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30/03/2011

Un certain 6 octobre de l'année 1789...

 

Je me suis retrouvé lundi après-midi, par le plus grand des hasards, à moins qu’il s’agisse d’un signe de la Providence, quelques années en arrière, en fait plus de deux siècles ! J’étais devant le château de Versailles, non loin des fenêtres du roi Louis XVI, tandis qu’une foule vociférait et tirait des coups de feu en l’air : le 6 octobre 1789 ! Soudain, la fenêtre du premier étage s’ouvrit et le roi s’avança, sans un mot, puis salua la foule grondante : observant la scène, je ne pus m’empêcher de lancer un vibrant « vive le roi ! » (vieux réflexe, sans doute…) qui fut repris par des dizaines de poitrines massées sous le balcon royal… Mon cri tombait bien, c’était dans le script… et dans l’histoire !

 

Rassurez-vous, si j’ai bien vécu cette scène, je n’ai pas pour autant abusé de substances hallucinogènes : je me suis juste retrouvé à côté du tournage d’un film sur les derniers moments de la Monarchie à Versailles, sur les lieux mêmes où s’était joué le drame… Drôle d’impression néanmoins que ce retour en arrière, ce voyage dans le temps, qui me faisait être là où, en définitive, tout s’est fait, ou plutôt, « défait ». Dans son « Histoire de France », Jacques Bainville décrit sobrement la scène et ses conséquences : « La foule se porta alors sur Versailles, envahit l’Assemblée et le château, égorgea les gardes du corps, réclama la présence du roi à Paris. La Fayette le promit et, le 6 octobre, toujours accompagné de l’émeute, ou plutôt son prisonnier, conduisit dans la capitale, roi, reine, dauphin et députés. On se consola en répétant le mot idyllique : « Nous amenons le boulanger, la boulangère et le petit mitron. » La vérité, très grave, c’était que la royauté et l’Assemblée (qui, regardant l’armée comme une force contre-révolutionnaire, n’avait pas admis un instant la résistance) avaient également capitulé. Désormais, l’émeute tenait ses otages. Le jour où les plus violents seraient maîtres de Paris et de sa municipalité –de sa Commune,- ce jour-là, ils seraient les maîtres du gouvernement. L’histoire, le mécanisme, la marche de la Révolution jusqu’au 9 thermidor tiennent dans ces quelques mots. »

 

Ainsi, le 6 octobre, date à peine évoquée dans les manuels scolaires, apparaît-elle déterminante car elle marque effectivement la mise sous tutelle d’une royauté et de son Assemblée nationale (acceptée par le roi, peut-être d’ailleurs comme un moyen de court-circuiter des privilégiés qui, auparavant, avaient tant fait pour l’abaissement de l’Etat royal…), tutelle terrible car sans chefs autres, en attendant pire, que l’Opinion parisienne, celle de ceux qui parlent le plus fort, parfois au détriment de la simple raison et, en tout cas, de la juste mesure. On connaît la triste suite et fin de cette tragédie qu’il était encore possible, au matin du 6 octobre, d’éviter…

 

« Vive le roi ! », clamais-je, dans une sorte de cri instinctif qui était le même que celui d’une foule qui ne pensait pas encore à la République si d’autres, plus discrets et manœuvriers, trouvaient dans les événements un moyen de s’approcher du Pouvoir avant que de se l’approprier…

 

Je fermais les poings : ah, si le 6 octobre 1789 le roi avait osé la fermeté, la suite tragique serait-elle advenue ? Si Louis XVI avait été Louis XIV ! Mais le roi de 1789 était persuadé, sans doute, que les hommes étaient bons et raisonnables, qu’ils ne se risqueraient pas à d’autres violences et que tout finirait par s’arranger et par quelques chansons...

 

Par quelques chansons ? « La Carmagnole » fut le dernier chant qu’entendit, un matin du 21 janvier 1793, ce roi humaniste…

 

Sans doute, en ce jour d’un hiver aussi froid que la Terreur est glacée, selon le mot de Saint-Just, « Louis Capet » repensa-t-il à ce 6 octobre versaillais et à ses rêves d’humanité qu’il était peut-être, en fait, le seul à espérer…

 

Ce lundi, devant le balcon du roi, j’ai serré les poings : je connaissais la fin de l’histoire.

 

 

05/10/2009

L'incendie suspect de l'hôpital royal de Versailles.

J'étais au lycée Hoche samedi  matin, au moment même où l'ancien hôpital royal (voisin de l'établissement scolaire), celui appelé aussi ancien hôpital Richaud, était en train de brûler : la fumée noire surplombait ma salle de cours mais sans danger pour les élèves ni le lycée lui-même, et l’agitation liée à l’incendie (sirènes de pompiers, hélicoptère survolant l’incendie, etc.) n’a guère empêché ma classe de Première S de l’heure de composer sur des thèmes aussi divers que « L’Argent dans les révolutions industrielles » ou « l’automobile, moteur ou acteur de la 2nde industrialisation »… Sortant de cours à 13 heures, les bras chargés de copies, j’ai alors aperçu les dégâts, considérables : la toiture dévastée et effondrée par endroits laissait apparaître un squelette de bois noirci dont des fumées continuaient à s’échapper par endroits.

Il se trouve que, quelques jours auparavant, passant par la rue Richaud avec quelques collègues et regardant les dégâts du précédent incendie, celui survenu il y a à peine quelques mois et qui faisait suite à un premier feu en 2008, nous « plaisantions » (ironiquement, s’entend !) sur « le prochain incendie », évoquant les appétits de quelques promoteurs ou de ceux qui souhaitaient transformer cet espace historique en centre commercial ou en appartements de standing : nous ne savions pas alors que le samedi suivant nous repasserions au même endroit quand les flammes dévoreraient la partie jusque là épargnée de l’hôpital, triste ironie d’une triste histoire.

 

Soyons clairs : cet incendie est fort « étrange », à peine quelques jours après l'annonce qu'il était « sauvé » des promoteurs et mes collègues ne croient pas à un « malencontreux hasard » : 3 incendies en moins de 2 ans, c'est au moins un de trop... Cet incendie remet en cause la restauration prévue (et annoncée par la municipalité le 24 septembre dernier) dont le coût vient évidemment de « flamber », c'est le (triste) cas de le dire... De plus, ce feu éclate dans les combles, semble-t-il, deux jours avant que le site ne soit sécurisé par la force publique : il n’est pas étonnant alors que les Versaillais rencontrés ces derniers jours ne soient pas dupes de ce qui s’est réellement passé et des enjeux financiers qui se cachent derrière une affaire qui rappelle d’autres lieux et d’autres mœurs que l’on croyait réservée aux scénaristes de cinéma. L’opération financière de sauvetage risque d’être remise en cause, et l’état désormais de ruine des bâtiments risquent d’entraîner des solutions plus « rentables », c’est-à-dire la vente à des capitaux privés qui ne manqueront pas de transformer cet espace en un lieu à « fort rendement spéculatif et immobilier », l’argument mis en avant par certains étant désormais que les Versaillais ne peuvent supporter seuls par des dépenses (et donc des impôts…) supplémentaires le poids de la réhabilitation du lieu… J’ai d’ailleurs lu sur des forums qui rapportaient l’information de l’incendie des commentaires qui ne comprenaient pas pourquoi garder un hôpital en ruines, fut-il un monument historique…

Désespérant... Décidément, la cupidité reste la plus forte chez certains... Et certains promoteurs, disons-le comme grand nombre de Versaillais le pensent et le disent, sont des voyous !

 

 

 

Post-scriptum : des photos des dégâts et d’un appel à témoin sont visibles sur le lien du « Post » suivant : http://www.lepost.fr/portfolio/2009/10/04/1725331_incendie-de-l-ancien-hopital-royal-a-versailles-la-toiture-est-detuite.html .

22/06/2009

Sarkozy chez Louis XIV.

Ce lundi se tient le Congrès à Versailles et la République se donne des grands airs, comme si elle voulait, dit-on, copier l’ancienne Monarchie absolue : d’ailleurs, n’est-ce pas la statue du roi Louis XIV qui accueille les parlementaires et le président ? Ainsi, comme l’y autorise désormais la Constitution, M. Sarkozy, prince des apparences, va prononcer son « discours du trône » dans le palais des rois : un de mes collègues, dans la salle des profs, ironisait : « l’hommage du vice à la vertu », ce qui ne pouvait qu’enchanter le fidèle royaliste que je suis…

 

En fait, M. Sarkozy, au regard de l’Histoire, n’est que ce « bourgeois gentilhomme », trop arriviste pour comprendre le mystère de l’Etat et des devoirs qu’il impose : s’il se veut hyperactif, il lui manque la patience, cette maîtrise humaine du temps qui permet d’inscrire l’action politique dans la durée. Il confond vitesse et précipitation et oublie que les grandes réformes, si elles nécessitent un vigoureux « coup de rein », doivent aussi s’enraciner pour s’épanouir véritablement. Il lui manque le temps, et l’humilité devant celui-ci : il n’est pas un roi, il n’est que le chef d’une majorité provisoire qui durera le temps d’un ou deux quinquennats.

 

D’autre part, M. Sarkozy confond les apparences avec le prestige : quand Louis XIV soigne sa tenue et le décor de la Monarchie, il le fait avec l’ambition de servir l’Etat en le mettant en scène. Il ne s’agit pas, en somme, de faire de la politique-spectacle, mais de mobiliser les formes spectaculaires pour prouver la puissance de l’Etat et sa capacité à rayonner, y compris au-delà des frontières. Le prestige de la Monarchie permet à la France de montrer au monde qu’elle est, fondamentalement, un Etat et une civilisation, et pas seulement une société égale aux autres… Cette stratégie monarchique vaudra à Versailles d’être imité un peu partout en Europe et, donc, d’être la référence sur laquelle les autres pays, sans parfois bien le saisir, calqueront leur politique du prestige…

 

Or, que restera-t-il, dans quelques décennies, de l’ère sarkozienne ? Quel grand projet de civilisation laissera-t-il à la mémoire des générations futures ? Quand Versailles reste une scène de la politique (est-ce un hasard si la République y donne ses grands rendez-vous ?) et que Louis XIV peut encore inspirer nos politiques et nos stratégies, que ce roi-soleil incarne encore pour les Etrangers « la France », que peut-il rester de celui qui, malgré ses talents certains de bateleur et quelques réformes dont il est trop tôt encore pour mesurer toutes les conséquences (bonnes ou mauvaises, d’ailleurs), s’aveugle sur ce qu’il est lui-même ?

 

Demain, le château de Versailles sera rouvert au public : il y entendra les échos de la grandeur passée des rois ou plus exactement la grandeur passée de la France sous les rois, à travers toutes les pièces, les tableaux, les jardins… Ce prestige-là ne meurt pas, quand le discours de l’actuel président se sera déjà envolé des mémoires qui ne retiennent que l’essentiel…