Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

01/12/2017

La Pologne pour le repos dominical.

Je suis toujours surpris de constater comment certaines informations, pas forcément négligeables, sont littéralement occultées dans notre pays, comme si elles dérangeaient l'ordre bien établi des idées reçues et de l'idéologie dominante. Ainsi, la décision de la Pologne de « supprimer le travail dominical » comme le titre, pour un court article, Le Figaro en pages économie, information qui ne peut laisser indifférent les royalistes sociaux, héritiers d'Albert de Mun, grand défenseur des ouvriers et promoteur infatigable du repos dominical combattu par les républicains libéraux et anticléricaux.

 

Ce n'est d'ailleurs pas la première fois que la Pologne se fait remarquer par des décisions législatives qui prennent le contre-pied du libéralisme ambiant en Union européenne : il y a pratiquement un an, le même gouvernement polonais, considéré comme « conservateur » et « eurosceptique », a fait voter par le Parlement la retraite à 65 ans pour les hommes et à 60 ans pour les femmes, revenant sur la précédente réforme des retraites mise en place par l'actuel président du Conseil européen, le libéral Donald Tusk, qui avait reculé l'âge de la retraite à 67 ans en 2012. Si cela ne fait pas des monarchistes sociaux français des partisans des dirigeants polonais, fort peu sensibles à la question écologique et favorables aux formes actuelles d'un « travail détaché » qui permettent une concurrence déloyale en Europe de leurs entreprises, ces récentes mesures sur les retraites et sur la fin du travail dominical nous interpellent favorablement : d'ailleurs, ne faudrait-il pas plutôt évoquer le « repos dominical », formule plus sociale en elle-même qu'un travail du dimanche qui, partout où il est libéralisé, se banalise et se dévalue, financièrement parlant, après quelques années ?

 

La mesure adoptée par le Parlement polonais et souhaitée par le syndicat Solidarnosc, celui-là même qui a contribué à la fin de la dictature communiste dans les années 1980, n'est pas, pour autant, une mesure extrémiste puisqu'elle se mettra en place progressivement et qu'elle souffrira quelques exceptions légitimes, comme le signale Le Figaro économie du lundi 27 novembre : « A compter du 1er mars, les magasins seront ouverts seulement le premier et le dernier dimanche du mois et, à partir du 1er janvier 2019, le dernier dimanche seulement. En 2020, le commerce dominical sera supprimé sauf pour les stations-service, les gares, les boulangeries, les pâtisseries et la livraison des achats sur Internet. » Sans doute faudrait-il ôter de cette liste le dernier élément qui ne me semble pas non plus indispensable mais l'idée générale est bonne et la décision prise par les députés polonais juste et éminemment sociale, même si elle ne sera sans doute pas immédiatement comprise d'une part de la jeunesse désormais habituée à une « immédiateté consommatrice » peu soucieuse du « partage familial ». Cette mesure s'inscrit néanmoins dans la nécessaire « dé-marchandisation » du temps qu'il me paraît utile de promouvoir, en rupture avec la logique de Benjamin Franklin, celle résumée par la célèbre et maudite formule « Le temps c'est de l'argent ».

 

En somme, il ne serait pas inutile que les éléments de ce programme polonais puissent s'appliquer, avec toutes les particularités qui nous sont propres en tant que nation, à la France : cela serait juste et rappellerait que l'économie doit, d'abord, être au service des hommes au lieu que d'être le serviteur du seul argent...

03/12/2014

Le travail du dimanche : pas d'accord !

 

Il est des débats qui reviennent régulièrement sur le devant de la scène politique et sociale : ainsi, le travail du dimanche, nouvelle marotte des libéraux qui peuplent le gouvernement et squattent les aéroports. L'assaut a été redonné il y a quelques semaines par l'actuel ministre de l'économie, ce M. Macron qui nous vante les bienfaits de la mondialisation et oublie de se rendre au salon du Made in France, sans doute trop « nationaliste » pour lui...

 

L'argument des partisans de l'ouverture des magasins le dimanche est toujours le même : donner à ceux qui le veulent la possibilité de travailler ce jour-là pour que les consommateurs puissent consommer, la consommation étant un nouveau droit (devoir, même, si l'on en croit les grands manitous de la croissance...) de l'homme moderne. Ainsi, M. Macron et ses amis, en dignes héritiers d'un Mai 68 qui a surtout libéré le capitalisme des traditions qui gênaient encore son expansion, veulent-ils « Tout, et immédiatement ! » : « Jouir sans entraves », slogan qui se voulait contestataire est devenu le meilleur argument des parangons des libéraux et des consommationnistes de toutes les obédiences ! Sans l'entrave des traditions héritées d'un passé (pas si) lointain où le temps n'était pas encore condamné à n'être compté qu'en argent ; sans l'entrave d'une longue histoire sociale qui, au XIXe siècle déjà, n'a été que le dur combat des catholiques sociaux et des syndicalistes pour retrouver quelques droits que la Révolution et les lois socialicides de 1791 avaient supprimés, déjà au nom de « la liberté du travail » ; sans l'entrave d'une vie familiale qui se joue à plusieurs et non dans la seule solitude de l'individu enfermé dans son ego... Toutes ces entraves que ne supportent plus les Macron et autres forcenés de l'individualisme consumériste : « la consommation est libre, la consommation vous rend libre », pourraient-ils clamer en cœur, la main sur le portefeuille et les yeux sur le CAC 40 !

 

Ont-ils déjà gagné ? Dans son édition du mardi 2 décembre, le quotidien La Croix rapportait que, en 2011, 29 % des salariés ont travaillé le dimanche (contre 20 % en 1990), dont près de la moitié de manière habituelle : une proportion qui me semble augmenter régulièrement, au regard des magasins qui, à Versailles et au Chesnay, se mettent à leur tour à ouvrir leurs portes régulièrement et définitivement, en particulier ceux des grandes enseignes alimentaires qui prennent de plus en plus de clients aux commerçants du marché matinal... Ainsi, le travail dominical, hier exceptionnel et réservé à quelques activités, principalement alimentaires et artisanales (qui s'arrêtaient d'ailleurs à l'heure du déjeuner), et aux domaines de la sécurité et de la santé, devient-il une arme de destruction massive qui élimine les « petits » et « indépendants » au profit des enseignes et des multinationales de l'alimentaire et du luxe... Ce qui devrait rester une exception, en devenant une habitude et, demain, une règle, transforme nos sociétés en vaste espace-temps consumériste dans lequel toutes les limites, familiales, sociales, voire religieuses, sont balayées devant la puissance de l'Argent et de ses épigones. Ce n'est pas la société que je souhaite pour mon pays, ni pour ceux que j'aime...

 

Le dimanche doit rester un jour « différent » des autres : s'il devenait égal aux autres, l'Argent aurait encore gagné du terrain sur nos vies, et la sinistre formule du plus sinistre des libéraux, Benjamin Franklin (dont il faudra bien, un jour, instruire le procès), ce fameux « Time is money » (« Le temps c'est de l'argent ») que je déteste au plus haut point, de toutes les fibres de mon être, verrait son aura maléfique grandir encore...

 

En 1814, le roi Louis XVIII « sacralisait » le dimanche, et proscrivait toute activité commerciale et financière ce jour : à bien y regarder, ce n'était pas qu'une mesure « religieuse » comme l'ont dénoncée les bourgeois de l'époque, furieux de voir remis en cause ce qui leur était acquis depuis la Révolution libérale de 1791, cette fameuse « liberté du travail » qui autorisait toutes les dérives et enchaînait les travailleurs aux détenteurs du Capital. Non, c'était aussi et d'abord, si l'on sait lire entre les lignes d'un roi plus habile et agile que sa corpulence pouvait laisser supposer, une mesure de justice sociale à l'égard des ouvriers et des artisans du pays.

 

Sacraliser socialement le dimanche ? Pourquoi pas, après tout, pour désacraliser un peu l'Argent et l'idéologie franklinienne...