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27/01/2015

La Grèce et l'Europe...

 

La Grèce fait peur, une fois de plus : non pas que les Hellènes nous menacent d'une invasion mais plutôt d'une implosion du système de l'union monétaire européenne, à en croire les élites libérales et la Commission européenne elle-même qui oscille entre ton d'une rare fermeté et une certaine prudence, comme pour ne pas insulter l'avenir mais en se préparant à une confrontation musclée avec le gouvernement de la Gauche radicale issu des urnes grecques.

 

Bien sûr, et c'est le discours officiel que l'on entend partout dans les sphères bruxelloises, les Grecs ont exagéré, par le passé : ils ont cru que la société de consommation que venait leur « offrir » la Communauté économique européenne (devenue Union européenne au début des années 1990) était un cadeau que l'on n'oserait pas leur reprendre puisque « l'Europe », c'était la paix, la prospérité et, surtout, la solidarité, et qu'ils en profiteraient toujours... Cadeau empoisonné car la société de consommation et de croissance ne fait jamais rien gratuitement et ce qu'elle « offre » un jour devient la dette du lendemain. Les Grecs, tout heureux d'être acceptés dans cette Europe à laquelle ils avaient donné son nom à travers un mythe ancien, ont joué les cigales et, croyant les européistes qui annonçaient à longueur de colonnes la fin des États remplacés par une Europe fédérale bruxelloise, n'ont rien fait pour construire un État, des institutions et un appareil politiques dignes de son histoire et de son destin. Mais, quand manque l’État, le chaos n'est pas loin, conjugué à l'injustice et à la corruption : c'est d'ailleurs une leçon que la Grèce, depuis l'Antiquité, nous donne à travers sa propre histoire.

 

La Grèce a connu une véritable descente aux enfers durant ces dernières années : bien sûr, elle avait fauté mais le châtiment n'était-il pas, en fait, injuste car frappant tous les Grecs et non, d'abord, les responsables politiques et économiques du pays qui l'avaient, par démagogie et carriérisme, mené à la catastrophe ? Certains me rétorqueront que les électeurs étaient tout aussi coupables que ceux qu'ils avaient élus, justement parce que, par le simple jeu démocratique et électoral, ils les avaient portés au pouvoir... Certes ! Mais, dans ce cas, que la démocratie est brutale ! Or, la politique n'a pas pour seul but de sanctionner mais de décider, de guider, mais aussi d'accorder les citoyens entre eux, de leur apporter les « hautes conditions du bonheur », non le Bonheur totalitaire d'un Saint-Just, mais celui qui permet l'harmonie du corps social et des citoyens avec le monde environnant, ce bonheur qui se conjugue au pluriel...

 

Peut-on oublier, aussi, que les institutions de l'Union européenne elle-même sont fautives puisqu'elles savaient qu'il y avait, au moment de l'entrée dans la zone euro, tricherie de la part du gouvernement grec d'alors, une tricherie facilitée par les banques dont la fameuse Goldman Sachs ? Mais il fallait alors que l'euro fasse rêver, car cette monnaie unique avait été présentée aux peuples comme cette solution-miracle qui allait, c'était certain, écarter tout risque de crise et assurer le plein-emploi et la prospérité au continent tout entier : on sait désormais que, s'il y avait tricherie, c'est d'abord et surtout de la part d'une Union européenne qui a menti pour faire avancer ses projets sans possibilité future de recours pour les États qui s'étaient engagés dans ce que l'on peut nommer l'aventure, sans que celle-ci soit vraiment assurée d'être heureuse... L'Europe a construit, par idéologie, son malheur et celui de ses peuples : que le peuple grec, abusé à la fois par sa classe politicienne indigne et par une Union européenne arrogante, décide désormais de « changer la donne » en rejetant bruyamment ses anciens partis dominants et en brandissant le poing devant le nez de « l'Europe », n'a rien, en définitive, de surprenant. Je ne suis pas certain que l'on puisse, malgré les errements anciens, l'en blâmer... Mais il est fort possible qu'il donne des idées à d'autres peuples d'Europe, ceux-là qui, d'ordinaire, désertent les urnes européennes pour mieux maugréer en vain contre un système qui leur échappe ou qui, déjà, s'en servent comme pavés pour se rappeler au bon souvenir des classes dirigeantes, nationales comme bruxelloises. En ce sens, la Grèce fait peur aux oligarchies qui, trop longtemps, ont cru qu'elles pourraient éternellement imposer leurs vues aux électeurs, au nom et par le moyen d'une démocratie représentative qui n'est pas celle que les Athéniens de Clisthène et de Périclès pratiquaient... Quand le royaliste Bernanos dénonçait la démocratie libérale comme le moyen politique du capitalisme de manœuvrer et dominer les foules, il visait juste ! Que, brusquement, ce système électoral se retourne contre ceux qui en vivaient et s'en servaient cyniquement pour légaliser leur domination, et voila que les masques tombent et que l'Union européenne s'inquiète ! Quoi ? Un peuple en dissidence ? Si ce n'est pas encore une révolution, c'est, assurément, une révolte... Où mènera-t-elle ? Nous verrons bien, et nous nous gardons, prudemment, d'en faire un modèle : regardons-la comme une expérience intéressante et, à coup sûr, instructive quelle que soit sa destinée. Mais, à défaut d'être nôtre, elle nous est un rappel que, en politique, rien, jamais, n'est impossible : une leçon que, en bons empiristes organisateurs, les royalistes ont retenu et ont bien l'intention, à leur tour et pour notre pays, de mettre en pratique...

 

 

 

 

 

 

 

23/01/2015

Liberté, déjà oubliée ?

 

Le 11 janvier était censé ouvrir une grande période de fraternité et certains de mes proches y ont cru, en toute bonne foi : après tout, défiler pour la liberté d'expression, pour la paix, l'amour entre les communautés, la générosité, quoi de plus honorable ? Alors, pourquoi pas ? Quant à moi, je suis de naturel méfiant à l'égard des grands discours et sans doute encore plus à l'égard des grands principes, surtout quand ils sont claironnés par les « hommes de peu de foi » qui gouvernent, intellectuellement ou politiquement, notre société contemporaine : les Bernard-Henri Lévy et leur hypocrisie dégoulinante me révulsent, et je connais trop bien, historiquement et personnellement, les conséquences de leurs engagements qui se font avec le sang des autres... Ces derniers jours confirment, en tout cas, mes craintes : l'air devient irrespirable depuis que M. Valls, nouveau « lider maximo » de la République, impose son rythme et son catéchisme républicain, repris en chœur par les « autorités morales » du pays et son ministre de l’Éducation nationale !

 

Le défilé du dimanche 11 janvier n'était-il, en fait, que le cortège funèbre d'une liberté que l'on clamait bruyamment pour mieux la faire taire ? J'en suis, moins de deux semaines après cette marche unanimiste, intimement persuadé ! Quelques éléments de preuve ? Alors que l'on demandait la liberté de dessiner ce dimanche-là, cette République si tolérante fait retirer un film de l'affiche de deux cinémas, à Neuilly et à Nantes : « L’Apôtre », qui raconte la conversion d'un jeune musulman au catholicisme, film de Cheyenne Carron, risque, selon la DGSI, de « provoquer » la communauté musulmane car ce film évoque une « apostasie », « crime » puni de mort par l'islam selon la lecture rigoriste des intégristes... Or, ce film, plutôt bien reçu par les critiques cinématographiques se veut, selon sa réalisatrice, « un film qui parle d'amour », et cette dernière rajoute : « Au lieu de l'interdire, on devrait le projeter dans les mosquées radicales ». J'ai envie d'ajouter : « et dans les écoles ! » D'ailleurs, ce film était présenté depuis quelques mois dans les salles de cinéma françaises, et cela sans un seul incident ! Pourquoi, d'un coup, les craintes de la DGSI ? Quelle hypocrisie ! Au lieu de préserver la liberté de création et de représentation cinématographique, l’État préfère censurer « pour votre sécurité » (sic !)... Et où sont ceux qui, la veille encore, ne juraient que par la liberté d'expression, l'obligation de la défendre, le devoir (ou la simple possibilité) de tout dire, de tout montrer ? Silence pesant des organisateurs du 11 janvier, comme un aveu : une pierre tombale sur laquelle on pourra inscrire, comme sur celles qui ornent les frontons des mairies, « liberté »...

 

Et pendant ce temps-là, le ministre de l’Éducation nationale, Madame Vallaud-Belkacem, annonce que les nouveaux professeurs devront passer une sorte d'examen pour s'assurer de leur rectitude « républicaine » : il me semblait que c'était d'autres régimes que ceux qui se proclament démocratiques qui avaient recours à de telles mesures de contrôle idéologique... D'ailleurs, imagine-t-on la Belgique ou le Royaume-Uni faire passer à leurs enseignants un examen pour vérifier leur attachement aux « valeurs de la Monarchie » ? Si tel était le cas, on crierait, et à juste raison, « à la dictature » ou, au moins, à l'inacceptable contrainte politique... Mais la République, sûre de son bon droit et de son universalité, ne se pose pas de tels problèmes de conscience, semble-t-il.

 

Il aurait été plus acceptable d'évoquer les valeurs civiques ou, mieux encore, celles de la France, non pas sur le seul plan de la République en place mais au regard de toute son histoire et de la civilisation qu'elle a, au fil de ses différentes incarnations institutionnelles, su développer et, parfois, promouvoir, autour de la francophonie et de ses traditions de liberté, de discussion ou d'amitié. Alors, pourquoi vouloir à tout prix « républicaniser » ou idéologiser à outrance ce qui peut se vivre sans étiquette partisane et qui dépasse joyeusement les barrières que la République voudrait, à tort, imposer ? Je connais bien des républicains qui comprennent ce que je dis et qui partagent ce point de vue : ce sont ceux qui savent que, pour être royaliste, on n'en est pas moins français, comme un Bernanos ou un d'Estienne d'Orves qui, dans les heures sombres de l'histoire, ont trouvé dans leur royalisme de quoi nourrir leur vive et noble, parfois mortelle, résistance à la barbarie nazie...

 

On pourrait dire, en plagiant Aragon, « Ceux qui croyaient en la République, et ceux qui n'y croyaient pas »... Ce qui importe, encore et toujours, et malgré les exclusions de Madame Vallaud-Belkacem, c'est bien cet amour de la France qui est indéfectiblement inséparable de celui de la liberté de l'esprit. La liberté, pas celle toute racornie d'un Valls persuadé que la France commence en 1789, mais celle qui a donné son nom à notre pays et que l'on respire à pleins poumons, et qui nous fait clamer à la face de cette République et de ses tristes sires et sœurs, comme jadis notre cher Maurice Clavel : « Messieurs les censeurs, bonsoir ! »

 

 

 

20/01/2015

Drôle d'union sacrée...

 

Après les événements du mercredi 7 janvier, le Chef de l’État, dans son rôle (et il faut reconnaître qu'il l'a bien tenu, comme transcendé par la tragédie), prônait l'unité nationale, en appelant à une « union sacrée » qui rappelait celle d'il y a un siècle, au soir de l'entrée de la France en guerre. A l'époque, les Français, pourtant fort divisés en cette « Belle époque » dont le terme n'apparaîtra qu'en comparaison des malheurs du moment, avaient répondu massivement présents sans barguigner, quelles que soient leurs idées : à bien y regarder, la République, elle, avait sans doute quelques arrières-pensées, et la suite le démontrera quand elle présentera la victoire acquise sur le champ de bataille comme celle de la République et de ses valeurs, véritable escroquerie intellectuelle et historique dont nous ne sommes pas encore sortis. Les royalistes (entre autres), dont les noms sont fort nombreux sur les monuments aux morts, y compris sur les plaques du lycée Hoche, ont fait leur devoir, comme les autres, la rage au cœur, parfois, d'avoir annoncé bien avant tout le monde la catastrophe de ces « jeunes Français couchés froids et sanglants sur leur terre mal défendue » sans avoir, alors, été écoutés : mais l'essentiel, la France, avait été sauvée, et c'est ce qui comptait, d'abord ! En tout cas, au soir de la mobilisation contre l'Allemagne menaçante, la République et ses administrations n'avaient pas fait la fine bouche devant ces pires ennemis des « valeurs de la République »...

 

Un siècle après, il s'est trouvé des socialistes pour exclure environ un quart du corps électoral de l'union nationale voulue par le président Hollande, et l'exclure au nom de ces mêmes valeurs de la République : ainsi, le Front National était-il expulsé d'une communauté nationale à laquelle, pourtant, il semble bien appartenir, ne serait-ce qu'électoralement et légalement... Cette attitude sectaire d'un parti socialiste (ou, plutôt, de quelques uns de ses membres les plus partisans...) qui n'a guère brillé par clairvoyance ni par son esprit de tolérance ces dernières années, a créé une polémique là où les événements nécessitaient du sang-froid et un dépassement, même temporaire, des anciens clivages (ce qui n'impose pas, en fait, la fin de toute discussion...).

 

Dans le même temps, la marche contre le terrorisme qui aurait pu porter un nom politique sans être partisan, a été baptisée « marche républicaine » : dois-je comprendre qu'un vieux royaliste comme moi devait renoncer à sa propre identité politique pour être accepté dans le cortège du dimanche ? Cette marche, qui aurait du être « d'union nationale », « française » ou « civique », affirmait tout d'un coup une étiquette politicienne dont, qu'on le veuille ou non, j'étais, au moins formellement et sémantiquement, exclu ! Non, ne pas être républicain (bientôt un délit, à lire quelques appels de partis et de politiciens au lendemain du drame?) ne signifie pas être indifférent à la tragédie ou réticent à désigner les coupables ! D'ailleurs, en Belgique ou au Royaume-Uni, imagine-t-on une « marche royaliste » ou « royale » en pareilles circonstances ?

 

Au lendemain des grandes mobilisations, la vie a repris son cours et, dès le mercredi, l'unité nationale, invoquée autour de la liberté d'expression et contre les menaces qui pèsent sur elle, éclatait devant la publication de nouvelles caricatures de Mahomet par Charlie Hebdo, ce que confirmaient des sondages publiés dimanche, une semaine tout juste après la grande manifestation du 11 janvier : 42 % des Français souhaitaient que l'on ne représente plus Mahomet et 50 % que l'on limite la liberté d'expression sur la toile...

 

A bien y regarder, je suis de plus en plus persuadé que la République ne peut pas, ne sait pas unir au-delà de quelques instants tragiques comme ceux vécus en ce début de janvier : sans doute est-ce lié à sa nature « exclusive » qui, parfois inconsciemment, reproduit l'état d'esprit d'un Saint-Just pour lequel la République était la destruction de tout ce qui lui était opposé ou, en tout cas, la non-reconnaissance de ce qui n'est pas elle-même. Qu'on le veuille ou non, les monarchies qui nous entourent nous démontrent à l'envi qu'elles sont plus ouvertes et cohérentes, symbolisant par leur simple et parfois discrète existence l'unité nationale, dans la vie de chaque jour et dans les événements tragiques : qu'on se souvienne juste un peu de la présence à la fois réelle et éminemment symbolique de la famille royale anglaise au cœur des bombardements de Londres en 1940 ou de l'union immédiate autour du trône de Norvège après le massacre commis par le fanatique Breivik, il y a quelques années ! Mais qu'on se souvienne aussi des fêtes « nationales » que constituent les événements de la vie de la famille souveraine, des naissances aux mariages et, plus tristement, lors des deuils. Là, pas besoin d'en appeler à l'unité nationale : elle « est », tout naturellement, autour de la famille royale, et cela quelles que soient les idées (même républicaines...) des uns et des autres, des citoyens comme des dirigeants...