Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

28/03/2009

Encore l'Action Française...

Je viens de passer trois journées à Paris pour suivre, de bout en bout, le passionnant et motivant colloque sur « le maurrassisme et la culture » organisé par le Centre d’histoire de Sciences Po. Comme l’a souligné Olivier Dard dans sa conclusion, il s’agissait de « ramener le maurrassisme à sa dimension historique », comme « objet historique », et c’est une œuvre qui est loin d’être achevée, au point de susciter de prochains colloques, comme celui du mois de mai 2009 à Metz sur l’un des compagnons de Maurras, Jacques Bainville, et le quatrième, annoncé pour l’an prochain à Paris, de la série sur « L’Action Française : culture, société et politique ».

 

J’ai beaucoup appris lors de ce colloque et j’ai hâte de lire le volume des actes d’icelui qui sortira l’an prochain : le « continent Action Française » est si vaste qu’il y a encore de multiples explorations à en faire, ce à quoi se sont attelés de nombreux historiens, de l’Oregon à l’Allemagne, de la France au Royaume-Uni…

 

Ainsi furent évoqués dans ces trois jours des personnalités aussi différentes que l’historien de l’Art Louis Dimier, Thierry Maulnier ou Jean Rivain qui, chacun en leur domaine, ont incarné un « aspect d’Action Française », voire « un moment ». Il était intéressant d’étudier comment l’AF pouvait influencer les mouvements ou les écoles culturelles, en musique comme en histoire ou, au contraire, être influencée par eux : cela amenait à poser la question du rapport entre culture et politique au sein de l’Action Française, mais aussi celle de l’apogée de l’AF qui, selon Olivier Dard, se situerait autour des années 20, plutôt au début de celles-ci, mais avec des décalages temporels, selon les domaines considérés.

 

Il me faudra reparler de ce colloque ultérieurement parce que, au-delà de l’aspect historique, il me semble nécessaire d’en étudier les leçons stratégiques : si l’AF « a vécu », au sens politique du terme, elle n’en reste pas moins une expérience unique dans l’histoire du royalisme contemporain et celle qui a eu la plus grande épaisseur idéologique de tous les mouvements attachés à ce que l’on nomme, en politique, le traditionalisme ou la Contre-Révolution, et il serait illusoire d’oublier, ou de renier, ce qu’elle peut encore apporter au combat royaliste actuel.

 

J’ai déjà dit ce que je devais à l’AF, et il est certaines de ses intuitions que je partage, certaines de ses idées que j’approfondis et revendique : il en est aussi beaucoup que je récuse et je n’oublie pas que, si l’AF a été riche de ses différences, elle l’est peut-être encore plus de ses dissidences… Les « ardeurs incomprises » d’Henri Lagrange et les « audaces stendhaliennes » de « la Revue Critique » ; les « lys sauvages » de la « Jeune Droite » des années 30 ; les « nouveaux chemins » de Philippe Ariès et de Pierre Boutang : autant d’aventures royalistes, politiques ou intellectuelles, qui peuvent encore alimenter la réflexion et qu’il serait regrettable de négliger.

 

Mais il ne faut pas chercher à copier ce qui a été, il s’agit de trouver de nouvelles voies ou, plus exactement, des voies adaptées à « notre bel aujourd’hui » pour « passer » : en cela, je reste tout à fait fidèle à Maurras qui clamait (malheureusement parfois sans se l’appliquer à lui-même…) : « la vraie tradition est critique ».

25/03/2009

Au-delà de l'Action Française...

Cette semaine, je fais faux bond à mes élèves durant deux jours pour me rendre au colloque organisé par le Centre historique de Sciences Po sur un thème qui m’intéresse au plus haut point, « Le maurrassisme et la culture ». En fait, c’est la troisième partie d’une série débutée en 2007 à Paris et poursuivie en 2008 à Metz, et qui a déjà donnée lieu à la publication d’un fort volume intitulé « L’Action Française : culture, société, politique » auquel j’ai consacré deux longs articles publiés dans « L’Action Française » actuelle.

 

Le programme des trois journées du colloque est fort alléchant et j’avoue une certaine impatience à entendre les conférences annoncées qui devraient permettre de mieux cerner les aspects de la « culture d’AF » et ses limites, ses influences sur les débats de l’époque, ses répercussions ou ses échos jusqu’à aujourd’hui, etc. Redécouvrir (ou, même, découvrir tout simplement) des idées, des textes, des interventions, etc. issus du courant monarchiste maurrassien, de cette école de pensée à laquelle je dois, dans une très large mesure, d’être devenu royaliste, et d’avoir aussi su « m’inventer » un royalisme plus personnel, non moins politique, non moins fidèle mais peut-être moins dogmatique, moins doctrinal, moins « daté » aussi…

 

Ce colloque est aussi un moyen pour moi de prendre la mesure de ce qu’il me reste du patrimoine ou de l’héritage d’AF, ce que j’en ai gardé et ce que je n’ai jamais accepté, ce que j’ai rejeté et ce que j’ai récupéré, parfois transformé : ce qui est certain, c’est que j’ai une immense dette intellectuelle envers l’Action Française, et que je n’ai pas l’intention de renier cette part de ma vie politique et militante. Certes, Maurras n’est pas mon seul « maître », et sans doute n’a-t-il été qu’un médiateur pour m’ouvrir à d’autres perspectives. Après tout, Maurras ne disait-il pas qu’il ne voulait pas faire des maurrassiens mais bien plutôt des royalistes ? En ce sens, il a plutôt bien réussi avec moi, même si c’est justement parfois en m’éloignant de lui que je le suis resté…

 

Depuis ce Noël 1977 où maman m’a offert, en cette année de mes quinze ans, un gros bouquin orange intitulé « Œuvres capitales » et signé d’un certain Charles Maurras dont je ne connaissais rien à l’époque, sinon qu’il était « de Droite » de façon assez vague, j’ai pratiquement « fait le tour » de la pensée maurrassienne et je n’y ai pas toujours trouvé mon compte : en somme, il m’a fallu le compléter, voire le dépasser, pour faire fructifier ce que j’avais appris à sa fréquentation livresque. La lecture de Bertrand de Jouvenel et, en particulier, de ce qui fut mon « maître livre », son ouvrage « Du Pouvoir » m’a sans doute permis plus facilement de remettre en cause certains préjugés sur une Démocratie dont je ne percevais pas aussi bien auparavant le mécanisme de renforcement du Pouvoir sur les personnes et les communautés.

 

Mais il y eut aussi Georges Balandier et son livre « le dédale » ; les écrits de Pierre-André Taguieff ; ceux de Bertrand Renouvin dont celui qui m’a le plus marqué : « La République au Roi dormant » ; et tant d’autres, monarchistes ou non.

 

Ce qui m’intéresse aussi dans ce colloque, c’est de saisir en quoi le maurrassisme et ses surgeons intellectuels ont pu jouer un rôle dans le processus, incomplet et inachevé, de « monarchisation de la République » sensible, de façon fort diverse et même antagoniste (qu’y a-t-il de commun entre De Gaulle et Sarkozy, tous deux pourtant traités de « monarques » ?), au gré des présidences de la Cinquième.

 

Derrière l’histoire des cultures et des idées politiques de l’Action Française, souvent passionnante et passionnée, aventurières et aventureuses, se profilent quelques questions politiques et institutionnelles, voire civilisationnelles, qui n’ont pas tout perdu de leur actualité ! Si tel était le cas, d’ailleurs, serai-je royaliste et partisan d’une magistrature suprême de l’Etat « libre et active » ?

 

De plus, en tant qu’historien, il m’intéresse aussi de voir où en est la recherche sur les royalismes français du XXe siècle, et comment, désormais, ils s’inscrivent dans le temps des historiens et dans la « mémoire savante ».

 

Autant de raisons, historiques et politiques, dans lesquelles le sentiment n’est pas très loin non plus, qui fondent mon impatience : vivement mercredi après-midi que le colloque commence…