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22/07/2008

Les socialistes piégés par la révision constitutionnelle.

La réforme de la Constitution, la plus importante dit-on depuis la fondation de la Ve République, est passée « à une voix près » (en fait à deux voix, si l’on regarde bien, mais c’est évidemment un détail) et de nombreux observateurs et parlementaires UMP ont fait le rapprochement avec l’établissement « définitif » de la IIIe en 1875 avec le vote de l’amendement Wallon. Mais en disant cela, de façon répétée devant les micros, Patrick Devedjian et ses amis semblent enterrer « le grand œuvre » du général de Gaulle et, surtout, l’état d’esprit du gaullisme institutionnel, annoncé par le discours de Bayeux de 1946.

 

Ce qui est certain, c’est que les pressions diverses et les manœuvres politiciennes pour obtenir la majorité des trois cinquièmes au Congrès de Versailles rappellent plus les us et coutumes des IIIe et IVe Républiques que ceux de la Ve : ainsi, ce sont des accords partisans, ou des « compromis » (certains les évoquent comme des « compromissions »…), qui ont permis l’adoption de cette révision. Mais il est vrai que les socialistes sont les principales victimes de celle-ci, pour des raisons politiques comme stratégiques : d’abord, les socialistes ont bien mauvaise grâce à ne pas reconnaître dans les principales dispositions de cette réforme des principes qu’ils n’ont cessé de prôner et de vanter depuis l’établissement de la Constitution de 1958 : il suffit, pour s’en convaincre, de relire « le coup d’Etat permanent » d’un certain François Mitterrand publié en 1964, ou les discours et écrits d’un radical souvent revendiqué par le PS, Pierre Mendès-France. Aussi, l’attitude d’un Jack Lang, au-delà de ses ambitions personnelles, est-elle parfaitement logique, même si elle me semble une illusion de sa part quant à un éventuel « renouveau parlementaire ».

 

Les socialistes sont aussi piégés et défaits parce que, dans cette affaire, le président Sarkozy leur a coupé l’herbe sous le pied et les a placé en porte-à-faux de la sacro-sainte Opinion publique (cf les sondages parus ces jours derniers, qui révèlent apparemment un état d’esprit « démocratique et réformateur » prononcé des Français, alors que, par prudence, le président a tout de même évité de faire passer sa révision par la voie référendaire…), et, en somme, se pose en « vrai réformateur » qui « tient les promesses, même celles des autres » (certains reconnaîtront le clin d’œil historique et ironique, sans plus, de ma part…). D’autre part, en se voulant, pour des raisons qui n’étaient pas les meilleures, les opposants farouches à cette réforme, ils ont dramatisé l’enjeu et ont, du coup, assuré la victoire morale et politique de M. Sarkozy, qui peut se targuer d’avoir remporté les quelques voix qui manquaient, comme l’avait fait la République en 1875 : M. Sarkozy sait, en bon tacticien, qu’il faut des alliés et des compromis pour remporter des victoires qui lui ouvrent désormais d’autres voies et vont favoriser « l’élan réformateur », mais d’abord celui de son principat, ou l’accélérer.

 

Ainsi, alors qu’ils tiennent 22 régions françaises sur 24 (depuis 2004) et la plupart des grandes villes du pays (depuis 2001), les socialistes semblent incapables de peser sur les réformes et sur le cours des événements, et ils semblent, en définitive, bien s’accommoder d’une sorte de « Yalta des pouvoirs » entre l’UMP et eux-mêmes. En fait, du coup, les citoyens se détournent de plus en plus d’un jeu politique et démocratique qui se fait sans eux, loin d’eux, et qui se conjugue aussi avec les oukases de l’Europe de Bruxelles et les tracasseries administratives ; sans oublier l’impression d’impuissance devant les délocalisations et les jeux de la Bourse, comme devant les scandales du type Tapie (entre autres…)… Cette fracture, dont j’entends les éclats et craquements au comptoir des cafés (« le parlement du peuple », disait Balzac), est inquiétante mais, à ce jour, impolitique : ce que l’on peut appeler, à la suite de Maurras, « le pays réel », en veut au « pays légal » qui l’oublie (sauf aux jours d’élections), mais ce ne sont que des rumeurs et des grondements… Les tempêtes sont pour plus tard, elles n’en seront que plus violentes : ne seront-elles que dévastatrices ?

 

18/07/2008

Le scandale Tapie.

Ainsi, Bernard Tapie vient de remporter un véritable succès devant un tribunal arbitral privé qui a décidé de lui accorder environ 285 millions d’euros, comme dédommagement de ses affaires ratées avec feu le Crédit lyonnais : en d’autres temps, cela aurait fait les gros titres de la presse, en particulier « d’opposition » ou « contestatrice », mais « L’Action française » quotidienne de Maurras et Daudet n’est plus là pour relever, chaque jour, les développements de l’affaire, comme en cette année 1934 qui a tant fait fantasmer (de peur…) les partis républicains et les démocrates d’affaires. Et « le Canard enchaîné », comme « Charlie Hebdo », restent d’une grande prudence à l’égard d’un Tapie si prompt à dégainer ses avocats avec la presse… Il n’y a, en gros, que « Le Nouvel observateur » et François Bayrou qui, dans une indifférence à peine polie, évoquent « le scandale Tapie » ! Quant au Parti socialiste, il est depuis longtemps aux abonnés absents…

 

En tout cas, cette affaire va coûter, selon les journalistes, entre 40 et 50 euros à chaque contribuable français, tout cela pour sauver de la « misère » (sic !) un Bernard Tapie qui, au final, gardera plusieurs millions d’euros. Les soutiens sarkozystes à l’ancien ministre mitterrandien ont beaucoup œuvré pour ce résultat, au moment même où les mêmes demandent aux Français de se serrer la ceinture et parlent de réduire les dépenses publiques. François Bayrou, avec raison, souligne que les 285 millions payés par l’Etat (sans compter les intérêts, ce qui devrait monter la somme à 400 millions d’euros) aux liquidateurs du groupe Tapie représentent « la totalité de tous les salaires annuels des 15.000 postes d’enseignants qui vont être supprimés l’an prochain » ou « l’effacement du déficit de l’hôpital public en France »…

 

Et M. Bayrou de clamer sa colère solitaire dans une République qui ne l’entend déjà plus !

 

En tout cas, cette affaire, ce scandale, mérite d’être dénoncé, encore et toujours, et disqualifie un Etat qui ne sait plus faire régner la justice et, ainsi, se discrédite aux yeux de l’opinion publique et, en particulier, aux yeux de ceux à qui il demande de faire des sacrifices pour faire diminuer la trop lourde dette publique. Contre un tel scandale, une telle injustice couverte par les plus hautes instances de la République, « même les pierres hurleraient » !

 

Et après, on voudrait que je sois républicain, bien sage et modéré, à croire à la République et à ses principes moraux ! En fait, la République, depuis Danton (le Tapie de l’époque…), n’a guère changé : c’est toujours « grands principes et petite vertu »… Je préfère, tout compte fait, un Louis XIV qui fait enfermer l’homme le plus riche de France, et confisque ses biens au bénéfice de l’Etat : aujourd’hui, c’est au contraire la revanche de Fouquet consacrée, d’ailleurs (clin d’œil de l’Histoire ?), le soir de l’élection présidentielle au… Fouquet’s !

 

17/07/2008

Méduses et thon rouge.

Une information passée quasi-inaperçue, sauf pour les vacanciers qui se baignent dans la Méditerranée : la recrudescence des méduses près des côtes, qui peuvent rendre désagréables les baignades lorsqu’elles frôlent les baigneurs… Ce n’est pas la première année que cela arrive, bien sûr, mais le phénomène se reproduit désormais de façon de plus en plus régulière sans que les municipalités puissent faire grand-chose, à part faire ramasser celles qui s’échouent sur les plages. La principale raison évoquée jadis était la chaleur caniculaire mais ce n’est pas vraiment le cas cette année. En fait, la raison la plus certaine est la raréfaction des prédateurs naturels des méduses dont, plus particulièrement, le thon rouge, aujourd’hui surpêché, au risque de déstabiliser toute la chaîne alimentaire méditerranéenne.

 

Comme le signalent les spécialistes, le thon rouge est aujourd’hui pêché au-delà des normes raisonnables, ce qui a entraîné une autre conséquence très visible, la diminution de la taille moyenne des thons pêchés et, donc, du poids moyen de ceux-ci : si j’ai bien entendu ce qui était évoqué à la radio, la moyenne serait désormais de 25 kilos par bête au lieu de 60 il y a quelques années. D’autre part, les capacités de pérennisation de l’espèce seraient gravement atteintes puisque l’on pêcherait le double de ce qui naît, au risque de voir le stock disparaître purement et simplement dans moins de cinq ans !

 

Ainsi, la leçon de la disparition de la morue de Terre-neuve n’a visiblement servi à rien, et l’on refait les mêmes bêtises à quelques années d’intervalle, en se disant que l’on trouvera toujours un substitut ou que l’élevage industriel pourvoira aux demandes des consommateurs… Erreurs dramatiques, comportements irresponsables !

 

Cette année, la Commission européenne a déclaré les quotas de pêche atteints plus tôt que prévu et a intimé l’ordre aux chalutiers français de cesser toute pêche au thon rouge, ce qui ne gêne pas outre mesure des navires venus d’autres pays ou d’autres continents qui, eux, continuent le pillage de façon systématique grâce aux moyens technologiques modernes (sonars et satellites pour repérer à coup sûr les bancs de poissons, par exemple, ce qui ne laisse pas beaucoup de chances aux poissons en question de passer entre les mailles du filet…). Il faut dire que la pêche reste rentable puisque la demande, jusque là principalement asiatique (et particulièrement nipponne), s’est diversifiée et ne cesse d’augmenter, grâce à la mode « mondiale » des sushis : une conséquence malheureuse, pourrait-on dire, de la mondialisation et de l’uniformisation des goûts et des habitudes alimentaires. Et l’accession de nouvelles puissances, démographiquement importantes, à la « société de consommation » multiplie le nombre de consommateurs potentiels qui veulent « faire comme les autres »…

 

Les pêcheurs français de la côte méditerranéenne n’ont pas réagi favorablement aux décisions de Bruxelles, ce qui peut se comprendre au regard de leurs intérêts et des traditions de pêche de notre pays. Mais, au lieu de « sévir sans proposer », la Commission a donné le bâton pour se faire battre, et se contenter de subventions ou d’indemnités, dans une logique purement comptable, reste insuffisant, voire insatisfaisant.

 

Que faire, alors ? S’il me semble important de « relâcher la pression » sur les ressources halieutiques (et pas seulement sur le thon rouge, mais aussi sur les raies et les squales, eux aussi menacés de disparition à court terme en Méditerranée) et donc de limiter les prises, cela ne suffit pas et néglige le sort des pêcheurs, en particulier des « petits », des « artisans de la mer », qui risquent de disparaître eux aussi au profit des grandes entreprises aux pratiques plus dictées par les intérêts des actionnaires que de leurs personnels ou de l’environnement. Aussi, me semble-t-il, la France doit (et par le biais de cette Union pour la Méditerranée baptisée le ouiquende dernier à Paris, elle peut le faire) imposer un véritable moratoire sur les espèces menacées (la simple limitation de pêche semble aujourd’hui insuffisante) mais engager en même temps un véritable programme de préservation et de renouvellement (donc de pérennisation) des ressources halieutiques par la mise en place de « trames bleues », principalement dans les zones de frai et de développement des poissons, cela pour permettre à la pêche méditerranéenne de survivre lorsque la Méditerranée nourricière aura « repris son souffle » et retrouvé son équilibre propre.

 

Les pêcheurs doivent être associés à cette politique : plutôt que les subventionner à « ne pas pêcher » ou financer la « casse des chalutiers », il vaut mieux financer leur travail de « jardinier des mers » en attendant que certaines ressources soient à nouveau suffisantes pour en autoriser l’exploitation, exploitation dont ils seraient alors les premiers bénéficiaires. Cela impose de réfléchir à une nouvelle conception et organisation des « métiers de la mer », et ce n’est pas le Marché qui peut le faire (puisque son principe moteur, y compris à court terme, est la recherche du profit financier, pas toujours compatible avec la « longue durée » nécessaire au respect de l’environnement), mais les instances de l’Etat : la France a un devoir en Méditerranée et au regard des générations futures, et elle doit donner l’exemple et, mieux encore, donner l’impulsion à cette politique fondée sur « le souci environnemental » et sur la « transmission de l’héritage ». La République saura-t-elle assumer ses responsabilités ? S’il faut bien sûr le souhaiter, il est permis, au regard de ses principes et de l’histoire récente, d’en douter : la Monarchie serait sans doute plus appropriée aux défis environnementaux à relever et à la résistance à opposer aux groupes de pression financiers et économiques qui ne manqueront pas de se manifester dès que leurs intérêts immédiats seront « menacés »…