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31/12/2007

Le Pakistan après Benazir Bhutto.

L’assassinat de Benazir Bhutto, 780ème victime du terrorisme de l’année 2007 au Pakistan, a replongé cette ancienne colonie britannique dans une période d’instabilité dangereuse pour l’avenir du pays mais aussi de toute la région qui n’en avait pourtant pas vraiment besoin… Bien sûr, la personnalité ambiguë de l’ancienne première ministre du Pakistan et les échecs de ses passages au gouvernement pouvaient gêner la visibilité de ses propres projets politiques mais elle était devenue le symbole d’une modernité « adaptable » à cette grande puissance musulmane et, en cela, l’espoir pour les Occidentaux d’une « remise en ordre démocratique », à l’image du grand voisin indien. Les Etats-Unis, en particulier, espéraient beaucoup en elle, empêtrés qu’ils sont, comme les autres puissances occidentales, en Afghanistan, faute d’avoir mis dès le début les moyens militaires et humains pour éradiquer les talibans : son accession au pouvoir aurait permis de mettre fin à l’hypothèque islamiste et de reprendre le contrôle des zones pachtounes tenues par les intégristes musulmans.

 

Et maintenant ? Les élections du 8 janvier risquent de ne pas dénouer la situation et l’actuel président pakistanais Pervez Moucharraf a de fortes chances d’apparaître comme le seul élément de stabilité dans un pays de plus en plus déchiré par les querelles internes, politiques comme religieuses, voire tribales. Le souci est évidemment que le Pakistan dispose de la bombe atomique (100 à 200 têtes nucléaires) et qu’il serait stratégiquement catastrophique que cette puissance de feu tombe entre les mains des talibans ou de leurs alliés. Non pas qu’ils puissent utiliser cette arme de façon militaire (cela reste peu probable pour diverses raisons) mais ils peuvent en faire un moyen de pression sur la scène diplomatique mondiale et déstabiliser toute la région, en particulier pour gêner le développement de « l’ennemi héréditaire » depuis l’indépendance de la fin des années 40, l’Inde, elle-même puissance atomique… Le Cachemire, motif de tension récurrent entre les deux frères ennemis, pourrait être à nouveau un « point de crispation » car, malgré les ouvertures sur ce sujet entre eux, tout cela reste bien fragile et mal assuré : il suffirait de peu de choses pour remettre le feu aux poudres et provoquer de nouveaux affrontements entre les deux pays limitrophes…

 

Et puis, il y a surtout l’Afghanistan que les talibans, déjà en position de force depuis quelques mois, pourraient chercher à récupérer en se servant de cette menace nucléaire à laquelle les Occidentaux ne savent comment réagir, prisonniers de schémas stratégiques anciens et plutôt conventionnels. La France, présente militairement et culturellement en Afghanistan, se retrouverait ainsi, comme les autres pays engagés dans la « sécurisation » du pays, en première ligne : à ce moment-là, il faudrait faire preuve de sang-froid et de courage, au risque d’affronter des Opinions publiques plus intéressées par la préservation de leur niveau de vie que par le maintien des libertés et des équilibres géopolitiques dans un pays lointain et si « étrange »… Il n’est pas certain que notre République soit à même de relever le défi, à l’heure où elle se réfugie dans une construction européenne, position de repli sur les seules sphères de l’économique et de l’humanitaire, et où elle « désarme » dans l’indifférence générale, baissant une garde qui, pourtant, reste bien nécessaire en ces temps d’incertitude et de périls nouveaux…

 

29/12/2007

Irak et diplomatie française.

La barbarie ne prend jamais de repos en Irak, comme le rappelle « Marianne » dans sa dernière édition : « 42. C’est le nombre de femmes tuées depuis trois mois par les milices religieuses chiites à Bassora, pour être sorties maquillées ou sans voile. On a retrouvé leurs corps mutilés sur des monceaux d’ordures. C’est ce qui s’appelle l’Irak libéré ». Ainsi, ce pauvre pays est passé d’une tyrannie laïque à une démocratie islamiste sauvage : pas certain que cela soit un grand progrès… En tout cas, l’intervention états-unienne, cette « guerre démocratique » a ouvert une boîte de Pandore que personne ne sait comment refermer.

 

Cette maladresse criminelle de Washington, cette politique de la canonnière qui rappelle les « westerns » manichéens (bons cowboys, méchants Indiens…), doivent nous inciter à penser une diplomatie indépendante, non pas « contre les Etats-Unis » (ce qui serait ridicule) mais « au-delà » d’eux, sans qu’ils soient le seul point de repère de notre politique étrangère : c’est la politique capétienne reprise et assumée par de Gaulle dans les années 60 et qui ont refait alors de la France une puissance libre, capable de jouer son rôle actif d’arbitre et de médiatrice sans négliger pour autant ses propres intérêts.

 

Il est fort dommage que nos partenaires de l’Union Européenne aient choisi sans sourciller de sacrifier toute velléité d’indépendance militaire et diplomatique par le simple fait de mettre la Défense européenne sous le contrôle effectif de l’OTAN, comme l’indique la Constitution modifiée… Pendant ce temps, la Russie s’éloigne de l’Europe et se tourne de plus en plus vers l’Asie, en particulier vers la Chine : or, si la Russie abandonne l’Europe, cette dernière ne sera plus que l’appendice continental d’une sorte d’Union Occidentale ayant pour capitale décisionnaire Washington, et il n’est pas certain que, au regard des tempêtes qui se préparent en différents coins du monde, cela soit le meilleur moyen de préserver notre liberté, publique comme privée. Mais le pire n’est jamais certain et le « retour de la Russie » comme le « retournement turc » montre bien que, ainsi que le soulignait de Gaulle, « les alliances sont saisonnières » et, surtout, comme le rappelle Hubert Védrine dans un récent ouvrage, « l’Histoire continue »…

 

En attendant, les femmes d’Irak continuent de vivre dans la peur et les fanatiques islamistes n’attendent que le départ des derniers soldats occidentaux pour établir définitivement leur loi sur un pays ravagé et humilié… Quel gâchis !

 

26/12/2007

Humilité de Dieu et Monarchie.

La fête de Noël est d’une grande importance dans le cœur des catholiques, dont je m’honore d’être. Elle est aussi porteuse de sens et mérite d’être méditée et de ne pas se résumer seulement à des agapes ou à une débauche de cadeaux, aussi sympathique que cela puisse être par ailleurs. Notre société a remplacé le don par la consommation effrénée, le partage par l’accumulation et l’envie, et cela m’apparaît fort regrettable : le sens premier de la fête de la Nativité s’en trouve altéré, voire complètement dénaturé, au profit d’un culte du Veau d’or que Moïse dénonçait déjà en son temps.

 

Dans « La Croix » (24-25 décembre 2007), le théologien nigérian Bede Ukwuije médite sur le sens de « l’humilité de Dieu », de cette naissance dans une mangeoire alors que, au même moment, le roi Hérode organise un recensement auquel, en définitive, Jésus échappera. Cela nous renvoie aussi à notre propre société, obsédée par le nombre, ce qui peut paraître totalement logique dans une Démocratie où c’est, officiellement, le Nombre qui est le Maître, en fait la source de la légitimité des Etats. Notre société qui ne cesse aussi de compter ses fortunes d’argent en oubliant de préserver les trésors de la nature, considérés à tort comme des coffres sans fond toujours disponibles et pourtant, en réalité, si fragiles… Depuis que nos sociétés ont fait de la formule de Benjamin Franklin « Time is money » le mot d’ordre suprême (véritable révolution qui change le sens de l’activité humaine et désacralise Dieu, ainsi détrôné par l’Argent), l’Avoir semble triompher de l’Être ou, du moins, le ravaler à la simple condition de « sujet de l’Avoir », dépendant des modes et de son rapport matériel à la société : ainsi, les gagneurs y sont confondus, à tort (terrible contresens !), avec les « meilleurs »… Pourtant, entre un abbé Pierre ou une mère Térésa, et un Ruppert Murdoch ou un Bernard Tapie, l’honneur de l’humanité est du côté de « ceux qui n’ont pas » et non du côté de ces « puissants » avides du pouvoir de posséder et capables de licencier sans scrupule des milliers d’ouvriers « trop coûteux »…

 

Comme l’écrit M. Ukwuije sur l’humilité de Dieu, « il faudra méditer ce mystère en lien avec la fébrilité de notre société, par trop soucieuse d’efficacité et de rentabilité, société qui génère une compétition de plus en plus féroce. Lorsqu’on voit des événements et des conflits qui se déroulent dans nos pays, au Proche-Orient, en Afrique, au Pakistan, etc., des événements qui ont un lien avec des stratégies politiques et économiques de l’Europe et de l’Amérique, on ne peut que souhaiter que les êtres humains se laissent interroger par la manière d’être de Dieu.

 

Ce n’est pas d’un regain d’accélération dont le monde a besoin. Ce qu’il lui faut, c’est du sommeil. Nous avons besoin de dormir des heures et des heures. Bien entendu, nous comprenons le « sommeil » au sens biblique : signe d’humilité, de discrétion, de confiance et de dépendance. Saurions-nous accepter de dépendre les uns des autres pour bâtir une civilisation de l’amour ? »

 

En cela, il me semble que le Politique a son rôle à jouer et je rappelle que, catholique certes, je ne confonds pas les moyens avec les fins : d’où mon attachement, en ce domaine de la vie en société, au « Politique d’abord » comme moyen, comme instrument nécessaire pour permettre la survie des sociétés, leur transmission dynamique entre les générations. Mais ce n’est pas forcément le Politique qui leur donne un sens, car cela relève du domaine de l’Esprit, comme l’ont dit, de meilleure manière que moi, les non-conformistes des années 30, les Thierry Maulnier, les Jean de Fabrègues, les Emmanuel Mounier ou, dans les années 50, les rédacteurs de « la Nation Française » de Pierre Boutang, les Jacques Ellul, etc.

 

Ainsi, ne pas tout ramener à l’Argent, rendre à Dieu ce qui est à Dieu et à César ce qui est à César, selon la formule consacrée, être capable de prendre son temps, acte gratuit par excellence, donner et servir… Tout cela est un programme que le royaliste politique que je revendique être assume entièrement, logiquement : on ne s’étonnera pas alors de mon engagement pour le respect des patrimoines, environnementaux, historiques, culturels, spirituels, etc., un respect qui s’accompagne d’une mise en valeur et en pratique des principes et des idées dont je me réclame, mais aussi d’une « tradition critique », nécessaire pour faire vivre ce qui doit vivre, sans nostalgie.

 

D’ailleurs, mon royalisme est la condition logique de ce qui doit vivre car il s’inscrit et cherche à inscrire l’Etat, en France, dans cet accompagnement et cette singulière maîtrise du temps politique que permet une Monarchie « à la française » par son mode de transmission naturelle, de la façon la plus simple qui soit, la naissance, cette naissance qui ne peut s’acheter comme on achète un candidat ou une Opinion publique… Pour que l’Etat retrouve sa liberté face aux puissances de l’Argent et l’humilité première face à la vie et à Celui qui lui permet, dans le risque et la liberté, d’être…