Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

02/07/2010

Il n'y a pas de République propre !

Décidément, chaque jour apporte sa « révélation » dans l’affaire Bettencourt-Woerth, et le nœud semble se resserrer sur la gorge du ministre tandis que la Suisse, les banquiers et autres exilés fiscaux s’en donnent à cœur joie pour « informer » la presse sous toutes ses formes : de franco-française, « l’Affaire », dont on ne sait plus trop si elle concerne d’abord la milliardaire ou l’homme politique, devient internationale !

 

Au-delà de M. Woerth, qui apparaît de plus en plus comme un bon commis du système politico-financier capitaliste (et sans doute rien de plus ni de moins…), c’est tout un état d’esprit et tout un système même de Pouvoir, de ses relations avec l’Argent, de sa légitimité même, qu’il faut discuter et remettre en cause aujourd’hui comme ils l’étaient déjà par un Bernanos ou un Péguy, un Maurras (dans « l’avenir de l’intelligence » en particulier) ou, dans un autre style, un Brassens. Après tout, cette affaire n’est pas la première et elle est même récurrente dans notre République, y compris dans ces dernières années de régime sarkozien, et cela malgré la promesse (vaine ou hypocrite, ou les deux à la fois) du président actuel d’instituer une « République irréprochable »…

 

Il n’y a pas de « République propre », quoi que l’on fasse, et l’histoire nous le montre aisément, répétitivement, de façon presque acharnée ! Ce n’est pas une malédiction de la République, c’en est juste une fatalité, inscrite dans son essence même, depuis les touts premiers temps, dès 1792, lorsque Danton mettait la main sur le Trésor de la Couronne pour le piller et s’en servir à ses fins, y compris diplomatiques. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas des républicains honnêtes : il y en a, certes, et beaucoup même. Mais leur République « idéale » n’existe pas, ne peut pas exister, pour la simple raison que la République est née, en France, de l’appétit de l’Economique et de sa volonté de plier le Politique à ses fins propres, tout simplement !

 

Dans un monde où l’Argent est devenu, à tort mais c’est ainsi (même si l’on peut ne pas se contenter de cette situation), « la » valeur suprême, comment la République pourrait-elle se libérer de son emprise puisqu’elle dépend presque complètement des largesses de ceux qui le détiennent et, grâce à cela, font aujourd’hui les élections et défont les Etats ? Essayez donc, si vous n’avez pas d’argent, d’exister électoralement et d’approcher le Pouvoir ! Vous pouvez avoir les meilleures idées du monde, cela ne suffit pas car les dés sont pipés par le simple fait que la politique se fait de plus en plus par la conquête des médias ou, au moins, leur « indulgence », et par le déversement de folles sommes d’argent pour convaincre les électeurs de glisser un bulletin à votre nom dans l’urne : pas d’existence électorale sans moyens financiers importants… Or, dans une démocratie qui s’émancipe de plus en plus des électeurs eux-mêmes, l’Argent n’en a plus que de poids, et ceux qui le versent aux grandes machines politiques, celles qui sont considérées comme « utiles » ou, plus clairement, « rentables », se préservent ainsi des « mauvaises surprises ». Là encore, les dernières révélations sur les enveloppes de billets de madame Bettencourt destinées à des « amis » politiques (entre autres) confirment, s’il en était encore besoin, les relations étroites des partis et des politiciens, quels qu’ils soient, avec les puissances de l’Argent.

 

Ce n’est pas le fait du simple financement des partis, campagnes électorales ou journaux politiques, qui pose problème, c’est le fait que l’Argent s’en fait, en République, le « maître » et que plus on a d’argent, plus on est influent dans un tel système, au risque de dénaturer la politique elle-même qui, pourtant, ne devrait pas dépendre de qui la finance mais de qui la pense, la discute et la pratique.

 

Décidément, la République ne peut sortir de ses liaisons fatales avec les puissances de l’Argent car elle en dépend beaucoup trop ! Libérer la politique de l’emprise de l’Argent et de ses grands possesseurs, c’est rendre à l’Etat son indépendance à l’égard de « ceux qui possèdent » et qui « achètent » parce qu’ils en ont les moyens et que les politiques peuvent aussi avoir des faiblesses de ce côté-là…

 

La naissance, elle, ne s’achète pas : c’est pour l’avoir oublié que Nicolas Fouquet, l’homme le plus riche de France en 1661, a fini ses jours en prison, sur ordre d’un roi à qui l’Argent ne commandait pas, ne pouvait pas commander puisque le roi ne lui devait pas son pouvoir d’Etat. Quand la République aime trop l’Argent, la Monarchie, elle, le remet à sa place, sa juste place, celle d’un « moyen » et non d’une « fin » : car la véritable finalité de l’Etat, ce n’est pas de « posséder », c’est de protéger ses peuples (à l’intérieur comme envers l’extérieur) et d’assurer l’équilibre social, l’arbitrage entre les différentes forces du pays.

 

Alors, derrière le cas de M. Woerth, c’est la République qu’il faut viser, non par plaisir, mais par nécessité politique, tout simplement !

28/06/2010

Affaire Woerth : la République coupable !

L’affaire Bettencourt-Woerth est une affaire à laquelle personne ne comprend grand-chose, en définitive, et il n’est pas facile de se faire un jugement sur la « culpabilité » (à quel propos, d’ailleurs…) ou non du ministre du Travail : mais est-ce vraiment le plus important et le plus révélateur ? En fait, ce qui importe, c’est le lien entre l’Argent et le Pouvoir, leurs relations dans une société qui se veut à la fois transparente et « vertueuse », l’impudeur et l’impudence des Puissants de la République, de cette oligarchie qui confond « servir » et « SE servir »… Et il se trouve que la République sarkozienne semble être l’aboutissement de la reconquête du Pouvoir par l’Argent, symbolisée dès le premier soir du règne sarkoziste par la réception au Fouquet’s (la revanche de Nicolas Fouquet, en somme !).

 

Dans cette affaire, qui suit l’affaire du salaire indécent de M. Proglio, nommé de façon cavalière patron de l’EDF sur les ordres de M. Sarkozy, l’affaire des indemnités versées à M. Tapie, allié fidèle et utile de M. Sarkozy au sein d’une certaine Gauche, l’affaire des déplacements coûteux des membres du Gouvernement et du Président lui-même, etc., la morale politique, plus exactement celle qui touche au service de l’Etat et du pays, n’est pas sauve ! Loin de moi l’idée de dénoncer tous les politiciens comme pourris, ce qui n’a, en définitive guère de sens, car c’est bien le régime lui-même qui pousse à ce genre de dérive et, sans doute, un état d’esprit qui se veut celui du temps, c’est-à-dire de l’individualisme et du matérialisme consumériste : oui, c’est cette République-là qui est coupable, que cela plaise ou non d’entendre cette accusation qui n’est pas, pour le coup et sans mauvais jeu de mots, gratuite !

 

S’il y eut un de Gaulle qui, lui, allait jusqu’à payer ses notes d’électricité à l’Elysée, il fut bien plutôt l’exception que la généralité : car la République est née d’une Révolution dont le principal objectif était de confondre « Pouvoir économique » et « Pouvoir politique » en considérant que c’était le rôle de ceux qui produisaient la richesse (les « bourgeois », disait-on alors) de tenir aussi l’Etat qui, jusque là, échappait au contrôle des plus riches par la simple présence d’un monarque qui ne tenait pas son Pouvoir ni sa légitimité des financiers et de l’Argent lui-même, la naissance ne s’achetant pas !

 

Aujourd’hui, l’Etat est le jeu des féodalités financières (encore plus qu’industrielles) et ses gouvernants sont fascinés (hypnotisés ?) par l’Argent, le clinquant, la puissance apparente que confèrent l’Argent et sa possession. Cela est d’ailleurs vrai à tous les niveaux de la société et dans quasiment toutes ses sphères, comme l’a démontrée il y a peu la lamentable équipée sud-africaine des « Bleus » de M. Domenech. M. Woerth, aussi intelligent soit-il, appartient à cette caste d’oligarques qui ne voient l’économie et la société qu’à travers le prisme de la réussite sociale « sonnante et trébuchante » : d’où ses relations aujourd’hui suspectes quand, pourtant, il ne pensait pas à mal (d’après ses déclarations), avec le milieu des Bettencourt, Peugeot, et autres magnats de l’économie française.

 

Il est tout de même remarquable, et tellement révélateur, que M. Woerth ait attribué la légion d’honneur et autres décorations que l’on aimerait voir décerner avec plus de mesure et d’à-propos, à tous ceux que, aujourd’hui, il dit connaître de loin, comme de simples relations mondaines : cela rappelle les débuts de la IIIe République lorsque le gendre du président Jules Grévy, le député Wilson, « vendait » des légions d’honneur à des banquiers et autres « personnalités » fortunées… Il est d’ailleurs étonnant, là aussi, que personne parmi les journalistes et politiques, n’ait rappelé cette affaire pourtant célèbre ! Et pourtant, on y trouverait quelques points communs avec celle qui est évoquée aujourd’hui…

 

M. Woerth n’a rien touché ? Mais n’a-t-il pas, de plusieurs manières, empêché quelques enquêtes fiscales délicates pour ses « amis » ? C’est là l’accusation la plus grave et la plus probante qu’il convient de lui signifier, si on veut sa tête ! Mais, je le répète, il n’est pas le seul à accuser, dans ce cas, et il faut désigner la République, dans son principe même et dans ses fondations, comme véritable coupable ! Mais aussi dénoncer cette « dissociété » dans laquelle l’Argent est le Maître, et donner à l’Etat les moyens, non de s’y adapter, mais d’en combattre, concrètement, les effets comme les fondements : une œuvre de longue haleine, assurément, mais nécessaire, forcément !