25/03/2009
Au-delà de l'Action Française...
Cette semaine, je fais faux bond à mes élèves durant deux jours pour me rendre au colloque organisé par le Centre historique de Sciences Po sur un thème qui m’intéresse au plus haut point, « Le maurrassisme et la culture ». En fait, c’est la troisième partie d’une série débutée en 2007 à Paris et poursuivie en 2008 à Metz, et qui a déjà donnée lieu à la publication d’un fort volume intitulé « L’Action Française : culture, société, politique » auquel j’ai consacré deux longs articles publiés dans « L’Action Française » actuelle.
Le programme des trois journées du colloque est fort alléchant et j’avoue une certaine impatience à entendre les conférences annoncées qui devraient permettre de mieux cerner les aspects de la « culture d’AF » et ses limites, ses influences sur les débats de l’époque, ses répercussions ou ses échos jusqu’à aujourd’hui, etc. Redécouvrir (ou, même, découvrir tout simplement) des idées, des textes, des interventions, etc. issus du courant monarchiste maurrassien, de cette école de pensée à laquelle je dois, dans une très large mesure, d’être devenu royaliste, et d’avoir aussi su « m’inventer » un royalisme plus personnel, non moins politique, non moins fidèle mais peut-être moins dogmatique, moins doctrinal, moins « daté » aussi…
Ce colloque est aussi un moyen pour moi de prendre la mesure de ce qu’il me reste du patrimoine ou de l’héritage d’AF, ce que j’en ai gardé et ce que je n’ai jamais accepté, ce que j’ai rejeté et ce que j’ai récupéré, parfois transformé : ce qui est certain, c’est que j’ai une immense dette intellectuelle envers l’Action Française, et que je n’ai pas l’intention de renier cette part de ma vie politique et militante. Certes, Maurras n’est pas mon seul « maître », et sans doute n’a-t-il été qu’un médiateur pour m’ouvrir à d’autres perspectives. Après tout, Maurras ne disait-il pas qu’il ne voulait pas faire des maurrassiens mais bien plutôt des royalistes ? En ce sens, il a plutôt bien réussi avec moi, même si c’est justement parfois en m’éloignant de lui que je le suis resté…
Depuis ce Noël 1977 où maman m’a offert, en cette année de mes quinze ans, un gros bouquin orange intitulé « Œuvres capitales » et signé d’un certain Charles Maurras dont je ne connaissais rien à l’époque, sinon qu’il était « de Droite » de façon assez vague, j’ai pratiquement « fait le tour » de la pensée maurrassienne et je n’y ai pas toujours trouvé mon compte : en somme, il m’a fallu le compléter, voire le dépasser, pour faire fructifier ce que j’avais appris à sa fréquentation livresque. La lecture de Bertrand de Jouvenel et, en particulier, de ce qui fut mon « maître livre », son ouvrage « Du Pouvoir » m’a sans doute permis plus facilement de remettre en cause certains préjugés sur une Démocratie dont je ne percevais pas aussi bien auparavant le mécanisme de renforcement du Pouvoir sur les personnes et les communautés.
Mais il y eut aussi Georges Balandier et son livre « le dédale » ; les écrits de Pierre-André Taguieff ; ceux de Bertrand Renouvin dont celui qui m’a le plus marqué : « La République au Roi dormant » ; et tant d’autres, monarchistes ou non.
Ce qui m’intéresse aussi dans ce colloque, c’est de saisir en quoi le maurrassisme et ses surgeons intellectuels ont pu jouer un rôle dans le processus, incomplet et inachevé, de « monarchisation de la République » sensible, de façon fort diverse et même antagoniste (qu’y a-t-il de commun entre De Gaulle et Sarkozy, tous deux pourtant traités de « monarques » ?), au gré des présidences de la Cinquième.
Derrière l’histoire des cultures et des idées politiques de l’Action Française, souvent passionnante et passionnée, aventurières et aventureuses, se profilent quelques questions politiques et institutionnelles, voire civilisationnelles, qui n’ont pas tout perdu de leur actualité ! Si tel était le cas, d’ailleurs, serai-je royaliste et partisan d’une magistrature suprême de l’Etat « libre et active » ?
De plus, en tant qu’historien, il m’intéresse aussi de voir où en est la recherche sur les royalismes français du XXe siècle, et comment, désormais, ils s’inscrivent dans le temps des historiens et dans la « mémoire savante ».
Autant de raisons, historiques et politiques, dans lesquelles le sentiment n’est pas très loin non plus, qui fondent mon impatience : vivement mercredi après-midi que le colloque commence…
01:23 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : royalisme, action française, colloque, maurras, de jouvenel, balandier, renouvin.