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01/08/2010

Starisation et règne de l'Argent en République.

Georges Balandier est un auteur trop souvent méconnu des médias et des royalistes eux-mêmes alors que ses réflexions rejoignent les préoccupations des monarchistes français, ce que j’avais déjà évoqué dans un article de… 1994 ! Son livre « Le dédale » a été pour moi une véritable révélation et je l’ai souvent cité alors dans mes discours : après tout, pourquoi bouder un sociologue qui se pose les questions auxquelles les royalistes cherchent eux-mêmes à répondre ?

 

Justement, dans son récent livre d’entretiens déjà cité sur ce blogue, Balandier souligne l’un des traits de la présente République, celle de la « starisation » du pouvoir présidentiel et du paysage politique ou, plus exactement, électoral : « Quelque chose apparaît, dans le fonctionnement actuel du politique, qui tient aux instruments aidant à l’action et contribuant à une connivence complaisante des acteurs. Cela conduit à une façon d’acceptation du vedettariat. (…) On est en train de produire et de multiplier les petites dramaturgies, les petites fictions imagées, qui recherchent un accord de l’opinion sur tel ou tel point. C’est de la connivence ainsi provoquée et construite que résulte la capacité de gouverner et de se maintenir, en contenant par la suite des dramatisations, le dissentiment. » Le monde des médias participe donc à cette starisation, cette « société du spectacle » qui se joue aussi sur la scène politique depuis quelques années, de Ségolène Royal, sacrée candidate miraculeuse de la Gauche avant l’élection de 2007, à Nicolas Sarkozy, dont les aventures (et mésaventures) conjugales, à défaut d’enrichir le débat politique, ont occupé les couvertures de la presse, autant celle qualifiée de « people » que celle se présentant comme « sérieuse »… Et la tragicomédie de l’affaire Bettencourt-Woerth, véritable feuilleton estival politico-juridico-financier à multiples rebondissements, semble bien aussi participer de cette spectacularisation, mais aussi de cette volonté, plus affirmée que toujours appliquée, de transparence et de morale, utilisée par les uns comme un bélier contre les autres… Au risque (mais en est-ce vraiment un, pour l’établissement politique ? La question mérite d’être posée) de lasser une opinion publique qui aimerait aussi bien que la presse comme les politiques abordent les vrais débats et acceptent la critique et la discussion !

 

Et ce ne sont pas les informations récentes sur la place prise par la communication présidentielle (et qui trouve sa place dans la stratégie pour 2012), autre élément de la promotion et du maintien du pouvoir en place, qui infirmeront le propos de Georges Balandier, tout comme le poids de plus en plus important du budget du SIG (Service d’information du gouvernement, chargé de diffuser la « bonne parole » gouvernementale et présidentielle…), passé de 6,2 millions d’euros dépensés en 2007 à 27 en 2009, soit 4 fois plus en seulement 2 ans ! Là encore, cela confirme un argument qu’avancent régulièrement les monarchistes, celui que c’est bien l’argent qui fait les élections et particulièrement la présidentielle, parfois plus sûrement que les électeurs, d’ailleurs de plus en plus contestataires (lors des premiers tours principalement) ou abstentionnistes. Une République si dépendante, dans son fonctionnement démocratique même, de l’Argent et des jeux d’influence des féodalités financières, peut-elle alors promouvoir et pratiquer concrètement une véritable équité sociale ? Au regard des dernières affaires en cours, des fonds levés à Londres par le ministre Wauquiez près de spéculateurs pour financer son « parti-écran » aux multiples magouilles du Parti socialiste en Provence, des affaires ( le pluriel n’est-il pas de mise, effectivement ?) Woerth (mari et femme)-Bettencourt (mère et fille) aux puissants du fameux « Premier cercle » des donateurs de l’UMP, je doute fort que la République trouve la force de trancher les liens qui la relient à l’Argent-Suzerain…

 

07/07/2010

La République en danger ?

Les affaires fragilisent la République, entend-on depuis quelques jours avec une certaine angoisse du côté des politiques et des journalistes, et ceux-ci nous refont, la main sur le cœur, la complainte des pleureuses dénonciatrices du « populisme » et de « l’antiparlementarisme », s’en prenant plus à la presse et aux « révélations » qu’à la réalité des affaires et aux scandales mêmes mis à jour ces derniers temps. Ce sont parfois les mêmes qui s’en prennent à l’équipe de France de balle-au-pied, aux joueurs surpayés et aux symboles d’un sport devenu une simple affaire commerciale, et qui, pourtant, ne veulent pas reconnaître que les mœurs politiciennes de la République ne valent guère mieux, avec ce même état d’esprit du type « Enrichissez-vous, et sans vergogne ni scrupule ! » qui prévaut jusqu’à la tête de l’Etat…

 

« La grande peur des bien-pensants » : ce titre de Bernanos s’impose aujourd’hui pour signifier l’attitude des hommes du gouvernement et d’un Etat aux abois faute d’avoir su, en temps voulu, « tailler dans le vif », c’est-à-dire prendre quelques mesures de précaution élémentaires pour éviter ce discrédit du pouvoir sarkozien, la première étant d’éviter le mélange des genres, de la finance et de la politique ! Jamais M. Woerth n’aurait du cumuler les fonctions de trésorier de l’UMP avec celles de ministre, du budget puis du travail, cela semble évident : ça ne l’est visiblement pas pour celui qui, aujourd’hui, se dit victime d’une cabale indigne.

 

En fait, plus encore que M. Woerth, c’est bien un système, celui d’une République oligarchique (et non pas monarchique comme elle pouvait paraître l’être à l’époque du général de Gaulle), qui est coupable aujourd’hui, mais dont M. Woerth est le « fusible » visible en attendant de provoquer d’autres courts-circuits jusqu’au faîte de l’Etat.

 

La République est menacée ? Sans doute mais, plus que par un hypothétique populisme, épouvantail sémantique politique qui a succédé au « fascisme », c’est par ses propres pratiques qui, jadis fatalement tolérées, sont aujourd’hui choquantes et insoutenables aux yeux d’une opinion publique qui ne se confond pas encore exactement avec le corps civique. La République s’est discréditée et est discréditée : ses coucheries permanentes avec l’Argent et ses Puissants révoltent ceux à qui elle demande de faire, encore et encore, des « sacrifices » quand des lois absurdes redonnent des millions d’euros à ceux qui en possèdent déjà par milliers… Il n’est pas impossible que le chèque de 30 millions d’euros fait à Mme Bettencourt au titre du fameux bouclier fiscal soit la goutte d’eau qui fasse déborder le vase !

 

Menacée, la République ? Cela peut être l’occasion de poser la question institutionnelle et de rechercher quel est l’Etat le moins susceptible d’être le fruit amer de l’Argent et le jeu des Puissants. La naissance, elle et contrairement aux élections, ne s’achète pas : cette indépendance qu’elle confère, par essence, à la magistrature suprême de l’Etat, peut permettre un meilleur équilibre entre les forces sociales et une « équité sociale » dont nos compatriotes appellent de plus en plus fort de leurs vœux, voire de leur colère.

 

L’effondrement de la République dans l’esprit de nos concitoyens ne doit pas entraîner une sorte de nihilisme qui, en définitive, remplacerait la loi de l’oligarchie par celle de la jungle : rétablir les notions de service et de « Res publica » est nécessaire pour éviter le pire. La Monarchie « à la française » a quelque véritable expérience en ce domaine, il serait trop dommage de la négliger !