Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

25/07/2016

Face aux risques terroristes.

Certains pensent que la période délicate actuelle n’est guère propice à la réflexion « posée » et que l’urgence est d’agir, seulement agir, pour répondre aux défis du terrorisme et de ses marques les plus cruelles. Agir ou plutôt réagir est nécessaire, bien sûr : mais cela reste insuffisant et le deuil ne doit pas nous faire oublier les devoirs du politique, qui doit toujours voir loin, voir au-delà du moment pour tenter de prévoir et de prévenir… Bien sûr, il ne s’agit pas de confondre politique et divination, mais de se donner les moyens de comprendre ce qui arrive et d’y répondre dans les meilleures conditions possibles.

 

L’impératif de l’unité nationale face au terrorisme islamiste ne doit pas être le paravent de la démission de l’intelligence : si les polémiques circonstancielles m’agacent (même si elles ne sont pas toutes infondées, malheureusement), des débats plus profonds devraient bien avoir lieu, n’en déplaise à ce secrétaire d’Etat socialiste, M. Le Guen, qui, à bien l’entendre, souhaiterait sans doute une « erdoganisation » de la vie politique et intellectuelle de notre pays quand il déclare que la critique du gouvernement s’apparente à une atteinte à la démocratie…

 

Les grandes questions qui doivent être posées portent sur la nature des dangers et, entre autres, sur les meilleurs moyens de les dépasser, de les réduire, tant sur le plan politique que géopolitique, sans négliger le domaine des idées et celui de l’esprit (qui, parfois, peuvent se confondre ou, au moins, se mêler). Ainsi, on ne fera pas l’économie de la réflexion sur les institutions si l’on veut régler, dans la durée, la question du danger terroriste : n’est-ce pas, d’ailleurs, l’absence d’une continuité réelle à la tête de l’Etat qui empêche toute politique de long terme, à la fois solide et souple, face aux risques ?

 

Le fait que la République soit entrée en campagne électorale présidentielle active risque bien de désarmer l’Etat ou de lui faire confondre son action avec celle d’un parti décidé à garder le Pouvoir tandis que d’autres, acharnés à conquérir sa magistrature suprême, n’hésiteront pas, dans le temps de leur candidature, à l’affaiblir. Dans tous les cas de figure électoraux, l’Etat et la France sont, en définitive, les proies d’un système qui risque bien de ne pas être le mieux à même de rassurer et de protéger nos concitoyens. On peut, sincèrement, le regretter : mais se contenter d’un tel regret ne peut fonder une politique ni un avenir… Il faudra aller plus loin : jusqu’à la Monarchie ? A défaut d’une réponse satisfaisante pour l’heure, il apparaît au moins possible de poser la question… Possible et, même, nécessaire !

 

 

 

30/03/2016

Cette contestation qui vient (partie 5) Ces fermetures de lycées si révélatrices...

Jeudi 31 mars, plus d'une vingtaine de lycées seront fermés à Paris et dans la région parisienne, et cela par décision des proviseurs inquiets devant le risque d'incidents tels que ceux qui ont éclatés la semaine dernière, en particulier devant le lycée Bergson devenu, bien malgré lui, le symbole des violences du moment. Ainsi, comme le signale le journal Le Monde sur son site informatique, même le lycée Jean de la Fontaine (XVIe arrondissement, près du parc des Princes) « pas franchement l'un des lycées coutumiers des blocages » annonce, sur sa page d'accueil internet, sa fermeture « afin d'éviter que les élèves et les personnels ne soient exposés à des débordements et de la violence »... Cela n'est guère rassurant, en particulier pour le gouvernement qui craint que les lycéens sans cours se retrouvent dans la rue, et rejoignent les cortèges contestataires, surtout si la météo est favorable ! De plus, les fermetures d'établissements ne sont pas si fréquentes et, selon le porte-parole national du SNPDEN-UNSA, principal syndicat de chefs d'établissement, « on a connu des fermetures, ponctuellement, mais un mouvement collectif de cette nature, je crois que c'est la première fois dans l'histoire ». Cela traduit aussi, comme le souligne Myriam Honnorat, représentante des proviseurs au Syndicat National des personnels de direction, « un sentiment d'impuissance » devant la violence de quelques jeunes, peut-être pas si minoritaires que cela si l'on en croit les images des attaques de deux commissariats et de l'invasion d'un supermarché dans les environs du lycée Bergson.

 

La réponse du ministère de l’Éducation nationale à ces fermetures et aux risques d'incidents est à l'image de cette République de plus en plus coupée des réalités, c'est-à-dire indigne et irresponsable : « Un lycée ne peut pas être fermé par anticipation. Une fermeture ne peut être envisagée que le jour même pour des raisons de sécurité avérées, en accord avec le recteur ». En somme, c'est un « débrouillez-vous » général adressé aux chefs d'établissement, ceux-là mêmes à qui l'on refuse une véritable autonomie de fonctionnement et les moyens de garantir la sécurité des usagers comme des personnels en temps normal ! Comme si le ministère souhaitait la survenue des incidents, et non leur prévention, même si cette dernière doit en passer par quelques heures de suspension des cours... En fait, je le répète, ces consignes de l’Éducation nationale n'ont d'autre fin que de faire assurer par les établissements scolaires un ordre public que l’État actuel ne semble plus en mesure d'assumer et d'assurer lui-même. A moins que le ministère ne souhaite des affrontements aux portes des lycées pour mieux dénoncer ensuite « l'irresponsabilité » du mouvement de contestation et le décrédibiliser aux yeux du grand public : une stratégie somme toute classique, mais pas toujours efficace, au regard de l'histoire des mouvements sociaux dans notre pays et ailleurs.

 

Ce qui est certain et sans préjuger des événements de jeudi, c'est l'embarras du gouvernement face à une situation qu'il croyait, hier encore, bien contrôler.

 

Qu'en sera-t-il, ainsi, ce 31 mars ? Le mouvement de contestation, pourtant bien essoufflé ces deux dernières semaines, peut-il reprendre la main et faire douter le gouvernement, à défaut de le faire céder, ce qui, à l'heure actuelle, semble difficile (sans être, pour autant, impossible...) ? La rue peut-elle imposer « son » (sic!) point de vue au Pays légal ? Les multiples colères françaises, attisées par le mépris gouvernemental à l'égard de ses opposants (et cela depuis le début du quinquennat) et l'arrogance de quelques grands oligarques comme MM. Gattaz ou Tavares, peuvent-elles déborder en une révolte sociale aux conséquences forcément imprévisibles, autant pour le meilleur (s'il en est un) que pour le pire ?

 

Georges Bernanos, ce royaliste éternellement encoléré et profondément humain, affirmait qu'il ne fallait pas hésiter à courir le risque d'une révolte ouvrière pour ébranler une société d'injustice(s) : peut-on attendre la même chose d'une émeute lycéenne, de ce « péril jeune » évoqué désormais (mais en d'autres termes, plus prudents...) par la Gauche de gouvernement ? Il y faudrait des raisons supérieures et une direction « souveraine », une « pensée Antigone » qui n'apparaît pas encore clairement, pour faire que du mal d'un désordre de rue naisse le bien reconnu de la Cité. Il est tard, mais il n'est pas trop tard pour y penser, et y travailler...

 

 

 

 

(à suivre : les désordres de la rue et le désordre de l’État ; le « Que faire ? » des royalistes en temps de colère ; les propositions royalistes pour le monde du travail ; le « tiers-pouvoir lycéen et étudiant » ; etc.)

 

 

21/04/2010

La comédie présidentielle de la sécurité.

L’installation d’un nouveau préfet en Seine-Saint-Denis a été l’occasion d’une polémique sur la manière dont celle-ci a eu lieu, et en particulier sur la fermeture, trois jours d’affilée, de la préfecture de Bobigny elle-même, sur ordre, semble-t-il, des services de l’Elysée… Les administrés, eux, n’ont même pas été prévenus, au risque de se heurter à une porte close lorsqu’ils venaient effectuer des démarches parfois prévues de longue date ! Mais c’est devenu une habitude de tout bloquer de la vie d’une administration ou de mobiliser des effectifs pléthoriques de forces de l’ordre quand l’actuel président se déplace quelque part, au moment même où les effectifs de police se réduisent d’année en année, « remplacés » comme l’évoquait (et s’en félicitait !) un ponte de l’UMP ce matin, par des systèmes de vidéoprotection…

 

Deux remarques : la première c’est l’écart grandissant entre un pays légal, « présidentiel », qui se coupe délibérément des populations par sa pratique méprisante de ses prérogatives, oubliant par là-même ses devoirs d’Etat, et un pays réel qui réclame la sécurité, non pour les seuls déplacements présidentiels mais pour la vie quotidienne dans les quartiers, les villes comme les campagnes ! Est-il normal que l’on mobilise des centaines de policiers ou de gendarmes pour un discours présidentiel au risque de manquer d’effectifs, le même jour, pour assurer la simple sécurité urbaine, par exemple ? L’Etat, qui parle constamment (et ce n’est pas forcément anormal) de faire des économies, devrait, en sa tête, donner l’exemple et faire preuve d’un meilleur usage des deniers publics : il ne s’agit pas de supprimer toute protection d’un Chef de l’Etat forcément exposé de par sa fonction (cela serait, évidemment, et absurde et dangereux !), mais d’être moins dispendieux et d’appliquer, en ce domaine comme en d’autres, la juste mesure.

 

Deuxième remarque : la vidéoprotection ne sert à rien si les moyens humains sont réduits au point de ne pas pouvoir exploiter les données enregistrées par les caméras placées désormais aux quatre coins des grandes villes ! On a sans doute de très belles images des agressions de personnes sur les quais de métro ou à la sortie du tramway, comme à Grenoble dernièrement, mais les agresseurs savent se protéger des regards de l’objectif et tous les moyens techniques de contrôle ne valent que s’il y a des personnes derrière pour en tirer profit, et, mieux encore, pour éviter, par leur présence dissuasive, les incidents ou les méfaits !

 

La sécurité n’est pas qu’une question de moyens techniques, elle est aussi une question de volonté : car que peuvent les forces de l’ordre si, après être intervenues en tel ou tel endroit, la justice « ne suit pas », préférant relâcher des « présumés coupables », parfois pris en flagrant délit, pour le motif que les faits reprochés ne sont pas « assez » graves ou que les conditions d’interpellation ne sont pas totalement « réglementaires »… C’est d’ailleurs ce qui choque les citoyens ordinaires qui ne sont pas toujours au fait des subtilités administratives et qui ont l’impression que les malfrats sont toujours impunis (ce qui n’est heureusement pas le cas), et que ces derniers peuvent recommencer dès leur sortie de garde-à-vue !

 

Plus encore peut-être que le sentiment d’insécurité, c’est le sentiment d’impunité des malfrats et des voyous qui agace les citoyens, et c’est celui-ci qui renforce concrètement l’insécurité : est-il normal que des personnes qui, dans certaines cités, ont déposé plainte contre de jeunes violeurs, soient obligées, sous les menaces de leur « voisinage », de déménager de chez eux, ainsi chassés, non seulement par les « amis » et les familles des violeurs, mais par une sorte de « loi du milieu » (ce dernier mot étant pris au sens sociologique du terme, et non maffieux, même si, concrètement, cela y ressemble…) qui veut que l’on ne doit rien faire contre les gens du quartier, fussent-ils les pires des salauds ! On est loin de la scène finale du film « Le plus beau métier du monde » dans laquelle tout le quartier se retrouvait soudé contre les voyous ! Bien sûr, cette loi d’airain des cités sensibles n’est pas systématique mais elle est tout de même assez générale pour ne pas être démentie, malheureusement…

 

 Il est une autre question qu’il faudrait aussi aborder : les problèmes de sécurité ne sont-ils pas liés, aussi et peut-être surtout, à une perte de repères et à une dévalorisation de valeurs telles que « le juste salaire pour une juste peine », l’honneur et l’honnêteté, le respect de la dignité d’autrui, l’attachement à un certain équilibre social, condition de toute justice sociale ? Dans un monde où l’argent (et particulièrement l’argent facile !) est devenue « la » valeur (sic !) suprême, comment la fin, cette fin-là, ne justifierait-elle pas les moyens, « tous les moyens », même les plus indignes, pour l’obtenir ?

 

Triste monde, triste République…