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26/09/2014

La bêtise dramatique du fisc de la République...

 

Lors du banquet du Groupe d'Action Royaliste de dimanche dernier, certains ont constaté que j'étais fort en colère : il y a de quoi, me semble-t-il ! Alors que la situation sociale ne cesse de s'aggraver ; que de nombreux concitoyens sont au chômage (près de 6 millions désormais) ; que les délocalisations se poursuivent dans une indifférence même plus contrariée par les déclarations ministérielles (M. Montebourg, à qui l'on peut reprocher beaucoup de choses et en particulier une certaine impuissance, n'est plus là pour, au moins, dénoncer l'attitude scandaleuse de certaines multinationales...) ; que les légumiers sont victimes de la politique étrangère de M. Hollande (une politique qui n'en a que le nom, et non la réalité, en fait...) qui nous a mis à dos la Russie, pourtant si utile à notre balance commerciale ; à l'heure des menaces géopolitiques et des désespérances sociales, la République de MM. Valls et Hollande répond par les hausses fiscales et par l'intransigeance de ce même fisc à l'encontre, non de M. Thévenoud, éphémère ministre mais administratophobe maladif de longue durée, mais des plus faibles et des moins aisés de nos concitoyens.

 

J'étais en colère car je venais de découvrir la situation faite à une jeune saisonnière de Haute-Savoie et rapportée quelques jours auparavant dans les colonnes économiques du Figaro : « Célibataire, sans enfants et actuellement au chômage, Audrey D., 28 ans, devait régler avant la mi-septembre 1.107 euros d'impôt sur le revenu pour un salaire moyen de 1.400 euros nets en 2013 (…). « Pour payer mes impôts en temps et en heure, j'ai dû vendre ma voiture », précise-t-elle. ». Bien sûr, il n'est pas choquant que toute personne, quels que soient ses revenus, participe à l'effort fiscal : mais, en revanche, au regard de la situation sociale générale actuelle et des particularités de la situation de chacun, il serait juste que l'administration fiscale fasse preuve d'un peu plus de discernement et, surtout, de mesure pour éviter d'aggraver les conditions de vie des personnes en difficulté. Or, dans ce cas précis (qui n'est pas vraiment unique...), l'administration, parfois si tendre (voire obséquieuse) avec les puissants, ne connaît ni « faiblesse » (sic!) ni mesure : ainsi a-t-elle refusé à la jeune chômeuse l'échelonnement du paiement de son impôt et, du fait d'une absurde mesure toute récente (surtout vexatoire pour les personnes à bas revenus ou ne disposant pas -ou plus- de chéquier), lui a-t-elle imposée de revenir quatre fois au centre des finances publiques pour pouvoir payer en espèces la somme exigée par le Trésor public... Les technocrates qui rédigent de tels réglements ont-ils conscience de l'humiliation supplémentaire qu'ils font subir à ceux qu'ils traitent, dans leur humour potache d'énarques, de « sans-dents », équivalent méprisant de « gagne-petit » ?

 

Cette jeune chômeuse a répondu, au bout du compte, par l'humour en débarquant pour le quatrième versement avec quelques kilos de pièces roses de 1, 2 et 5 centimes... Un pied de nez amusant à la bêtise technocratique, sans violence et sans scandale.

 

Mais sa mésaventure est hautement révélatrice des dysfonctionnements de notre République plus oligarchique que populaire, et elle me met en rage contre un système qui oublie les devoirs de l'Etat et, en particulier, celui de justice sociale !

 

Je risque d'être longtemps en colère ! Malheureusement...

 

 

 

19/11/2013

La Bretagne, éternelle insoumise ? (2ème partie)

 

Après la dispersion des Bonnets rouges à l’automne 1675, il faudra attendre la période de la Révolution et des années 1790 pour revoir un tel mécontentement et une telle mobilisation des Bretons face à l’Etat, voire contre lui : les promesses révolutionnaires une fois envolées et la perte concrète et définitive de l’autonomie et des privilèges fiscaux, les Bretons se retrouvent fort marris d’une situation que, pourtant, certains d’entre eux, comme le député rennais Le Chapelier, ont créé et avalisé, de la nuit du 4 août à ses suites diverses et variées… La Révolution, avant même l’établissement de la République, a frappé plus fort que le roi Louis XIV qui, tout absolu qu’il était, n’avait pas osé, malgré la répression de 1675, imposer la gabelle et autres taxes, octrois et impôts français, à une province qui, même rebelle, restait une part de son royaume et dont il était, au regard des traités, le protecteur et, au regard du serment du sacre, le « père » : les hommes de l’Assemblée constituante, puis de la République, n’eurent pas de telles ambitions… Si la perte de l’autonomie politique elle-même n’inquiéta alors que les membres de la noblesse et quelques ecclésiastiques (et entraîna la création d’une Association bretonne très autonomiste et royaliste par un ancien compagnon de Washington, le marquis de La Rouërie, première ébauche de la Chouannerie, celle-ci militaire, politique et surtout nobiliaire), la nouvelle pression fiscale « égalitaire », d’une égalité nationale qui se marquait par un « rattrapage fiscal » assez rude, provoqua un fort mécontentement et un ressentiment qui s’accrurent quand la Révolution, à travers les décisions de la Constituante, supprima quatre évêchés de la province et priva l’Eglise locale de revenus qui lui permettaient de soulager les misères du temps. De plus, la répression contre les prêtres qui refusaient de prêter serment à la nouvelle constitution fit gronder des paroissiens attachés à leurs traditions et à leurs recteurs : certains notables républicains ne virent là que la survivance de vieilles superstitions quand, en fait, il serait plus juste d’y voir une forme, à la fois particulière et classique, d’enracinement remontant aux sources mêmes du christianisme breton, et constitutif d’une sorte d’identité collective sublimant les antagonismes villageois et les querelles anciennes de clocher (qui n’étaient pas que proverbiales…).

 

Cet enracinement véritable qui fait que les Bretons regardent plus souvent vers la mer ou vers le ciel que vers le Pouvoir central et la capitale, si ce n’est avec inquiétude et circonspection, explique que les révoltes y trouvent une énergie propre et une capacité, également, de résistance, fut-elle passive, à la répression et aux malheurs : les chouans de la Bretagne et de ses marges mayennaises et normandes, hommes parfois bien difficiles à discipliner, furent d’ailleurs ceux qui, même sous l’Empire napoléonien, poursuivirent une lutte clandestine apparemment vouée à l’échec, mais qui raviva et ancra pour près de deux siècles (y compris dans la lutte contre la tentative gouvernementale de construire une centrale nucléaire à Plogoff…) un esprit hostile à la centralisation parisienne, esprit que certains Parisiens de parti ou de gouvernement qualifient de régionaliste en espérant le décrédibiliser aux yeux de ceux des Français qui ne pensent qu’en termes d’Europe ou de mondialisation… Il n’est pas certain que les Bonnets rouges d’aujourd’hui, qui retrouvent les réflexes chouanniques du harcèlement et de l’esprit communautaire (et non pas communautariste…) et qui brandissent leur bretonnité comme un étendard de résistance (ici contre une pression fiscale imposée de « la capitale » et de Bruxelles) apprécient cette sorte de mépris si républicain et si oublieux de la pluralité française, cette pluralité qui « est » la France, cette pluralité aussi bien vantée par Fernand Braudel que chantée par Charles Maurras…

 

 

 

 

04/11/2013

Cette écotaxe qui fâche...

 

Se promener avec un bonnet rouge sur la tête ne laisse pas indifférents les passants parisiens ou versaillais : quelques marques de sympathie, d’autres d’inquiétude, parfois de l’agressivité et des mots que l’on pourrait facilement taxer de « xénophobie », surtout de la part de quelques partisans du gouvernement en place ou d’admirateurs de la mondialisation… Il est amusant de constater combien un simple couvre-chef peut créer du lien social et comme il est devenu un véritable symbole, à la fois de la Bretagne et de la révolte fiscale en cours ! 

 

Dans l’histoire, la révolte des bonnets rouges de 1675 s’inscrit dans la longue cohorte des révoltes populaires contre l’impôt et, par la même occasion, contre l’Etat central ou, du moins, de ses relais sur le lieu de la contestation : celle-ci fut terrible, tout comme la répression qui s’ensuivit… Mais il en reste quelques leçons que nos gouvernants, entre autres, feraient bien de méditer avant que de commettre de nouveaux impairs.

 

Tout d’abord, la question même de l’impôt, de sa légitimité et de son acceptabilité : tout Etat digne de ce nom doit trouver les moyens de se financer pour pouvoir maîtriser les territoires et aider les populations, engager de grandes politiques et être présent sur la scène internationale, tout simplement pour « être et durer » et représenter les intérêts de la nation, les défendre et les faire prospérer. En période de crise (qu’elle soit géopolitique comme en 1675 avec la guerre de Hollande –le pays, pas la personne…, ou économique et financière comme aujourd’hui, marque d’une mondialisation en cours, moins heureuse qu’espérée), trouver de l’argent est un art plus délicat encore que d’ordinaire, et qui nécessite un certain doigté si l’on veut éviter les réactions brutales : oublier les spécificités locales dans un pays aussi pluriel que la France, chatouiller les susceptibilités provinciales ou socio-professionnelles ou vouloir passer en force sans un minimum de concertation avec les parties concernées, en particulier celles appelées à s’acquitter de nouvelles taxes ou impositions, c’est risquer le mécontentement explosif, la contestation active et l’émeute revendicatrice. Colbert, en 1675, en négligeant la particularité de l’autonomie bretonne, a allumé, peut-être sans en saisir toutes les conséquences, un incendie qui mit bien du temps à s’apaiser et desservit l’Etat central sans satisfaire le Roi, obligé d’envoyer des troupes dans la province rebelle et risquant sa postérité… L’historien breton La Borderie, pourtant royaliste convaincu (il fut député monarchiste de Vitré de 1871 à 1876), n’hésita pas à parler, pour évoquer la répression royale de 1675, de « despotisme », même s’il cible plus Colbert que le souverain lui-même… Le gouvernement Ayrault devrait se souvenir de cela, sans doute, s’il ne veut pas perdre tout crédit (ou plutôt ce qui lui en reste…) dans une région qui, pourtant, lui était électoralement très favorable en 2012. Mais il est vrai que, contrairement à la structure institutionnelle étatique d’une monarchie qui restait encore « fédérative » à défaut d’être complètement fédérale, la République se veut « une et indivisible » et, donc, égalitaire, au risque de ne pas prendre en compte ce qui fait la diversité française et de se heurter à des réalités qui, elles, ne sont pas identiques d’un bout à l’autre du territoire national…

 

D’autre part, pour être acceptable et accepté, un impôt ou une taxe doit avoir une « raison d’être » et apparaître comme utile, voire nécessaire, aux populations qui doivent l’acquitter : or, qu’a-t-on vu avec cette fameuse « écotaxe », si mal nommée en fait ? C’est qu’elle devait plus rapporter à une société privée, baptisée Ecomouv, qu’à la Bretagne elle-même ! Cela nuit, évidemment, à la crédibilité de cette taxe qui apparaît plus devoir bénéficier à des actionnaires ou à des intérêts privés qu’à la collectivité elle-même : le principe de la « Ferme générale », déjà condamné sous l’Ancien régime parce qu’elle semblait trop profiter à quelques riches « percepteurs », n’est pas plus populaire ni compréhensible aujourd’hui qu’hier…

 

Mais là n’est pas le plus grave : en fait, cette taxe n’était accompagnée, pour lui donner crédit près de la population, que de vagues projets de transports ferroviaires, d’autant plus incompris en Bretagne que la SNCF a abandonné toute velléité de ferroutage dans cette province et qu’il n’a guère été évoqué d’alternative à la route en cette même région ! Pourtant, la reconstruction d’un réseau ferré dédié au transport de marchandises et de camions sur plateforme ferroviaire devrait être une priorité, mais aussi l’étude et la mise en place d’un système de cabotage ou de merroutage qui relierait les côtes de Bretagne aux grands ports nationaux (en particulier Le Havre, à l’embouchure de la Seine) pour éviter les routes et diminuer la pollution du transport routier… Or, rien de tout cela ! D’où l’incompréhension et l’absence de légitimité de cette nouvelle taxe, aggravées par les difficultés actuelles de l’économie en Bretagne, en particulier dans le secteur agroalimentaire.

 

Prisonnière de ses principes et de ses maladresses, la République se heurte désormais à une colère bretonne dont les derniers événements montrent qu’elle n’est pas qu’une simple flambée mais bel et bien une contestation plus profonde qui fait suite à un malaise lui aussi enraciné dans le tissu provincial, sur le plan social comme politique : au-delà de la politique fiscale, c’est aussi toute la politique d’aménagement du territoire mais aussi d’autonomie régionale que l’Etat doit repenser. Mais la République peut-elle faire ce double effort à l’heure où la mondialisation menace la réalité même de l’Etat et avec un gouvernement qui apparaît désormais isolé et condamné à brève échéance ?