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13/05/2012

Pas de politique du pire !

François Hollande est président de la République pour cinq ans, voire un peu plus : je n'en suis pas plus réjoui que par le précédent qui a largement contribué au brouillage de l'image de la France dans le monde, même s'il a pu, parfois, jouer un rôle non négligeable sur cette même scène internationale au coeur de la crise de la fin des années 2000. Mais que le président en place me plaise ou non, et qu'il convienne de combattre sa philosophie politique et un certain nombre de ses décisions qui risquent de mettre à mal l'unité française ou sa grandeur, ne doit pas empêcher de « savoir raison garder », comme nous le rappelle le vieil et utile adage des Capétiens : aussi, je trouve particulièrement déplacée la sorte de jubilation de la presse libérale (qui se veut « sérieuse et responsable »…) et des politiciens de Droite qui semblent se féliciter de l'intransigeance rigoriste de la chancelière allemande et du possible échec du nouveau président face à Madame Merkel ! A croire, parfois, que « Le Figaro magazine » s'écrive à Berlin, et que BFM émette depuis Francfort ! Avec, en prime, ce « On vous l'avait bien dit » un peu hautain qui évite évidemment de se poser trop de questions sur les causes profondes de la situation actuelle, sur les racines et logiques (parfois fort dangereuses) d'un système de la Société de consommation qui n'a attendu ni M. Sarkozy ni M. Hollande pour déployer ses effets les plus pernicieux et les moins humainement justifiés et acceptables...

 

M. Hollande est élu président de la République : c'est un fait, certain, si ce n'est pas un bienfait ! La République, elle, est beaucoup plus coupable que celui qui n'est que de passage au palais de l'Elysée, même s'il revient au président de corriger ou, au contraire, d'aggraver les défauts inhérents aux institutions. Dire que M. Hollande n'est pas « mon président » n'a pas beaucoup de sens car il n'a pas, d'une certaine manière, à l'être et il n'a pas été élu pour cela, d'ailleurs : sa titulature a un sens, il est « président de la République », ce qui est à la fois plus large et moins individualiste, et qui ne signifie pas, à y bien regarder, « des Français » en tant que tels, de passage eux aussi, non point sous les ors élyséens mais sur cette terre... Cela est aussi une sorte d'adaptation républicaine de la formule « roi de France » qui, lorsqu'elle est devenue « roi des Français », s'est avérée plus incertaine et aléatoire, prise au pied de la lettre...

 

Il ne faut pas souhaiter le pire à M. Hollande car ce serait, face à l'Allemagne, une défaite dangereuse et créerait les conditions d'un déséquilibre en Europe au détriment de nos intérêts et, plus largement, de tous ceux qui souhaitent une autre forme d'Europe et de relations internationales que celles aujourd'hui imposées par les Marchés et les institutions de l'UE et de la BCE.

 

N'oublions jamais que la politique du ressentiment, la politique du pire est, comme le rappelle Maurras, « la pire des politiques ». D'autre part, à ceux qui souhaitent pour la France une imitation servile de la rigueur allemande, rappelons que, s'il s'agit d'être avec l'Allemagne en Europe, il ne s'agit pas de faire « comme elle » : ce n'est ni dans notre intérêt ni dans notre tradition...

 

 

 

07/05/2012

Et maintenant ? Les défis à relever du prochain président.

« Ite missa est » : la grand-messe électorale est dite, et c’est donc M. Hollande qui est le malheureux élu… Je dis bien malheureux car il arrive au plus mauvais moment possible et à la tête d’un Etat qui a, depuis quelques années déjà, renoncé à certains instruments du politique, laissant bien trop libres les féodalités économiques et les institutions européennes, celles-ci et celles-là trop heureuses d’en profiter… Ce qui se passe aujourd’hui en Europe et en particulier en zone euro marque la Grande Transition que j’évoque fréquemment et qui se fait, en large part, au détriment de nos vieilles et anciennes (à défaut de l’être encore) nations industrialisées, qui semblent incapables de sortir de la logique absurde d’une mondialisation devenue folle et de celle, non moins dangereuse, de la société de consommation et de distraction qui pousse à s’endetter toujours plus pour répondre à l’addiction consumériste de nos sociétés elles-mêmes…

 

Le nouveau président aura-t-il la force de « restaurer l’Etat » et, au-delà, le politique ? Au regard des institutions républicaines actuelles d’une part, et des pressions des puissances financières et économiques d’autre part, j’en doute ! Je ne mets pas en cause la volonté et la bonne foi de M. Hollande, qui seront plus tard discutées lorsque les grandes échéances arriveront, mais bien plutôt les capacités mêmes de la République qui n’est plus celle, même si elle en porte le même numéro, de son fondateur, le général de Gaulle.

 

Les premières difficultés seront sans doute avec le partenaire allemand, peu enclin à céder sur ses positions rigoristes, et avec les institutions européennes qui en appellent déjà au « sens de la responsabilité » de M. Hollande pour accélérer les réformes dites « structurelles », c’est-à-dire le démantèlement d’un droit social français jugé trop protecteur et pas assez libéral ; mais il faudra aussi compter sur des Marchés qui voudront impressionner le nouveau président et lui signifier qu’ils sont, en définitive, les « maîtres du jeu » et que, sans eux, rien n’est possible. Quant aux multinationales qui attendaient la fin de la présidentielle pour annoncer, au fil des mois qui viennent, de nouveaux plans sociaux, elles pourraient mettre leurs projets rapidement à exécution, au risque de provoquer l’ire du nouveau pouvoir mais, peut-être aussi, de montrer la faiblesse d’un Etat prisonnier de règles de libre-échange que Bruxelles mais aussi l’OMC sont chargés de garantir…

 

La République s’est liée les mains en abandonnant, au fil des ans, sa souveraineté politique à des institutions qui n’en étaient pas au sens politique mais beaucoup plus au sens administratif : des carcans, en somme, dont il est difficile de s’extraire légalement aujourd’hui…

 

Il ne faut pas se réjouir des difficultés de l’Etat à faire face à ces problèmes économiques comme institutionnels, mais il convient de rappeler que la remise en force, nécessaire, de l’Etat face aux groupes de pressions et aux défis de la mondialisation, passe par une nouvelle mutation institutionnelle qui inscrive le politique dans la durée, dans le temps long des générations successives et non plus dans les atermoiements d’une action gouvernementale limitée par le calendrier électoral et bridée par des forces économiques émancipées de leurs devoirs sociaux depuis trop longtemps.

 

Les faiblesses congénitales de la République, aggravées par la course d’un temps qui l’a usée prématurément, sont aussi des occasions de réflexion pour ceux qui veulent refaire un Etat politique solide et durable, socialement juste et économiquement équilibré : sans doute cela pourra-t-il aussi ouvrir un chemin, étroit mais qu’il conviendra d’élargir peu à peu, à la possibilité monarchique qui est, d’abord, celle d’une Monarchie du possible mais aussi de la volonté et de l’action, qui ne sont rien sans la durée et l’unité, ces éléments de définition de la Monarchie elle-même

 

 

29/02/2012

Le devoir civique des plus riches.

Il est intéressant de constater la difficulté d'obtenir des chiffres en France sur certaines questions sensibles : ainsi, dans ma note d'hier mardi sur la proposition de François Hollande de taxer les « millionnaires » en revenu annuel, j'avançais le chiffre de 10.000 à 15.000 personnes concernées par cette taxation promise, et cela sur la foi de ce qui était évoqué sur plusieurs chaînes de radio. Or, d'après le candidat socialiste lui-même, ce chiffre ne serait que de 3.000 et les sommes espérées par cette taxation à 75 % des revenus millionnaires d'environ  200 à 300 millions par an, c'est-à-dire moins que ce que l'Etat a versé au seul Bernard Tapie il y a quelques années de manière inconsidérée...

 

Quelques remarques : d'une part, il est étonnant que dans un pays comme le nôtre où le fisc est bien organisé et les moyens de contrôle nombreux, le nombre de personnes gagnant plus d'un million d'euros annuels soit à ce point difficile à cerner. En même temps, cela peut être rassurant de savoir que, justement, le fisc ou les administrations publiques (ou privées, d'ailleurs) ne savent pas tout de nous ! La même incertitude sur les chiffres vaut aussi, semble-t-il, sur le nombre exact de fonctionnaires, ce qui est tout de même ennuyeux quand ces derniers sont payés par l'argent des contribuables... Les contradictions d'un système, sans doute !

 

Deuxième remarque : cette proposition hollandiste (et surtout hollandiste, les socialistes ayant visiblement été surpris de cette proposition de leur candidat...) n'a pas pour vocation d'être déterminante mais plutôt symbolique et j'avoue qu'il ne me paraît pas forcément choquant, en temps de crise, de faire appel au civisme et à un certain patriotisme des plus privilégiés de nos compatriotes. D'ailleurs, n'est-ce pas ce qui se passait dans les cités antiques de Grèce et de l'empire romain ? La richesse était un privilège qui ouvrait à des devoirs civiques, et elle n'était pas séparée du sort même de la cité. Mais il est vrai que certaines « élites » sociales d'aujourd'hui considèrent le patriotisme, l'enracinement dans une terre et la fidélité à un ensemble national comme des « obstacles » à leur liberté individuelle, et qu'elles se veulent les nomades (et les monades...) d'une mondialisation dont elles sont, parfois par égoïsme, les principales bénéficiaires... D'où ma proposition de renforcer le lien entre l'appartenance nationale et la solidarité fiscale : « nationalité est fiscalité ».

 

Dernière remarque (mais pas l'ultime...) : je doute, peut-être à tort, que M. Hollande puisse appliquer cette mesure s'il est élu, car il se trouvera toujours des bonnes âmes dans son propre camp et dans les rangs de ses interlocuteurs et partenaires économiques pour lui indiquer que cela serait « contre-productif » et brandir la menace de « délocalisations des fortunes ». Ce dernier argument classique est malheureusement d'une grande efficacité, sans doute par la faute même des Etats qui n'osent se défendre de peur d'être taxés « d'autoritaires » ou de « liberticides » (deux qualificatifs qui ne sont pas, pourtant, forcément synonymes), et par la faute de l'Union européenne qui, rapidement, risque d'invalider, au nom des principes même de sa construction libérale, cette mesure qui serait présentée par ses contradicteurs comme une atteinte au « Droit européen ». D'ailleurs, il est intéressant de noter la grande indifférence avec laquelle cette proposition a été accueillie, non pas dans les milieux politiques, mais dans les milieux économiques et financiers... Indifférence révélatrice !

 

L'un des grands défis des années qui viennent sera de renforcer le politique pour ramener à la raison (voire à la « maison »...) les plus aisés de nos concitoyens, qu'il ne s'agit pas de chasser ou de persécuter, mais qu'il s'agit de motiver pour une plus grande solidarité avec tous les membres de la Communauté nationale. Que M. Laurent Voulzy déclare hier que cette taxation ne le choquerait pas, au regard des efforts demandés à chacun en ces temps de crise, est un bel exemple que la richesse n'implique pas forcément l'oubli des autres, moins riches : cet artiste révèle ainsi une sorte de patriotisme fiscal qui est aussi la marque de la solidarité nécessaire au-delà des différences sociales. Bravo, l'artiste ! Puisse-t-il être suivi par d'autres !

 

Mais je reste persuadé que son exemple et sa bonne volonté ne trouveront vraiment leur pleine mesure que dans un Etat qui saura s'imposer aux féodalités financières contemporaines, y compris contre les oukases et chantages des multinationales ou des puissances financières du moment : la République de M. Hollande n'est pas une Monarchie royale, et il n'est pas non plus Louis XIV face à Nicolas... Fouquet !

 

14:18 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : fisc, hollande, impôts, voulzy, taxe, crise.