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25/03/2013

Promenade printanière aux Champs-Elysées...

 

« La Manif pour tous » de ce dimanche 24 mars a réuni des foules très importantes dont le nombre exact de participants s’approche sans doute plus du million et au-delà que des 300.000, chiffre avancé par la préfecture de police sans beaucoup de conviction. Lors de cette réunion géante, des discours fort intéressants et parfois surprenants y ont été prononcés, qui mériteraient d’être écoutés plus précisément et débattus, quelle que soit l’opinion que l’on puisse avoir sur le sujet du mariage nouveau et de ses conséquences.

 

Mais, au-delà du « fond » de la discussion et des prises de parole, il y a eu ce que les journalistes étrangers ont beaucoup plus sévèrement jugés que les médias hexagonaux : les « débordements » et la « répression », toutes choses dont j’ai personnellement été le témoin, un témoin loin d’être indifférent à la situation en question.

 

Arrivé en retard à ce rassemblement, je suis descendu à la station de métro Kléber et j’ai suivi le flot de drapeaux bleus, blancs, roses, égayé aussi de drapeaux tricolores français et de ceux des provinces de France : d’ailleurs, difficile de faire autrement, encadré par des forces de l’ordre à la fois débonnaires et impressionnantes. En quelques minutes, alors que je voulais rejoindre le gros de la manifestation pour écouter les discours, je me suis retrouvé à l’ombre d’un Arc de triomphe visiblement fermé au public, tout comme les sorties de métro qui y mènent, et au milieu d’une foule bigarrée mécontente et frustrée de ne pouvoir ni défiler sur les Champs (transformés en camp retranché sur une partie de l’avenue, avec grilles, camions, boucliers et forces de l’ordre lourdement équipées) ni passer du côté de la manifestation officielle…

 

Personnellement, quand je me promène dans la rue, manifestation ou pas, j’arbore une belle fleur de lys sur ma chemise ou ma veste, et cela était le cas, ce dimanche comme les autres jours : je dois avouer que, à la fin de la journée, j’avais encore plus de raisons d’être royaliste que d’ordinaire… J’avais aussi sous le bras ma pochette remplie de journaux, papiers, livres, et… copies d’élèves ! Et, dans la poche, ma plaque de Camelot du Roi que Guy Steinbach m’a remise il y a plus d’une vingtaine d’années déjà, une sorte de talisman que je garde par devers moi les jours d’épreuve et qui me rappelle, à son contact, mes devoirs de militant et d’homme d’honneur

 

Soudain, une odeur âcre envahit le lieu et je vois tomber des jeunes et des moins jeunes devant et à côté de moi tandis qu’une clameur monte vers le ciel : « ils gazent ! ». Des gens courent, cela hurle, tousse, pleure… « Les salauds », disent certains : mais non, ce ne sont pas eux, les CRS ou les policiers en civil, qu’il faut seulement dénoncer, même si c’est bien eux qui vident leurs bonbonnes de gaz sur les manifestants, mais c’est contre ce « désordre établi » qui gouverne et qui est le vrai coupable, cette République qui ne veut rien entendre de ce que les gens ont à dire et qui confisque, à chaque élection, les désirs des citoyens au fond de ses urnes qui ont cessé d’être magiques et miraculeuses !

 

La suite des événements n’a fait que confirmer mes craintes : une répression classique qui nous rappelle que, malgré ses grands principes affichés, « la République gouverne mal, mais elle se défend bien », comme l’affirmait déjà Anatole France du temps de la IIIe République, celle-là même née de l’écrasement de la Commune de Paris et si peu soucieuse d’écouter les catholiques et les ouvriers du pays.

 

En tout cas, ce soir-là, dans la fumée des lacrymogènes et les lueurs blafardes des lumières des Champs, alors que les touristes effarés contemplaient le spectacle d’une dispersion violente de manifestants qui, visiblement, n’étaient pas venus pour en découdre mais beaucoup plus pour faire entendre leur voix, leurs voix, des vocations militantes sont nées : en quelques heures, ce sont des dizaines de jeunes (et moins jeunes) avec lesquels j’ai discuté, parfois que j’ai calmé, consolé ou conseillé, voire enguirlandé quand les slogans n’étaient pas adaptés à la situation (le slogan « Hollande démission » n’avait guère de sens, car ce n’était pas le sujet, et cela même si je peux comprendre la colère de jeunes choqués –à tous les sens du terme- par la répression)… Certains ont compris que le combat n’était pas que physique ou esthétique : ils vont réfléchir, lire, discuter, fourbir des arguments et creuser, peut-être, de nouvelles pistes intellectuelles et politiques. Ils se rappelleront, pour certains, ce que je leur ai dit, sur le bord du trottoir, au milieu de la rue ou dans le métro. L’un d’entre eux portait un nom qui est cher au cœur des royalistes, mais chut ! Il y aura des surprises, bientôt…

 

Hier dimanche, il faisait froid sur les Champs. Pourtant, aux arbres, l’on voyait des bourgeons… Aux arbres, et sur le macadam, sans doute !

 

Au plus près des barrages, en haut des Champs, un vieil homme était assis sur son pliant, insensible aux gaz qui le cernaient et parfois le visaient : il portait une longue perche à laquelle il avait accroché un drapeau blanc frappé du sacré-cœur, un drapeau chouan qui a dominé la scène de longues heures. M’approchant de lui pour le féliciter de son calme courage, il me sourit et me dit : « en ce dimanche des Rameaux, je ne me voyais pas brandir un autre drapeau »… Tout était dit : reste à faire, maintenant !

 

Un peu plus loin, devant un car de CRS, un officier regroupait ses hommes, visiblement fatigués. Au moment où je passais, s’adressant à ses hommes, il eut ces mots surprenants et, en somme, si révélateurs de la situation de notre pays, en ce dimanche comme depuis si longtemps : « Bon, pas de blessures, à part la fracture au moral ! ». Oui, « fracture au moral », c’étaient ses mots ! Il y aurait tant à dire sur ces quelques mots apparemment si simples… Mais c’est ce genre de fracture, aujourd’hui étendue à toute la société, qu’il s’agit de réduire, et au plus vite !