Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

21/12/2009

La mort de Johnny Halliday...

« La mort de Johnny Halliday a éclipsé la suppression de l’histoire-géographie en Terminale S »… A chaque fois que j’ai prononcé cette phrase, mes collègues à qui je m’adressais ont presque tous eu la même réaction, surprise mais pas tellement surprenante : « Ah bon, Johnny est mort ? ». Bien sûr, je les rassurais (quoique…) en évoquant une boutade de ma part, mais leur réaction n’en était que plus révélatrice : ainsi, alors même que la deuxième partie de la phrase les concernait directement, c’est la première qui les faisait réagir !

 

Ainsi en va-t-il dans notre Société du Spectacle et du Présent éternel : les informations sur la vie (ou la mort) des idoles populaires (ou pas, d’ailleurs) ont plus d’importance que celles qui engagent sur le long terme et qui apparaissent plus sérieuses, plus ennuyeuses. « Le spectacle continue », on peut même dire qu’il ne s’arrête jamais ! Et dans cette valse effrénée, une information chasse l’autre ! Déjà, au début de l’été, la mort de Mickaël Jackson avait, d’une certaine manière, enterré le « printemps de Téhéran » comme l’avaient remarqué les observateurs de la vie politique et internationale, et cela à la grande satisfaction des ayatollahs de la République islamiste.

 

Alors que la fronde des historiens et géographes montait et commençait à trouver un écho dans la population, les problèmes de santé du chanteur sexagénaire ont envahi les médias et détourné les gens de la réflexion sur la place de l’histoire-géographie mais aussi sur la réduction des horaires de philosophie et de sciences physiques dans les classes de lycée : et c’est ainsi que la réforme de Luc Chatel, préparée et rédigée par d’autres (dont le funeste Richard Descoings, directeur de Sciences Po), pourra apparaître aux futurs historiens (il en restera bien quelques uns…) comme celle qui aura été la plus facile (et la plus rapide) à faire passer de toute l’histoire de la Cinquième République…

 

Je ne suis pas le seul à penser ainsi, mes collègues, un brin découragés, partageant cet amer point de vue. Même l’hebdomadaire « Marianne » remarque l’entourloupe créée par la santé défaillante du contribuable suisse M. Halliday : « Sur le papier, l’affaire paraissait mal emmanchée pour le ministre de l’Education nationale : en plein remue-méninges sur l’identité nationale, atrophier l’enseignement de l’histoire tenait de la provocation. Pourtant le score final est sans appel : Luc Chatel 1 – histoire 0. » Si l’hebdomadaire évoque aussi deux autres causes à cette victoire ministérielle (causes d’ailleurs elles aussi fort valables : réaction tardive des profs et désunion, pour des raisons plus comptables que raisonnables, de ceux qui auraient pu s’opposer au projet), c’est bien la dernière évoquée qui emporte définitivement la décision : « Versatilité médiatique : dès lors qu’un buzz chasse l’autre, le calvaire de Johnny et le clip de l’UMP ont évincé des écrans l’offense faite à une certaine idée de la culture. Forcément… »

 

Malgré cette défaite « évidente », je ne renonce pas, personnellement, à me battre, ne serait-ce qu’en continuant à dénoncer cette mesure de suppression de l’histoire-géographie matière obligatoire en Terminale S par la plume, le clavier et la parole, comme par cette leçon que je ferai, comme annoncé déjà il y a quelques semaines, dans une rame du métro parisien…

 

Au fait, qui a dit : « Mais le dernier mot est-il dit ? L’espérance doit-elle disparaître ? La défaite est-elle définitive ? Non ! » ? Sans doute un homme qui ne se contentait pas de mots et qui connaissait bien l’histoire de la France, avant même que de la faire…

 

14/12/2009

Copenhague ne suffira pas...

Négociations et marchandages vont bon train à Copenhague, mais ce Sommet sur le climat va-t-il vraiment changer la donne et permettre de véritables avancées sur la question environnementale ? Rien n'est moins sûr. Certes, ce Sommet n'aura pas été totalement vain car sa médiatisation, forte surtout en Europe, aura sans doute aidé à une certaine prise de conscience des dangers d'une consommation effrénée et « illimitée » des produits de la terre, sous toutes leurs formes. Mais, dans la pratique, les habitudes consuméristes et « consumatrices », terme qui conviendrait bien à la situation de nos sociétés énergivores, sont loin d'avoir cédé la place à la sobriété raisonnable que semble commander aujourd'hui l'état des ressources de la planète. Sobriété qui n'est pas privation mais meilleure utilisation de ce qui est : est-il en effet normal que 40 % de l'alimentation disponible aux Etats-Unis soit purement et simplement jetée ou détruite, et cela au moment même où plus d'un milliard de personnes souffrent de sous-alimentation dans le monde ? (1)

 

D'autre part, ce Sommet aura révélé quelques hypocrisies et quelques manœuvres qui montrent que certains, dans une logique à court terme, ne cherchent qu'à déplacer sans le résoudre le problème des pollutions climatiques : ainsi, lorsque les pays de l'Union européenne s'engagent à diminuer de 30 % leurs émissions de gaz à effet de serre, ils oublient d'y inclure les entreprises européennes implantées (délocalisées le plus souvent, pour vendre à bas coûts leurs produits en Europe...) dans les pays du Sud tout en priant la Chine et l'Inde (entre autres) de diminuer, non plus leurs rejets de produits polluants dans l'atmosphère (les pays du Sud s'y refusent pour des raisons liées à leur propre développement), mais leur « intensité carbone », c'est-à-dire de diminuer le taux de carbone rejeté par unité produite. Or, cela n'est évidemment pas suffisant pour garantir l'avenir mais les pays de l'UE, comme les Etats-Unis d'ailleurs, veulent ainsi continuer à pouvoir consommer sans payer plus maintenant, en laissant donc aux générations suivantes le soin d'affronter les difficultés environnementales et climatiques... On touche là à la logique de la Société de consommation, à cette spirale infernale du « Consommer pour produire » qui oublie de prendre en compte les limites de la nature et qui risque de mener, un jour, à l'effondrement dramatique des sociétés humaines ou à leur confrontation brutale, avant même des catastrophes climatiques dont on ne sait pas grand-chose malgré les projections apocalyptiques de certains qui jouent à se faire peur sans chercher à faire jouer, d'abord, leur intelligence et leur raison.

 

Il n'est pas inutile de revenir à ces propos écrits au siècle dernier par Charles Maurras et qui méritent d'être, aujourd'hui comme demain, entendus : « Non, la nature, non, le jeu spontané des forces naturelles ne suffisent pas à établir l'équilibre économique.

Mais prenons garde ; ces lois, auxquelles il serait fou de vouer une confiance aveugle et mystique, il serait encore plus fol de les négliger.

Cultivons, tourmentons, forçons même l'ample et bizarre sein de la vieille nature, ajoutons à ses forces nos forces et notre sagesse, notre prévoyance et notre intérêt, doublons-les partout de nous-mêmes. Mais sachons que nous ne commanderons aux choses qu'à la condition de leur obéir. Moissonner en hiver, vendanger au printemps, voilà l'impossible. Avant de moissonner et de vendanger, connaissons le temps naturel des vendanges et des moissons. Et, si nous voulons influer en l'améliorant sur l'ordre économique, connaissons-le. Par-dessus tout, appliquons-nous bien à n'en méconnaître aucun fait essentiel. Nous payerions comme toujours ces oublis et ces ignorances ou plutôt notre peuple payerait notre grande erreur. »

 

Ce que Maurras évoquait pour l'économie est aussi valable pour l'environnement et doit nous rappeler qu' « on ne commande à la nature qu'en lui obéissant », règle simple que les Etats devraient inscrire en tête de toute déclaration finale de ce Sommet de Copenhague s'ils en étaient véritablement conscients... Et, malheureusement, si le pire n'est jamais certain, il semble bien que nous soyons encore loin du meilleur...

 

 

 

Notes : (1) : chiffre tiré de l'enquête scientifique publiée dans la revue états-unienne « PLOS One » de novembre 2009.

09/12/2009

L'histoire-géographie diminuée au lycée.

L’histoire-géographie est l’objet de vifs débats entre le ministre de l’Education nationale Luc Chatel et les professeurs eux-mêmes, et ces derniers se sentent un peu isolés malgré le soutien de brillants intellectuels au maintien de cette matière obligatoire en Terminale S. Isolés parce que les fédérations de parents d’élèves et les syndicats lycéens, de droite comme de gauche, applaudissent à la suppression annoncée et voulue par le Ministère, à la suite des propositions de M. Richard Descoings, président de Sciences-Po (qu’il a transformé, au nom de la modernité, en simple école de commerce, selon l’avis de plusieurs enseignants de l’institution de la rue Saint-Guillaume) et l’un des représentants de « l’ouverture » voulue par M. Sarkozy.

 

Mais il y a un autre aspect de la réforme que les médias et les professeurs eux-mêmes ont peu évoqué : c’est la suppression des heures de modules en classe de Seconde… De quoi s’agit-il ? Simplement des heures durant lesquelles les élèves apprennent les méthodes de travail et d’étude nécessaires à la préparation de l’épreuve du bac et des concours post-bac ! Pour ce faire, la classe est alors divisée en deux groupes qui, par alternance, suivent ces cours de méthode, forcément utiles pour la suite des études en histoire-géographie et la réussite aux différentes épreuves prévues dans le cycle scolaire et universitaire.

 

Or, le Gouvernement supprime sans sursis ces heures, pourtant bien utiles et cela dans l’indifférence quasi-générale ! Les fédérations de parents d’élèves FCPE (Gauche) et PEEP (Droite libérale), si promptes à dénoncer le « corporatisme des enseignants », ne protestent pas contre cette mesure de réduction des heures d’histoire-géographie en Seconde alors qu’ils ne cessent d’invoquer « l’intérêt des élèves » : drôle de conception de ce fameux « intérêt » dont je ne suis pas sûr qu’elles sachent ce qu’il est réellement !

 

Ce que je retiens des projets du Ministère, au regard de cette réorganisation qui n’est qu’une petite manœuvre à la fois comptable et électorale, c’est que les élèves n’y gagneront ni en matière ni en méthode, et que le niveau des connaissances et des moyens de compréhension du monde de ceux qui en sont pourtant les futurs héritiers risque d’emprunter une pente de plus en plus raide

 

Triste sort pour cette matière scolaire dont je me veux un serviteur dévoué et passionné, non pour les beaux yeux du Ministère mais pour les élèves auxquels j’ai la chance d’enseigner !

 

Sans doute la République n’a-t-elle plus besoin de professeurs d’histoire-géographie, leur préférant quelques substituts de type Wikipedia, par exemple…

 

Oui, décidément, triste, bien triste…