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15/06/2009

Totalitarismes, démocraties... Monarchie ?

La fin d’année scolaire précipite souvent les dernières préparations de cours : ainsi, je viens d’achever mes cours sur « les totalitarismes » et « la seconde guerre mondiale » (les deux thèmes pouvant se compléter sans se confondre entièrement), et je termine en ce moment, quant à la préparation, ceux qui portent sur « la Révolution française et l’Empire », pour les classes de Seconde. En fait, ces différents thèmes révèlent des liens de parenté parfois fort serrés et j’ai posé la question, en Première, des racines des totalitarismes nazi et communiste, sans doute à chercher au sein même des Lumières et de la Révolution, autant à travers leurs pratiques que de leurs théories. Bien sûr, les écrits de Bernanos comme « La France contre les robots » semblent apporter une réponse assez claire, mais je m’appuie surtout en ce moment sur le livre publié sous la direction de Stéphane Courtois, « Les logiques totalitaires en Europe », et en particulier sur les chapitres évoquant un autre livre fameux (qu’il serait bien nécessaire de rééditer), celui de J. Talmon intitulé « Les origines de la démocratie totalitaire ».

 

L’union des termes « démocratie » et « totalitaire » peut être choquante dans notre société qui, non contente de distinguer l’un de l’autre (dans leur définition comme dans leur application), les oppose, les fige en des postures irrémédiablement antagonistes. Le danger serait de vouloir interdire que l’on puisse penser une éventuelle parenté entre les deux termes, et je me souviens d’un débat à la fin des années 80 à la faculté de Droit de Rennes lors duquel j’avais été pris à partie parce que je ne voulais pas me contenter du dilemme « Démocratie ou totalitarisme ? ». Ainsi, le fait de ne pas faire de la démocratie l’expression d’une fin obligatoire de l’Histoire me valait d’être rejeté dans le camp des « maudits », à ma grande déception…

 

Pourtant, je me sentais légitimé par la phrase de Georges Bernanos prononcée lors d’une conférence à la Sorbonne en 1946 qui affirmait crânement que « les démocraties sont les mères des totalitarismes ». Cela signifie-t-il que toute démocratie est condamnée à finir en totalitarisme ? Pas exactement, mais cela indique que les démocraties, selon leur histoire et malgré (est-ce toujours « malgré » ?) leurs principes affirmés, ne sont pas à l’abri de donner naissance à des monstres totalitaires. D’ailleurs, l’Histoire est là pour nous le prouver, et c’est parfois au nom même de « la Démocratie » que certaines horreurs ont été légitimées, que cela soit sous la Terreur d’un Robespierre ou par les bombes atomiques d’Hiroshima et Nagasaki fêtées au champagne par le président des Etats-Unis et son état-major…

 

Bernanos comme Tolkien (l’auteur du « Seigneur des anneaux ») pensaient que l’on ne pouvait combattre le Mal avec les mêmes procédés que lui, d’où leur répugnance à célébrer la « bombe de la Liberté » qui, d’ailleurs, tombera bientôt aussi dans les mains des Soviétiques ou, plus exactement, de Staline, en grande partie grâce à Julius Rosenberg, exécuté aux Etats-Unis pour la divulgation des secrets nucléaires à la puissance communiste…

 

D’autre part, ne sont-ce pas les totalitarismes eux-mêmes qui, parfois, se réclament de la « vraie » Démocratie, « contre sa caricature bourgeoise » que dénoncent Lénine et ses partisans marxistes ?

 

Je repose la question : cela signifie-t-il que toute démocratie est condamnée à finir en totalitarisme, que celui-ci soit « abrupt » comme le furent nazisme et communisme, ou « voilé » comme le « globalitarisme » de certaines sociétés contemporaines semble vouloir le démontrer à travers la « société de soupçon permanent », ultra-informatisée et « sécurisée » ? J’aime à penser que non, même si cela n’a pas toujours été ma réponse, et je ne me pose pas en antidémocrate même s’il m’est difficile d’être démocrate de pleine et entière acception…

 

Ainsi, je n’oppose pas Monarchie et Démocratie, ne serait-ce que parce que cela serait un contresens historique et politique, et je peux fort bien me reconnaître dans la formule qui veut « couronner la démocratie », en France comme dans d’autres pays du monde qui, pour certains, sont déjà des Monarchies héréditaires. Si je crains la faiblesse des démocraties à l’égard des systèmes totalitaires, voire leur complaisance pour des raisons plus souvent économiques que politiques ou humanistes ; si je m’inquiète des logiques démocratiques, plus souvent consuméristes qu’écologiques ; si je crois discerner dans les sociétés démocratiques la réduction des libertés concrètes et des traditions au profit d’une illusoire « souveraineté populaire » ou « citoyenneté » mal ordonnée, voire impuissante ou incapable (au sens de l’incapacité à pouvoir user de droits de décision concrets dans son espace civique de base) : tout cela ne m’empêche pas de considérer l’importance qu’il y a à intéresser les citoyens à la politique mais aussi à la réflexion sur les institutions et les pratiques civiques (prise de parole, élections, référendum, etc.), à la responsabilisation civique et à la construction de médiations politiques, associatives, professionnelles, etc. En somme, à la reconquête par les institutions locales, « de proximité » dirait-on aujourd’hui, et par les familles et les personnes elles-mêmes, de leurs pouvoirs, jadis en France appelés « franchises », « privilèges », « libertés »…

 

Et c’est là l’une des fortes raisons de mon royalisme : cette redistribution des pouvoirs, cet ordonnancement qui se fonde sur la médiation et l’équilibre (ou, du moins, sa recherche), ne peut se réaliser le plus complètement et le plus justement possible que par la présence, surplombant les pouvoirs politiques et les organisations économiques et professionnelles, d’un Etat qui soit la mémoire et la garantie de l’unité de l’ensemble et des libertés de chacun de ses éléments, dans leur sphère d’action et de décision propre. En somme, une sorte de clé de voûte qui, tout aussi discrète soit-elle, n’en est pas moins nécessaire pour éviter la ruine de l’ensemble.

 

La Monarchie n’est pas une « antidémocratie », elle ne se pose pas par rapport à un système idéologique mais par rapport aux réalités concrètes : fédératrice et fédérative, elle est la possibilité « des » démocraties nécessaires et équitables, de celles qui existent parfois même sans les divisions ou les étiquettes partisanes, de celles qui rapprochent les personnes des institutions et de la prise de décisions… En somme, la Monarchie permet aussi des « démocraties de base », ce que l’on pourrait qualifier de « nouvelles agoras ».

 

Oui, « couronner la démocratie », pour éviter à la Démocratie de se trouver piégée par une logique dangereuse qui en ferait, comme le craignait Bernanos, « la fin d’elle-même » et la porte ouverte aux « pires », qu’ils soient totalitaires ou simplement globalitaires…

 

Dans l’Histoire, la Démocratie a souvent résumé son combat par le cri fameux : « La Liberté ou la mort ! ». J’aime à croire que la Monarchie française (et cela qu’elle se pare du mot de démocratie ou non), elle, se retrouve mieux dans le cri : « Les libertés et la vie ! »…

 

12/06/2009

Comment la Monarchie ? (réédition)

L’une des questions qui revient fréquemment parmi les commentaires de ce blogue, c’est « Comment la Monarchie peut-elle advenir en France ? ». Il est vrai qu’au regard de l’état actuel du royalisme et des résultats électoraux encore bien dérisoires, cette perspective institutionnelle monarchique apparaît fort lointaine, voire improbable. Si tel est peut-être le cas, cela, de toute façon, n’enlève rien à sa nécessité. Ce constat une fois établi, quelles sont les voies d’une instauration monarchique en France ? Ecartons, dans le cadre de notre « démocratie apaisée », l’idée d’un « coup d’Etat » qui délégitimerait, aujourd’hui, toute entreprise politique aux yeux de nos concitoyens désormais habitués aux règles électorales ou parlementaires. Cela étant, ce qui est vrai en 2009 ne l’a pas toujours été, et le « coup d’Etat » ou la « révolution par la rue » ont longtemps été des pratiques pensées, voire appliquées, par les mouvements républicains, autoritaires (bonapartistes) ou royalistes en France. Il n’est d’ailleurs pas écrit que les circonstances n’autorisent pas, en des temps futurs, le retour de ces perspectives brutales : il n’y a pas de « fin de l’Histoire » et cela serait insulter l’avenir que de croire que la violence va déserter à tout jamais le champ du politique dans notre pays…

 

Dans le cadre de la démocratie représentative actuelle, plusieurs voies sont possibles pour l’instauration, et la Constitution du 4 octobre 1958 elle-même n’empêche pas vraiment une telle perspective, malgré l’article 89 qui stipule que la forme républicaine du Gouvernement ne peut faire l’objet d’une révision. C’est ce que signale et développe Daniel de Montplaisir, administrateur de l’Assemblée nationale, dans son livre intitulé « La Monarchie » et publié en 2003.

 

La Monarchie sera-t-elle établie par un processus électoral ou par une « nécessité » politique (le roi comme « recours » en cas de crise politique grave ou de blocage des institutions existantes) ? Rien n’est à exclure. Pourquoi pas, disent certains, un référendum institutionnel sur la forme de l’Etat qui poserait la question de la Monarchie ou, plutôt, l’introduirait comme « possibilité » face à l’actuelle République ou, même, dans la continuité, l’aboutissement « logique » de la Cinquième République ? Cela, d’ailleurs, ne rejoindrait-il pas l’idée première du général de Gaulle au début des années 1960, idée malheureusement non suivie d’effets ?

 

Néanmoins, d’autres pistes existent et méritent sans doute d’être elles aussi exploitées. Quoiqu’il en soit, la première étape vers la Monarchie c’est déjà de faire connaître et accepter la proposition monarchique, d’une part au sein de l’Opinion publique (la création d’un état d’esprit favorable ou « pas opposé » à la perspective monarchique, qui passe par la « dédramatisation » de l’idée royale), d’autre part au sein des « élites » politiques des partis de gouvernement qui peuvent jouer un rôle dans la crédibilisation de l’option royale et permettre sa concrétisation, par la voie parlementaire par exemple.

 

Il faut être clair : la Monarchie n’est pas faite, elle est à faire. Le chemin est forcément long et difficile, mais il me semble, en ce domaine comme en d’autres, qu’il vaut la peine d’être emprunté. A l’heure de certaines échéances, il appartiendra aux royalistes de « saisir la verte chance » : il n’est pas dit que ce soient eux qui établissent la Monarchie, mais ils auront préparé le terrain, psychologique et politique, pour que d’autres, ceux qui auront le pouvoir, la possibilité de le faire, pensent, au bon moment, à l’option institutionnelle monarchique

23/11/2008

Démocratie au parti socialiste.

L’actuelle bataille pour le secrétariat général du Parti socialiste prend des allures de bataille de chiffonniers, et le décompte des voix, qui doit être repris lundi, promet encore de belles empoignades entre les partisans des deux candidates, Mmes Aubry et Royal. Mais, au-delà des querelles pour telle ou telle voix, des fraudes qui semblent être, en fait, une habitude dans ce parti qui ne cesse de parler de morale politique (à défaut de la pratiquer toujours), du recours aux juges pour venger les affronts et de ce spectacle triste d’un parti de gouvernement qui ne maîtrise plus ses nerfs, il y a tout de même un rappel à faire, dans le cadre de la logique démocratique (je n’ai pas parlé de sagesse…) : dans ce système, la victoire revient toujours, dans le cadre d’une élection à deux candidats, à celui qui a obtenu 50 % + 1 voix et c’est même la règle !

Soyons franc, la situation se présente peu souvent (quoique…) mais, dans l’histoire, elle a pu avoir des conséquences justement historiques autant que politiques : la condamnation à mort du roi Louis XVI, en janvier 1793 ; l’établissement « définitif » (pourvu que non…) de la République, numérotée troisième, en 1875 ; la dernière révision constitutionnelle à l’été dernier (approuvée par l’éternel Jack Lang contre son propre parti, le même que celui qui, aujourd’hui, amuse la galerie…)…

Je ne sais pas qui, de la sainte du Poitou ou du bouledogue lillois, sera déclarée vainqueur ces jours prochains ou si les adhérents seront à nouveau sollicités pour une nouvelle cérémonie urnicole (le terme n’existe pas, mais, bon, tant pis : j’aime bien !), mais le fait que chaque camp ne reconnaisse pas la victoire de l’autre prouve le bien-fondé de la réflexion de Maurras sur la « soustraction » que constitue ce principe démocratique appliqué à la désignation d’un dirigeant, quel qu’il soit : soustraction car les forces tirent chacune de leur côté au lieu de s’unir, et elles ont d’autant plus de mal à s’unir ensuite qu’elles se sentent soit légitimées soit lésées par le résultat proclamé…

Le plus étonnant, démocratiquement parlant, c’est que le sort du fond des urnes soit désormais (et il n’y a pas qu’au PS ni même seulement en France !) pratiquement toujours contesté dès qu’il y a un doute, fut-il exagéré, sur quelques bulletins : signe de la fin d’une époque qui accordait une confiance presque aveugle à ce que déclaraient les gardiens du vote ou ses dépouilleurs ? Ou d’une remise en cause d’un système majoritaire dont on accuserait, lorsque le vote n’est pas celui désiré par les élites du moment, la vacuité ? Ainsi, une voix ne serait plus une voix, et chacune serait désormais pesée et non plus comptée ?

Cela peut sembler anecdotique. Et pourtant ! Il me semble que nous entrons dans une nouvelle ère de la politique, celle du « doute post-démocratique » : si les premières manifestations en sont encore bien ridicules, il n’est pas dit que les prochaines ne soient pas plus inquiétantes ou, pourquoi pas, prometteuses ?