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02/01/2008

1er janvier de la fidélité...

Mardi 1er janvier, premier jour d’une année qui en annonce 366… Il est presque 8 heures et Paris est désert, à peine troublé par quelques rares voitures sur l’avenue de Rivoli. J’entre dans la cour du Louvre, palais des rois capétiens : là encore, personne, et même les pigeons semblent avoir pris congé… Ambiance tout à fait irréelle, vraiment particulière.

 

Je crois en la force des symboles comme Mitterrand croyait aux forces de l’esprit : aussi, au milieu de cette cour que nos rois d’antan traversaient pour se rendre à leur paroisse de Saint-germain l’Auxerrois, je lance à forte et intelligible voix, à trois reprises, comme une formule magique destinée à changer les formes de notre monde (au moins politique…), celle qui résume ma fidélité et mes espérances : « Vive le Roi ! ». Dans cette cour immobile, les mots s’appuient sur les murs pour rebondir et finir en roulement de tambour, comme si j’étais cent voix à la fois…

 

Toujours dans cette cour déserte, j’entonne à tue-tête le refrain de « La Royale » que n’entendront, cette fois encore, que les pavés et les murs et, peut-être, quelques vigiles cachés derrière les fenêtres du Louvre.

 

8 heures sonnent de je ne sais où, comme pour mettre un terme à cette cérémonie symbolique, et me voilà reparti vers le Quartier latin, sifflotant gaiement sur le pont des Arts et devant l’Académie française, reprenant le chant de « la Jeunesse Royaliste » composé par Théodore Botrel à la fin du XIXème siècle et le « Vive Henri IV », hymne traditionnel des monarchistes d’avant l’Action Française, sans oublier « le chant des Camelots du Roi » en arrivant rue Saint-André-des-arts (en particulier devant le 33…). Puis, je finis mon petit périple « de fidélité » devant la statue de celui qui en représente l’exact inverse, par ses multiples revirements et corruptions, et que les républicains, sans honte, ont voulu honorer au cœur du Paris des intellectuels, le régicide Danton… S’installer au pied de cette crapule et déployer les épreuves du numéro de « l’Action Française » à paraître est un acte, là encore, éminemment symbolique et un rien provocateur…

 

Tout cela s’est fait dans un Paris désert, avec pour seuls témoins quelques moineaux et corbeaux, et les multiples fantômes de l’Histoire qui hantent cette ville et en font aussi le charme.

 

Acte inutile ? Sans doute au regard de l’efficacité politique immédiate mais cette forme de rituel n’est pas, pour moi, négligeable, et il faut des temps consacrés à la méditation et à l’expression personnelle de cette fidélité qui anime tant ma vie et éclaire mes engagements.

 

Pour que cette année 2008 ne soit pas désespérante…

 

01/01/2008

Les effacés de Slovénie.

Peut-on faire « disparaître » des hommes dans une société européenne sans que personne s’en émeuve, au vu et au su de centaines de milliers de personnes ? La réponse est malheureusement positive et la manière inquiétante, nous renvoyant aux pires songes d’Orwell… Cela s’est passé en 1992, en Slovénie, pays qui va présider l’Union Européenne dans quelques jours et c’est le journal « La Croix », décidément attentif lorsqu’il s’agit des droits et de la dignité des personnes, qui l’évoque dans son édition du 24-25 décembre 2007. Cet article, apparemment anodin, est stupéfiant et, en même temps, éminemment révélateur : « En 1992, cet archéologue d’origine serbe a été purement et simplement effacé, ainsi que 18 404 personnes, du registre des résidents permanents de Slovénie et transféré sur celui des étrangers. Pourtant marié à une Slovène de souche, il s’est alors vu confisquer ses papiers, aussitôt perforés, au guichet de la mairie alors qu’il déclarait la naissance de sa fille. Il est ressorti sans passeport, sans carte d’identité, sans permis de conduire et avec un espace vide à la place du nom du père sur le certificat de naissance de son enfant.

 

Un pour cent des Slovènes de l’époque sont ainsi devenus du jour au lendemain des « effacés », apatrides dans un pays où ils résidaient depuis des nombreuses années, perdant leurs droits les plus élémentaires. » Cet épisode montre, au-delà du fait brut, le piège de nos sociétés modernes, y compris démocratiques, qui veulent, à tout prix, maîtriser « l’identité » même des personnes, par le recensement (condamné, d’ailleurs, dans certains passages de la Bible…) et l’encadrement administratif, aujourd’hui renforcé par toutes les merveilles technologiques de l’informatique ou de la biométrie…

 

Les conséquences, dans une société devenue celle du « soupçon » (actualisation contemporaine de la « loi des suspects » de la 1ère République des années 1793-1794), peuvent être terribles, comme elles le furent en Slovénie : « Plus le droit de conduire, d’aller chez le médecin, de travailler, de retirer de l’argent de son propre compte bancaire, d’étudier, d’avoir un appartement, de toucher sa retraite. Réduit à la misère sans même pouvoir recourir aux aides sociales. A vivre la peur au ventre. (…)

 

Pour se régulariser, il fallait sortir du pays à ses risques et périls et obtenir des papiers dans les autres républiques bouleversées par le conflit [yougoslave], puis demander un visa en Slovénie. Certains n’en sont jamais revenus. Beaucoup, perdus, humiliés dans ce labyrinthe bureaucratique, se sont exilés. Certains même, désespérés, se sont suicidés. D’autres, comme Franjo Herman, un ouvrier du bâtiment qui a cotisé à la sécurité sociale en Slovénie pendant trente-trois ans, jusqu’au jour de son « effacement », sont décédés, faute de soins, l’hôpital refusant de les traiter parce qu’ils n’étaient plus couverts par l’assurance-maladie. » Cela s’est passé près de chez nous, et je dois avouer, à ma grande honte, que je n’en avais jamais entendu parler jusqu’à cette semaine : « effacement » réussi, visiblement, au point de rendre « invisible » ce véritable scandale humanitaire…

 

Sommes-nous, en démocratie française, à l’abri d’un tel drame humain ? J’aimerai en être certain, mais, par expérience propre, je ne peux le dire : lorsque, dans les années 80, je n’avais plus de carte d’identité valable, je me suis heurté dans de nombreuses administrations, dont la Poste, à des refus (par exemple) de me donner des lettres recommandées ou des paquets parce que je ne pouvais, administrativement, prouver que j’étais bien celui que je prétendais être, et cela a parfois donné lieu à de véritables incidents au guichet… Le plus grave était que je n’étais pourtant pas un inconnu et que les personnes qui voulaient que je leur montre des papiers « en règle » me connaissaient pourtant depuis des années, tant que ma carte avait été valable… Situation kafkaïenne ! Mais tout cela n’est rien par rapport à ces événements de Slovénie, bien sûr, qui ont coûté la vie à des dizaines de personnes et qui, aujourd’hui, ne sont pas totalement réglés : malgré le fait que la Cour constitutionnelle de Slovénie ait donné enfin raison aux anciens « effacés », l’Etat slovène refuse d’appliquer les décisions d’indemnisation de la Cour…

 

Bienvenue en 2008…