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14/01/2008

La BCE contre les salariés.

Il est des informations qui passent inaperçues et qui, pourtant, sont fort révélatrices d’un état d’esprit et d’une idéologie : ainsi la récente déclaration de Jean-Claude Trichet, gouverneur de la Banque Centrale Européenne (BCE), en partie résumée par « Libération » dans son édition du vendredi 11 janvier, et qui dénonce d’éventuelles augmentations salariales dans les pays de l’UE, au nom de la lutte contre l’inflation. Ce personnage, qui ne raisonne qu’en termes économiques, oublie visiblement que l’économie, si elle n’est plus au service des hommes mais juste au service de l’Argent ou de « principes », devient vite sauvage et inhumaine. Or ses propos montrent que l’orthodoxie financière lui est plus importante que les intérêts des salariés et que la juste rémunération de ceux-ci : « « La BCE ne tolérera pas de spirale inflation-salaires », a-t-il affirmé à l’issue d’une réunion du conseil des gouverneurs de l’institution monétaire (…). Alors que l’inflation est au plus haut depuis six ans et demi dans la zone euro (+3,1 % sur un an en décembre), les syndicats jugent légitimes de revendiquer des hausses conséquentes des rémunérations. C’est notamment le cas en Allemagne, où ils demandent des hausses de 8 % pour les fonctionnaires et une revalorisation pour les salariés du secteur privé. Il est « absolument essentiel » d’éviter ces effets de « second tour », a martelé le gouverneur ajoutant que la BCE se trouvait en état « d’alerte totale ». » La BCE avait déjà dénoncé le mois dernier l’instauration d’un salaire minimum pour les facteurs allemands (8 euros de l’heure en ex-RDA, 9,80 euros à l’ouest du pays), votée le 14 décembre par le Bundestag…

 

Ainsi, les salariés français sont prévenus : réclamer et parfois obtenir une augmentation de salaires est considéré comme un acte dangereux par la BCE, et donc condamnable, ce qui entraîne la « mobilisation » de la BCE, son état « d’alerte totale »… Où est donc l’Europe sociale dont on nous a tant rebattu les oreilles il y a quelques années pour nous faire accepter le traité de Maëstricht ? Où est la justice sociale ? Cette BCE, qui s’accommode bien (au nom du libre marché et de ses « règles ») des jeux boursiers qui coûtent si cher en emplois dans nos pays ; cette BCE qui veut imposer son orthodoxie libérale aux Etats au détriment des droits de ceux qui travaillent ; cette BCE est, il faut le dire, détestable, monstrueuse, ignoble… Je dois avouer que je tremble de colère en écrivant cette note et que je tape mon pauvre clavier avec une certaine rage tellement je suis écœuré par tant de mépris et d’ignominie de la part d’une institution qui se veut totalement indépendante des Etats et des citoyens et qui lance de tels diktats aux gouvernements.

 

Qu’on ne me parle plus d’une « Europe solidaire » si l’on ne souhaite pas mettre cette Banque au pas ou lui rappeler ses devoirs d’humanité ! Le chef de l’Etat français s’honorerait en dénonçant l’attitude irresponsable de la BCE : mais en a-t-il encore le pouvoir s’il en a toujours le droit ?

 

 

10/01/2008

La France et la construction européenne.

J’ai donné cette semaine à mes élèves de Première plusieurs sujets au choix pour le contrôle de Géographie comptant pour le 2nd trimestre : l’un d’entre eux portait sur « la France et la construction européenne, de 1950 à nos jours », thème qui reste d’actualité au moment où l’on commence à évoquer la prochaine ratification du traité « modificatif » constitutionnel de l’Union Européenne. Malheureusement, les copies rendues n’ont pas été à la hauteur de mes espérances, ni de celles des élèves concernés… L’Europe a beau être de plus en plus envahissante dans la vie quotidienne des citoyens français, elle reste encore largement méconnue, y compris des jeunes générations qui, pourtant, sont soumis depuis leur plus tendre enfance à la « pédagogie » (autre nom de la propagande…) européiste qui s’étale à longueur de colonnes dans les manuels d’histoire comme de géographie. Quant au rôle de la France dans la construction et dans l’Union européennes…

 

Pourtant, c’est en France qu’a été « lancée » la CECA (Communauté Economique du Charbon et de l’Acier) par la fameuse déclaration Schuman du 9 mai 1950, déclaration d’ailleurs rédigée par son ami et complice Jean Monnet. Mais c’est aussi la France qui, à plusieurs reprises, a freiné les dérives européistes : en 1954, par le vote parlementaire contre la CED (Communauté Européenne de Défense), vote qui montre l’hétérogénéité des oppositions à cette politique initiée par les démocrates-chrétiens puisque, au-delà des traditionnels contestataires gaullistes et communistes, une (courte) majorité des députés socialistes (53 contre 50) refuse cette ébauche de « défense européenne » ; en 1965, par la politique de « la chaise vide » pratiquée par la France gaullienne (bête noire des européistes) pour refuser l’idée d’une supranationalité qui condamnerait le pays à la soumission à une instance bureaucratique sans légitimité véritable ; en 2003, par la position particulière de la France face aux velléités états-uniennes d’intervention en Irak, intervention soutenue par la plupart des pays de l’UE et des futurs entrants de 2004 ; en 2005, par le référendum négatif sur le traité constitutionnel européen…

 

Cela a-t-il empêché la France de jouer un rôle de premier plan dans ce que l’on nomme la construction européenne ? Pas vraiment, et de Gaulle lui-même a pratiqué un « nationalisme pragmatique » qui ne refusait pas « l’Europe » mais entendait la faire sur les réalités, c’est-à-dire sur les nations historiques, avec les Etats politiques et non avec les seuls experts et banquiers ou autres idéologues qui font de l’Europe une nouvelle Parousie. Son idée d’une confédération européenne (et non d’Etats-Unis d’Europe, idée de Monnet) me semble encore possible et sans doute plus réaliste que les rêves d’un « Empire » commerçant et ludique, réglementaire et obligatoire, cette fameuse « Europe des cabris » qui l’exaspérait au plus haut point.

 

Les successeurs du général n’ont pas vraiment suivi son exemple et sa stratégie, faute de colonne vertébrale et, pour certains, de confiance en notre nation, considérée comme « trop petite » quand ils confondaient ainsi leur propre état d’esprit avec l’ambition nécessaire du pays qui, elle, ne souffre pas cette petitesse : de Gaulle avait bien compris que la France n’est elle-même que lorsqu’elle aspire à la grandeur, d’âme comme de politique, et que peu importe alors les plaintes des financiers et des actionnaires. « La politique de la France ne se fait pas à la Corbeille », rappelait-il avec raison.

 

La France a un grand rôle à jouer dans la construction européenne en cours mais elle n’est pas pour autant obligée de renoncer à ce qu’elle est, à ce qui fait sa particularité et sa liberté au regard de l’Histoire et de l’Europe : ce n’est pas en uniformisant que l’on créé l’unité d’un ensemble mais en permettant à chacun de développer ses propres qualités et d’en faire profiter ses partenaires. Il n’est pas certain que l’Union européenne actuelle soit à la hauteur des nécessités du moment comme de l’avenir à souhaiter… Ce n’est pas, en tout cas, en lui abandonnant notre destin de nation que l’on relèvera les défis contemporains.

 

08/01/2008

La chance d'un pétrole cher ?

Le baril de pétrole a franchi la semaine dernière la barre symbolique de 100 dollars. Cela n’est pas forcément une mauvaise nouvelle si les Etats en profitent pour impulser une nouvelle politique de l’énergie et des transports basée sur la sobriété et le partage, la mise en commun des modes de déplacement, dans la mesure du possible et le respect des libertés de chacun. En somme, cette hausse prévisible des prix de l’énergie peut même apparaître comme une véritable chance si nos entreprises, soutenues par une action intelligente des pouvoirs publics, savent saisir l’occasion de faire avancer la recherche et de développer des alternatives au « tout-pétrole ». Pour l’instant, les marques françaises sont en retrait par rapport aux sociétés japonaises comme Toyota, qui a joué précocement la carte de la voiture hybride, ou par rapport à la marque indienne Tata qui vient de prendre en main la commercialisation prochaine de la voiture à air comprimé, créée par un ingénieur français qui n’a pas trouvé parmi nos entreprises nationales de débouché… (Voir la note suivante : http://www.leblogauto.com/2007/02/mdi-moteurs-a-air-comprime-en-inde.html ).

C’est là que l’on peut regretter l’absence d’une politique audacieuse et « colbertiste » de l’Etat telle que celle pratiquée sous la présidence de Gaulle : le libéralisme français trouve là une de ses limites, périlleuse à moyen terme si l’on n’y remédie pas.

Post-scriptum : je me permets de renvoyer à la lecture d’une note ancienne écrite il y a quelques mois sur le livre « Le plein, s’il vous plaît » de Jancovici et Grandjean : http://jpchauvin.typepad.fr/jeanphilippe_chauvin/2007/08/le-plein-sil-vo.html .