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09/12/2013

Prépas en colère contre M. Peillon, ci-devant ministre !

 

« Il n’y a que les Prépas qui ont encore de bons résultats », déclare une intervenante aux Grandes gueules sur RMC ce lundi 9 décembre, et poursuivant : « il faut que l’on arrête de niveler par le bas », à propos des projets de M. Peillon, ministre provisoire de l’Education nationale en attente d’un siège au Parlement européen en mai prochain… et dont la réforme est en train d’affaiblir les fameuses classes préparatoires françaises, au moment même où les classements internationaux comme « Pisa » montrent le déclin accéléré du niveau éducatif de notre pays !

 

Ce matin, les collègues des classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE) du lycée Hoche étaient en grève et distribuaient des tracts à la porte de l’établissement pour dénoncer le sort qui leur était réservé par ce gouvernement qui, de plus en plus, semble n’avoir de cesse que de détruire ce qui marche et de décourager ceux qui prônent l’excellence et l’espérance plutôt que la défiance et l’assistanat. C’est aussi ce que dénonçait Jacques Julliard dans son article de samedi dernier publié par Marianne, à la suite de nombreux autres textes rédigés par des professeurs ou d’anciens élèves de Prépas, comme celui de Camille Pascal dans Valeurs actuelles de jeudi dernier et affiché ce matin dans la salle des profs du Couvent de la Reine, au milieu de quelques autres et de papiers administratifs.

 

Le tract des collègues, en quelques lignes, résumait bien la situation et allait plus loin que la seule défense de leurs propres intérêts, en soulignant que les professeurs de lycée étaient aussi concernés par une prochaine baisse de leurs revenus, alors même que nos salaires (je dis « nos », car je suis dans ce cas qui est celui de tous mes collègues de l’enseignement public…) sont, depuis 3 ans, « gelés » (ce qui, dans mon cas personnel, ne me gêne pas mais qui peut affecter les professeurs chargés de famille et dont les frais, eux, ne cessent d’augmenter…), que le gouvernement soit de droite ou de gauche, d’ailleurs : sans doute la « continuité républicaine »…

 

« Vincent Peillon ne cache pas son hostilité au système des prépas. Nous sommes pourtant convaincus qu’il permet chaque année à des milliers de jeunes gens de progresser et de réussir, c’est pourquoi nous y sommes très attachés. Notre inquiétude est grande quant à l’avenir de ces filières d’excellence au sein desquelles nous sommes pourtant fiers et heureux de travailler. » : le tract évoque là le vrai souci, celui de la disparition possible (et souhaitée par certains…) des classes préparatoires considérées comme « des lieux de reproduction sociale » par les égalitaristes de tout poil, à la fois jaloux de l’excellence des élèves sélectionnés pour y entrer et des rémunérations de ceux chargés d’encadrer et d’instruire ceux-ci.

 

Et pourtant ! Tout le monde sait bien que, si la France veut encore jouer un rôle dans les années prochaines au sein des grandes nations, il faut préparer les nouvelles générations et former des élites, ce dernier mot étant hypocritement honni par ceux qui nous gouvernent actuellement et, j’espère, provisoirement. Alors que de nombreuses universités ont désormais du mal à assumer leurs fonctions traditionnelles de transmission du savoir et de l’expérience, n’ayant pas la possibilité de filtrer les entrées en leur sein malgré l’effondrement du niveau des bacheliers depuis quelques décennies déjà (le problème était ainsi évoqué au milieu des années 1980 au Conseil d’administration de l’université de Rennes-2, conseil au sein duquel je siégeais en tant qu’élu étudiant !), et au lieu de s’inspirer des réussites des classes préparatoires, le ministère de la République préfère, par paresse intellectuelle et aussi par lâcheté vis-à-vis des pédagogues qui continuent de faire la loi, leur Bourdieu en poche et leur suffisance en bandoulière (tel ce Meirieu qui empoisonne l’éducation en France depuis tant d’années…), s’attaquer aux quelques milliers d’enseignants de CPGE, traités d’ « aristocrates » (sic !) comme aux temps sombres de la Révolution française, celle-là même que M. Peillon, déclarait n’être « pas terminée » dans son livre de 2008, véritable manifeste républicain qu’il veut, désormais au Pouvoir, appliquer pour le pire plus que pour le meilleur…

 

En écoutant il y a quelques jours Vincent Peillon s’exprimer à la radio avec ce ton si déplaisant et arrogant et affirmer qu’il ne céderait pas devant la colère des enseignants, un collègue haussait les épaules et lançait, dans un souffle rageur, ce qui me semble bien résumer la situation : « la République n’a plus besoin de professeurs, juste d’ordinateurs ! ». Julliard, dans Marianne, ne disait, en d’autres termes, pas autre chose…

 

Et si, nous les professeurs, nous en tirions enfin les conséquences politiques ? Tant pis, alors, pour la République…

 

 

 

04/11/2013

Cette écotaxe qui fâche...

 

Se promener avec un bonnet rouge sur la tête ne laisse pas indifférents les passants parisiens ou versaillais : quelques marques de sympathie, d’autres d’inquiétude, parfois de l’agressivité et des mots que l’on pourrait facilement taxer de « xénophobie », surtout de la part de quelques partisans du gouvernement en place ou d’admirateurs de la mondialisation… Il est amusant de constater combien un simple couvre-chef peut créer du lien social et comme il est devenu un véritable symbole, à la fois de la Bretagne et de la révolte fiscale en cours ! 

 

Dans l’histoire, la révolte des bonnets rouges de 1675 s’inscrit dans la longue cohorte des révoltes populaires contre l’impôt et, par la même occasion, contre l’Etat central ou, du moins, de ses relais sur le lieu de la contestation : celle-ci fut terrible, tout comme la répression qui s’ensuivit… Mais il en reste quelques leçons que nos gouvernants, entre autres, feraient bien de méditer avant que de commettre de nouveaux impairs.

 

Tout d’abord, la question même de l’impôt, de sa légitimité et de son acceptabilité : tout Etat digne de ce nom doit trouver les moyens de se financer pour pouvoir maîtriser les territoires et aider les populations, engager de grandes politiques et être présent sur la scène internationale, tout simplement pour « être et durer » et représenter les intérêts de la nation, les défendre et les faire prospérer. En période de crise (qu’elle soit géopolitique comme en 1675 avec la guerre de Hollande –le pays, pas la personne…, ou économique et financière comme aujourd’hui, marque d’une mondialisation en cours, moins heureuse qu’espérée), trouver de l’argent est un art plus délicat encore que d’ordinaire, et qui nécessite un certain doigté si l’on veut éviter les réactions brutales : oublier les spécificités locales dans un pays aussi pluriel que la France, chatouiller les susceptibilités provinciales ou socio-professionnelles ou vouloir passer en force sans un minimum de concertation avec les parties concernées, en particulier celles appelées à s’acquitter de nouvelles taxes ou impositions, c’est risquer le mécontentement explosif, la contestation active et l’émeute revendicatrice. Colbert, en 1675, en négligeant la particularité de l’autonomie bretonne, a allumé, peut-être sans en saisir toutes les conséquences, un incendie qui mit bien du temps à s’apaiser et desservit l’Etat central sans satisfaire le Roi, obligé d’envoyer des troupes dans la province rebelle et risquant sa postérité… L’historien breton La Borderie, pourtant royaliste convaincu (il fut député monarchiste de Vitré de 1871 à 1876), n’hésita pas à parler, pour évoquer la répression royale de 1675, de « despotisme », même s’il cible plus Colbert que le souverain lui-même… Le gouvernement Ayrault devrait se souvenir de cela, sans doute, s’il ne veut pas perdre tout crédit (ou plutôt ce qui lui en reste…) dans une région qui, pourtant, lui était électoralement très favorable en 2012. Mais il est vrai que, contrairement à la structure institutionnelle étatique d’une monarchie qui restait encore « fédérative » à défaut d’être complètement fédérale, la République se veut « une et indivisible » et, donc, égalitaire, au risque de ne pas prendre en compte ce qui fait la diversité française et de se heurter à des réalités qui, elles, ne sont pas identiques d’un bout à l’autre du territoire national…

 

D’autre part, pour être acceptable et accepté, un impôt ou une taxe doit avoir une « raison d’être » et apparaître comme utile, voire nécessaire, aux populations qui doivent l’acquitter : or, qu’a-t-on vu avec cette fameuse « écotaxe », si mal nommée en fait ? C’est qu’elle devait plus rapporter à une société privée, baptisée Ecomouv, qu’à la Bretagne elle-même ! Cela nuit, évidemment, à la crédibilité de cette taxe qui apparaît plus devoir bénéficier à des actionnaires ou à des intérêts privés qu’à la collectivité elle-même : le principe de la « Ferme générale », déjà condamné sous l’Ancien régime parce qu’elle semblait trop profiter à quelques riches « percepteurs », n’est pas plus populaire ni compréhensible aujourd’hui qu’hier…

 

Mais là n’est pas le plus grave : en fait, cette taxe n’était accompagnée, pour lui donner crédit près de la population, que de vagues projets de transports ferroviaires, d’autant plus incompris en Bretagne que la SNCF a abandonné toute velléité de ferroutage dans cette province et qu’il n’a guère été évoqué d’alternative à la route en cette même région ! Pourtant, la reconstruction d’un réseau ferré dédié au transport de marchandises et de camions sur plateforme ferroviaire devrait être une priorité, mais aussi l’étude et la mise en place d’un système de cabotage ou de merroutage qui relierait les côtes de Bretagne aux grands ports nationaux (en particulier Le Havre, à l’embouchure de la Seine) pour éviter les routes et diminuer la pollution du transport routier… Or, rien de tout cela ! D’où l’incompréhension et l’absence de légitimité de cette nouvelle taxe, aggravées par les difficultés actuelles de l’économie en Bretagne, en particulier dans le secteur agroalimentaire.

 

Prisonnière de ses principes et de ses maladresses, la République se heurte désormais à une colère bretonne dont les derniers événements montrent qu’elle n’est pas qu’une simple flambée mais bel et bien une contestation plus profonde qui fait suite à un malaise lui aussi enraciné dans le tissu provincial, sur le plan social comme politique : au-delà de la politique fiscale, c’est aussi toute la politique d’aménagement du territoire mais aussi d’autonomie régionale que l’Etat doit repenser. Mais la République peut-elle faire ce double effort à l’heure où la mondialisation menace la réalité même de l’Etat et avec un gouvernement qui apparaît désormais isolé et condamné à brève échéance ?

 

 

 

 

 

 

21/08/2013

La révolte fiscale qui vient...

 

Le gouvernement a fait sa rentrée lundi et les observateurs politiques soulignent la difficulté du moment comme de l’exercice : malgré la légère amélioration de la situation économique au 2ème trimestre que semble évoquer la croissance à 0,5 % (taux bien insuffisant, dans la logique de mondialisation actuelle et principalement dans celle-ci, pour provoquer une baisse significative du chômage), la morosité demeure dans notre pays et les risques d’une dévalorisation économique de la France sont loin d’être écartés.

 

D’autre part, les réformes annoncées et les mesures déjà prises sont-elles efficaces et surtout, sont-elles justes ? On peut légitimement en douter quand on constate que le gouvernement, en cette année électorale (mars 2014, les municipales ; juin 2014, les européennes…), cherche, en fait, à préserver ce qu’il considère comme sa clientèle « traditionnelle », en particulier parmi les fonctionnaires, et qu’il évite de toucher à quelques règles un peu anciennes qui, pourtant, mériteraient d’être, sinon totalement abrogées, du moins largement érodées pour réparer quelques injustices flagrantes : ainsi, celle sur le calcul des retraites des fonctionnaires, sur les six derniers mois de la carrière, qui apparaît bien peu légitime au regard de ce même calcul, mais sur 25 ans, des salariés du secteur privé… Certes, quelques députés proches de l’actuel gouvernement insistent pour passer à 10 ans pour les fonctionnaires, mais est-ce suffisant ? La question mériterait d’être posée et débattue, mais, pour l’heure, le gouvernement semble plus pressé de communiquer que de discuter vraiment avec les acteurs sociaux, quels qu’ils soient, d’ailleurs !

 

A bien y regarder, le gouvernement cherche à tout prix à éviter un « automne social chaud » qui le mettrait en porte-à-faux avec ses obligés : du coup, il privilégie le levier fiscal pour résoudre la question du déficit et celle des retraites à venir, au détriment des réformes de structures et des économies nécessaires… Mais, ce faisant, il mécontente doublement les travailleurs du secteur privé, qu’ils soient ouvriers, artisans, commerçants, ou encore cadres, entrepreneurs, agriculteurs. En fait, ce sont toutes les classes moyennes « privées » qui font les plus grands frais de cette politique qui n’en est pas vraiment une, et qui semblent condamnées à financer celle-ci sans répit…

 

Et si c’était de ces classes pressurées que venait le danger pour le gouvernement dans les temps prochains ? Si c’était une « révolte fiscale » qui éclatait, multiforme et dévastatrice en ces jours de « disette financière » ? Un événement passé presque inaperçu au début du mois d’août pourrait bien le laisser penser et l’annoncer : la destruction par des manifestants en colère d’un portique destiné à l’application de la future écotaxe sur les poids-lourds (taxe sur laquelle on peut, d’ailleurs, avoir une lecture différente de celle des manifestants, mais ce n’est pas ici le débat le plus important) à Guidan, dans le Finistère, le vendredi 2 août dernier. Les manifestants, souvent agriculteurs ou salariés de l’agroalimentaire, dénonçaient « l’impôt de trop », « une taxe décidée à Paris par des technocrates », et « une violation du principe du non-paiement de taxes étatiques de péage en Bretagne depuis le rattachement de la Bretagne au royaume de France ». Le président de l’Association pour le maintien de l’élevage en Bretagne, lui-même éleveur de porcs, n’hésite pas à s’en prendre à ce qui est pour lui un véritable symbole de la République centralisatrice : « Ce portique est un symbole qu’il nous faut faire tomber. C’est une potence, c’est le symbole d’un establishment parisien, le symbole des contrôles tatillons dans nos exploitations et nos entreprises. ». Il n’est d’ailleurs pas inutile de souligner que cette manifestation et la destruction de ce symbole fiscal ont rencontré une large approbation dans les populations locales… Jusqu’à certains qui y ont vu une sorte de « chouannerie antifiscale », formule qui, évidemment, ne me laisse pas indifférent…

 

Le ministre de l’économie et des finances, le transparent M. Moscovici, a lui-même constaté « le ras-le-bol fiscal » qui commence (depuis un certain temps, déjà…) à se répandre dans le pays : sans doute commence-t-il à percevoir le danger d’une révolte antifiscale qui mettrait à mal ses prévisions dignes de Pangloss !

 

« Trop d’impôt tue l’impôt », est une formule juste mille fois répétée : mais il est temps pour l’Etat de penser à en tirer toutes les conséquences et à cesser de vampiriser les fruits du travail des Français. Moins d’impôts, mais davantage d’initiative, d’audace mais aussi d’économies : la République, hollandaise ou autre, en est-elle capable ? L’histoire nous incite à répondre prudemment, c’est le moins que l’on puisse dire… Quant à la politique, elle répond, encore plus implacable, par la négative, ne serait-ce que par les principes mêmes de la République, au-delà des sursauts et exceptions gaulliennes des années 60.