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26/04/2016

2017 n'est pas joué...

Cela est presque passé inaperçu mais une élection législative partielle a eu lieu ces dernières semaines, et le second tour, dimanche 24 avril, a donné la victoire au Parti Socialiste, ce qui n'est pas totalement anodin et, en fait, très révélateur de l'état de la démocratie française. Car cette victoire s'accompagne d'un taux d'abstention comme on en a rarement vu sous la Cinquième République : 74 % des électeurs de la 3ème circonscription de Loire-Atlantique sont restés à la maison, comme indifférents à cet exercice démocratique du suffrage universel en cette période de troubles sociaux et de discrédit de la politique politicienne, voire de désintérêt pour le vote lui-même, et 12 % de ceux qui se sont déplacés ont voté blanc. Dans le même temps, la candidate socialiste, apparatchik locale, obtient environ 55 % des suffrages exprimés, ce qui lui assure une large victoire face à une droite parlementaire locale peu motivée et souvent déconsidérée, voire rejetée, y compris par un électorat qui pourrait être, pourtant, le sien...

 

Dans cette élection, tout le monde (sauf peut-être les Verts locaux, hostiles au projet d'aéroport à Notre-Dame-des-Landes, qui triplent leur score de 2102) semble avoir perdu (mais il y a toujours un vainqueur par le simple jeu électoral démocratique...) : les partis contestataires, parfois hauts dans les sondages nationaux (ou présidentiels...), végètent, y compris ceux qui paraissent d'ordinaire profiter d'une situation tendue, soit sur le plan migratoire soit sur le plan social ; la droite modérée, qui se croit certaine de l'emporter l'an prochain, ne mobilise pas vraiment les électeurs pourtant peu satisfaits de l'action gouvernementale ; quant au Parti Socialiste, s'il l'emporte en définitive, c'est plus par défaut et presque par habitude plutôt que par entrain ou conviction... Peut-on se réjouir d'une telle « fatigue démocratique » ? Je n'en suis pas vraiment certain.

 

Cette élection nous rappelle aussi que les sondages ne sont pas les élections si elles peuvent parfois les influencer, voire les faire en partie. Aujourd'hui, il est de bon ton d'enterrer M. Hollande avant même que l'on sache exactement quels seront ses adversaires réels : c'est une erreur, comme le souligne, dans Le Figaro de lundi 25 avril, le directeur général adjoint de l'institut de sondages Ifop, M. Frédéric Dabi : « Dire aujourd'hui que le président sortant a déjà perdu n'a pas de sens et ne serait pas sérieux de la part d'un politologue, d'un sondeur ou d'un commentateur de la vie politique s'exprimant sur le sujet. (…) La présidentielle a lieu dans un an. Elle reste une terra incognita» Effectivement, et comme je le soulignais plus haut, « sondage n'est pas suffrage » et l'histoire de la Cinquième République nous le prouve à l'envi, de Barre à DSK, en passant par Rocard, Balladur ou Jospin, qui, d'une façon ou d'une autre, et parfois avant même l'épreuve des urnes, sont passés du statut de favori à celui, moins enviable, de triste perdant, éliminé avant l'heure de gloire promise et annoncée...

 

Qu'en sera-t-il dans un an ? Il peut se passer tant de choses, en bien comme en mal, et tant d'illusions envolées... Comme le dit M. Dabi, M. Hollande va, désormais, « gauchir » son message pour récupérer cette partie de la Gauche qui, aujourd'hui, lorgne vers Jean-Luc Mélenchon et qui, à l'heure du vote, préférera peut-être l'assurance de la victoire « modeste » plutôt que « l'aventure » : la crainte, dans la classe politique et de la part des féodalités économiques, d'un second tour présidentiel Le Pen-Mélenchon commence à poindre et pourrait bien servir d'argument aux partisans de François Hollande pour en appeler, dès le premier tour, à un « vote utile et républicain »...

 

D'autre part, M. Hollande pourra vanter son bilan « sociétal » avec l'adoption du « mariage pour tous » et, ainsi, gêner une Droite qui est fort divisée sur ce thème et dont les principaux ténors « valident » désormais cette mesure après avoir laissé une part de leur électorat de base s'engager fortement contre elle... Du coup, nombre de militants de cette droite modérée risquent de faire défaut aux candidats « ralliés » à la loi Taubira ! Sans négliger aussi le fait que la primaire des Républicains risque bien de creuser des fossés infranchissables entre certains candidats de celle-ci et que cela pourrait bien affaiblir le vainqueur plutôt que le porter vers les sommets.

 

A gauche, le souvenir du 21 avril 2002 peut habilement être utilisé par les partisans de M. Hollande qui, jusqu'à preuve du contraire, tiennent fermement l'appareil du Parti Socialiste sans lequel rien, en définitive, n'est possible face à la Droite.

 

En cela, la victoire, même par défaut, de la candidate socialiste en Loire-Atlantique pourrait bien préfigurer celle, improbable aujourd'hui mais pas impossible, de l'actuel président Hollande... La République a plus d'un tour de malice dans son bonnet, disait un satiriste royaliste du XIXe siècle : mais ses petits jeux politiciens continuels et ses attrape-nigauds desservent le pays et l'intérêt commun ! Il serait temps de rendre à la magistrature suprême sa dignité et son indépendance, et renvoyer à leurs appareils partisans ceux qui, en un temps plus normal, n'en seraient que les bouffons et non les maîtres...

 

 

 

30/03/2016

Cette contestation qui vient (partie 5) Ces fermetures de lycées si révélatrices...

Jeudi 31 mars, plus d'une vingtaine de lycées seront fermés à Paris et dans la région parisienne, et cela par décision des proviseurs inquiets devant le risque d'incidents tels que ceux qui ont éclatés la semaine dernière, en particulier devant le lycée Bergson devenu, bien malgré lui, le symbole des violences du moment. Ainsi, comme le signale le journal Le Monde sur son site informatique, même le lycée Jean de la Fontaine (XVIe arrondissement, près du parc des Princes) « pas franchement l'un des lycées coutumiers des blocages » annonce, sur sa page d'accueil internet, sa fermeture « afin d'éviter que les élèves et les personnels ne soient exposés à des débordements et de la violence »... Cela n'est guère rassurant, en particulier pour le gouvernement qui craint que les lycéens sans cours se retrouvent dans la rue, et rejoignent les cortèges contestataires, surtout si la météo est favorable ! De plus, les fermetures d'établissements ne sont pas si fréquentes et, selon le porte-parole national du SNPDEN-UNSA, principal syndicat de chefs d'établissement, « on a connu des fermetures, ponctuellement, mais un mouvement collectif de cette nature, je crois que c'est la première fois dans l'histoire ». Cela traduit aussi, comme le souligne Myriam Honnorat, représentante des proviseurs au Syndicat National des personnels de direction, « un sentiment d'impuissance » devant la violence de quelques jeunes, peut-être pas si minoritaires que cela si l'on en croit les images des attaques de deux commissariats et de l'invasion d'un supermarché dans les environs du lycée Bergson.

 

La réponse du ministère de l’Éducation nationale à ces fermetures et aux risques d'incidents est à l'image de cette République de plus en plus coupée des réalités, c'est-à-dire indigne et irresponsable : « Un lycée ne peut pas être fermé par anticipation. Une fermeture ne peut être envisagée que le jour même pour des raisons de sécurité avérées, en accord avec le recteur ». En somme, c'est un « débrouillez-vous » général adressé aux chefs d'établissement, ceux-là mêmes à qui l'on refuse une véritable autonomie de fonctionnement et les moyens de garantir la sécurité des usagers comme des personnels en temps normal ! Comme si le ministère souhaitait la survenue des incidents, et non leur prévention, même si cette dernière doit en passer par quelques heures de suspension des cours... En fait, je le répète, ces consignes de l’Éducation nationale n'ont d'autre fin que de faire assurer par les établissements scolaires un ordre public que l’État actuel ne semble plus en mesure d'assumer et d'assurer lui-même. A moins que le ministère ne souhaite des affrontements aux portes des lycées pour mieux dénoncer ensuite « l'irresponsabilité » du mouvement de contestation et le décrédibiliser aux yeux du grand public : une stratégie somme toute classique, mais pas toujours efficace, au regard de l'histoire des mouvements sociaux dans notre pays et ailleurs.

 

Ce qui est certain et sans préjuger des événements de jeudi, c'est l'embarras du gouvernement face à une situation qu'il croyait, hier encore, bien contrôler.

 

Qu'en sera-t-il, ainsi, ce 31 mars ? Le mouvement de contestation, pourtant bien essoufflé ces deux dernières semaines, peut-il reprendre la main et faire douter le gouvernement, à défaut de le faire céder, ce qui, à l'heure actuelle, semble difficile (sans être, pour autant, impossible...) ? La rue peut-elle imposer « son » (sic!) point de vue au Pays légal ? Les multiples colères françaises, attisées par le mépris gouvernemental à l'égard de ses opposants (et cela depuis le début du quinquennat) et l'arrogance de quelques grands oligarques comme MM. Gattaz ou Tavares, peuvent-elles déborder en une révolte sociale aux conséquences forcément imprévisibles, autant pour le meilleur (s'il en est un) que pour le pire ?

 

Georges Bernanos, ce royaliste éternellement encoléré et profondément humain, affirmait qu'il ne fallait pas hésiter à courir le risque d'une révolte ouvrière pour ébranler une société d'injustice(s) : peut-on attendre la même chose d'une émeute lycéenne, de ce « péril jeune » évoqué désormais (mais en d'autres termes, plus prudents...) par la Gauche de gouvernement ? Il y faudrait des raisons supérieures et une direction « souveraine », une « pensée Antigone » qui n'apparaît pas encore clairement, pour faire que du mal d'un désordre de rue naisse le bien reconnu de la Cité. Il est tard, mais il n'est pas trop tard pour y penser, et y travailler...

 

 

 

 

(à suivre : les désordres de la rue et le désordre de l’État ; le « Que faire ? » des royalistes en temps de colère ; les propositions royalistes pour le monde du travail ; le « tiers-pouvoir lycéen et étudiant » ; etc.)

 

 

21/03/2016

Cette mémoire qui gêne les bien-pensants...

Dimanche matin, il faisait bien froid et le printemps semblait prendre son temps pour mieux se faire désirer : cela n'a pas empêché une petite délégation du Groupe d'Action Royaliste de fleurir la statue parisienne du roi Henri IV, sur le Pont-neuf. Bien sûr, cet hommage discret peut faire sourire et certains peuvent se demander à quoi bon entretenir le souvenir d'une histoire forcément passée à l'heure de la connexion et de l'immédiateté, de la mondialisation et de la consommation, de la distraction et de la confusion universelles.

 

Et pourtant ! L'histoire n'est pas une grande chose morte, elle est un champ d'expériences toujours renouvelées et dont il serait dommage de ne retenir aucune leçon, et elle est le rappel toujours utile des risques que porte toute vie en société, mais aussi des motifs d'espérance au cœur des désastres, des possibilités du meilleur quand tout semble vain, des victoires qui se préparent et des nécessités de la résistance aux vents mauvais qui, parfois, balayent nos vieilles terres... En d'autres temps, pas si lointains, Jacques Bainville a apporté quelques preuves de l'importance de connaître bien l'histoire pour ne point en éprouver les retours malheureux ou les revanches dévastatrices : ses articles de l'après-guerre de 1918 sont des actes de prévention, malheureusement négligés par une IIIe République trop sûre d'elle-même et trop idéologique pour penser au-delà de ses seuls horizons électoraux, et l'on connaît la suite.

 

L'histoire nous offre aussi quelques hautes figures de courage, de bonté et de sens politique : Henri IV mais aussi Jeanne d'Arc, entre mille exemples possibles, sont de celles-ci, et il n'est pas inutile de s'en souvenir et, au-delà, d'en perpétuer le souvenir sans en méconnaître les côtés humains, dans leurs qualités comme dans leurs défauts. Si Henri IV mit fin aux guerres de religion, Jeanne d'Arc, elle, permit la reconquête du royaume de France par le roi légitime, même si celui-ci, après l'impulsion johannique, préféra suivre une autre stratégie militaire que celle de la jeune fille de Domrémy, et parce que, en définitive, les deux se retrouvaient dans la même logique d'un « Politique d'abord » qui pouvait admettre des chemins différents mais qui passaient tous par Reims...

 

Aussi, la mauvaise querelle cherchée à Philippe de Villiers par quelques journalistes et le silence de l’État et de sa magistrature suprême dans l'affaire de l'anneau de Jeanne d'Arc me semblent-ils révélateurs de cette attitude d'un Pays légal qui n'aime guère qu'on lui rappelle qu'il n'est rien sans ce Pays réel dont il se nourrit et qu'il méprise dans le même temps. L'anneau est-il authentique ? Je veux bien croire qu'il l'est, même si le doute peut subsister : mais le symbole est bien là, lui, et c'est cela qui compte. Et les foules qui s'empressaient au Puy du Fou, ce dimanche 20 mars, pour la présentation de l'anneau par ceux qui l'ont heureusement racheté lors d'une récente vente aux enchères en Angleterre, montrent bien que les peuples, au sens fort du terme, ont besoin de symbolique et pas seulement de « consommation » ou de matérialisme : en somme, ce supplément d'âme qui fait tant défaut à notre époque...

 

La République a, dans cette affaire, brillé par son absence : alors qu'elle s'était mobilisée, il y a quelques années, pour récupérer des manuscrits attribués à Maximilien Robespierre (celui-ci avait supprimé la particule d'origine de son nom en 1791, avant que de supprimer ses adversaires...), elle n'a pas bougé un cil lorsque l'annonce de la vente d'un anneau ayant appartenu, selon les vendeurs dignes de foi, à Jeanne d'Arc, a été portée à la connaissance du monde des historiens et des amateurs d'antiquités... Certes, le ministère de la Culture n'a plus le lustre et... la culture qu'il pouvait avoir du temps de son illustre premier locataire, André Malraux, mais tout de même ! Qui ne connaît Jeanne d'Arc ? Son histoire et sa destinée tragique, sa lutte pour la liberté du royaume et sa foi profonde, passionnée ? Il est vrai qu'elle a disparu des programmes scolaires depuis un certain temps déjà, au collège comme au lycée, et que son évocation apparaît à nombre de nos contemporains oublieux de la mémoire nationale comme un relent de nationalisme ou de militarisme, voire de fanatisme...

 

L'ironie des journalistes de Canal+ lundi midi et l'effroi de l'hebdomadaire L'Obs, ce même jour sur son site internet, sont les deux masques de cette grande peur des bien-pensants qui voient dans toute épopée nationale, fût-elle médiévale et, selon François Reynaert, « féodale » (comme si la « nation » ne puisait pas son histoire dans les époques qui ont précédé l'apparition tardive de ce terme né a posteriori pour signifier cette création originale et pas forcément jacobine...), un enracinement préjudiciable à une mondialisation qu'ils croient encore heureuse quand elle n'est plus qu'une idéologie des oligarchies et non des peuples...

 

D'ailleurs, la revendication (tardive) des Britanniques sur cet anneau tout d'un coup si précieux à leurs yeux alors qu'ils l'avaient laissé vendre il y a quelques semaines sur leur propre sol sans, à ce moment-là, réagir, en dit long sur le retour des mémoires qui s'opère en Europe et sur la volonté de certains États de renouer avec cette part d'eux-mêmes qu'ils avaient parfois oubliée. Bien sûr, la France ne devra rien céder et ne répondre à cette provocation anglaise que par un refus ferme mais courtois (voire « cordial »...) : mais c'est avec l'esprit de Jeanne d'Arc et avec celui du roi Henri IV qu'il lui faut, d'abord et politiquement comme intellectuellement, renouer... Non pour diviser en Europe mais pour unir, en France, et pour parler haut et fort dans le monde.