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14/11/2013

Pas de coupable pour la marée noire...

 

Il y a onze ans, le Prestige, un pétrolier libérien battant pavillon du Bahamas avec un équipage roumain et philippin dirigé par des officiers grecs, avec 77.000 tonnes de fuel dans ses soutes, se brisait en mer après avoir dérivé durant six jours : 3.000 kilomètres de côtes françaises, espagnoles et portugaises allaient alors en souffrir les conséquences, et plusieurs centaines de milliers d’oiseaux, de dauphins, de phoques mourir, englués dans ce mazout visqueux qui s’échouait sur les plages de l’Europe atlantique. La mondialisation et la cupidité avaient encore conjointement frappé, au grand dam des habitants du littoral et de l’environnement…

 

Onze ans après la catastrophe, le tribunal espagnol chargé de juger l’affaire d’un « naufrage annoncé » (au regard de l’état du pétrolier et des avertissements émis par l’ancien capitaine du bateau qui avait, justement et prudemment, abandonné son poste de capitaine du Prestige trois mois avant le drame) a acquitté les trois accusés qui, à bien y regarder, paraissent être plus des lampistes que les véritables coupables de ce désastre : ceux qui auraient dû être jugés, c’est-à-dire l’armateur grec, l’affréteur russe, sans oublier la société de classification états-unienne qui a délivré le certificat d’aptitude à la navigation sans beaucoup de discernement, ne le seront jamais, semble-t-il…

 

Ce jugement est, lui aussi, une véritable catastrophe car il peut laisser croire que souiller les mers et les côtes n’est, après tout, pas si grave, en tout cas aux yeux de la Justice… Il est certain que ce verdict clément ne passera pas inaperçu chez les armateurs et dans les sociétés pétrolières !

 

La France se devrait de réagir et, non seulement de faire connaître son mécontentement face à ce jugement, mais de prendre des initiatives fortes pour éloigner les navires suspects de ses côtes, voire leur interdire l’entrée dans ses eaux territoriales, mais aussi pour accélérer la mise en place dans chaque pays de l’Union européenne, comme cela l’avait été évoqué au plus fort de l’émotion suscitée par la marée noire, de « ports refuges » susceptibles d’accueillir des navires en détresse et d’éviter qu’ils ne sombrent au large avec les conséquences que l’on sait. Mais, là encore, l’Union Européenne n’est guère motivée, freinée par les pressions des armateurs et de certains pays du sud de l’Europe, et tout simplement par sa propre logique libérale qui privilégie les affaires et le libre échange au souci environnemental…

 

A cette heure et à ma connaissance, le gouvernement de la République n’a pas officiellement réagi, ou pas assez fort pour qu’on l’entende… Tout un (triste) symbole !

 

 

22/06/2009

Sarkozy chez Louis XIV.

Ce lundi se tient le Congrès à Versailles et la République se donne des grands airs, comme si elle voulait, dit-on, copier l’ancienne Monarchie absolue : d’ailleurs, n’est-ce pas la statue du roi Louis XIV qui accueille les parlementaires et le président ? Ainsi, comme l’y autorise désormais la Constitution, M. Sarkozy, prince des apparences, va prononcer son « discours du trône » dans le palais des rois : un de mes collègues, dans la salle des profs, ironisait : « l’hommage du vice à la vertu », ce qui ne pouvait qu’enchanter le fidèle royaliste que je suis…

 

En fait, M. Sarkozy, au regard de l’Histoire, n’est que ce « bourgeois gentilhomme », trop arriviste pour comprendre le mystère de l’Etat et des devoirs qu’il impose : s’il se veut hyperactif, il lui manque la patience, cette maîtrise humaine du temps qui permet d’inscrire l’action politique dans la durée. Il confond vitesse et précipitation et oublie que les grandes réformes, si elles nécessitent un vigoureux « coup de rein », doivent aussi s’enraciner pour s’épanouir véritablement. Il lui manque le temps, et l’humilité devant celui-ci : il n’est pas un roi, il n’est que le chef d’une majorité provisoire qui durera le temps d’un ou deux quinquennats.

 

D’autre part, M. Sarkozy confond les apparences avec le prestige : quand Louis XIV soigne sa tenue et le décor de la Monarchie, il le fait avec l’ambition de servir l’Etat en le mettant en scène. Il ne s’agit pas, en somme, de faire de la politique-spectacle, mais de mobiliser les formes spectaculaires pour prouver la puissance de l’Etat et sa capacité à rayonner, y compris au-delà des frontières. Le prestige de la Monarchie permet à la France de montrer au monde qu’elle est, fondamentalement, un Etat et une civilisation, et pas seulement une société égale aux autres… Cette stratégie monarchique vaudra à Versailles d’être imité un peu partout en Europe et, donc, d’être la référence sur laquelle les autres pays, sans parfois bien le saisir, calqueront leur politique du prestige…

 

Or, que restera-t-il, dans quelques décennies, de l’ère sarkozienne ? Quel grand projet de civilisation laissera-t-il à la mémoire des générations futures ? Quand Versailles reste une scène de la politique (est-ce un hasard si la République y donne ses grands rendez-vous ?) et que Louis XIV peut encore inspirer nos politiques et nos stratégies, que ce roi-soleil incarne encore pour les Etrangers « la France », que peut-il rester de celui qui, malgré ses talents certains de bateleur et quelques réformes dont il est trop tôt encore pour mesurer toutes les conséquences (bonnes ou mauvaises, d’ailleurs), s’aveugle sur ce qu’il est lui-même ?

 

Demain, le château de Versailles sera rouvert au public : il y entendra les échos de la grandeur passée des rois ou plus exactement la grandeur passée de la France sous les rois, à travers toutes les pièces, les tableaux, les jardins… Ce prestige-là ne meurt pas, quand le discours de l’actuel président se sera déjà envolé des mémoires qui ne retiennent que l’essentiel…

 

30/01/2009

Prestige et service.

Mardi dernier, Jean-Jacques Bourdin, sur RMC, s’étonnait que 560 gendarmes soient mobilisés pour le voyage de deux heures du président Sarkozy à Châteauroux tandis que seulement 700 militaires étaient envoyés dans les Landes pour aider les populations à remettre en état les routes et les principales infrastructures dévastées par la tempête du samedi précédent : et il rajoutait qu’il y voyait un aspect « monarchique » (sic !) de notre République présente… Trop pour le prestige et pas assez pour le service !

En fait, M. Bourdin a raison (hors l’évocation incongrue à la monarchie qu’il confond avec sa caricature) : si l’Etat doit faire montre de prestige, c’est bien plutôt par le service qu’il doit le faire : j’ai souvenir qu’au moment d’un séisme survenu dans une région reculée du Maroc, le roi Mohammed VI y avait installé, quelques jours, son « quartier général » et qu’il y recevait ses invités. On aurait pu imaginer le chef de l’Etat, en France, organiser, au-delà des traditionnelles réunions de crise en pareilles circonstances, un véritable conseil des ministres et y recevoir des élus et personnalités politiques et socioprofessionnelles des régions sinistrées. Cela aurait manifesté, concrètement et à travers la présence sur le terrain de la magistrature suprême de l’Etat, la solidarité et la sollicitude de l’Etat et de la nation toute entière à travers son plus illustre représentant : là encore, une occasion manquée !