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06/11/2018

Face à la démesure capitaliste, pour une justice sociale éminemment royale.

La justice sociale est une formule qui n'a plus guère d'écho dans notre société libérale-libertaire, semble-t-il, et c'est plutôt la démesure qui domine, au nom d'une liberté économique qui, de plus en plus aujourd'hui, peut se définir par la fameuse formule : « le renard libre dans le poulailler libre ». La question du travail dominical en est un exemple parmi d'autres, trop souvent imposé aux salariés sans grande contrepartie si ce n'est celle de ne pas être licenciés : quelques cas récents peuvent nous alerter là-dessus comme la volonté forte et insistante des grands magasins de la région rennaise de ne plus respecter les règles locales jusque là observées pour préserver les commerces de proximité et de centre-bourgs. Mais sans doute faut-il aussi évoquer l'ouverture désormais systématique des grandes surfaces les jours fériés, 14 juillet compris comme c'est le cas depuis moins de dix ans à Parly2, aux portes de Versailles, et dans la plupart des enseignes de la Grande Distribution, malgré les réticences d'un personnel qui, en définitive, n'a plus vraiment son mot à dire. Et les consommateurs valident, en grande partie, ces ouvertures tandis que les opposants sont rabroués comme « mauvais coucheurs » ou « réactionnaires », voire « fainéants », et qu'est toujours mis en avant « le choix » qui, pourtant, n'en est plus un pour la grande majorité des salariés, si l'on excepte les étudiants qui peuvent voir en ces ouvertures dominicales une occasion de payer leurs études, et ce qui nous renvoie à ce souci, qui grandit parmi les préoccupations des parents et de leurs enfants, du financement des études, le système des bourses arrivant à épuisement...

 

Pendant ce temps, comme le rapporte Marianne dans son édition du 2 novembre 2018, « les PDG du CAC 40 ont touché en moyenne 5,1 millions d'euros annuels (+14 % en un an), soit environ 14.000 euros par jour ». En fait, ce n'est pas l'importance du revenu journalier ou annuel de ce petit nombre de grands patrons qui choque mais bien plutôt les 14 % supplémentaires en un an quand, dans le même temps, les salariés des magasins ou les ouvriers d'usine, parfois leurs propres employés, mais aussi les retraités, voient leurs revenus, sinon diminuer, du moins progresser de façon beaucoup plus modeste alors que les efforts demandés par l’État, à travers les taxes diverses et les prix des carburants, par exemple, ne cessent d'augmenter et d'agacer nos compatriotes. N'est-ce pas au risque de nourrir des colères peut-être difficiles à maîtriser, que cela soit dans la rue ou dans les urnes, nouveaux pavés des contribuables-électeurs ?

 

Soyons clair : les 14 % supplémentaires en un an, c'est bien cela qui ne passe pas, surtout quand l'on entend les justifications de certaines élites et que l'on constate le mépris de ces catégories dites supérieures qui, de plus, ont cessé d'abonder les caisses des associations caritatives le jour où les hauts revenus ont été exemptés de certains impôts qui pesaient sur eux, en particulier de l'ISF sur les revenus d'actions boursières ! Preuve que leur générosité n'était pas vraiment sincère, ce qui peut nous alerter sur leur égoïsme profond et leur absence de solidarité civique et financière avec le pays qui les accueille et, souvent, leur a permis, par l'éducation financée par tous, d'accéder aux responsabilités ou d'en hériter sans déchoir. Comme le souligne ironiquement Marianne, dans le cas de ces revenus si élevés en comparaison de ceux des Français communs, « nul ne crie au « coût du travail » excessif. L'expression est réservée à ceux qui sont en bas de l'échelle salariale et qui se heurtent à un ascenseur social bloqué au sous-sol », preuve supplémentaire s'il en faut que ce n'est pas l'intérêt de l'économie nationale qui importe mais « leurs intérêts » avant ceux des autres, avant ceux de la majeure partie des Français qui n'en peuvent plus du nouveau choc fiscal et des inégalités si énormes qu'elles en deviennent des injustices sociales, à ce titre éminemment condamnables, autant sur le plan économique que sur le simple plan de la décence commune.

 

C'est bien la démesure, la fameuse hubris dont se méfiaient les Grecs anciens, qui appelle une réaction politique, non pour empêcher la libre initiative ou instaurer une quelconque dictature collectiviste, mais pour remettre un peu de justice sociale dans une économie devenue parfois trop sauvage pour que les hommes puissent s'en accommoder. En cela, la revendication d'une Monarchie sociale et son instauration, souhaitable dans les meilleurs délais possibles, ne sont pas de simples facilités de plume et de papier (qui souffre tout, dit-on), mais une nécessité institutionnelle pour rendre à l’État l'autorité nécessaire et crédible pour imposer ce qui n'est que justice sociale aux féodalités contemporaines : des revenus décents pour les salariés et une limitation des excès du petit monde de la Finance et de la Grande Industrie.

 

 

 

 

 

01/12/2017

La Pologne pour le repos dominical.

Je suis toujours surpris de constater comment certaines informations, pas forcément négligeables, sont littéralement occultées dans notre pays, comme si elles dérangeaient l'ordre bien établi des idées reçues et de l'idéologie dominante. Ainsi, la décision de la Pologne de « supprimer le travail dominical » comme le titre, pour un court article, Le Figaro en pages économie, information qui ne peut laisser indifférent les royalistes sociaux, héritiers d'Albert de Mun, grand défenseur des ouvriers et promoteur infatigable du repos dominical combattu par les républicains libéraux et anticléricaux.

 

Ce n'est d'ailleurs pas la première fois que la Pologne se fait remarquer par des décisions législatives qui prennent le contre-pied du libéralisme ambiant en Union européenne : il y a pratiquement un an, le même gouvernement polonais, considéré comme « conservateur » et « eurosceptique », a fait voter par le Parlement la retraite à 65 ans pour les hommes et à 60 ans pour les femmes, revenant sur la précédente réforme des retraites mise en place par l'actuel président du Conseil européen, le libéral Donald Tusk, qui avait reculé l'âge de la retraite à 67 ans en 2012. Si cela ne fait pas des monarchistes sociaux français des partisans des dirigeants polonais, fort peu sensibles à la question écologique et favorables aux formes actuelles d'un « travail détaché » qui permettent une concurrence déloyale en Europe de leurs entreprises, ces récentes mesures sur les retraites et sur la fin du travail dominical nous interpellent favorablement : d'ailleurs, ne faudrait-il pas plutôt évoquer le « repos dominical », formule plus sociale en elle-même qu'un travail du dimanche qui, partout où il est libéralisé, se banalise et se dévalue, financièrement parlant, après quelques années ?

 

La mesure adoptée par le Parlement polonais et souhaitée par le syndicat Solidarnosc, celui-là même qui a contribué à la fin de la dictature communiste dans les années 1980, n'est pas, pour autant, une mesure extrémiste puisqu'elle se mettra en place progressivement et qu'elle souffrira quelques exceptions légitimes, comme le signale Le Figaro économie du lundi 27 novembre : « A compter du 1er mars, les magasins seront ouverts seulement le premier et le dernier dimanche du mois et, à partir du 1er janvier 2019, le dernier dimanche seulement. En 2020, le commerce dominical sera supprimé sauf pour les stations-service, les gares, les boulangeries, les pâtisseries et la livraison des achats sur Internet. » Sans doute faudrait-il ôter de cette liste le dernier élément qui ne me semble pas non plus indispensable mais l'idée générale est bonne et la décision prise par les députés polonais juste et éminemment sociale, même si elle ne sera sans doute pas immédiatement comprise d'une part de la jeunesse désormais habituée à une « immédiateté consommatrice » peu soucieuse du « partage familial ». Cette mesure s'inscrit néanmoins dans la nécessaire « dé-marchandisation » du temps qu'il me paraît utile de promouvoir, en rupture avec la logique de Benjamin Franklin, celle résumée par la célèbre et maudite formule « Le temps c'est de l'argent ».

 

En somme, il ne serait pas inutile que les éléments de ce programme polonais puissent s'appliquer, avec toutes les particularités qui nous sont propres en tant que nation, à la France : cela serait juste et rappellerait que l'économie doit, d'abord, être au service des hommes au lieu que d'être le serviteur du seul argent...

30/09/2013

Non à l'extension de l'ouverture dominicale des grandes surfaces !

 

La question du travail le dimanche revient sur le devant de la scène sociale, mais dans de mauvaises conditions pour le débat sur ce sujet, au regard de la situation de l’emploi en France et dans le cadre d’une société de consommation qui survalorise la croissance quantitative quand il faudrait penser plutôt en termes qualitatifs, et pas forcément en termes de croissance, comme le rappelait Patrice de Plunkett dernièrement.

 

J’ai déjà écrit ici mes réserves, voire mon hostilité marquée au travail le dimanche, plus précisément pour le secteur de la Grande distribution, tout comme je dénonce régulièrement la disparition des jours fériés dans ce même secteur, le plus souvent au détriment des salariés eux-mêmes : on pourra le constater encore le jour de la Toussaint, cette année un vendredi, et le 11 novembre, un lundi… Ne restent plus fériés que Noël et le Jour de l’An dans le calendrier des grandes surfaces ! Toutes les autres fêtes, jadis occasions de fermetures, sont oubliées, et c’est la même affichette que l’on retrouve sur la porte de Parly2 et de beaucoup d’autres : « ouverture exceptionnelle » (sic !) quand c’est la fermeture qui, elle, est devenue exceptionnelle, voire rare !

 

Pour en rester à la question de l’ouverture ou de la fermeture le dimanche des magasins, plusieurs points sont discutés sur lesquels il n’est pas inutile d’y revenir : d’abord la question de l’emploi, évidemment primordiale en ces temps de chômage de masse structurel. Ainsi, les partisans de l’ouverture dominicale arguent que celle-ci permettrait la création de nombreux emplois, entre 32.000 jusqu’à 102.000 si l’on se réfère aux exemples des pays étrangers qui ont libéralisé l’ouverture des magasins le dimanche (Canada, Etats-Unis, etc.) : néanmoins, dans un article paru samedi 28 dimanche dans les pages économie du « Figaro », Cécile Crouzel relativise cette projection mirifique : « Reste que tout dépendrait de la souplesse des nouvelles règles et du nombre de magasins concernés. Les effets pourraient être différents selon les secteurs, une étude du Credoc de 2008 ayant estimé que 6.800 à 16.200 emplois postes seraient détruits dans l’alimentaire, les grandes surfaces cannibalisant le petit commerce. » J’ai d’ailleurs constaté que, lorsque Parly2 (grand centre commercial aux portes de Versailles) est ouvert les dimanche précédant Noël ou lors des soldes, le marché dominical de Versailles, mais aussi celui, un peu plus lointain, de Saint-Germain-en-Laye, étaient beaucoup moins attractifs et fréquentés : la déperdition de fréquentation du marché de Versailles a été estimée à environ 30 % (près d’un tiers d’un dimanche habituel !), ce qui est énorme ! Il est à noter que, depuis l’ouverture dominicale de plusieurs petites et moyennes surfaces alimentaires le dimanche de 9 heures à 13 heures (celles-ci appartenant à de grands groupes de distribution…), une partie des jeunes consommateurs s’est détournée du marché traditionnel pour lui préférer le « leader price » ou le « franprix » le plus proche… Au bout, ce sont effectivement les revenus des maraîchers ou des marchands de produits alimentaires frais qui stagnent dans le meilleur des cas, mais qui baissent la plupart du temps, au risque de se répercuter en définitive sur l’emploi…

 

Certains m’objecteront que je défends, par mon raisonnement, le travail dominical des uns au détriment de celui des autres : effectivement, mais comme une forme d’exception traditionnelle (légalisée depuis la loi de 1906) et comme moyen de rétablir un certain équilibre économique et social entre les « petits » et les puissants de la Grande distribution. De plus, ce travail dominical doit, à mon avis, rester l’exception et ne pas devenir la nouvelle norme, ce qui risquerait, d’ailleurs, d’entraîner la fin des avantages salariaux aujourd’hui valorisés par les partisans de l’ouverture dominicale…

 

De plus, l’ouverture des grandes surfaces le dimanche a des conséquences sur la structure même de l’emploi, qu’elle précarise, quand on y regarde de plus près : comme le souligne Cécile Crouzel, « Bref, il y aurait des créations d’emplois mais à temps partiels. » Etudiants ou précaires seraient donc le vivier dans lequel les grandes enseignes de la Distribution piocheraient pour ouvrir, à moindre frais, leurs magasins le dimanche… C’est d’ailleurs déjà le cas comme l’avouent benoîtement les professionnels du secteur : ce qui permet une main d’œuvre renouvelable et bon marché, très flexible et relativement peu exigeante sur les conditions sociales du travail puisque destinée à ne rester que quelques années, voire quelques mois dans ce genre d’emploi. Ce qui, surtout, permet aux employeurs de ne pas augmenter les salaires des employés diurnes et « habituels », des salaires qui sont fort peu élevés, souvent autour du SMIC (environ 1.121 euros net mensuels)…

 

De plus, dans la Grande distribution, l’heure est aussi, dimanche ou pas, à la réduction pérenne des effectifs et chacun a pu constater la multiplication des « machines à payer » qui, en définitive, visent à remplacer, à plus ou moins long terme, les hôtesses (et hôtes…) de caisse : un cadre d’une enseigne fort connue dans le domaine culturel m’a récemment confirmé que cette tendance lourde n’avait pas vocation à s’inverser prochainement…

 

Dernier point (provisoire…) : il est intéressant de noter que l’Allemagne, dont les libéraux vantent tant les mérites par ailleurs, et qui semble se porter mieux que notre pays sur le plan de l’emploi et de l’économie en général, n’autorise pas l’ouverture des commerces le dimanche ! Apparemment, cela ne freine guère sa consommation intérieure ni ne l’empêche d’être la première puissance économique de l’Union européenne