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23/07/2011

Pas de ministre européen de l'économie, s'il vous plaît !

 

Depuis quelques temps et profitant de la crise de la zone euro, certains financiers et politiques avancent régulièrement l’idée d’un ministre des affaires économiques européennes, y voyant là l’occasion de faire un « saut qualitatif » vers une Europe de plus en plus fédérale : c’était encore le cas hier à l’occasion de la réunion entre les partenaires de l’Union européenne pour sauver l’euro, réunion qui semble s’être limitée à un dialogue à trois entre Nicolas Sarkozy, Angela Merkel et Jean-Claude Trichet.

 

Cette idée peut paraître logique, d’une certaine manière : puisqu’il y a une seule monnaie pour dix-sept pays, pourquoi pas un seul ministre chargé, au-dessus des gouvernements européens, de l’économie de cette zone monétaire ? En fait, là encore, on reproduit les mêmes erreurs qu’au moment de la création de l’euro en ne voulant pas voir qu’il y a plusieurs manières de concevoir l’économie en Europe et qu’il y a des traditions (bonnes ou mauvaises, c’est une autre question), voire des mentalités différentes en ce domaine : ne pas reconnaître ces différences initiales c’est se condamner, à plus ou moins long terme, à de cruelles désillusions et commettre des impairs toujours difficiles à réparer par la suite. La situation actuelle en est d’ailleurs la rude illustration…

 

S’il y a ministre des affaires économiques européennes, son rôle risque rapidement d’être celui d’imposer une politique économique unique, au risque de déstabiliser les sociétés européennes : car, peut-on appliquer la même politique, en particulier à travers ce que l’on nomme pudiquement la rigueur, à des pays qui n’ont ni les mêmes structures administratives d’Etat ni les mêmes fiscalités ni les mêmes règles sociales parfois ?

 

Il y a aussi autre chose qui m’inquiète : c’est que, dans les déclarations des sauveteurs de l’euro, jamais ne sont évoquées les populations de la zone euro, seulement les dettes, les déficits, les risques financiers… Or, peut-on faire une politique économique sans au moins écouter ce que disent les peuples qui ne sont pas que contribuables mais aussi citoyens ? Ecouter ne veut pas dire céder à la démagogie mais pouvoir répondre à leurs inquiétudes, chercher avec eux et pour eux (parfois malgré eux aussi, mais cela ne doit pas être un principe, loin de là !) des solutions acceptables et compatibles autant avec les équilibres économiques que sociaux et écologiques : cette proposition de ministre de l’économie européenne semble éloigner un peu plus la « gouvernance » (terme en fait dangereux qui semble limiter le politique à une simple gestion de l’économique) des peuples sur laquelle elle est censée s’exercer !

 

Alors, que faire ? Au lieu d’un ministre des affaires économiques qui, en définitive, ferait une seule politique, mieux vaut une forme de coordination plus efficace et plus réelle que celle qui existe aujourd’hui, et qui, par la discussion entre les représentants des différents Etats, chercherait à concilier les économies entre elles plutôt qu’à vouloir les fondre et les confondre dans une seule et même économie : une coordination autant qu’une conciliation, ce qui n’est pas la même chose que « l’imposition » que serait, en définitive, le ministère européen des affaires économiques au-dessus des gouvernements et des parlements et qui risquerait, effet pervers peu évoqué mais bien réel, d’entraîner une sorte de « grève du zèle » permanente des salariés de la zone euro pour protester contre une administration encore plus lointaine et aveugle que celles, nationales, d’aujourd’hui… A-t-on oublié comment cette attitude de « résistance passive » des ouvriers, des fonctionnaires et des paysans a peu à peu asphyxié l’économie toute entière de l’Union soviétique, pourtant grande puissance, dans les années 1960-80 ?

 

Cette coordination, que je souhaite, ne doit d’ailleurs pas forcément se limiter aux pays de la zone euro, mais elle doit aussi redonner des moyens aux Etats eux-mêmes, pour reprendre l’initiative par rapport aux institutions financières et boursières : « réarmer le pouvoir politique », disait, avec raison, Nicolas Demorand avec des accents dignes de Maurras la semaine dernière dans « Libération » … Sans cela, aucune sortie saine de crise de la zone euro n’est véritablement possible et durable !

  

 

 

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