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09/12/2007

Société de consumation et politique.

Cette semaine était celle des devoirs sur table de mes classes de seconde, cette fois en géographie : les études d’ensemble documentaire portaient sur la marée noire du Prestige, celle de 2002 (sujet commun aux deux classes), mais aussi l’insécurité alimentaire dans le monde (pour l’une des secondes) et la sous-alimentation en Afrique (pour l’autre). Ces thèmes étaient, sont et risquent de rester pour longtemps encore, d’actualité, malheureusement : deux marées noires ont souillé le mois de novembre (sur les côtes américaines et en Mer noire) et « les Restos du cœur » viennent de rouvrir les portes ces dernières semaines tandis que plus de 820 millions de personnes souffrent quotidiennement de la faim dans le « Sud » (35 millions dans les pays du « Nord »)… Tristes réalités à l’heure où nos grands magasins regorgent des derniers produits « high-tech » ludiques et où les écrans de télévision débordent des publicités clinquantes pour l’inutile et le gadget…

En fait, je ne reproche pas à mes contemporains de vouloir s’amuser, mais je reproche à notre société d’être devenue, selon le mot de Philippe Murray, « distractionnaire », et de négliger ses devoirs à l’égard des plus faibles mais aussi des générations futures. Je lui reproche de n’avoir que la consommation comme fin alors que la qualité de la vie ne se mesure pas à la simple accumulation d’objets, Dieu merci. De plus, cette société de consommation qui s’étend avec tous ses excès à la Chine littorale et à l’Inde urbaine apparaît, de plus en plus, comme une société de « consumation » qui brûle plus d’énergie et de ressources végétales comme animales qu’il n’est raisonnable de le faire, au risque de faire peser sur les générations suivantes les conséquences redoutables de cette insouciance gaspilleuse, y compris la guerre, celle qui naît plus de l’envie encore que du simple manque.

Face à ces enjeux, que peut faire le Politique ? Il me semble qu’il lui revient de reconquérir le terrain qu’il a laissé prendre à l’Economique, en tout cas dans le domaine de la Décision. Si, en France, cela me paraît devoir passer par l’établissement d’une Monarchie à transmission héréditaire, symbole d’un Politique indépendant (mais non pas oublieux ou antagoniste) de la sphère économique, il est évident que cela ne suffira pas. Néanmoins, sans doute faut-il méditer cette phrase de Bernanos que Nicolas Hulot a repris à son compte dans ses déclarations récentes sur la valeur d’exemple et d’entraînement de la France sur la scène internationale : « Le monde a besoin de la France ». Dans l’Histoire, notre pays a pu donner l’exemple, pour le meilleur comme aussi pour le pire, d’un modèle de civilisation ou de révolution, et « conquérir les esprits et les coeurs » du monde entier, ou d’une grande partie de celui-ci : il n’est pas impossible que l’Histoire, d’une certaine manière, se « rejoue » demain. Encore faut-il que, d’abord, la France se donne les moyens étatiques de sa présence active au monde : on en revient toujours au point de départ : « Politique d’abord donc, en France, son corollaire : Monarchie d’abord ».

07/12/2007

Banlieues : Villiers-le-Bel.

Les émeutes de la semaine dernière à Villiers-le-bel ont réveillé les souvenirs vieux d’à peine deux années, de ces semaines d’automne 2005 qui se chauffaient aux incendies de voitures et d’écoles. A l’époque, il avait été beaucoup écrit sur le malaise des banlieues, mais aussi beaucoup promis pour résoudre cette arlésienne de la société française depuis plus d’un quart de siècle. Deux ans après, la situation ne semble pas s’être améliorée et, aux dires de mes collègues des Mureaux, elle se serait même aggravée malgré tous les efforts consentis depuis tant d’années par les professeurs des écoles, collèges et lycées de la ville et des environs : la bonne volonté ne suffit pas, il y faut aussi le soutien de l’Etat et une politique sur le long terme pour régler, ou plutôt surmonter, les différents problèmes qui font des banlieues des poudrières sociales toujours prêtes à s’enflammer : on ne fera pas l’économie d’une vraie remise en cause des principes qui régissent une société de consommation et du spectacle, véritable démocratie émotionnelle et superficielle sans civilité enracinée…

En attendant, et sans oublier cette nécessaire réflexion libérée des préjugés égalitaires, il faut bien s’attacher à chercher des solutions d’urgence pour désarmer (à tous les sens du terme, semble-t-il…) les émeutiers, les marginaliser pour mieux en séparer le grain de l’ivraie, aujourd’hui mêlés en une alliance forgée sur le seul refus de l’autorité publique, policière en particulier. Une répression forte des comportements incendiaires n’est pas scandaleuse, loin de là : elle est même nécessaire pour que l’Etat retrouve sa visibilité dans des quartiers trop souvent abandonnés à « l’économie parallèle », mais aussi sa crédibilité, mise à mal par les images désastreuses d’un commissariat en flammes qui, dans cette guerre des territoires, a valeur de symbole du « recul de l’Autorité » au sens institutionnel du terme. Mais elle ne servira à rien si elle ne s’accompagne pas d’une véritable stratégie de « reconquête des territoires », reconquête non pas guerrière bien sûr (même si le terme employé apparaît renvoyer à une stratégie de force qui ne soit pas que verbale) mais bien plutôt politique, économique et civilisationnelle : ce dernier terme n’est pas le moins important, loin s’en faut. Car nous vivons une crise qui n’est pas que sociale, c’est une véritable crise de civilisation et, si je crois au moyen du politique, il me semble évident que celui-ci ne suffira pas à apporter des réponses à une société en doute et qui éprouve les plus grandes difficultés à se penser dans le tourbillon de la mondialisation et du relativisme.

Post-scriptum : j’ai consacré il y a deux ans plusieurs notes de blog à la question des « banlieues » : il me semble, à les relire avec un peu de distance temporelle, qu’elles peuvent répondre à quelques questions sur mes positions et qu’elles restent actuelles, « trop actuelles », même…

http://jpchauvin.typepad.fr/jeanphilippe_chauvin/2005/11/deux-victimes-o.html

http://jpchauvin.typepad.fr/jeanphilippe_chauvin/2005/11/des-coles-qui-b.html

http://jpchauvin.typepad.fr/jeanphilippe_chauvin/2005/11/ebauches-de-pro.html

http://jpchauvin.typepad.fr/jeanphilippe_chauvin/2005/12/crise-des-banli.html

04/12/2007

Marées noires.

Je suis en train de préparer une série d’études de documents pour mes classes de Seconde et, du coup, comme pour la préparation des cours, je me plonge et replonge dans les manuels de géographie et dans mes « découpes » de journaux sur les thèmes évoqués ce trimestre : l’un des sujets porte sur les pollutions marines à partir de l’exemple du naufrage du pétrolier « Prestige » en 2002, mais j’aurai pu m’appuyer aussi sur la récente marée noire dans la mer du même nom… L’un des documents que j’ai sélectionné (sur une dizaine mais il ne doit, au final, n’en rester que cinq) est un extrait du rapport de l’Assemblée nationale française (10 juillet 2003) et, par la simple énumération qu’il présente, est révélateur et éminemment significatif :

« Pétrolier à simple coque, âgé de 26 ans, usé.

Propriétaire : société basée au Libéria (paradis fiscal).

Pavillon des Bahamas (pavillon de complaisance).

Armateur : Mare Shipping Inc., société grecque chargée de l’exploitation et de l’entretien.

Certificat d’aptitude à la navigation : délivré par une société privée américaine, A.B.S. (Bureau Américain de la Navigation).

Affréteur (locataire du navire) : Crown-Prestige , société immatriculée en Suisse à Zoug (paradis fiscal), filiale du groupe russe Alfa Group.

Equipage : roumain et philippin (probablement sous-payé) avec des officiers grecs.

Marchandise : pétrole russe chargé en Lettonie à destination de Singapour. »

Voici un bon exemple de cette mondialisation-globalisation qui, dans la recherche de la rentabilité maximale, ne prend guère de précautions ni avec les hommes ni pour l’environnement… Le renchérissement des prix pétroliers et, donc, des navigations va-t-il forcer les multinationales, toujours et logiquement mues par la recherche du profit le plus important qu’il soit possible d’atteindre (le poids des actionnaires…), à relocaliser une part de leurs activités et à restreindre les déplacements autour de la planète ? Rien n’est moins sûr, en particulier avec l’opportunité offerte par la fonte de la banquise et l’ouverture, sur un temps de plus en plus long dans l’année, de nouvelles voies navigables près du pôle Nord, ce qui va raccourcir de nombreux trajets et risque, comme je l’ai déjà évoqué dans une précédente note, d’entraîner une « hong-kongisation » des territoires polaires

Que faire ? Certains pensent qu’une « gouvernance mondiale » pourrait résoudre le problème en imposant à tous des règles valables pour tous. Non seulement c’est un leurre mais en plus un vrai danger, celui pour nos Etats de perdre toute souveraineté au profit d’un « Machin » (selon la célèbre formule gaullienne) forcément technocratique et pas forcément soucieux de l’environnement mais plus de la « liberté des échanges », de celle qui, si elle n’est pas « mesurée », peut ouvrir la porte à toutes les dérives du libéralisme : oublie-t-on quelle est la logique des organisations de « gouvernance mondiale » telles que le FMI ou l’OMC ?

La solution me semble plus reposer sur l’organisation de Conférences internationales où chaque Etat fait part de ses propositions et de ses réalisations, et qui permettraient une coordination et une coopération des politiques nationales, indépendamment des volontés des multinationales qui doivent être écartées, non de la consultation mais de la décision en ce domaine. D’autre part, pour ce qui est de la France, elle doit, à l’instar de ce que font aujourd’hui les Etats-Unis qui ont tiré les leçons de la catastrophe de l’Exxon Valdez, mieux contrôler les navires qui croisent dans ses eaux et ne pas hésiter à « frapper fort » les contrevenants aux règles de sécurité et de précaution. Et ne pas hésiter à rappeler, y compris à la Commission européenne et à l’Organisation Mondiale du Commerce, que la nécessaire « liberté des échanges » ne doit pas être la seule aune des politiques d’Etat.