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07/12/2008

Crise immobilière à la campagne.

 

Je passe quelques jours à la campagne, et cela est fort reposant après plusieurs semaines de cours et, surtout, de corrections de copies. C'est aussi une autre manière d'aborder et de voir le monde, d'en constater parfois les « débordements » et de retrouver quelques accents ou couleurs de temps plus anciens, immémoriaux peut-être, même si je me méfie des nostalgies qui figent le temps au risque de ne plus saisir les réalités présentes.

Dans ma promenade matinale, autour de Saint-Léger-en-Yvelines, ce village où le comte de Paris rencontrait secrètement, sous la Quatrième République, le général de Gaulle, plusieurs signes attestent de la crise financière en cours : des agences immobilières sont fermées et leurs locaux à vendre ou à louer, ce qui est bien le comble pour ce type d'agence ; des panneaux « A vendre » fleurissent un peu partout et certains, déjà, se couvrent de mousse, devant des propriétés pourtant peu anciennes ; les « lotos » de village semblent se multiplier, plus nombreux désormais que les Marchés de Noël...

Des amis, rencontrés hier, me confiaient que plus rien ne se vendait dans la région, et que certains craignaient à plus ou moins long terme, désormais, une chute des prix immobiliers, chute tout aussi irrationnelle que celle actuelle des prix des produits pétroliers. Déjà, les chantiers de construction se ralentissent, ce qui, d'ailleurs, n'est pas forcément négatif au regard des ravages du mitage dans nos campagnes : cela va peut-être inciter à entretenir et à rénover ce qui peut (et parfois doit) l'être, et enrayer la folle consommation de terres que provoquait la poussée rurbaine depuis plus de vingt ans.

Cette crise immobilière qui, si l'on regarde bien ce qui s'est passé aux Etats-Unis à l'été 2007, est aussi en grande partie la cause de la crise financière, économique et sociale qui affecte en priorité les pays occidentaux, va sans doute pousser à repenser le rapport à la propriété immobilière de nos sociétés : ce rapport, qui n'était plus que financier dans de nombreux cas et n'avait plus de lien avec un enracinement territorial et mémoriel (familial, par exemple), participait, sans que cela soit perçu ainsi la plupart du temps, à cette forme de « néo-nomadisme » contemporain qui est le corollaire d'une « déterritorialisation des communautés et des familles ». Je ne dis pas que ce processus était toujours négatif mais simplement qu'il a parfois déstructuré des sociétés au point de n'en plus voir les solidarités traditionnelles qui, en temps de crise, seraient tout de même bien utiles pour amortir les « chocs » économiques comme sociaux.

En tout cas, les campagnes franciliennes, si peu communautaires par rapport à celles des provinces moins proches de Paris-capitale, vont sans doute connaître une atténuation progressive des effets « durs » de la rurbanisation, par l'intérêt de plus en plus évident pour les rurbains récents de devenir, véritablement et originalement, des « néo-ruraux », c'est-à-dire d'adapter leur mode de vie encore trop urbain aux réalités particulières de « la campagne ». Il n'est pas dit que cette révolution des mentalités se fasse en un jour, loin de là, mais il semble tout de même que ce processus soit déjà engagé et qu'il ait de fortes chances de se pérenniser, la crise aidant et forçant à des révisions de forme comme de fond de la part de nos contemporains...

Je me souviens vaguement d'une citation du « président Mao », dictateur chinois très en vogue après Mai 68 parmi ceux-là mêmes qui sont aujourd'hui les admirateurs du Dalaï-lama, qui affirmait que l'avenir est aux villages : il n'est pas impossible que, tout compte fait et alors que le processus de métropolisation n'est pas achevé au Nord ni celui de l'urbanisation au Sud, cette prédiction s'accomplisse dans les décennies prochaines, au moins partiellement...

C'est d'ailleurs une conviction que j'avais déjà évoquée lors de ma campagne électorale royaliste à Vitré en 1995, comme me le rappelle ma récente relecture des textes que j'avais alors publiés et distribués dans les rues de la petite ville d'Ille-et-Vilaine... Il est tout aussi vrai que j'y évoquais les possibilités qu'offrait le recours au télétravail et que, là encore la crise aidant, certains redécouvrent, comme le prouve un excellent dossier sur ce sujet publié il y a quelques semaines par le quotidien « La Croix ». Comme quoi, tout arrive à qui sait prendre le temps...

 

Post-scriptum : merci à Erwan Th. qui m'a donné envie l'autre jour, après réception de son amical courrier (auquel je vais répondre, je te rassure !), de rouvrir la boîte des archives de cette campagne législative que nous avons menée ensemble : la preuve ci-dessus...

05/12/2008

Les risques d'une consommation aveugle.

Il y a deux mois, je signalais sur ce blogue un article paru dans « Le Monde » sous la signature de Jean-Raphaël Chaponniere et intitulé « La crise renforcera l’Asie », article qui reste encore à mes yeux le plus intéressant et le plus instructif sur la crise que nous connaissons aujourd’hui. Mais d’autres articles et informations parus récemment semblent aussi confirmer cette annonce, tel icelui, fort bref mais tellement révélateur, publié dans « Le Parisien » du mercredi 3 décembre et titré : « Les produits « made in Asia », grands gagnants. »

Il mérite d’être intégralement cité, pour mesurer les enjeux de cette crise actuelle pour notre société :

« Une relance de la consommation par des aides aux ménages profiteraient surtout aux produits d’importation. Selon un sondage Ipsos/Tradexpo, ils sont 43 % de Français à fréquenter les magasins discount et 41 % à rechercher les produits les moins chers. Ils sont environ sept sur dix à penser que les produits en provenance d’Asie sont de moins bonne qualité que ceux « made in Europe ». Mais le sentiment d’appauvrissement est devenu tel pour une majorité de Français que « le prix devient dans de nombreux domaines le principal critère auquel ils font attention. Les objets fabriqués en Asie peuvent donc apparaître pour beaucoup de personnes comme un moyen de consommer à moindre coût ». »

En quelques lignes, tout (ou presque) est dit : dans une société de consommation où la quantité prime souvent la qualité, cette dernière considérée plus sélective et moins rentable, les consommateurs ont un réflexe plus « comptable » que raisonné et raisonnable. Mais, en fait, la crise nourrit la crise : en achetant à moindre coût les produits asiatiques, chinois ou autres, les consommateurs français serrent un peu plus la corde sur leur propre cou et risquent de mettre encore plus en difficulté les producteurs français déjà bien pressurés par les intermédiaires et les grandes chaînes (ce mot est si bien approprié, en fait…) de distribution qui, trop souvent, fixent « leurs » conditions, pour leur meilleur profit et sans beaucoup de scrupules…

Ainsi, les pays asiatiques à bas coûts salariaux qui, eux aussi, ralentissent leurs activités pour l’exportation ont néanmoins encore de meilleures chances de continuer à vendre aux pays occidentaux que nos producteurs locaux et proches. D’autre part, ces pays d’Asie ont encore la ressource d’écouler une grande partie de leurs stocks sur des marchés intérieurs dont les potentialités encore inexploitées sont importantes, voire très importantes ! Pour la seule Chine, il reste encore une masse de 800 millions de personnes qui pourraient accéder à leur tour à cette société de consommation et qui commencent, d’ailleurs, à s’impatienter… Idem pour l’Inde !

La fatalité est mauvaise conseillère : il serait confortable de se contenter d’être spectateurs et consommateurs sans conscience. Cependant, cela serait oublier nos devoirs de Français, en particulier à l’égard de nos compatriotes mais aussi de tous ceux qui, dans le monde, pensent que la France n’est pas simplement faite pour participer au « banquet des satisfaits ». Consommer autrement, sans doute moins mais mieux, n’est pas une simple foucade ou un slogan facile : cela doit être aussi une politique, et l’Etat, sans se mêler de ce qui ne le regarde pas en maints domaines,  peut donner l’impulsion d’une meilleure pratique consommatrice. Une pratique qui puisse garantir le présent et préserver l’avenir, pour les générations futures, autant de notre société que de notre art de vivre…

21/11/2008

Un milliard d'euros.

 

Encore une information passée inaperçue, à mon grand dam ! C’est le journal « La Croix » qui, dans son édition du mercredi 19 novembre, rapporte l’histoire : en mai dernier, l’idée de consacrer à l’aide aux pays du Sud (principalement des pays africains, dans ce cas précis) un milliard d’euros, consacrés initialement à la PAC (politique agricole commune) mais en définitive non utilisés, avait été avancée par des députés européens et reçue le soutien de la Commission de Bruxelles et du Parlement européen. Une belle idée, témoignant d’une solidarité bienvenue dans un monde souvent cruel aux plus faibles… D’autant plus que cette somme devait surtout servir « à développer leur agriculture, en leur offrant engrais et semences (non OGM) appropriés », selon l’auteur de l’article.

Mais la crise financière est passée par là, depuis, et certains États de l’UE, qui n’ont pas hésité à débourser des milliards d’euros pour sauver des banques pas toujours irréprochables, se refusent désormais à entériner cette mesure de solidarité : l’Allemagne, la Pologne et la Hongrie pourraient former, avec d’autres, une minorité de blocage et faire capoter le projet, « débattu ce vendredi dans le cadre d’une tentative de conciliation sur le budget 2009 entre le Parlement et la Commission ».

Cette information, peu médiatisée en ces heures de « guerre des roses », mériterait, me semble-t-il, plus d’attention et, en tout cas, est fort révélatrice des hypocrisies de notre société de consommation qui est prête à brûler des milliards pour soutenir une croissance qui s’apparente parfois à un vaste gaspillage des ressources de notre planète, et qui oublie, dans le même temps (à part dans les discours électoraux…), les notions de partage, de charité et de solidarité… Le journal « Le Monde » faisait sa « Une » il y a quelques semaines sur ce chiffre faramineux de 25.000 milliards de dollars envolés en fumée ces derniers mois, tandis que les différents plans de sauvetage financier de par le monde atteignent des sommes qui donnent le tournis : et, dans le même temps, quelques pays d’Europe chicanent sur un « misérable » milliard d’euros, un « milliard utile » pour une fois, et non pas destiné à la spéculation ou aux banques… Triste temps, triste monde…

Il faut souhaiter que, dans cette affaire, le cœur et la raison l’emportent, et que l’Union européenne saura où se trouvent l’honneur et son devoir. A moins que, comme l’affirme la cynique formule, « on ne prête qu’aux riches »…