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15/03/2010

L'abstention de Droite.

J’ai passé une partie de la soirée électorale dans ma voiture, quelque part entre Paris et Dreux, et la radio m’a servi de fil conducteur, au rythme des analyses et des déclarations des politiques, toujours soucieux de bien placer leurs « éléments de langage », formule de novlangue pour signifier la communication façon « langue de bois » des partis et des candidats.

 

Ainsi, les dirigeants de l’UMP arguaient de la forte abstention pour signifier que le vote n’était pas vraiment significatif tandis que les socialistes triomphaient à bon compte en tendant négligemment la main aux listes d’Europe-écologie qui, elles, se félicitaient d’un enracinement que les Verts espèrent, cette fois, pérenne, tout en réaffirmant, plus haut et fort qu’à la veille des élections, leur attachement à la Gauche… Et le Modem, dont la plupart des cadres se sont discrètement (ou pas, d’ailleurs…) retiré, continue sa descente aux enfers quand le Front National, lui, resurgit du bois au grand dam des sarkozystes qui redoutent des triangulaires qui leur interdisent tout espoir de victoire dans l’état actuel des choses : j’ai bien écrit « état actuel » car l’expérience nous rappelle qu’une élection n’est jamais gagnée ou perdue avant le résultat final et qu’il vaut mieux éviter, par prudence, « d’insulter l’avenir » ou de vendre la peau de l’ours avant de l’avoir complètement occis !

 

Que penser de tout cela ?

 

Tout d’abord, l’abstention, la plus forte pour une élection régionale : elle n’a pas un seul sens mais bien plusieurs et les motivations des abstentionnistes peuvent être fort diverses, même s’il est tentant de vouloir simplifier cette tendance de plus en plus lourde de la vie politique contemporaine. Les gens de Droite qui ne se déplacent pas pour voter marquent ainsi leur désarroi devant une présidence plus « libérale-libertaire » que « traditionnelle », gaulliste ou « conservatrice » : le fait de la nomination de personnalités de la Gauche, d’ailleurs souvent brillantes et parfois plaisantes même aux yeux des royalistes comme moi, à des postes importants de l’Etat ou de l’Administration, a eu pour conséquence de désorienter et de décevoir des électeurs de Droite qui en ont logiquement, sinon légitimement, conclu que leurs idées étaient désavouées par le Président Sarkozy ou que celui-ci ne semblait pas (ou ne voulait pas) trouver de personnes compétentes parmi ceux qui l’avaient « fait Président ».

 

De plus, les électeurs de Droite de tradition intellectuelle ne peuvent qu’être déçus par les réformes démagogiques et si peu qualitatives (car répondant à de simples calculs comptables ou à des motivations égalitaristes-communautaristes) touchant l’Enseignement et inspirées par un Richard Descoings : la réduction des heures de Philosophie en Terminale ; la suppression de l’enseignement obligatoire de l’Histoire-géographie en Terminale S ; la dévalorisation de la Culture générale, désormais accusée de « favoriser la discrimination sociale » (sic !) ; etc. La grogne réelle qui s’exprime dans les salles de profs n’est pas l’apanage des syndicalistes de Gauche, loin de là, mais tourne parfois à la colère parmi les collègues dits « de Droite » ou traditionalistes, dont la plupart se refusent, dans la Région parisienne, à apporter leur suffrage personnel à la ministre Valérie Pécresse, celle-là même qui évoquait, dans un lointain entretien au journal « Le Monde », que sa personnalité française préférée était… Coluche ! On aurait pu s’attendre à De Gaulle ou à Charles de Foucauld de la part de cette Versaillaise bon teint mais il s’agissait de « faire peuple » (sic !, encore une fois !), semble-t-il… Rien de plus énervant pour un électeur de Droite qui a, souvent, d’autres références plus historiques et politiques. Cela n’enlève rien, d’ailleurs, aux qualités artistiques ou généreuses de Coluche, mais ce n’est pas faire injure à sa mémoire que de ne pas voir en lui la principale référence historique ou culturelle française !

 

C’est ce genre de démagogie facile de la part de certains politiciens de Droite qui détourne les électeurs « traditionnels » de Droite du vote UMP. Mais, après tout, cela nous rappelle que le président Sarkozy n’aime guère la littérature ni la culture classique, et qu’il s’en était pris à « La princesse de Clèves », œuvre de Marie-Madeleine de La Fayette, en des termes qui n’auraient pas déplu en d’autres temps aux soixante-huitards dénonciateurs de la « culture bourgeoise » (sic !)…

 

 

 

 

(à suivre).

 

 

04/02/2010

Réforme au lycée.

J’assistais cet après-midi à la réunion de présentation de la réforme du lycée qui rentre en application dès septembre prochain : au-delà du programme d’histoire de Seconde et de la suppression de l’histoire comme matière obligatoire en Terminale S sur lesquels je reviendrai ces temps prochains, il y a de profonds changements dans la structure du lycée et de ses enseignements et je ne suis pas vraiment sûr que ce qui nous a été annoncé aille dans le bon sens, celui d’une meilleure maîtrise des connaissances et des savoirs et d’une réflexion approfondie sur ceux-ci et le sens des choses… C’est même plutôt l’inverse !

La plupart des matières actuelles perdent des heures, y compris les sciences physiques dans les filières… scientifiques ! Mais, ce n’est pas encore le plus grave (même si cela l’est déjà !) : il y a l’esprit même de cette réforme qui tend à transformer le lycée en une simple préparation à l’activité économique alors qu’il devrait aussi jouer un rôle de formation des intelligences, non comme un bourrage de crâne, mais comme l’ouverture à la culture et à la réflexion. Susciter la curiosité, l’envie de savoir au-delà de la simple utilité « économique » ou « scolaire », voila ce que devrait permettre un enseignement digne de ce nom, un enseignement qui cherche à « élever » les esprits au-dessus des seules préoccupations matérielles ! Cela est-il absent des projets présentés dans le cadre de la réforme ? Pas totalement car il existera désormais des enseignements « d’exploration » dont les thèmes sont fort alléchants et sur lesquels j’avoue que je ne bouderai pas mon plaisir comme celui sur « l’écriture et l’engagement »… Mais ces enseignements seront-ils assez attirants pour des élèves dont les choix risquent de se porter, pour des raisons « d’efficacité », sur les matières plus scientifiques ?

En fait, l’une des conséquences de cette réforme me semble la promotion d’une sorte d’ « école à la carte » qui, en fin de compte, pourrait bien entraîner la disparition des matières littéraires comme les langues anciennes, désormais concurrencées par le chinois ou les sciences économiques et sociales (SES), tandis qu’il sera possible de faire une partie des enseignements scientifiques ou littéraires dans une langue étrangère, en fait principalement l’anglais ! Cette dernière mesure, qui nous a été présentée par notre proviseur comme étant inscrite dans la réforme, risque d’aggraver le fossé entre les lycées « d’élite » qui proposeront ce genre d’enseignement parce que le public (culturellement « favorisé ») pourra s’y prêter, et les autres lycées où les élèves posséderont mal les bases de notre langue et éprouveront alors plus de difficultés à suivre un enseignement dans une autre langue…

Il y aurait tant à dire sur cette réforme ! Si tout n’est pas négatif, sa logique est vicieuse et, surtout, marque la fin, déjà bien avancée dans les faits, d’une certaine culture française, classique au sens noble du terme, et d’une tradition d’enseignement diversifié et pas seulement « globalisé ».

Et les profs là-dedans ? Qu’en pensent-ils, qu’éprouvent-ils ? En fait, c’est le désarroi, le dépit, le découragement, et l’impuissance… A la fin de la réunion de concertation des profs des matières littéraires, j’ai d’ailleurs pris la parole pour que, avant d’évoquer en réunion plénière notre choix sur les thèmes d’exploration avancés par les documents officiels de la réforme, le rapporteur du groupe d’enseignants souligne notre inquiétude, voire notre défiance (pour rester poli et courtois…), à l’égard d’une réforme qui « divise pour mieux régner » et démantèle, à y bien regarder, non pas tellement l’Education nationale qui reste ce monstre bureaucratique et jacobin qu’il est depuis Jules Ferry (au moins !), mais (et c’est plus grave !) l’enseignement « à la française », fondé sur l’esprit de découverte et de discussion, sur la « belle culture » et le débat, sur la rigueur intellectuelle et la discussion argumentée…

Mais, cette réforme est-elle vraiment si étonnante de la part d’une République qui s’est donnée pour président un homme qui n’aime ni la littérature ni le bon vin ?

27/05/2008

Poubelle littéraire...

Les poubelles sont pleines de gens irremplaçables, pourrait-on dire au regard de ce que l’on y trouve parfois : ainsi, ce soir, en ouvrant le local aux susdites poubelles de mon immeuble, j’ai eu la surprise d’y découvrir une bonne quinzaine de livres et de manuels de littérature publiés dans les années 60-70, dans des collections du type « Lagarde et Michard ». Ainsi, Ronsard côtoyait Molière et Villon au milieu des cartons de chaussures et des briques vides de lait, et Frison-Roche terminait sa cordée dans les odeurs de salade pourrie et au milieu des factures déchirées, tandis que la littérature médiévale surnageait au milieu d’un océan de publicité d’électroménager…

 

Spectacle navrant, révélateur d’une société et d’un état d’esprit qui consomme sans compter et élimine sans penser. Peut-il en être autrement dans ce monde et cette République dont l’élu quinquennal moque la pauvre princesse de Clèves au motif qu’elle serait incompréhensible aux jeunes générations ? Dans une société du spectacle qui communique à défaut de transmettre ? Dans une « démocratie économique » qui ne pense plus qu’en terme de nombre et d’efficacité, et pour laquelle la culture littéraire « ne sert à rien » ?

 

Je suis un sentimental : j’ai récupéré tous ces livres promis à une fin indigne et je les ai ramenés chez moi, leur trouvant une petite place sur les nombreuses piles qui encombrent déjà mon studio. Demain, j’en emmènerai quelques uns au lycée, au CDI ou au « bar des professeurs » : une nouvelle vie pour ces ouvrages bafoués qu’il me plaît d’avoir « sauvés »…