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05/02/2009

Bernard Kouchner, Pierre Péan et le 6 février 1934.

Alors que je me préparais à écrire une note historique sur le 6 février 1934, l’affaire Kouchner m’incite à me détourner de la seule histoire pour retourner sur l’actualité politique et sur les « affaires de la République » actuelles, trop nombreuses pour les citer toutes : alors, autant s’intéresser à ce nième scandale qui n’est pas forcément celui que l’on croit…

Pierre Péan est un journaliste d’investigation connu pour ses livres parfois iconoclastes et qui ont, en fait, tendance à dire tout haut ce que les gens murmurent tout bas ou savent sans oser le dire, par peur de « déranger » ou de s’attirer les foudres des puissants : on se souvient de son livre sur François Mitterrand, intitulé « Une jeunesse française », dont la couverture montrait un jeune homme de belle allure, promis à une belle carrière, serrer la main d’un vieux chef d’Etat français, maréchal de son état militaire et promis, lui, au déshonneur moral en 1945 après avoir été, en 1916, le vainqueur de Verdun… Cette photo de la poignée de main entre Mitterrand et Pétain avait provoqué un choc dans le grand public et, en retour, une véritable plaidoirie « pro domo » du président en exercice, déjà rongé par le crabe fatal.

Certains semblèrent alors découvrir ce que, personnellement, je connaissais depuis longtemps, comme beaucoup d’autres, que j’avais entendu raconté mille fois dans les milieux de l’Action Française et, même, que j’avais lu dans les colonnes du journal monarchiste « Aspects de la France », tribune hebdomadaire de cette même Action Française. Je savais aussi, ce que Péan ne disait pas, voire démentait, que Mitterrand avait participé aux activités intellectuelles des cercles maurrassiens à Angoulême (témoignage de Jean Roche-Boitaud) comme à Paris, et qu’il avait en particulier fréquenté la permanence des étudiants royalistes du 33, rue Saint-André-des-Arts (témoignages de Georges Calzant et de Pierre Juhel), et quelques autres anecdotes d’avant- comme, et cela pouvait être plus surprenant, d’après-guerre… Il me semble en avoir rapporté quelques unes sur ce blogue ou sur un forum monarchiste. Je dois avouer, à lire le livre de Péan sur Mitterrand, que je me suis demandé pourquoi il ne disait pas tout et s’il n’avait pas été, en partie, instrumentalisé par le Palais. Mais son livre n’en était pas moins fort intéressant et éclairant sur les années 30-40, et sur les ambiguïtés des engagements de ces temps troublés.

Je n’ai pas encore lu son dernier livre sur Bernard Kouchner mais, au regard des réactions d’une brutalité rare à ce brûlot, je m’efforcerai de le lire au plus tôt, non pour forcément accréditer les thèses qui peuvent y être développées, mais pour, au moins, lire ce que Pierre Péan avance et ce qu’il reproche, justement ou pas, à M. Kouchner. En fait, j’en ai lu quelques feuilles déjà publiées, samedi dernier, dans l’hebdomadaire « Marianne » (édition du 31 janvier au 6 février 2009), et l’article d’Eric Conan qui présente ces « bonnes pages » et égratigne, voire pire, l’icône de l’humanitarisme contemporain. Mais, soyons franc, ce que j’y ai lu ne m’étonne pas vraiment car cela fait des années que les attitudes ambiguës du « french doctor », en particulier au Kosovo, m’ont convaincu de la tartufferie du personnage et de sa suffisance, de son mépris pour qui ne pense pas comme lui. Quant à son parcours et ses discours politiques, ils prouvent à l’envi un arrivisme certain, jusqu’à renier ses amitiés partisanes de la veille. Personnellement, je pourrai lui reprocher, non pas d’avoir fait carrière dans l’humanitaire (y compris malgré ses choix parfois hasardeux), mais de s’être servi de ce qu’il avait fait de bien pour en retirer « gloires et honneurs », ce qui me semble contraire à cette conception de l’honneur (au singulier, ce qui n’a pas la même valeur) qu’il avance pourtant en le brandissant bien haut…

Ce qui m’agace aussi au plus haut point, c’est une défense qui, sans vraiment répondre aux accusations de Pierre Péan, joue la carte de la « victimisation », évoquant le « climat » et les « idées » des années 30, et se posant en victime d’une odieuse campagne qui viserait ses racines juives, défense reprise en chœur de manière soit insidieuse soit violente par la grande presse, en particulier par « Le Monde » sans beaucoup de discernement, ce qui évite, évidemment, de répondre aux affirmations du livre… Tactique classique d’une presse qui, pour l’occasion, calomnie M. Péan pour mieux défendre son « héros » ! Avec une telle presse, il est certain que la République n’a guère de souci à se faire, ni les Tapie, ni les Sarkozy, ni les Kouchner… D’ailleurs, il est « amusant » de constater que la classe politique, à quelques exceptions près, fait, soit front avec M. Kouchner pour la droite, soit silence (ou juste quelques murmures) pour la gauche. Ce petit jeu du déni me navre et ne m’incite guère à aimer cette République qui, à travers des Kouchner et des Dray, brandit le drapeau des grands principes pour mieux camoufler sa petite vertu

Oh mince, alors ! Je m’emporte… Sans doute des échos du 6 février 1934 : une actualité peut rappeler une commémoration, semble-t-il… Kouchner a sûrement raison, tout cela fleure les années 30 : mais il y a plusieurs manières de comprendre et d’interpréter cela… Quant à moi, je préfère sentir le parfum violent des lys sauvages, ceux qui poussent sur le pavé ou crèvent le bitume des avenues grises du conformisme « politiquement correct » : décidément, j’aurai toujours mauvaise réputation et je n’aime toujours pas cette République, désolé…

 

04/08/2008

Remettre les choses à leur juste place.

Je profite des vacances pour, entre deux lectures (les livres se sont accumulé cette année sur mon bureau… et puis, il y a les révisions pour l’agrég’), me promener dans les campagnes franciliennes et normandes : à la rencontre du « pays réel » rural…

 

Mais c’est aussi lors des déplacements eux-mêmes que j’apprends et que, parfois, je m’indigne : la radio est allumée en permanence et particulièrement sur les chaînes d’informations et de débats. Ainsi, vendredi dernier, non loin de Houdan, je suis tombé sur un débat (sur Europe 1, je crois) auquel participait François de Closets : la discussion portait sur l’affaire Siné qui remue la Gauche sur ce que l’on peut ou ne peut pas dire dans la presse, sur les idées du dessinateur anarchiste et propalestinien et sur les méthodes du patron de journal Philippe Val, un de ces débats qui agite Saint-Germain-des-prés mais qui, peut-être, n’est pas si anodin que cela. Mais François de Closets a remis les choses à leur juste place avec une certaine sévérité, de bon aloi me semble-t-il : il a fait remarquer que cette querelle entre « bonnes consciences » (et mauvaises fois…) avait occulté complètement une autre information, beaucoup plus importante et vitale que l’essayiste avait évoqué quinze jours auparavant, soit les quatorze millions d’Africains menacés d’une grave crise alimentaire dans les semaines qui viennent…

 

L’indignation de François de Closets portait aussi sur le fait que la presse écrite et audiovisuelle avait consacré des pages et des pages, des heures d’émissions et de débats à l’affaire Siné et seulement quelques lignes (dans le meilleur des cas) au sujet alimentaire : entre l’ego de deux personnes dont l’assiette est et sera toujours pleine, et les quatorze millions de ventres vides de contrées africaines oubliées, la Presse a fait un choix qui n’est pas le meilleur, ni le plus éthique.

 

Notre devoir de charité (le mot, aussi connoté soit-il, ne me fait pas peur) et de partage, pour un pays comme le nôtre, ne doit pas être oublié : certes, nous ne pouvons pas supporter sur nos épaules et résorber d’un coup de baguette magique toute la misère du monde ; certes, la culpabilisation n’est pas non plus très saine, et ne résout rien ; certes… Mais il appartient à la France de prendre des initiatives humanitaires quand, dans le monde, une urgence se fait jour.

 

D’autre part, les médias peuvent jouer un rôle important dans l’information des citoyens et la prise de conscience de ceux-ci face aux grands problèmes de société mais aussi de ce monde dont nous ne pouvons pas, ne devons pas être absents.

 

Or, j’ai l’impression que la remarque de François de Closets est révélatrice de nos abandons et d’une certaine hypocrisie des démocraties qui dénoncent les violations des droits de l’homme en Chine, là où elles ne peuvent que (timidement, d’ailleurs, pour éviter les représailles économiques…) geindre, tandis que, là où elles auraient les moyens d’agir, moyens matériels, humanitaires et militaires (car il n’y a pas d’action humanitaire possible quand il n’y a pas les moyens militaires de la protéger et de l’assumer, comme on le constate, cruellement, au Darfour et dans le sud chrétien du Soudan), elles semblent détourner les yeux : égoïsme ? Inconscience ? Lâcheté ?

 

Je sais que la France ne peut pas tout faire. Je sais que les problèmes du pouvoir d’achat mais aussi les vacances, et c’est bien normal, nous rendent moins sensibles à la misère des autres… Mais les gouvernements et les médias, sans tomber dans l’annonce permanente des mauvaises nouvelles ou dans le moralisme le plus agaçant qui soit, n’ont-ils pas un devoir d’information et de réaction ?