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18/02/2014

Une nouvelle agriculture pour demain (2ème partie : quelle agriculture souhaitable?)

Quelles peuvent-elles être les pistes pour une nouvelle agriculture souhaitable en France ? Des chercheurs de l’INRA (Institut national de la recherche agronomique) mettent en avant l’idée de développer de façon plus large l’agroforesterie, c’est-à-dire la combinaison entre arbres et productions végétales et animales, sachant que, selon les recherches menées récemment, une exploitation de 100 hectares en agroforesterie produit autant qu’une exploitation conventionnelle (c’est-à-dire dissociée des arbres) de… 140 hectares ! En ce domaine, la France a une grande marge de progression puisque seulement 170.000 hectares sont exploités en agroforesterie (chiffres de 2008) alors que l’on pourrait monter à plusieurs millions en quelques années, pour le plus grand bénéfice des terres comme des producteurs. Cela permettrait aussi de revenir sur les inconvénients du remembrement en replantant des haies, et en refaisant, au-delà de l’agroforesterie, des talus et des fossés susceptibles de retenir les terres et de drainer l’eau lors des tempêtes et des épisodes de grandes pluies dont la Bretagne est aujourd’hui victime et dont les conséquences sur les espaces agricoles, réels et fort lourds, sont aujourd’hui peu évoqués…

 

Développer l’agriculture biologique est aussi une piste intéressante car, là aussi, les possibilités d’extension spatiale et d’expansion économique sont très importantes, comme le faisaient remarquer les participants au Grenelle de l’environnement de 2007 : aujourd’hui, plus d’un million d’hectares sont dédiés au bio, ce qui est encore loin de l’objectif de 20 % des terres pour 2020 qui était alors espéré et qu’il paraît difficile d’atteindre s’il n’y a pas une volonté ferme de l’Etat, mais aussi des fédérations agricoles et des producteurs eux-mêmes, de faire avancer cette perspective par une véritable politique volontariste et par une certaine motivation, toujours nécessaire pour mener à bien ce genre de mutation à terme.

 

Il apparaît aussi utile de repenser les productions en France elles-mêmes : par exemple, sait-on qu’une grande partie du chanvre que nous utilisons dans notre pays vient… de Chine, alors même que le Berry, ancienne région productrice, n’en produit plus guère et qu’il n’y en a que 8.000 hectares de culture en France ? Cela alors même que le chanvre est utilisable dans de multiples domaines, de la construction et l’isolation à l’alimentation animale et, même, comme carburant et, plus étonnant, comme carrosserie pour véhicules électriques ! Ce petit exemple montre combien il serait possible de moins dépendre d’autrui pour de nombreuses productions que l’on importe aujourd’hui des pays émergents, que cela soit pour se nourrir ou pour de multiples autres raisons.

 

De plus, à l’heure où la crise de l’emploi frappe durement notre pays, « relocaliser » notre production nourricière agricole permettrait, sur des espaces aujourd’hui délaissés ou sous-exploités, d’installer de nombreux jeunes (ou moins jeunes) désireux de travailler à leur compte et dans un cadre moins urbanisé, avec l’avantage de rajeunir une population d’agriculteurs aujourd’hui vieillissante et de redonner vie à des campagnes et à des villages qui pourraient, avec l’arrivée de ces jeunes « néoruraux » (qu’il s’agira de former aux techniques agricoles les plus soucieuses de l’environnement et de ses équilibres) et de leurs enfants, maintenir ou rouvrir des classes d’école… Cette politique « localiste » est, de plus, rendue possible par un bâti qui, le plus souvent, existe déjà et mérite d’être entretenu ou rénové. Et ce ne sont pas les terres qui manquent en France, mais bien plutôt les bras pour les cultiver. Il est d’ailleurs à signaler que, selon la plupart des recherches menées sur ce sujet, de petites surfaces agricoles sont mieux exploitées et valorisées que de trop grandes : l’étude lancée en 2011 par un chercheur de l’INRA pour 3 ans sur une ferme de Normandie pratiquant le maraîchage bio intensif (étude signalée par la revue « L’écologiste » de l’été 2013) montre qu’il « est possible de dégager un revenu brut d’environ 30 000 euros annuels avec 1400 heures de travail annuels, soit 35 heures par semaine sur dix mois ». Voici, là aussi, une piste prometteuse pour une nouvelle agriculture, à la fois biologique et de proximité, favorisant l’emploi sans écraser l’agriculteur ni la terre et l’environnement !

 

Cette nouvelle agriculture, certes, ne verra pas son règne arriver tout de suite, loin de là, mais il apparaît de plus en plus nécessaire d’engager la transition agricole vers cette nouvelle forme de production, à la fois plus respectueuse de l’environnement et de ses richesses, des paysages et des communautés rurales (ou néorurales…), tout aussi productive et sans doute plus utile que l’agriculture productiviste, uniformisatrice et épuisante pour les sols, qui domine trop souvent dans nos campagnes sous la coupe d’une industrie agroalimentaire trop dépendante d’une société de consommation vorace et tentatrice…

 

C’est aussi l’occasion pour la France de se présenter comme le pays de l’excellence environnementale et de l’innovation agricole sans céder aux sirènes scientistes de certaines grandes multinationales de l’agroalimentaire et sans abandonner ses agriculteurs aux oukases des banques ou d’une Commission européenne trop réglementariste et hygiéniste pour être honnête…

 

L’agriculture est une chance pour la France et la France peut et doit, impérativement, la saisir.

 

 

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