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22/05/2019

Des élections européennes inutiles ?

Dans quelques jours, les urnes parleront et chacune des listes y trouvera l’occasion soit de vanter son résultat, au regard de ses attentes et des pronostics, soit de relativiser son échec, car certains pleureront au soir du scrutin, écartés du Parlement européen ou définitivement (mais qu’est-ce qui est vraiment définitif en politique ou en histoire ?) marginalisés sur la scène hexagonale. Mais à quoi servent ces élections, désormais de moins en moins européennes et de plus en plus nationales, et qui tournent, pour la France, autour du soutien ou de l’opposition au président plutôt qu’à la valorisation d’une politique pour l’Europe (ou contre celle-ci, d’ailleurs) ? A bien y regarder, les partis en lice n’ont pas forcément le même écho ni la même place en Union Européenne et en France : la liste de M. Macron (maladroitement menée par celle qui fut secrétaire d’Etat aux affaires européennes) n’a, pour l’heure, guère d’alliés sur la scène parlementaire, malgré les rumeurs évoquant un possible soutien du SPD (sociaux-démocrates allemands) et le ralliement espéré mais bien incertain de quelques écologistes européens, ou les espoirs présidentiels d’une « grande coalition » à l’allemande. De plus, il est fort possible (probable, assureraient certains) que la question de Strasbourg (1) fragilisera la maigre coalition des libéraux européens (surtout issus du nord de l’Europe) dès le début de la nouvelle Assemblée…

 

En fait, les listes du Rassemblement National, des Républicains et Centristes et celle des Verts risquent bien d’avoir, quels que soient leurs résultats respectifs, plus d’occasions de jouer un rôle, fût-il de trouble-fête, que les élus macroniens dans la nouvelle Assemblée élue à partir de jeudi (2). Les équilibres européens ne sont pas les équilibres français, et il faut bien reconnaître un certain isolement de M. Macron en Europe, malgré ses efforts déployés pour relancer une dynamique européenne qui semble lui échapper mais qui, peut-être plus sûrement, semble avoir atteint ses limites, faute d’une grande ambition géopolitique : il n’y a, à bien y regarder, que notre pays à évoquer la possibilité ou la nécessité d’une « Europe puissance » qui soit bien autre chose qu’un grand marché ou qu’une simple province de « l’Empire » dirigé de Washington… Le général de Gaulle, qui espérait une « Europe européenne » indépendante des blocs sans renier ses alliances, s’était déjà, en son temps, heurté aux atlantistes menés par Jean Monnet, celui-là même qui fit échouer le traité de l’Elysée (1963) comme il avait milité contre les plans Fouchet avancés par la France quelques années auparavant, ces plans qui orientaient la construction européenne vers une confédération active d’Etats souverains. Aujourd’hui, l’Union Européenne est dominée par une puissance économique, l’Allemagne, qui est ouvertement indifférente (quand elle n’est pas hostile) aux positions de la France, comme le reconnaissent la chancelière Merkel et celle qui doit lui succéder, encore plus rude à l’égard des propositions présidentielles françaises. Cette élection n’arrangera rien, car il est bien possible que l’Allemagne en profite pour récupérer la plupart des grands postes à la tête de l’Union Européenne, et que les pays du sud de l’Europe, peu germanophiles et désignés par les Allemands comme les pays du « Club Med’ », n’en soient guère satisfaits…

 

Les lendemains du 26 mai seront sans doute bien douloureux pour tous ceux qui continuent à se faire des illusions sur les réalités et les possibilités de l’Union Européenne, et il n’est pas inutile de conserver précieusement les professions de foi des principales listes reçues il y a quelques jours et les découpes d’articles et d’entretiens donnés par les candidats et, particulièrement, par les têtes de liste : leur relecture, dans quelques mois, sera fort révélatrice et sans doute fort cruelle pour les croyants de la construction européenne, mais elle peut être bénéfique si elle ouvre la réflexion sur ce que peut être, concrètement et non seulement idéalement, une Europe politique, économique et sociale, y compris hors des habituels clivages ou, pourquoi pas, hors des cadres institutionnels actuels.

 

Si l’on veut que « l’Europe » (mais laquelle voulons-nous ?) existe ou serve l’intérêt des populations sans négliger leurs particularités propres, historiques comme culturelles, il faudra penser, d’abord, à « faire de la force » pour la France, car rien ne se construira de durable sans les bases solides et les racines profondes des Etats et des nations, et ce qui est valable pour la France, vieux pays issu d’une longue et parfois douloureuse histoire, l’est aussi pour ses voisins, dont l’histoire peut avoir été, jadis, affrontée à la nôtre. L’on ne construit rien de sûr et certain sur les sables mouvants de l’idéologie, et le reconnaître est le début de la sagesse et de la possibilité d’une construction, qu’elle soit européenne ou autre (latine ? « romaine » ? eurasienne ?), qui puisse compter et peser sur la grande scène d’un monde aujourd’hui instable et dangereux.

 

 

 

 

 

Notes : (1) : Nombre d’eurodéputés et de partis de l’UE souhaitent le transfert définitif de toutes les activités parlementaires à Bruxelles qui deviendrait ainsi une « super-capitale » de l’Union Européenne regroupant la Commission et le Parlement, dans une logique centralisatrice, jacobine même, qui symboliserait sans doute dans le même temps le basculement vers une logique plus économique et « comptable » que politique et historique : les arguments des anti-Strasbourg n’évoquent que le « gaspillage d’argent » quand les Français leur opposent le caractère symbolique et historique de la présence du Parlement dans la ville jadis source de tension et de conflit entre la France et l’Allemagne. Et si l’on transférait toutes les activités europarlementaires à Strasbourg plutôt que l’inverse ? Cela serait l’occasion de « déconcentrer » sans déconstruire l’Union, pour ceux qui s’inquiéteraient de cette « dispersion » des sièges de pouvoir en Europe… Ce qui n’interdit pas les réflexions sur cette même construction européenne !

 

(2) : Les électeurs britanniques votent dès ce jeudi 23 mai pour désigner leurs députés européens dont le mandat ne courra que le temps pour le Royaume-Uni de mener son Brexit à terme, s’il y parvient…

 

 

 

25/04/2017

Le protectionnisme, première définition.

La quinzaine qui s'annonce promet d'être sportive et pas forcément très équilibrée sur les plans politicien et médiatique : le candidat Macron, déjà adoubé par la Bourse et les banques au regard de la bonne journée des valeurs financières le lendemain du premier tour, a reçu le soutien d'une grande partie de la classe politique, syndicale et patronale, dans une sorte de consensus qui rappelle l'union sacrée de 2005 pour la Constitution européenne, union qui avait, en définitive, liguées toutes les contestations en un « Non » puissant et finalement victorieux.

 

Durant cette quinzaine, les arguments des partisans de M. Macron seront principalement « européens et économiques », même si le candidat en appelle désormais aux « patriotes » contre « les nationalistes » que représenterait son adversaire et les « eurosceptiques » qui la soutiendraient, étiquettes faciles et un peu simplistes, du moins si l'on prend la peine de définir les mots que l'on emploie, ce qu'évitent soigneusement de faire MM. Hollande, Cambadélis et consorts. Mais au-delà du nationalisme supposé de Mme Le Pen, c'est aujourd'hui le protectionnisme qui semble le plus morigéné et dénoncé par l'actuel locataire de l'Élysée et les milieux patronaux, avec une violence parfois surprenante : cette ardeur aurait pourtant mérité meilleur usage, en particulier face aux délocalisations des multinationales comme Mittal et Whirlpool, et contre le chômage qui ronge aussi sûrement notre pays que l'endettement public notre crédibilité en Union européenne...

 

Je ne considère pas, quant à moi, que le protectionnisme soit un gros mot ni un grand mal comme l'affirme M. Hollande : c'est bien plutôt une politique d’État de stratégie économique qui peut être crédible et même utile si on l'accompagne d'une politique industrielle intelligente et volontariste, et d'un aménagement équilibré et équitable des territoires et terroirs de France, y compris outre-mer. Il ne s'agit pas de supprimer le libre-échange, mais de l'encadrer rigoureusement et d'en limiter les aspects sociaux et environnementaux qui nuisent aux travailleurs comme aux espaces et aux espèces : c'est, en somme, la reconnaissance que la justice sociale ne doit pas être sacrifiée aux intérêts financiers et à la spéculation, et que la nation peut jouer un rôle protecteur par des lois qui, sans forcément nuire à l'initiative privée, empêchent celle-ci de dériver en égoïsme destructeur et oublieux des devoirs sociaux des puissances industrielles et économiques.

 

Cela n'est évidemment possible que si l’État se donne les moyens de sa politique, et qu'il est capable de recréer les conditions économiques mais aussi sociales internes favorables à la remontée en puissance du pays face aux grandes féodalités multinationales : cela passe par le retour effectif du politique face à l'économique et par la reconstruction d'un État digne de ce nom, véritable « Louis XIV » face aux « Fouquet » de notre temps. En ce domaine comme en d'autres, « Politique d'abord » !

 

 

 

 

 

 

(à suivre : quelques arguments supplémentaires pour un protectionnisme solidaire, éminemment politique et intelligent...)

 

11/07/2016

Nationalisme sportif...

La coupe d’Europe de balle-au-pied s’est achevée par la victoire de l’équipe du Portugal aux dépens de celle de France, au grand désespoir des soutiens d’icelle. Mais il faut toujours, en ce genre de compétition, un gagnant et un perdant en finale, et ce n’est pas toujours le favori qui l’emporte : cela rappelle, me semble-t-il, quelques situations politiques typiques de nos démocraties d’opinion, souvent plus émotionnelles que rationnelles ou spirituelles. Mais le sport n’est pas la politique, même s’il peut être éminemment politique, comme on le sait et comme les politiciens le démontrent par leur attitude et par leur discours opportuniste du moment sportif…

 

Cette dernière coupe d’Europe a joué un certain rôle dans l’amélioration temporaire de l’humeur générale des Français, et le royaliste attaché à la France que je suis ne peut que s’en réjouir sans, pour autant, oublier que le sport est, dans notre « démocratie de consommation », une forme d’opium du peuple particulièrement efficace et, il faut le dire, parfois dangereux. D’ailleurs, il n’est pas surprenant de constater que le Pouvoir politique a profité de l’occasion pour, sinon se refaire une santé, du moins faire passer quelques dossiers brûlants au deuxième (voire bien au-delà) plan de l’actualité : oubliée, la loi El Khomry et sa contestation ; négligées, les questions liées à l’inquiétante dévalorisation du baccalauréat ou les critiques de la Cour des comptes sur la dérive des comptes publics aggravée par les mesures préélectorales annoncées par le président Hollande…

 

La balle-au-pied et, surtout, les heureuses réussites de l’équipe de France avant la finale, ont joué le rôle d’euphorisant national et démocratique, et « le peuple », aujourd’hui si méprisé par la classe politique installée et souvent traité de « populiste » parce qu’il voterait « mal », est soudain flatté ou amadoué par des exploits sportifs que le Pouvoir, aidé en cela par des médias complaisants, valorise comme s’ils étaient les siens : en fait, c’est de bonne guerre, l’essentiel étant de ne pas en être dupe, tout simplement.

 

Il est tout de même un aspect éminemment sympathique de cette compétition sportive, c’est cette forme de « nationalisme démonstratif » qui rappelle aux Français qu’ils forment, malgré leurs différences (provinciales, sociales ou politiques) et l’indifférence de la mondialisation uniformisatrice, une communauté nationale. Bien sûr, l’on peut regretter que ce ne soit pas l’histoire, la dynastie ou le sentiment d’une communauté de destin politique et géopolitique, qui soient ainsi et ici valorisés mais seulement la reconnaissance (toute temporaire, en somme) en une équipe de sportifs dont les valeurs ne sont pas toutes « sportives », mais ne boudons pas le plaisir de voir acclamer le nom de « France » et brandir l’étendard du pays, parfois accompagné de ceux de nos provinces enracinées ou des lys royaux !

 

Cela ne nous empêche pas, tout compte fait, de savoir à quoi nous en tenir et d’être d’autant plus critique envers une République qui ne sait pas, par elle-même, faire aimer et valoriser la France, et ne semble se rappeler qu’elle se qualifie de « française », au sens fort et concret du terme, que dans les périodes électorales et lors des événements sportifs populaires… Certains me trouveront sévère ou excessif mais, malheureusement, et malgré l’amour de la France que je rencontre chez certains républicains « traditionnels » (comme MM. Guaino ou Chevènement, par exemple), je constate une indifférence certaine de nombre de nos élites gouvernementales et politiques à l’égard du pays qu’ils dirigent ou se croient appelés à diriger : parfois est-ce l’idéologie (qu’elle se pare du nom « Europe » ou « mondialisation » n’y change pas grand chose) qui les guide plutôt que le sens du Bien commun, parfois sont-ce des raisons moins honorables et plus « sonnantes et trébuchantes », mais peu importe ! Ce qui me navre, c’est leur « déracinement mental », ce refus des racines terrestres dont se vantent les « citoyens du monde » (sic !) comme Bernard-Henri Lévy et qui leur fait mépriser les « manants » attachés à leurs lieux de vie et d’esprit…

 

Sans être un fervent amateur de balle-au-pied, j’apprécie de constater que, sous le masque de la mondialisation et du « festivisme » de notre société de consommation, subsiste une forme de « pays réel » qui se trouve fier, au moins à travers le sport, d’une appartenance nationale : ce n’est peut-être qu’un fragile terreau, mais c’est celui qui peut permettre, aussi, de refonder un enracinement plus profond, promesse de meilleures floraisons, culturelles comme géopolitiques…