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08/02/2009

Monarchie active, premiers éléments de définition.

Dans un monde globalisé, que peut l’Etat et, en particulier, l’Etat royal ?

Je me place ici dans l’hypothèse d’une Monarchie fraîchement instaurée en France, ce qui, pour l’instant, relève évidemment de la simple théorie, puisque nous sommes présentement en République.

Avouons d’abord que les conditions mêmes de l’instauration royale pèseront sur ses capacités d’action, non pas qu’elles handicapent forcément l’Etat mais qu’elles le placent en position de ne pas décevoir et, donc, de tenir compte, sans en être prisonnière, d’une Opinion publique attentive et impatiente.

La Monarchie « à la française » se signale, traditionnellement, par une force particulière de l’Etat, par l’autonomie du politique à l’égard des forces économiques et une volonté d’intervention qui ne se confond pas, néanmoins, avec l’étatisme, maladie d’hypertrophie invasive de l’Etat.

Cette force, cette autonomie et sa capacité d’inscrire sa volonté et son action dans le long terme sont d’autant plus « permises » que la monarchie est bien enracinée dans le temps et la suite des générations, et qu’elle n’a plus l’obligation pour l’Opinion de prouver sa légitimité ou son utilité, celles-ci étant avérées par son « temps passé » et les services rendus, pour autant qu’ils soient reconnus. Cela est sans doute plus délicat dans les premières années de l’instauration, dans le « règne inaugural ». Mais, quoiqu’il en soit, le simple fait de la transmission héréditaire annoncée procure à la magistrature suprême de l’Etat une certaine liberté qui a des possibilités de se vérifier et de se fortifier au fil des règnes.

Cela étant, il est nécessaire de rappeler que la monarchie, nouvelle ou adulte, ne peut pas tout faire et que, surtout, elle ne doit pas tout faire : son principe lui donne l’autorité nécessaire pour parler et agir, mais lui interdit de monopoliser les pouvoirs et les libertés.

Son rôle est de donner l’impulsion aux grands projets qui ont besoin d’une garantie politique sur le temps long, d’arbitrer entre les grandes assemblées, conseils ou syndicats, qu’ils soient nationaux ou régionaux, mais aussi d’ouvrir les grands chantiers institutionnels, politiques, sociaux, économiques, environnementaux, … par la convocation de conseils et le lancement de grands programmes de recherche et de prospective. Cette action qui mêle volonté, rapidité d’initiative et enracinement dans la durée, est rendue plus facile qu’en régime électif présidentiel par l’essence même de l’Autorité suprême qui n’a pas à remettre son destin tous les cinq ans entre les mains de ceux qui font (ou défont…) les élections et les opinions. Au contraire du système de la Cinquième République où le calendrier, sauf accident (démission du président ou décès, deux cas possibles, comme en 1969 et 1974), est réglé comme la minuterie d’une bombe à retardement, la monarchie n’est pas maître de son calendrier mais accompagne le temps, offrant, par son principe successoral, la garantie d’une « respiration humaine » et de la continuité statutaire.

L’action politique n’est pas réductible à la seule parole, et elle se doit de poser des actes : tout l’intérêt d’une monarchie héréditaire est d’en assumer la responsabilité, y compris d’un roi à son successeur, mais le renouvellement par le remplacement d’une génération par une autre au travers du monarque permet aussi de remettre en cause ce qui pourrait s’avérer obsolète sans, pour autant, menacer la continuité et la garantie de la permanence de l’Etat.

La Monarchie active ne peut être juste une magistrature morale, elle se doit d’être politique : de Gaulle, en établissant la Cinquième République, avait sans doute en tête ce que pourrait être une monarchie au-delà même de celle qu’il fondait, d’une certaine manière, incomplète et inachevée. En somme, le mieux ne serait-il pas de faire de cette Cinquième République qui, par le jeu des partis et des ambitieux, se caricature aujourd’hui en monocratie pipolisée, une monarchie véritable, hors d’atteinte des querelles partisanes et libre de toute attache clientéliste et financière, libre de parler et d’agir, avec le garde-fou des obligations constitutionnelles, des Conseils et des Assemblées, entre autres. C’était le vœu du comte de Paris, de Pierre Boutang et, au moins un temps, du général de Gaulle lui-même. Pour aller au bout de la logique gaullienne (je n’ai pas dit gaulliste…), et restaurer la politique, assumer le souci politique au sommet de l’Etat…

07/02/2009

La mauvaise cause de Laurence Parisot.

Le 6 février 1934 a eu lieu, après un mois de manifestations déjà fort violentes, la conjonction des « mécontents » scandalisés par l’affaire Stavisky, « l’affaire de trop » qui mêlaient financiers malhonnêtes et politiciens véreux : en somme, une affaire aujourd’hui presque banale, au regard des multiples scandales qui n’ont plus assez des pages du « Canard enchaîné » pour être révélés…

Aujourd’hui, alors qu’il y aurait mille raisons de descendre dans la rue pour dénoncer les centaines de millions d’euros d’ « indemnités » (sic !) pour Bernard Tapie, les salaires mirobolants des affairistes financiers de tout acabit, les délocalisations spéculatives, les licenciements abusifs, les milliards gaspillés et les injustices sociales, les déclarations extrémistes de Laurence Parisot, les scandales financiers à répétition, etc. : rien, ou si peu ! Une sorte de fatalisme semble régner en notre vieux pays qui se complaît dans la mauvaise conscience permanente et le souvenir de ses colères passées, justes ou exagérées.

Pourtant, au comptoir des cafés, et Dieu sait si je les aime et les fréquente, les amertumes s’expriment avec des mots d’une crudité et, parfois, d’une cruauté que je n’apprécie pas toujours. Les verres délient les langues, et les colères. Parfois des insultes à l’égard des puissants, parfois aussi des larmes sur des drames sociaux personnels : me voilà, moi qui suis protégé par mon statut de fonctionnaire, témoin attentif des iniquités sociales d’une société qui a placé le Seigneur Argent au faîte de ses préoccupations et de ses occupations tout court…

Bien sûr, toutes les plaintes, toutes les douleurs n’ont pas le même sens, ni la même légitimité, et je me méfie des mécontents professionnels, des « yaka » ou des vendeurs de révoltes nihilistes, des consuméristes frustrés ou des casseurs compulsifs…

Mais, tout de même ! S’il nous faut accepter de faire des efforts pour participer au relèvement d’une économie aujourd’hui fragilisée par la série de crises qui s’emboîtent les unes les autres, s’il faut penser aux générations qui nous succéderont et dont il nous faut alléger les dettes, aujourd’hui astronomiques alors qu’elles n’ont parfois pas encore vu le jour, cela ne doit pas se faire au détriment de la nécessaire justice sociale, de cette condition de l’harmonie sociale sans laquelle aucune société ne peut normalement et éthiquement fonctionner.

Aussi, les propos de Madame Laurence Parisot dénonçant, avant même que l’Etat n’en ait formulée l’idée (quand M. Obama en fait un élément fort de son discours aux Etats-Unis, pourtant patrie-mère contemporaine du capitalisme financier et industriel), l’idée de plafonner les salaires des grands patrons de quelque manière que ce soit, me choquent et montrent l’aveuglement et la mauvaise volonté d’un certain patronat égoïste et, en définitive, inconscient : qu’on ne me dise pas que (si l’on reprend les 500.000 dollars annuels évoqués comme plafond par M. Obama) 360.000 euros par an ne soient pas une somme largement suffisante pour des grands patrons, quels que soient leurs mérites ! Au-delà, n’est-ce pas, surtout en période de crise mais aussi en période de prospérité, une somme qui peut paraître indécente comparée aux 20.000 euros d’un maçon qui, s’il n’a pas les responsabilités d’un chef d’entreprise, doit travailler (et ce n’est pas un travail de bureau !) à l’extérieur par tous les temps, y compris quand les températures avoisinent les – 10 ° comme il y a quelques semaines dans les Yvelines ? Ou par rapport aux 16.000 euros d’une agricultrice bretonne qui ne compte pas ses heures pour aider son mari, lui-même touchant à peu près la même somme en fin de mois parce que les grandes surfaces ou les industries agroalimentaires fixent eux-mêmes les prix (comme cela a été le cas il y a quelques semaines au détriment des petits producteurs laitiers) et menacent de se fournir « ailleurs » si les agriculteurs ont le malheur de demander ce qui n’est rien d’autre que leur juste dû ?

Dire cela est-il du « populisme » comme je l’entends parfois ? Pas vraiment, juste un rappel de la mesure et le refus de « l’hubris »… Je ne trouve pas choquant que certains salaires soient élevés et je refuse toute démagogie égalitaire, mais il est des limites, me semble-t-il, à ne pas dépasser : « le trop est l’ennemi du bien », ai-je souvent entendu dire mon père. Je n’ai pas toujours compris cette formule : mais, en entendant aujourd’hui les propos si peu éthiques de la patronne du MEDEF, je la comprends désormais, cette formule, et cette fois sans risque d’erreur…

 

05/02/2009

Bernard Kouchner, Pierre Péan et le 6 février 1934.

Alors que je me préparais à écrire une note historique sur le 6 février 1934, l’affaire Kouchner m’incite à me détourner de la seule histoire pour retourner sur l’actualité politique et sur les « affaires de la République » actuelles, trop nombreuses pour les citer toutes : alors, autant s’intéresser à ce nième scandale qui n’est pas forcément celui que l’on croit…

Pierre Péan est un journaliste d’investigation connu pour ses livres parfois iconoclastes et qui ont, en fait, tendance à dire tout haut ce que les gens murmurent tout bas ou savent sans oser le dire, par peur de « déranger » ou de s’attirer les foudres des puissants : on se souvient de son livre sur François Mitterrand, intitulé « Une jeunesse française », dont la couverture montrait un jeune homme de belle allure, promis à une belle carrière, serrer la main d’un vieux chef d’Etat français, maréchal de son état militaire et promis, lui, au déshonneur moral en 1945 après avoir été, en 1916, le vainqueur de Verdun… Cette photo de la poignée de main entre Mitterrand et Pétain avait provoqué un choc dans le grand public et, en retour, une véritable plaidoirie « pro domo » du président en exercice, déjà rongé par le crabe fatal.

Certains semblèrent alors découvrir ce que, personnellement, je connaissais depuis longtemps, comme beaucoup d’autres, que j’avais entendu raconté mille fois dans les milieux de l’Action Française et, même, que j’avais lu dans les colonnes du journal monarchiste « Aspects de la France », tribune hebdomadaire de cette même Action Française. Je savais aussi, ce que Péan ne disait pas, voire démentait, que Mitterrand avait participé aux activités intellectuelles des cercles maurrassiens à Angoulême (témoignage de Jean Roche-Boitaud) comme à Paris, et qu’il avait en particulier fréquenté la permanence des étudiants royalistes du 33, rue Saint-André-des-Arts (témoignages de Georges Calzant et de Pierre Juhel), et quelques autres anecdotes d’avant- comme, et cela pouvait être plus surprenant, d’après-guerre… Il me semble en avoir rapporté quelques unes sur ce blogue ou sur un forum monarchiste. Je dois avouer, à lire le livre de Péan sur Mitterrand, que je me suis demandé pourquoi il ne disait pas tout et s’il n’avait pas été, en partie, instrumentalisé par le Palais. Mais son livre n’en était pas moins fort intéressant et éclairant sur les années 30-40, et sur les ambiguïtés des engagements de ces temps troublés.

Je n’ai pas encore lu son dernier livre sur Bernard Kouchner mais, au regard des réactions d’une brutalité rare à ce brûlot, je m’efforcerai de le lire au plus tôt, non pour forcément accréditer les thèses qui peuvent y être développées, mais pour, au moins, lire ce que Pierre Péan avance et ce qu’il reproche, justement ou pas, à M. Kouchner. En fait, j’en ai lu quelques feuilles déjà publiées, samedi dernier, dans l’hebdomadaire « Marianne » (édition du 31 janvier au 6 février 2009), et l’article d’Eric Conan qui présente ces « bonnes pages » et égratigne, voire pire, l’icône de l’humanitarisme contemporain. Mais, soyons franc, ce que j’y ai lu ne m’étonne pas vraiment car cela fait des années que les attitudes ambiguës du « french doctor », en particulier au Kosovo, m’ont convaincu de la tartufferie du personnage et de sa suffisance, de son mépris pour qui ne pense pas comme lui. Quant à son parcours et ses discours politiques, ils prouvent à l’envi un arrivisme certain, jusqu’à renier ses amitiés partisanes de la veille. Personnellement, je pourrai lui reprocher, non pas d’avoir fait carrière dans l’humanitaire (y compris malgré ses choix parfois hasardeux), mais de s’être servi de ce qu’il avait fait de bien pour en retirer « gloires et honneurs », ce qui me semble contraire à cette conception de l’honneur (au singulier, ce qui n’a pas la même valeur) qu’il avance pourtant en le brandissant bien haut…

Ce qui m’agace aussi au plus haut point, c’est une défense qui, sans vraiment répondre aux accusations de Pierre Péan, joue la carte de la « victimisation », évoquant le « climat » et les « idées » des années 30, et se posant en victime d’une odieuse campagne qui viserait ses racines juives, défense reprise en chœur de manière soit insidieuse soit violente par la grande presse, en particulier par « Le Monde » sans beaucoup de discernement, ce qui évite, évidemment, de répondre aux affirmations du livre… Tactique classique d’une presse qui, pour l’occasion, calomnie M. Péan pour mieux défendre son « héros » ! Avec une telle presse, il est certain que la République n’a guère de souci à se faire, ni les Tapie, ni les Sarkozy, ni les Kouchner… D’ailleurs, il est « amusant » de constater que la classe politique, à quelques exceptions près, fait, soit front avec M. Kouchner pour la droite, soit silence (ou juste quelques murmures) pour la gauche. Ce petit jeu du déni me navre et ne m’incite guère à aimer cette République qui, à travers des Kouchner et des Dray, brandit le drapeau des grands principes pour mieux camoufler sa petite vertu

Oh mince, alors ! Je m’emporte… Sans doute des échos du 6 février 1934 : une actualité peut rappeler une commémoration, semble-t-il… Kouchner a sûrement raison, tout cela fleure les années 30 : mais il y a plusieurs manières de comprendre et d’interpréter cela… Quant à moi, je préfère sentir le parfum violent des lys sauvages, ceux qui poussent sur le pavé ou crèvent le bitume des avenues grises du conformisme « politiquement correct » : décidément, j’aurai toujours mauvaise réputation et je n’aime toujours pas cette République, désolé…