste qui concurrence nos propres productions françaises ; aucune photo des femmes et des enfants prostitués dans les grandes métropoles des pays du « Sud » (qualification géographique des pays anciennement colonisés et désormais terrain de jeu des grandes multinationales souvent issues des pays occidentaux) ni des cliniques de « gestation pour autrui » dans lesquelles s'entassent des mères-porteuses issues des zones rurales pauvres ou des bidonvilles ; aucune photo des rhinocéros abattus par des contrebandiers ou de riches clients, au nom du développement des échanges marchands de produits animaux ou du tourisme « local », en fait mondialisé... La pauvreté contrainte issue du processus du développement est presque cachée, comme s'il fallait maintenir l'idée d'un développement forcément harmonieux et, surtout, obligatoire dans ses formes actuelles pour mener à la non moins obligatoire société de consommation, sorte de paradis terrestre né en Occident à la fin du XIXe siècle !

 

Dans le même temps, les manuels expliquent la mise en place des initiatives onusiennes pour « sortir de la pauvreté » au sens large du terme et parfois abusif aussi (en particulier quand il s'agit des peuples originels des forêts et des déserts, pour lesquels l'argent n'a pas de valeur en tant que tel...), toujours sans expliquer qu'une grande part de celle-ci (que l'on cite sans la montrer, si ce n'est une photo, reproduisant souvent la même situation, celle d'enfants africains une écuelle à la main et attendant une distribution de nourriture) est la conséquence directe de ce fameux développement qui a déstructuré les anciens systèmes agricoles locaux au profit de monocultures (roses au Kénya, huile de palme à Bornéo, etc.) destinées à fournir les marchés des pays les plus riches de la planète, système de substitution fatal aux économies locales et multiséculaires. Il ne me semble pas inutile, d'ailleurs, de rappeler que le fameux développement évoqué ici, dans son acception actuelle, n'est rien d'autre qu'une notion « inventée » et valorisée par Rostow et le président des États-Unis Truman dans le cadre de la Guerre froide, pour légitimer l'imposition du modèle états-unien de société de consommation contre les « alternatives » communistes ou traditionalistes...

 

La « belle histoire » du développement, que l'on sert aux élèves de Seconde qui, il faut bien l'avouer, ne se posent pas trop de questions sur ce sujet (sans doute plus par insouciance que par égoïsme), est même encore « embellie » par cette trouvaille appelée « développement durable », un simple oxymore (selon Serge Latouche) qui permet de donner bonne conscience à nos sociétés et à leurs dirigeants, et cela sans que la dégradation accélérée de la planète et de ses milieux ne soit nullement freinée (ou si peu...) ni que les inégalités démesurées fondées sur la mondialisation concurrentielle ne se réduisent vraiment, comme l'ont montrées les dernières études sur l'état du monde. N'apprenait-on pas, la semaine dernière, que 82 % des richesses engendrées l'an dernier sur notre bonne vieille Terre avaient profité à... 1 % de la population mondiale, la plus aisée évidemment ? Cela me rappelle le bilan social qu'évoquait Pierre Chaunu sur la Révolution dont il disait qu'elle n'avait, en définitive, économiquement profité sur le quart de siècle 1789-1815 qu'à environ 120.000 familles (soit 600 à 700.000 personnes) alors que l'on en fait encore dans les manuels d'histoire des lycées l'entrée dans une sorte de paradis de la prospérité et de l'égalité...

 

Ces constats ne doivent pas nous faire perdre la raison ni l'espérance, car céder à la fatalité comme à la facilité marquerait alors, à plus ou moins long terme, la fin de toute possibilité de liberté de conscience et d'action humaine. La France peut, ainsi, jouer un rôle pour limiter les effets dévastateurs de cette forme de développement et de la société de consommation dont cette seconde est la principale motivation (ou alibi) du premier. Mais, encore faut-il que l’État retrouve ses droits et ses moyens, et qu'il réussisse à imposer, en France et en Europe avant le reste du monde, l'idée que le politique doit reprendre la main sur l'économique, non d'une manière totalitaire mais en rappelant que les grandes féodalités financières et économiques doivent être soumises à des devoirs sociaux qui, après tout, sont la principale légitimation de leurs droits et de leur existence même.

 

Si les grandes multinationales, comme les fameux GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) par exemple, ne sont pas rapidement limitées dans leurs ambitions et ramenées à de plus justes proportions et prétentions, il est à craindre que leur « gouvernance » s'impose aux gouvernements, en particulier à ceux des démocraties occidentales qui ont déjà accepté nombre de « Münich » en leur faveur, sans que l'on aperçoive à l'horizon de Churchill ou de De Gaulle pour leur faire barrage : l'histoire des années trente, tragique et cruelle, n'a-t-elle servi à rien que nos dirigeants l'aient déjà oubliée ? En attendant la Monarchie royale qui, je l'avoue avec un brin d'amertume, tarde à venir, il ne serait pas inutile que la magistrature suprême de l’État applique cette « régence du Politique» qui, en fait, ne sera vraiment efficace que lorsqu'elle aura pris conscience de son « incomplétude » et qu'elle aura redonné au pays un État digne de ce beau nom (et de notre propre histoire), capable de faire rendre gorge aux Fouquet nationaux comme internationaux du moment, ou, du moins, de les éloigner du « pré carré » des libertés françaises...

 

 

 

 

 

17/09/2012

Une conférence environnementale pour rien...

 

La Conférence environnementale des jours derniers n’a pas servi à grand-chose, si ce n’est à étaler une bonne conscience soi-disant écologiste sans trop de risque et à remplir de quelques grands mots le vide de la pensée gouvernementale sur le sujet… Alors que cette conférence aurait pu être l’occasion de quelques réflexions nouvelles et de l’annonce, avant une véritable mise en pratique de projets environnementaux, d’une stratégie environnementale sur le long terme, elle n’a été qu’un « soufflé médiatique » déjà retombé et sur laquelle même la grande presse ne s’est pas attardée !

 

Quel dommage et, surtout, quelle inconscience de la part de cette République qui ne vit plus que pour ses prébendes et oublie ses devoirs d’aujourd’hui et d’avenir ! Car il y a urgence, et le gouvernement n’a même pas dressé un bilan de la précédente initiative dans le domaine de la concertation écologique, c’est-à-dire du Grenelle de l’environnement qui a eu lieu au début de la présidence Sarkozy : pourtant, certaines mesures qui y avaient été annoncées pouvaient être fort intéressantes, même si leur réalisation ne fut pas à la hauteur des espérances, loin de là ! L’idée d’un moratoire sur la construction des autoroutes, par exemple, n’était pas inutile, tout comme la proposition d’augmenter le nombre d’exploitations agricoles et d’hectares dédiés à l’agriculture biologique : cette dernière est d’ailleurs un vieux combat des royalistes, qui furent nombreux à s’investir dans ce domaine bien avant la mode récente du bio dont il faut souhaiter qu’elle ne soit pas que cela mais qu’elle ouvre sur la pérennisation des bons comportements agricoles comme alimentaires... (cf « le paysan biologiste », la revue dans laquelle l’actuel président du Groupe d’Action Royaliste publia de nombreux articles dans les années 1980-90)

 

Quand on lit les (rares) articles sur cette conférence, on se rend compte que ce n’est qu’un catalogue de bonnes intentions (et encore, elles semblent plutôt limitées au regard des enjeux !) et d’annonces même pas sérieusement chiffrées ni financées ! De quoi désespérer !

 

Pas d’évocation des énergies marines ni des algocarburants qui pourraient pourtant à la fois résoudre la question énergétique et limiter les pollutions liées à la production et la consumation des hydrocarbures ; pas de plan concret contre l’artificialisation des terres, pourtant de plus en plus préoccupante ; pas de moratoire sur la construction des infrastructures aéroportuaires et autoroutières dont on connaît pourtant l’impact sur l’environnement (impact territorial comme impact atmosphérique et sanitaire…) ; pas de réflexion sur le nécessaire aménagement du territoire pour revitaliser nos campagnes et leur rendre vie sociale et équilibres environnementaux ; etc. On comprend que les ONG environnementales soient fort insatisfaites de cette conférence déjà oubliée (quand elle n’a pas été purement et simplement ignorée) par l’Opinion publique !

 

Toute politique environnementale digne de ce nom nécessite de s’enraciner dans le temps et de se dégager de la seule immédiateté, de ce présentisme qui stérilise toutes les bonnes initiatives ; elle nécessite aussi une véritable volonté politique et la mise en place d’une stratégie. Avec le gouvernement socialiste, rien de tout cela ! Mais, cela était-il mieux avec le gouvernement sarkoziste ? Pas plus !

 

Cela fait plus de trente ans que j’entends les mêmes discours gouvernementaux sur un thème qui n’intéresse guère nos hommes politiques, à quelques heureuses exceptions près. Plus de trente ans de discours et quelques rares progrès qu’il ne faut pas méconnaître mais qui restent encore trop limités pour être suffisants. Pourtant, la dégradation de notre environnement s’accélère et les dérèglements climatiques, liés au mode de développement de nos sociétés de consommation, ont des conséquences de plus en plus visibles et de plus en plus nuisibles…

 

La France pourrait jouer, au niveau international, un rôle de première puissance écologiste du monde : elle en a les atouts et, au-delà, le devoir. Il semble pourtant que la République ne veuille pas, elle, le comprendre…