15/09/2016
La République a trompé les travailleurs d'Alstom de Belfort.
Ainsi, le gouvernement savait : c’est M. Montebourg qui l’affirme, s’appuyant sur sa propre expérience de ministre du président Hollande et sur les déclarations des élus locaux de Belfort ! Il savait et il n’a rien fait, alors même que l’Etat est actionnaire d’Alstom, mais aussi le seul actionnaire de la SNCF, cliente de cette entreprise… A ce niveau-là d’incompétence ou de dilettantisme (ou les deux à la fois), peut-être de cynisme, il y a de quoi se mettre en colère, mais il est encore plus approprié de réfléchir aux causes de ce désastre économique et social, mais aussi politique ; cela sans négliger de lutter, aujourd’hui et maintenant, contre une délocalisation vers l’Alsace qui ne serait rien d’autre, en définitive, que l’annonce d’une délocalisation prochaine plus lointaine, toujours au nom de la « compétitivité », cette même compétitivité qui sert actuellement d’argument à la direction d’Alstom pour supprimer 400 emplois locaux. Défendre et sauver l’emploi à Belfort aujourd’hui, c’est défendre et sauver l’emploi en Alsace demain, et, plus généralement, rappeler les entreprises multinationales françaises à leurs devoirs sociaux, à cette forme de « nationalisme économique » nécessaire pour pérenniser une économie française digne de ce nom et indépendante des grandes féodalités mondiales.
Bien sûr, il n’y a pas une cause unique à l’affaire Alstom de Belfort, mais il faut souligner les responsabilités politiques et les mentalités économiques qui ont présidé à ce que l’on peut qualifier de gâchis industriel. Si le gouvernement n’a pas voulu entendre ce qui se tramait au sein d’un conseil d’administration dans lequel l’Etat a sa place, c’est qu’il est acquis, de longue date et cela à gauche comme à droite, aux présupposés (aux préjugés ?) libéraux et « mondialistes » (c’est-à-dire promoteurs de la mondialisation dont on sait qu’elle n’a pas qu’un visage et qu’elle n’est pas forcément heureuse pour tous…), et que ceux-ci supposent l’acceptation du libre-marché et de ses règles, fussent-elles si peu sociales et aussi bien destructrices des emplois que des paysages… Acquis aussi à un européisme et à une Union européenne (en fait, la Commission européenne) qui ont inscrit ses mêmes règles dans le marbre des traités et le bronze des directives édictées à Bruxelles, du bureau des groupes de pression au siège des institutions de cette « Europe-là », en passant par un Parlement imbu de lui-même…
D’ailleurs, quelle marge de manœuvre l’Union européenne laisse-t-elle à l’Etat dans ses tentatives de sauver à Belfort ce qui peut (et doit) l’être ? Déjà, les fonctionnaires de la Commission de Bruxelles rappellent la France à ses « obligations » de respect de la « libre concurrence non faussée », faux nez de la violence sociale à l’égard des travailleurs, et condamnent certaines des mesures d’urgence annoncées par le ministre français des transports, y décelant une « rupture » des engagements libéraux pris par la France… Mais où est donc « l’Europe sociale » que les socialistes ne cessaient d’évoquer dans quelques campagnes électorales européennes passées ? Elle n’existe pas, et elle ne peut exister, au regard des traités eux-mêmes, de Rome à Amsterdam, et Pierre Mendès-France, dès 1957, l’expliquait, à la suite (bien involontaire pour lui) des royalistes d’Action Française qui l’affirmaient avec force chaque semaine depuis la fin des années 40 dans Aspects de la France ou dans les Dossiers d’Action Française du temps de Georges Pompidou…
De ce triste état de fait, la République est doublement coupable, et plus encore depuis qu’elle se républicanise en renonçant à ses racines « monarchiques » héritées de la volonté et de la présidence gaulliennes : coupable d’avoir renoncé, par son ralliement à un libéralisme anglo-saxon qui motive la mondialisation et l’Union européenne (qui en mourra peut-être, l’avenir nous le dira…), à une voie économique française, à ce modèle qui laisse au politique toute sa place mais rien que sa place, et qui n’oublie pas, que derrière toute activité ou statistiques européennes, il y a des hommes, des familles, des territoires avec leurs particularités et leur désir de vivre pleinement et librement un destin qu’ils puissent s’approprier (et non subir des contraintes venues d’un centre lointain).
Coupable aussi de ne plus se comporter en Etat digne de ce nom, dont la légitimité repose aussi et surtout sur la capacité à défendre les intérêts de la nation et de ses citoyens, et à assurer la paix intérieure comme la défense extérieure, si besoin est. Alors que l’Etat devrait s’imposer aux féodalités économiques (ce qui ne signifie pas détruire les puissances industrielles mais les plier aux besoins de la nation et les accorder aux équilibres internationaux), il hésite, tergiverse et, en définitive, leur cède en arguant des nécessités de la mondialisation ! Quand l’Etat devrait être « Louis XIV », il n’est désormais plus que « Foutriquet » face aux « Fouquet » contemporains…
La nature de cette République, désormais prisonnière du quinquennat présidentiel, empêche aussi toute politique et toute stratégie industrielle, sociale et même environnementale, sur le long terme : faute d’une magistrature suprême arbitrale digne de ce nom et de sa fonction historique, la République (toujours en campagne présidentielle permanente) est impuissante et indigne, et ce sont les travailleurs et les territoires français qui en font les frais… Ce n’est plus, ce n’est pas et cela n’a jamais été acceptable, et nous ne pouvons l’accepter : ainsi, logiquement, faut-il remettre en cause cette République avant qu’elle ne ruine définitivement le pays qu’elle a déjà tant endetté et dont elle a bradé tant de joyaux industriels, sacrifiant emplois et salariés locaux à une logique mortifère et à cette « Fortune anonyme et vagabonde » qui se moque bien de cet avenir que tout esprit bien né souhaite d’abord à sa patrie.
En plagiant certaine citation célèbre, l’on pourrait dire : si vous souhaitez faire vivre le tissu industriel et le travail français, il faudra bien vous résoudre et conclure à la nécessité de la Monarchie, éminemment politique et sociale, et c’est la raison et l’expérience qui vous le commandent…
18:38 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : alstom, emplois, république, industrie, délocalisations, monarchie sociale.
13/09/2016
Sauver l'usine d'Alstom à Belfort, c'est possible !
L’affaire Alstom risque bien de devenir un nouveau cauchemar social et politique pour le président-candidat Hollande, mais il en est d’abord et déjà un, aujourd’hui, pour les travailleurs de l’usine de Belfort à qui la direction a annoncé, de façon légère et presque insouciante, la fin de leur emploi belfortain pour 2018. Bien sûr, les arguments économiques sont avancés pour justifier cette fermeture et nombre de commentateurs haussent les épaules devant le désarroi des salariés ; j’en ai même entendu un à la radio expliquer que ces derniers devraient désormais être « plus mobiles », comme si vouloir rester dans la ville de son enfance ou de sa maturité familiale, là où l’on a fait sa vie, était une absurdité ou une incongruité en ces temps de mondialisation et de néonomadisme…
Il faudrait tout de même que ces dirigeants d’entreprise qui décident du haut de leur bureau climatisé ou de leur avion pensent un peu plus aux conséquences sociales de leurs décisions et que les actionnaires réfléchissent en terme de Bien commun plutôt que dans le seul souci de gagner encore plus d’argent. Je ne dis pas qu’il faut renoncer à l’idée et à l’espoir de tout profit, celui-ci pouvant être à la base des investissements futurs et d’une consommation parfois utile, mais il me semble qu’il faut y adjoindre les notions de partage et d’entraide, dans la mesure où cela ne nuit pas à la vie normale de l’entreprise, et penser les stratégies industrielles et économiques sans méconnaître les intérêts sociaux et régionaux, voire nationaux.
Dans le cas d’Alstom, dont la direction semble se moquer des velléités de l’Etat et des pouvoirs politiques locaux de préserver l’emploi à Belfort, sans doute faudrait-il être plus ferme et plus directif, au moins pour un temps : il ne s’agit pas de tomber dans l’étatisme, qui ne résout rien et déresponsabilise les acteurs sociaux au lieu de les pousser à réfléchir et agir, mais d’impulser de nouvelles initiatives dans le cadre d’une stratégie à moyen et à long terme pour maintenir l’activité dans la durée sur le site aujourd’hui menacé par la délocalisation, certes à quelques heures de route pour l’instant, mais qui pourrait s’en aller beaucoup plus loin d’ici cinq ans si l’on suit la logique de la direction actuelle de l’entreprise.
Oui, l’Etat doit prendre ses responsabilités dans ce dossier, et non se contenter de gesticulations hypocrites et surtout pré-électorales, à huit mois de l’élection présidentielle. D’autant plus que, au-delà des 20 % des droits de vote au conseil d’administration qu’il possède, l’Etat est l’autorité politique supérieure qui peut, qui doit intervenir, agir pour l’intérêt des citoyens et des travailleurs de la nation… Ou, alors, il ne sert plus à rien, au sens éminemment politique du terme, et il doit disparaître, ce que souhaitent les plus ardents libéraux et les libertariens, partisans de la mondialisation et de la gouvernance mondiale ! Cette dernière solution n’est pas souhaitable.
Il est une piste que l’Etat pourrait creuser, s’il en avait la volonté : c’est de promouvoir le ferroutage et de pousser la SNCF et les régions à investir dans l’achat de locomotives (produites par Alstom) pour celui-ci qui, aujourd’hui, n’est pas assez développé dans notre pays alors même que l’Etat ne cesse de parler de transition énergétique et qu’il est urgent de lutter contre une pollution liée aux transports, pollution homicide par les rejets de gaz à effet de serre et de particules fines dans l’atmosphère. C’est d’ailleurs la proposition évoquée par les représentants de la CFDT d’Alstom et rapportée par Le Figaro en ses pages économiques ce mardi 13 septembre : selon le délégué syndical CFDT d’Alstom, « Le gouvernement avait un projet ambitieux de ferroutage européen, le transport sur rail du transport de marchandises. (…) Une liaison Amsterdam, Paris, Marseille, Barcelone aurait permis de décongestionner les routes, ce qui a du sens au lendemain de la COP21. » Et le journal de préciser : « Ce projet aurait nécessité la commande de 50 locomotives et de wagons », ce qui permettrait une pérennisation du site pour la décennie à venir, et le maintien des emplois à Belfort, ville qui aura du mal à supporter, sans cela, un nouveau choc social et ses conséquences pour le commerce local, mais aussi pour le nombre d’élèves scolarisés et donc le maintien de certaines classes, les travailleurs d’Alstom étant souvent parents d’élèves…
L’Etat doit, pour imposer une politique de maintien de l’emploi à Belfort et une nouvelle stratégie industrielle plus sociale, reprendre ses pouvoirs face aux féodalités économiques et savoir s’imposer, quitte à frapper du poing sur la table et à, provisoirement, placer l’entreprise sous une certaine tutelle de l’Etat. Nationalisation provisoire ? Pourquoi pas, mais dans une logique de néocolbertisme et pour quelques années seulement, si cela doit advenir. Et il ne faudra pas que le bras séculier de l’Etat tremble face aux menaces de la Commission européenne qui y verra une « entorse » aux principes de « libre concurrence non faussée » et dénoncera une « aide d’Etat déguisée », ni face aux oukases des multinationales qui, de plus en plus, prennent la forme d’une « fortune anonyme et vagabonde » sans foi ni loi !
La République peut-elle remplir ce rôle politique d’autorité suprême ? J’en doute fortement, et les épisodes récents de Florange et maintenant de Belfort, après ceux de Gandrange, de Villemur-sur-Tarn ou de Clairoix, prouvent à l’envi cette impuissance de la République…
Raison(s) de plus pour promouvoir l’idée d’instauration d’une Monarchie politique éminemment sociale !
12:19 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : alstom, monarchie sociale, emplois, trains, locomotives, république, féodalités, nationalisation.
29/07/2016
Après la mort d'un prêtre...
Le corps d’un prêtre ensanglanté au pied de l’autel, frappé en pleine célébration, c’était pour moi une image sortie d’un livre de Barbey d’Aurevilly, puis celles, répétées à l’envi, de ces hommes d’Eglise martyrisés par une Révolution qui avait tournée République dans les années 1790 ; c’était aussi les échos lointains des terres d’Orient dont sont irrémédiablement chassés les chrétiens, pourtant là depuis 2.000 ans : en somme, c’était loin, dans le temps ou, au moins pour le présent, dans l’espace…
C’est près de moi, désormais, dans cette petite ville de Normandie toute proche de Rouen, là où Jeanne d’Arc a, elle aussi, souffert le martyre pour sa foi et son attachement à la nation couronnée. Et les portraits du père Jacques Hamel s’affichent sur les couvertures de magazines comme des quotidiens, comme sur les écrans de l’information continue : son visage de vieil homme, qui s’adoucit lorsqu’il se met à parler ou à chanter, semble celui d’un ancêtre que nous aurions un peu négligé, simplement parce qu’il nous était si coutumier que nous ne pensions plus qu’il pouvait disparaître… Son assassinat brutal nous a réveillé, sans doute, d’une certaine insouciance historique : cet homme d’Eglise, c’est notre mémoire, nos traditions, ces habitudes contractées de longue date et qui nous rassurent, ces baptêmes, ces jours de fête, ces communions d’un dimanche de printemps, le son des cloches, l’horloge sur le clocher… C’est le baptême de Clovis et le sacre de Reims, c’est aussi Don Camillo, et le chagrin du maire communiste de Saint-Etienne-du-Rouvray parlant de « notre prêtre » pour désigner le père Hamel en était le rappel le plus émouvant !
Bien sûr, les Français ne sont pas tous catholiques, loin de là, mais la France, qu’on le veuille ou non, qu’on le regrette ou pas, reste, au regard de l’histoire, un pays aux multiples racines catholiques, à la fois particulières et fort diverses, de la Bretagne à l’Alsace, de la Provence à la Martinique : l’oublier serait renier ce qu’est la France, au-delà de l’instant présent. Marc Bloch qui n’était pas catholique le soulignait à sa façon lorsqu’il expliquait : «Il est deux catégories de Français qui ne comprendront jamais l’histoire de France : ceux qui refusent de vibrer au souvenir du sacre de Reims ; ceux qui lisent sans émotion le récit de la fête de la Fédération.»
En disant cela, je ne méconnais pas les aspects plus sombres de l’histoire de France, des guerres de religion et des persécutions religieuses, quelles qu’elles soient d’ailleurs et les catholiques en ont aussi largement fait les frais, de la Première République déchristianisatrice aux inventaires de 1905-1906 : mais, en définitive, l’âme de la France est restée sensiblement la même jusqu’à nos jours. Et lorsque la libération de Paris a été célébrée, c’est à Notre-Dame plus encore qu’ailleurs, quand, quelques années après, c’est à la cathédrale de Reims, celle des sacres royaux, que la réconciliation franco-allemande était définitivement scellée…
L’autre jour, toutes les autorités de la République étaient réunies pour une messe en la cathédrale de Paris, et le président Hollande, après les propos déjà anciens de son premier ministre sur « les racines chrétiennes de la France », n’a pas hésité à déclarer que « attaquer une église, tuer un prêtre, c’est profaner la République » : une formule qui n’est pas anodine même si certains y décèleront sans doute une précaution électorale et d’autres une tentative de désamorcer certaine contestation politique. Comme si la République cherchait à récupérer le sacré catholique et, en même temps, signalait ce que la France, même en République, devait à la tradition catholique en son être profond ! Quand le politique défaille et semble impuissant face au malheur, ce sont « le retour aux traditions » et « les forces de l’esprit » qui apparaissent, dans notre pays de France, comme « le bouclier et l’épée »…
Que les hommes d’Etat ou ceux qui postulent à le représenter, soient bien obligés de le reconnaître est révélateur, sans doute, d’un changement d’état d’esprit, en attendant le nécessaire changement de politique et, surtout, le retour du « temps long » à la tête de l’Etat, ce temps apprivoisé qui, face aux défis contemporains, peut permettre à une nation « d’être et de durer », tout simplement…
22:46 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : attentat, terrorisme, racines chrétiennes, traditions, catholicisme, république, cathédrale.