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22/06/2009

Sarkozy chez Louis XIV.

Ce lundi se tient le Congrès à Versailles et la République se donne des grands airs, comme si elle voulait, dit-on, copier l’ancienne Monarchie absolue : d’ailleurs, n’est-ce pas la statue du roi Louis XIV qui accueille les parlementaires et le président ? Ainsi, comme l’y autorise désormais la Constitution, M. Sarkozy, prince des apparences, va prononcer son « discours du trône » dans le palais des rois : un de mes collègues, dans la salle des profs, ironisait : « l’hommage du vice à la vertu », ce qui ne pouvait qu’enchanter le fidèle royaliste que je suis…

 

En fait, M. Sarkozy, au regard de l’Histoire, n’est que ce « bourgeois gentilhomme », trop arriviste pour comprendre le mystère de l’Etat et des devoirs qu’il impose : s’il se veut hyperactif, il lui manque la patience, cette maîtrise humaine du temps qui permet d’inscrire l’action politique dans la durée. Il confond vitesse et précipitation et oublie que les grandes réformes, si elles nécessitent un vigoureux « coup de rein », doivent aussi s’enraciner pour s’épanouir véritablement. Il lui manque le temps, et l’humilité devant celui-ci : il n’est pas un roi, il n’est que le chef d’une majorité provisoire qui durera le temps d’un ou deux quinquennats.

 

D’autre part, M. Sarkozy confond les apparences avec le prestige : quand Louis XIV soigne sa tenue et le décor de la Monarchie, il le fait avec l’ambition de servir l’Etat en le mettant en scène. Il ne s’agit pas, en somme, de faire de la politique-spectacle, mais de mobiliser les formes spectaculaires pour prouver la puissance de l’Etat et sa capacité à rayonner, y compris au-delà des frontières. Le prestige de la Monarchie permet à la France de montrer au monde qu’elle est, fondamentalement, un Etat et une civilisation, et pas seulement une société égale aux autres… Cette stratégie monarchique vaudra à Versailles d’être imité un peu partout en Europe et, donc, d’être la référence sur laquelle les autres pays, sans parfois bien le saisir, calqueront leur politique du prestige…

 

Or, que restera-t-il, dans quelques décennies, de l’ère sarkozienne ? Quel grand projet de civilisation laissera-t-il à la mémoire des générations futures ? Quand Versailles reste une scène de la politique (est-ce un hasard si la République y donne ses grands rendez-vous ?) et que Louis XIV peut encore inspirer nos politiques et nos stratégies, que ce roi-soleil incarne encore pour les Etrangers « la France », que peut-il rester de celui qui, malgré ses talents certains de bateleur et quelques réformes dont il est trop tôt encore pour mesurer toutes les conséquences (bonnes ou mauvaises, d’ailleurs), s’aveugle sur ce qu’il est lui-même ?

 

Demain, le château de Versailles sera rouvert au public : il y entendra les échos de la grandeur passée des rois ou plus exactement la grandeur passée de la France sous les rois, à travers toutes les pièces, les tableaux, les jardins… Ce prestige-là ne meurt pas, quand le discours de l’actuel président se sera déjà envolé des mémoires qui ne retiennent que l’essentiel…