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06/12/2010

Que veulent les royalistes ?

Pour répondre à quelques questions qui sont régulièrement posées aux militants royalistes, je réédite un petit texte rédigé il y a quelques années et qui me semble bien résumer la « doctrine » royaliste française :

 

 

Ce que veulent les royalistes, aujourd’hui :

 

Malgré leurs différences et leur diversité, on peut évoquer quelques idées dans lesquelles peuvent se reconnaître la plupart des royalistes :

 

-          L’attachement à la nation française et à son indépendance diplomatique, c’est-à-dire au refus de l’alignement systématique sur les Etats-Unis, alignement qui caractérise trop fréquemment les autres Etats d’Europe. Cela entraîne une certaine méfiance à l’égard de l’Union Européenne, du moins telle qu’elle se construit actuellement. Les royalistes sont, avec des nuances diverses, pour une Europe qui prenne en compte les nations, soit dans le cadre d’une Confédération (refus du « fédéralisme européen » ou de « l’Europe fédérale ») des Etats d’Europe, soit dans le cadre d’une Europe des cercles concentriques (un noyau dur constitué par quelques Etats-moteurs et une organisation de l’UE organisée en cercles concentriques selon le degré d’intégration des Etats dans les politiques communes de l’UE).

 

-          La volonté d’une instauration royale pour rendre à la France sa « tête » et sa « liberté d’Etat », sa souveraineté : c’est le cœur même de l’idéal royaliste, la monarchie royale « à la française » n’étant que le moyen institutionnel politique pour permettre au pays et à ses citoyens (et non-citoyens, ou citoyens en devenir) « d’être et de durer au monde ». L’instauration d’une Nouvelle Monarchie doit être, dans les années qui suivent l’acte d’instauration, légitimée par trois principes majeurs : 1 : unité nationale sur le plan intérieur comme en diplomatie, et fédératrice des « provinces unies de France »; 2 : souci environnemental ; 3 : justice sociale.

 

 

-          Une large décentralisation pour permettre une meilleure « respiration des communautés » (famille, commune, région, entreprise, etc.) et rendre leurs « pouvoirs » (libertés concrètes d’agir sur leur environnement social et politique proche) aux corps sociaux et aux personnes : c’est l’une des bases du combat royaliste qui peut se résumer selon la vieille formule : « L’autorité au sommet, les libertés à la base » ou « Sub rege, rei publicae » (Sous le roi, les libertés publiques). C’est aussi l’application politique du principe de subsidiarité. Le roi est juste le trait d’union entre les provinces, il est l’incarnation de l’unité nationale par delà les différences communautaires, provinciales ou religieuses : Louis XVI, d’ailleurs, s’adressait aux peuples de France (au pluriel)…

 

-          Une politique d’écologie durable qui n’est possible que par l’existence d’un « Etat durable », c’est-à-dire inscrit dans la durée et la permanence, la continuité, Etat qui ne peut être que la Monarchie à transmission héréditaire.

 

05/12/2010

Cruelle impuissance face aux Marchés ?

J’étais ce midi au dernier banquet public pour l’année 2010 du Groupe d’Action Royaliste dont je suis le vice-président depuis sa fondation officielle en 2009 : l’occasion de revoir quelques amis et d’évoquer les derniers événements politiques en France et en Europe, en particulier la crise actuelle de l’euro et les réactions parfois affligeantes de la Commission européenne comme de la République française, mais aussi les raisons et les espérances de notre combat monarchiste-social.

 

Je ne suis pas europhobe, pas plus qu’europhile, mais simplement pragmatique et réaliste, en somme « empiriste conséquent » : ma réflexion politique part d’un postulat simple, celui qu’il ne sert à rien de construire sur les sables mouvants de l’idéologie quelle qu’elle soit, et que la France, toute imparfaite qu’elle soit, reste ce « trésor commun » à tous ceux qui vivent en son sein historique, civique, politique mais aussi sentimental, et qu’il faut conserver et transmettre ce « fait français » si l’on veut « vivre au monde ». Rien ne serait pire que la perte de la France qui serait un arrachement terrible pour nos compatriotes et marquerait l’empêchement de décider de leur destin, de vivre librement leur qualité de Français : l’histoire nous enseigne que la France sans sa liberté, son indépendance, n’est plus la « France vivante » ! Nous n’avons pas le cœur à être des gardiens de musée ou des croque-morts de l’œuvre de nos pères ! Et la France n’est pas qu’une circonscription économique ! Elle est une nation historique, éminemment politique, et non une quelconque « société anonyme » qui se résumerait à quelques bilans statistiques, à un budget et à quelques sites touristiques.

 

Or, la République, qui s’est en partie construite sur un mode identitaire agressif et liberticide, sur ce jacobinisme qui a fait tant de mal aux provinces et aux provinciaux, mais aussi aux Etats voisins qui n’avaient pas l’heur d’apprécier les « bizarreries républicaines », cette République-là sacrifie désormais la France à ses illusions européistes et aux intérêts si peu politiques que sont ceux des grandes féodalités économiques et financières et de cette Commission dite européenne mais qui est, avant tout, « libérale et globalitaire ». L’actuelle crise irlandaise en est la triste illustration : alors que les Irlandais, jadis (jusqu’à 2007, au moins !) vantés pour leur exemplarité économique libérale, se retrouvent pressurés par les mesures d’austérité décidées plus encore à Bruxelles qu’à Dublin, les banques et les spéculateurs (et les unes ne sont pas si éloignées que cela des autres…) poursuivent leurs affaires, sûrs que l’Union européenne et que les Etats d’icelle ne leur joueront pas le mauvais tour de « faire défaut » et de ne pas les « rembourser » ou les soutenir ! La spéculation s’appuie même sur les malheurs des peuples à qui l’on fait payer l’irresponsabilité de certaines banques et l’immoralité des autres (à moins qu’il s’agisse des mêmes…) : c’est particulièrement vrai dans le cas irlandais, comme cela l’a aussi été pour l’Islande l’an dernier.

 

La République française, prisonnière d’une politique de l’euro qui prend de plus en plus l’allure du « bloc de béton aux pieds des peuples », semble impuissante face à la crise de l’euro : elle est surtout incapable de tenir un langage de fermeté face aux Marchés, oubliant au passage cette formule du fondateur de la Cinquième, « la politique de la France ne se fait pas à la Corbeille [la Bourse] », formule toute capétienne que l’actuel président, représentant d’une oligarchie qui ne se cache même plus, feint d’ignorer…

 

 

23/04/2010

De Philippe Auguste à Jeanne d'Arc.

Voici la deuxième partie du résumé de mon propos tenu dimanche dernier devant les participants au « Cercle Lutétia », dans le cadre des activités du Groupe d’Action Royaliste : en fait, ce résumé est enrichi de quelques éléments que j’ai rajouté après coup, et qui mériteront évidemment plus de développements dans la brochure à paraître sur ce sujet, sans doute durant l’été prochain :

 

 

De Philippe Auguste à Jeanne d’Arc :

 

 

Après Hugues Capet, les premiers capétiens vont voir leurs vassaux s’émanciper les uns après les autres mais le domaine royal va, au contraire, se renforcer et s’approfondir, condition indispensable à tout éventuelle et future extension solide du territoire. Le règne de Philippe Auguste (1180-1223) va marquer une étape importante dans la construction nationale, autant sur le plan territorial que politique et sentimental : effectivement, c’est la bataille de Bouvines du 27 juillet 1214 qui voit l’ébauche d’un véritable sentiment national avec le soutien des bourgeois des villes, soutien qui vient confirmer la formule des légistes du royaume « Le roi de France est empereur en son royaume », formule destinée à déjouer les ambitions des adversaires de la France, en particulier de l’empereur germanique Otton. Cette union entre les bourgeois et l’Etat indique une remise en cause de plus en plus affirmée des mécanismes de la féodalité et la mise en place de plus en plus nette d’un Etat qui s’affranchit des liens vassaliques pour créer de nouveaux liens avec les communautés, liens fondés sur une relation privilégiée avec le monarque, incarnation du royaume.

 

Dans le même temps, le règne de Philippe Auguste marque un trait important de la tradition politique française : le refus de l’empire territorial et administratif, qu’il soit européen ou autre, refus que Maurras rappellera dans son livre « Kiel et Tanger » et que De Gaulle, fidèle ici à la tradition capétienne, pratiquera au XXe siècle… Cela vient en complément du refus de la théocratie pontificale et montre combien, dès ses origines, la monarchie fondatrice de la nation et de son unité politique a pratiqué, à l’intérieur comme à l’extérieur, le « Politique d’abord » : à l’intérieur par le refus des communautarismes et des féodaux qui se pliaient mal à l’obéissance envers l’Etat royal, mais aussi par l’incorporation des communautés, des populations des nouveaux territoires conquis au sein du royaume vécu comme ensemble territorial uni et représenté par le Roi, au-delà de sa seule personne physique et par ses multiples incarnations physiques successives signalées par la formule « Le roi est mort, vive le roi ! ». Unité par delà le temps et les générations… A l’extérieur par sa politique que l’on peut qualifier de « libre destin » ou d’ « indépendance nationale » en des termes plus contemporains.

 

Les conquêtes territoriales du roi Philippe Auguste, roi audacieux et chanceux, sont importantes et aboutissent à quasiment tripler la superficie d’un royaume qui devient conséquent : c’est aussi la démonstration que, dans cette histoire médiévale française, c’est bien l’Etat, et plus précisément l’Etat royal, qui bâtit la nation, qui « fait la France », lentement certes mais sûrement, au regard du résultat que nous connaissons aujourd’hui et qui diffère peu de celui de la veille de la Révolution…

 

Cela étant, les progrès vécus et renforcés par les successeurs de Philippe Auguste sont-ils alors pérennes et n’ont-ils pas connu des remises en cause ? La Guerre de Cent ans a effectivement failli emporter l’ouvrage mais, après plus d’un siècle de troubles, de souffrances et de tragédies marquées aussi de gloires et de quelques joies (heureusement !), la France non seulement a survécu mais elle sort renforcée, en son corps comme en son esprit : Jeanne d’Arc en est peut-être le symbole le plus marquant même s’il ne faudrait pas négliger pour autant ce que nous apprend la présence de Bertrand Duguesclin, Breton des environs de Dinan, aux côtés du roi de France, c’est-à-dire le rayonnement du royaume au-delà de ses limites territoriales.

 

La Guerre de Cent ans a renforcé « l’unité de sentiment » : la France existe et suscite le désir de se battre pour que son Chef d’Etat soit issu de son histoire et de la famille qui siège sur un trône de plus en plus territorialisé et politique. C’est ainsi que l’on peut comprendre la chevauchée héroïque mais surtout éminemment politique de Jeanne d’Arc qui, non seulement reconnaît le dauphin Charles, mais le fait, contre toute logique stratégique, d’abord sacrer roi à Reims (Charles VII) plutôt que de pousser son avantage militaire : Jeanne comprend que rien ne sert de gagner des batailles si la légitimité de l’Etat royal français n’est pas assurée et pérennisée à travers l’institution de « l’unité renouvelée » intergénérationnelle, c’est-à-dire la transmission héréditaire de l’Etat au sein d’une même famille selon les règles initiées par Hugues Capet et ses successeurs. En somme, pas d’unité du royaume sans l’affirmation du principe de continuité (autre forme de l’unité, mais là sur le plan temporel) !

 

 

 

 

(à suivre)