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16/06/2017

Quelle démocratie promouvoir ?

« Le royalisme pour une vraie démocratie » : c'est le thème du prochain « Banquet Camelot du Roi » du Groupe d'Action Royaliste qui aura lieu au moment même du second tour des élections législatives. Certains ont été surpris par le titre du Banquet, me citant les formules ironiques de Georges Bernanos sur cette fameuse démocratie amnésique de ses propres promesses ou « mère des totalitarismes » comme évoquée dans son discours d'après-guerre à la Sorbonne. Mais il y a sans doute malentendu sur la compréhension de l'intitulé du banquet, et cela tient à la polysémie du terme démocratie et à ses pratiques différentes ou revendiquées par nombre de « démocrates » autoproclamés qui confondent leur opinion avec l'obligation de croire ce qu'ils disent...

 

Le mot démocratie a une longue histoire et celle-ci n'a pas toujours été heureuse. Née à Athènes sous le nom d'isocratie (« le pouvoir de l'égalité »), la démocratie est, dès ses origines, critiquée et contestée : certains y voient le risque d'une trop grande arrogance de la cité au détriment de toute raison et humilité, et les discours de Périclès (autant que sa violence à l'égard de ceux qui remettaient en cause l'hégémonie d'Athènes sur le monde grec) sont empreints d'une ambiguïté que le témoignage favorable de Thucydide ne dissipe pas entièrement. Maurras y voyait, d'ailleurs, la cause des malheurs d'Athènes et de sa disparition politique au cours du quatrième siècle avant Jésus-Christ.

 

Il faudra attendre le XVIIIe siècle pour que le mot réapparaisse puis s'impose dans les deux siècles suivants, aussi bien dans le vocabulaire politique que dans la hiérarchie des systèmes ou des idéologies politiques, mais avec des confusions qui, parfois, sont à la fois voulues par ceux qui les commettent et subies par ceux qui les entendent... La Démocratie écrite avec un grand « D » est d'abord une idéologie avant même que d'être des institutions : celle qui fait du « démos » (le peuple des citoyens reconnus comme tels, ce qui peut limiter leur nombre et écarter nombre de sujets du Droit...) la source de toute légitimité et de toute souveraineté mais, en démocratie représentative, la réserve à quelques uns dans la prise de décision finale et empêche le « pays réel » de pouvoir peser sur ce qui, pourtant, le concerne parfois directement. Ce n'est donc pas notre définition d'une « vraie démocratie » telle que nous la pensons et la souhaitons pour notre pays.

 

Dans la lignée d'un La Tour du Pin et des grands décentralisateurs du XIXe siècle, jusqu'au « premier fédéraliste de France » tel que se définissait Maurras en 1950, nous souhaitons une vraie représentation du « pays réel » et une décentralisation des pouvoirs au bénéfice des régions, des communes mais aussi des quartiers et des professions, des universités et des lycées, entre autres. Il s'agit bien de réactiver les multiples républiques françaises qui font vivre la nation en ses diverses composantes et en toutes ses dimensions. Cela a bien peu de choses à voir avec cette République, même cinquième, qui découpe et recoupe au seul gré du Pouvoir central et sur un coin de table les régions françaises (ainsi que l'a fait M. Hollande un soir de 2014), sans aucun égard pour les souhaits des provinciaux eux-mêmes et au mépris de l'histoire de celles-ci et de la nation. Les Bretons, par exemple, ont souffert et souffrent encore de ces décisions prises à Paris, et, s'ils dénoncent un jacobinisme qui reste la colonne vertébrale de la République, ils n'en tirent pas encore toutes les conséquences institutionnelles mais sentent confusément que la démocratie dite française (que l'on pourrait qualifier, plus véridiquement, de « parisienne » et « parisianiste ») n'est pas la « vraie démocratie », du moins celle qui permettrait une forme de reprise en main par eux-mêmes des décisions s'appliquant à la Bretagne, mais plutôt une sorte de « démocrature » administrative, contrôlée depuis Paris et adoubée par les institutions européennes de Bruxelles.

 

Ainsi, la définition de la démocratie que nous revendiquons n'est pas celle du gouvernement d'un « pays légal » politicien, administratif et centraliste, sur le « pays réel » (et nous continuerons, invariablement, à dénoncer cette démocratie-là), ni d'une gouvernance mondialisée qui vanterait de grands principes moraux pour mieux détruire toute tradition et résistance locales (n'est-ce pas là le fameux « globalitarisme » qui s'étend sous le couvert de mondialisation et de modernité ?), mais bien plutôt celle d'une redistribution des libertés et pouvoirs concrets des « pays réels » aux citoyens par le biais d'institutions (et d'élites, pourquoi pas ?) locales, politiques comme professionnelles, et par leur pratique régulière sous des formes diverses et adaptées à notre temps (et, donc, à l'ère numérique sans tomber néanmoins dans les excès d'une virtualité parfois desséchante).

 

Nous ne proposons pas forcément un « projet clés en main », mais bien plutôt des axes de réflexion et d'action dans les domaines politique, économique et social, avec la forte intuition, soutenue par l'expérience de l'histoire et de la pratique des sociétés humaines en France, que seule une Monarchie fédérative, fort trait d'union entre tous les éléments de la pluralité française, peut, simplement, permettre la mise en place et l'exercice plein et entier de cette démocratie ou, plutôt, de ces démocraties réelles, autonomes, vives et mesurées à la fois, de proximité comme d'efficacité. En somme, ce que n'a pas su (ou voulu) faire la République, qu'elle soit jacobine ou girondine...

 

 

 

15/01/2017

La Cinquième République n'est pas la Monarchie !

Dans le cadre de la nouvelle enquête sur la Monarchie, je recueille les objections faites à la Monarchie, et j’essaye d’y répondre en quelques lignes : n’est-ce pas ainsi le meilleur moyen de préciser ce que proposent les royalistes et d’en débattre ? Aujourd’hui, voici une objection souvent entendue ces jours-ci…

 

 

 

« Avec la constitution de la Cinquième République, et comme le dit M. Mélenchon, la France est déjà en « monarchie » : alors, pourquoi vouloir changer ce système ? »

 

 

C’est un argument que l’on entend effectivement souvent dans les rangs de la gauche radicale et chez les nostalgiques de la Troisième et, plus encore, de la Quatrième Républiques, mais aussi chez certains conservateurs et quelques gaullistes. Sans doute y a-t-il dans ce propos un aspect à la fois polémique et simplificateur qui tient aux discours politiques qui se prétendent « antisystème », mais, au regard de notre définition d’une Monarchie « à la française » qui transmet la magistrature suprême d’une génération à la suivante lors de la mort du monarque par la simple formule « le roi est mort, vive le roi », la Cinquième République reste bien, qu’on le regrette ou non, une République qui se déchire dans un féroce combat des chefs à chaque élection présidentielle…

 

Il est vrai, néanmoins, que depuis ses origines, et au-delà des polémiques évoquées plus haut, la constitution de la Cinquième a souvent été comparée à une « monarchie républicaine » ou décrite comme telle, et Maurice Duverger en avait fait le titre d’un livre célèbre jadis étudié dans toutes les facultés de Droit : en somme, une République qui se donnerait un roi tous les sept ans, puis tous les cinq ans, le suffrage jouant le rôle de l’ancienne acclamation populaire et de sacre de Reims. Mais, et surtout depuis que le mandat présidentiel a été réduit à cinq ans, la République présente le spectacle, parfois indécent au regard des difficultés des populations ou des enjeux contemporains, d’une sorte de « présidentielle permanente », qui se fait évidemment plus vive les neuf mois précédant le scrutin.

 

Or, dans une Monarchie héréditaire et successible, la magistrature suprême de l’Etat échappe au jeu électoral et, donc, suscite moins de convoitises et moins de querelles d’egos, tout en assurant la continuité de l’Etat (en particulier de sa représentation et de sa parole, garantie par la présence du souverain) en cas de crise ministérielle ou parlementaire, ce que l’on a vu chez nos voisins espagnols et belges ces dernières années malgré le peu de pouvoirs concrets des monarchies locales…

 

Ce qui distingue aussi la Cinquième République de la Monarchie « pleine et entière » qui nous paraît souhaitable, c’est la structure même de l’Etat et de la prise de décision dans le pays : la Monarchie, symbole d’unité par elle-même, n’a pas besoin de la « centralisation centraliste » qui, depuis la Révolution, enferme les énergies du pays dans une cage de fer dont les clés sont à Paris, entre l’Elysée et le Palais-Bourbon, mais aussi de plus en plus à Bruxelles, dans les palais de verres et d’acier de « l’Europe ». Le roi, trait d’union entre les régions et les communautés, est le maître de la diplomatie (ce que la Cinquième République a repris de l’ancienne Monarchie, et non l’inverse) et il incarne (et exerce) les pouvoirs régaliens (qui, d’ailleurs, veulent dire « royaux », à l’origine) : il peut ainsi redonner aux régions, aux communes et aux quartiers, une grande part des pouvoirs qui, aujourd’hui, sont aux mains des parlementaires ou des ministres de Paris et de Bruxelles.

 

Ainsi, la Monarchie n’est pas ce que la Cinquième République a pu, légalement et constitutionnellement, être, c’est-à-dire une monocratie incarnée, plus ou moins bien, par le locataire de l’Elysée…

 

 

20/02/2009

Préférence régionale ?

La crise guadeloupéenne est, en fait, révélatrice de quelques blocages de notre système politique et pas seulement social : en écoutant l’émission de Jean-Jacques Bourdin sur RMC depuis quelques jours, les réactions du journaliste comme celles de nombreux intervenants sont intéressantes, parfois surprenantes et certaines choquantes, et en tout cas donnent à penser…

 

Ainsi, M. Bourdin, en évoquant cette crise, ne cesse de dénoncer la centralisation et le parisianisme, en évoquant le mépris de Paris à l’égard des provinces, métropolitaines comme ultramarines. De plus, à la suite d’une auditrice très en colère, il dénonce le fait que des métropolitains mais aussi des étrangers (par exemple des Suédois…) prennent la place des « locaux », des Guadeloupéens, du coup relégués dans une situation de chômage ou d’assistanat…

Cela appelle plusieurs remarques : la République, depuis la Révolution, est marquée, voire identifiée, par une centralisation statutaire et institutionnelle qui, néanmoins, commence à reculer devant les lois de décentralisation des années 1981-82 et 2003-04, lois qui, mal encadrées ou maladroites dans certains cas, ont aussi entraîné des dérives financières dont il faudra bien reparler car elles sont responsables du creusement des déficits publics. Comme quoi ce qui devait être une réforme utile peut tomber dans des travers qui la discréditent : là aussi, il sera nécessaire de revenir sur ce problème.

La République politique est aussi responsable (après en avoir été le fruit) de l’idéologie de la « volonté générale », forcément unique par essence, et qui fait que Paris, considéré comme centre décisionnel sur le plan administratif et économique, développe un véritable complexe de supériorité, politique mais pas seulement…

En somme, les propos de Bourdin sont significatifs d’un « ras-le-bol » (parfois exagéré, d’ailleurs) des provinces à l’égard d’une centralisation qui s’est trop souvent faite méprisante et a diffusé dans les élites économiques et politiciennes (ce que Maurras nommait « le pays légal ») un esprit souvent détestable à l’égard du « pays réel » : déconnection dramatique entre élites et « peuples » (le pluriel n’est pas anodin) qui s’est parfois traduite par des crises graves dont les chouanneries de l’époque révolutionnaire ne furent pas des moindres… Déconnection entre la République et les communautés, entre la République et les corps citoyens

Une conséquence dénoncée en son temps par l’autonomiste provençal et nationaliste fédéraliste Charles Maurras, devenu, pour donner plus de force à sa réflexion et à son action politiques, royaliste d’Etat…

Mais, si la République, par sa déconnection des réalités d’un pays qui ne se limite pas à sa capitale parisienne, semble incapable de comprendre et d’agir, en Guadeloupe comme ailleurs, cela veut-il dire qu’il est impossible de retisser le manteau coloré de l’unité française ? L’échec de la République n’est pas, pour autant, l’impossibilité pour tout Etat français de réussir cette « nouvelle conciliation française », visiblement nécessaire en Outre-Mer comme ailleurs, ne serait-ce aussi que pour désarmer les démagogues, indépendantistes ou non, qui n’hésitent pas à faire la politique du pire pour atteindre leurs objectifs.

 

Autre remarque : comme je le signalais plus haut, une des intervenantes à l’émission de M. Bourdin s’indignait, tout à l’heure, que les Guadeloupéens ne soient pas prioritaires sur l’île pour occuper les emplois, dont beaucoup sont tenus par des « métros » (d’autres Français, donc) ou des étrangers… En somme, le principe ici défendu par cette auditrice et relayé par le journaliste est celui d’une « préférence régionale » qui va encore plus loin que la préférence nationale aujourd’hui interdite par les règlements de l’Union européenne (au nom de la lutte contre les discriminations à l’embauche et, surtout, de la libre circulation des personnes et des biens…)! A l’heure où il est de bon ton de dénoncer toute forme de protectionnisme (dont la définition varie selon l’interlocuteur), les syndicats guadeloupéens revendiquent un « exclusivisme régional » qui, d’une certaine manière, pourrait se résumer par « Vivre et travailler au pays ». Ainsi, quelle condamnation des principes mêmes mis en avant par le gouvernement et l’Union européenne !

L’auditrice évoquée plus haut rajoutait qu’il fallait tout faire pour mieux former sur place les populations locales au monde professionnel, par le biais de l’éducation nationale et du monde du travail lui-même : pourquoi pas ? Mais ce qui vaut pour la Guadeloupe peut, dans ce cas, valoir aussi pour la métropole qui, aujourd’hui, connaît cette situation absurde de voir plusieurs centaines de milliers d’emplois non pourvus (faute de candidats ou de jeunes formés aux métiers demandeurs, faute de volontaires aussi…) tandis que plus de 2 millions de travailleurs, d’employés, de cadres français hantent les locaux du « pôle emploi »… Il est des contradictions qu’il faudra bien un jour résoudre !

Je dois avouer que je ne suis pas partisan d’une « stricte » préférence locale, régionale ou nationale, même si je suis favorable à faire appel, effectivement et dans la mesure du possible, « aux plus proches », dans un souci d’équilibre et de respect raisonnable des particularités locales : or, je ne suis pas sûr que notre actuelle République, coincée par ses principes idéologiques (économiques comme politiques) et ses obligations à l’égard du système libre-échangiste européen comme mondial, soit capable de résoudre les contradictions qui se font jour de plus en plus nettement aujourd’hui, en particulier en temps de crise, toujours elle-même révélatrice… Cela ouvre donc, a contrario, des possibilités de réflexions et de propositions nouvelles : encore du travail pour les royalistes sociaux !

 

 

 

Post-scriptum : cette note n’évoque la Guadeloupe que comme un élément révélateur d’une situation plus générale et pas seulement ultramarine, et je ne traite pas exactement, donc, de sa réalité propre : cela fera l’objet d’une autre note, prochaine je l’espère…