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28/10/2013

Contre l'écotaxe : la colère bretonne !

 

Les cafés rennais résonnaient dimanche et encore ce lundi matin des échos de la colère des agriculteurs bretons et de la bataille autour du portique de Pont-de-Buis destiné au prélèvement automatique de la fameuse écotaxe : les télévisions d’information passaient en boucle les mêmes images des fumées, des bonnets rouges défiant les gardes casqués ou des manifestants blessés, à terre… Et cela discutait sec en lisant « Le journal du Dimanche » ou « Ouest-France-dimanche » qui faisaient chacun leur couverture sur « Les révoltés de l’écotaxe » ou « Vent de fronde en Bretagne ». Sur le comptoir d’un bistrot, comme une sorte d’intersigne, il y avait aussi le numéro « hors-série histoire » du magazine « Bretons » qui titrait, insolemment, « La Bretagne contre la Révolution ? », un chouan montant la garde en couverture…

 

Ce qui a mis le feu aux poudres en Bretagne, c’est cette taxe supplémentaire qui doit entrer en application au 1er janvier prochain, au moment même où la Bretagne affronte une de ses plus graves crises de l’emploi, entre les licenciements dans l’industrie automobile (usine PSA de Rennes-La Janais), dans celle des télécommunications (Alcatel-Lucent, là encore à Rennes mais aussi à Lannion), et, surtout, dans ce qui constitue encore l’un des principaux réservoirs de métiers et d’emplois de la province, le secteur agroalimentaire, avec la fermeture de nombreux abattoirs et d’entreprises de transformation de la viande et du poisson, en particulier dans le Finistère, là où la tension sociale est désormais la plus palpable et la plus explosive comme les jours derniers l’ont bien montré.

 

Cette écotaxe est donc bien mal venue : ce n’est ni le moment ni le lieu, si l’on peut dire, de l’appliquer, alors que la Bretagne subit de plein fouet les effets délétères d’une mondialisation qui respecte si peu (voire pas du tout…) les règles d’équité économique, de justice sociale et de souci environnemental ! Quelques exemples de cette folle et terrible mondialisation sans freins ni entraves : la concurrence déloyale des abattoirs allemands qui exploitent une population d’ouvriers misérables venus de l’Europe orientale et centrale, certains d’entre eux étant payés moins de 400 euros mensuels (!), et cela dans la première puissance économique de l’Union européenne, au cœur de celle-ci, sans que cela émeuve beaucoup la Commission européenne ; les multiples violations par les grandes multinationales de l’agroalimentaire des milieux naturels (destruction des forêts brésilienne ou africaine pour produire de l’huile de palme ou des agrocarburants, saccage des littoraux ou des fonds marins pour en tirer à moindre frais le maximum de ressources monnayables, etc.) et l’indifférence totale de celles-ci pour le bien-être animal ou la diversité des espèces végétales, etc.

 

Soyons clair : le système agroalimentaire dominant breton n’est pas exempt de reproches, loin de là, qui a, au nom de la modernisation (depuis les années 50-60 en particulier) et de la compétitivité, trop souvent pris les traits d’un productivisme agroindustriel polluant et de moins en moins « paysan »… Les mises en garde de quelques paysans traditionalistes de l’époque, comme ceux de la revue « Le Paysan biologiste », n’ont pas été entendues. D’ailleurs, comment auraient-elles pu l’être quand l’heure était dans les milieux économiques, les médias, mais aussi à travers les manuels scolaires de géographie par exemple, à vanter « l’adaptation de l’agriculture bretonne à la mondialisation », et se félicitant, au nom de la nécessaire modernité et « pour sortir de l’archaïsme » (termes mille fois entendus et lus depuis mes années de lycée et d’université), de la mise en place d’un système de production vu sous le seul angle économique et oublieux des conditions mêmes de production : il fallait produire, disait-on, coûte que coûte, pour exporter hors de Bretagne et « nourrir le pays », et les arguments développés par les milieux économiques dominants étaient les mêmes que ceux aujourd’hui utilisés pour pousser à la rapide modernisation des agricultures de l’Europe centrale et orientale, avec la bénédiction d’une Commission européenne là encore aveuglée par les seules finalités financières et économiques, mais aussi pour, dit-on, permettre le développement des pays d’Asie et d’Afrique ! Il suffit de parcourir la presse économique mais aussi et surtout les manuels de géographie de Seconde par exemple (les pages sur la question alimentaire…) pour s’en rendre compte ! Belle hypocrisie de ceux qui, de Paris ou de Bruxelles, des quartiers bobos ou des milieux « Verts », viennent désormais faire la leçon à des Bretons qui auraient, sans doute par facilité plus que par discernement, mais aussi souvent de bonne foi (qui n’est pas toujours la vérité…), adopté ce modèle agroindustriel hier vanté et aujourd’hui décrié en France mais toujours prôné pour les pays en développement, au nom de ce même « développement »…

 

Dans cette affaire, quoi qu’il en soit, les Bretons sont les principales victimes, certes parfois consentantes hier, mais aujourd’hui sacrifiées sur l’autel des grands principes et des petites vertus qui fondent la République centrale. Et, au lieu d’impulser en Bretagne (et ailleurs !) une politique nouvelle de redéploiement agricole plus respectueuse de l’environnement, la République fiscalise un peu plus une province fragilisée par la mondialisation et un secteur agricole menacé dans sa survie même : politique de Gribouille quand on pourrait espérer de l’Etat une véritable stratégie sur le long terme pour « réparer et préparer » ! Mais nous sommes en République, malheureusement, et le seul horizon semble être celui des élections : un horizon bien étroit, en somme, quand il faudrait regarder au loin, au-delà du calendrier électoral, et penser en terme de générations et de transmission…

 

Cette écotaxe, de plus, n’a rien de très écologiste : elle est d’abord une taxe qui profitera, entre autres, au consortium privé Ecomouv qui gère les fameux portiques et la perception de la taxe, consortium qui touchera, sur 1,2 milliard d’euros prévus par an, environ 250 millions (soit, pour l’ensemble de la France, plus de 8 fois ce qui sera prélevé par les portiques en Bretagne !). On aurait pu attendre, au moins, que la République évite de rétablir ce qui a, d’ailleurs, coûté si cher à la Monarchie d’Ancien Régime, c’est-à-dire le système des « fermiers généraux » chargés de récupérer taxes et impôts dans la royaume.

 

De plus, cette taxe si mal nommée « éco » doit, paraît-il, financer des projets d’aménagements ferroviaires, en particulier de ferroutage, alors même que la SNCF, elle, semble négliger dans sa propre stratégie le secteur fret, et qu’elle ne prévoit pas vraiment de recréer des voies de chemin de fer là où elles seraient bienvenues et nécessaires pour le transport de marchandises agricoles à moindre coût environnemental… De qui se moque-t-on, alors ?

 

Doit-on rappeler, aussi, que cette écotaxe ne sera pas perçue là où elle aurait pu avoir le plus de sens et de rapport, c’est-à-dire sur les autoroutes, aujourd’hui privatisées (à déraison, d’ailleurs) ? Du coup, les multinationales du Transport routier comme de l’agroalimentaire seront indéniablement favorisées, favorisant en retour les principes si peu vertueux sur le plan écologique d’une mondialisation « carbonée » à grande échelle ! Où est l’écologie là-dedans ?

 

La colère de la Bretagne, cette chouannerie agricole et industrielle, est donc plus que légitime : mais elle ne doit pas être qu’une colère, elle doit penser les sources de la crise et remonter à celles-ci, dans un exercice de « tradition critique », autant sur le plan économique, environnemental aussi, que politique… « Les Bretons contre la Révolution ? » : oui, deux siècles après, contre les conséquences de ses principes républicains, ceux d’un libéralisme économique mêlé de centralisme administratif et politique, et contre les attitudes d’un « pays légal et central », contre cette arrogance des maîtres de Bercy et des chantres d’une mondialisation qui pensent en chiffres et oublient les femmes et les hommes de chair et de sang !

 

Il est encore des portiques de l’injustice fiscale à faire tomber…

 

 

 

 

18/09/2013

Exagérations fiscales contre justice sociale...

 

La rentrée est le moment douloureux de la découverte des diverses feuilles d’impôts qui encombrent la boîte aux lettres, et cette année n’a pas été très différente des autres selon le rituel fiscal. Ce qui est nouveau, c’est, au-delà du regroupement de plusieurs impôts sur la même feuille au nom de la simplification administrative (ce qui n’est pas une idée stupide, d’ailleurs), l’impression d’un « choc fiscal » mais aussi d’une certaine « exagération » de la République de Bercy qui exaspère jusqu’aux plus conciliants

 

Car, en définitive, ce sont les classes moyennes mais aussi les classes populaires et les petits entrepreneurs qui sont les principaux pourvoyeurs de fonds de l’actuelle République : les plus aisés, eux, semblent en partie épargnés, comme le montrent les « aménagements » destinés aux clubs de balle-au-pied pour leur permettre de poursuivre leurs embauches à coups de millions d’euros de joueurs venus, non pour la passion d’une équipe et d’un maillot, mais pour faire « le spectacle » à grands frais et sans payer trop d’impôts à l’Etat qui les accueille ! Sans oublier ces grandes entreprises, parfois françaises (Renault ou Total par exemple, dont l’Etat est pourtant actionnaire…), qui délocalisent une part de leurs activités ou de leur trésorerie pour éviter de remplir leurs devoirs à l’égard du fisc français mais en continuant à verser d’abondants dividendes à quelques gros actionnaires, qu’ils soient hexagonaux ou étrangers… La diatribe du candidat Hollande contre la Finance prédatrice n’était donc qu’un discours destiné à abuser des électeurs français soucieux de remettre l’Argent à sa place qui n’est pas la première, qui ne doit pas être la première si l’on veut faire respecter la nécessaire justice sociale.

 

M. Hollande a menti, et les contribuables en font les frais, y compris les moins aisés… L’un de mes voisins de Saint-Briac me confiait, à titre d’exemple, son propre cas, édifiant et révélateur : ayant commencé à travailler comme ouvrier à 14 ans, touchant une petite retraite et n’ayant jamais payé jusque là l’impôt sur le revenu (car ne gagnant pas assez d’argent pour cela…), voici que, pour ses 80 ans, le fisc lui demande de régler, au titre de cet impôt dont il était jusque là préservé, la somme de 416 euros ! Le cas n’est pas isolé et d’autres exemples de ce genre de situation m’ont été rapportés par quelques collègues du lycée, eux aussi indignés de ces « surprises fiscales » qui, parfois, mettent ces retraités souvent très âgés dans des conditions de précarité difficiles à surmonter. N’oublions pas que ces personnes ne sont pas exemptes d’autres impôts et taxes !

 

Pendant ce temps-là, l’Etat continue à s’endetter, refusant obstinément de faire les réformes et les économies qui s’imposent, et maintenant une inégalité désormais choquante entre salariés du privé et fonctionnaires, en particulier sur le calcul des retraites…

 

Bien sûr, la critique est facile, m’objectera-t-on : mais cela n’enlève rien à sa nécessité, au nom de la justice sociale, cette dernière formule étant d’ailleurs étrangement absente désormais du langage gouvernemental… La critique, néanmoins, ne suffit pas, et elle serait même vaine, voire dangereuse, si elle ne s’accompagnait pas de propositions : certaines, ici même, au travers de nombreuses notes, ont déjà été avancées, et il me faudra les reprendre, les compléter, parfois les amender, en tout cas les préciser. Cela constituera une bonne partie de mon travail politique de cette année qui s’annonce politiquement riche…

 

Propositions fiscales, suggestions économiques, réflexions institutionnelles, etc. dans le cadre d’un royalisme raisonné et constructif…

 

21/08/2013

La révolte fiscale qui vient...

 

Le gouvernement a fait sa rentrée lundi et les observateurs politiques soulignent la difficulté du moment comme de l’exercice : malgré la légère amélioration de la situation économique au 2ème trimestre que semble évoquer la croissance à 0,5 % (taux bien insuffisant, dans la logique de mondialisation actuelle et principalement dans celle-ci, pour provoquer une baisse significative du chômage), la morosité demeure dans notre pays et les risques d’une dévalorisation économique de la France sont loin d’être écartés.

 

D’autre part, les réformes annoncées et les mesures déjà prises sont-elles efficaces et surtout, sont-elles justes ? On peut légitimement en douter quand on constate que le gouvernement, en cette année électorale (mars 2014, les municipales ; juin 2014, les européennes…), cherche, en fait, à préserver ce qu’il considère comme sa clientèle « traditionnelle », en particulier parmi les fonctionnaires, et qu’il évite de toucher à quelques règles un peu anciennes qui, pourtant, mériteraient d’être, sinon totalement abrogées, du moins largement érodées pour réparer quelques injustices flagrantes : ainsi, celle sur le calcul des retraites des fonctionnaires, sur les six derniers mois de la carrière, qui apparaît bien peu légitime au regard de ce même calcul, mais sur 25 ans, des salariés du secteur privé… Certes, quelques députés proches de l’actuel gouvernement insistent pour passer à 10 ans pour les fonctionnaires, mais est-ce suffisant ? La question mériterait d’être posée et débattue, mais, pour l’heure, le gouvernement semble plus pressé de communiquer que de discuter vraiment avec les acteurs sociaux, quels qu’ils soient, d’ailleurs !

 

A bien y regarder, le gouvernement cherche à tout prix à éviter un « automne social chaud » qui le mettrait en porte-à-faux avec ses obligés : du coup, il privilégie le levier fiscal pour résoudre la question du déficit et celle des retraites à venir, au détriment des réformes de structures et des économies nécessaires… Mais, ce faisant, il mécontente doublement les travailleurs du secteur privé, qu’ils soient ouvriers, artisans, commerçants, ou encore cadres, entrepreneurs, agriculteurs. En fait, ce sont toutes les classes moyennes « privées » qui font les plus grands frais de cette politique qui n’en est pas vraiment une, et qui semblent condamnées à financer celle-ci sans répit…

 

Et si c’était de ces classes pressurées que venait le danger pour le gouvernement dans les temps prochains ? Si c’était une « révolte fiscale » qui éclatait, multiforme et dévastatrice en ces jours de « disette financière » ? Un événement passé presque inaperçu au début du mois d’août pourrait bien le laisser penser et l’annoncer : la destruction par des manifestants en colère d’un portique destiné à l’application de la future écotaxe sur les poids-lourds (taxe sur laquelle on peut, d’ailleurs, avoir une lecture différente de celle des manifestants, mais ce n’est pas ici le débat le plus important) à Guidan, dans le Finistère, le vendredi 2 août dernier. Les manifestants, souvent agriculteurs ou salariés de l’agroalimentaire, dénonçaient « l’impôt de trop », « une taxe décidée à Paris par des technocrates », et « une violation du principe du non-paiement de taxes étatiques de péage en Bretagne depuis le rattachement de la Bretagne au royaume de France ». Le président de l’Association pour le maintien de l’élevage en Bretagne, lui-même éleveur de porcs, n’hésite pas à s’en prendre à ce qui est pour lui un véritable symbole de la République centralisatrice : « Ce portique est un symbole qu’il nous faut faire tomber. C’est une potence, c’est le symbole d’un establishment parisien, le symbole des contrôles tatillons dans nos exploitations et nos entreprises. ». Il n’est d’ailleurs pas inutile de souligner que cette manifestation et la destruction de ce symbole fiscal ont rencontré une large approbation dans les populations locales… Jusqu’à certains qui y ont vu une sorte de « chouannerie antifiscale », formule qui, évidemment, ne me laisse pas indifférent…

 

Le ministre de l’économie et des finances, le transparent M. Moscovici, a lui-même constaté « le ras-le-bol fiscal » qui commence (depuis un certain temps, déjà…) à se répandre dans le pays : sans doute commence-t-il à percevoir le danger d’une révolte antifiscale qui mettrait à mal ses prévisions dignes de Pangloss !

 

« Trop d’impôt tue l’impôt », est une formule juste mille fois répétée : mais il est temps pour l’Etat de penser à en tirer toutes les conséquences et à cesser de vampiriser les fruits du travail des Français. Moins d’impôts, mais davantage d’initiative, d’audace mais aussi d’économies : la République, hollandaise ou autre, en est-elle capable ? L’histoire nous incite à répondre prudemment, c’est le moins que l’on puisse dire… Quant à la politique, elle répond, encore plus implacable, par la négative, ne serait-ce que par les principes mêmes de la République, au-delà des sursauts et exceptions gaulliennes des années 60.