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30/06/2009

La crise profitera à l'Asie (réédition 2009)

Au mois d’octobre dernier, j’ai écrit un texte sur la crise actuelle, texte qui a été imprimé et diffusé à plusieurs centaines d’exemplaires en région parisienne et en Bretagne et qu’il me semble utile, aujourd’hui et avec quelques mois de recul, de republier sur ce blogue. Je n’y ai pas changé une ligne, et je pense que l’article ici cité de Jean-Raphaël Chaponniere prend de plus en plus de valeur au fur et à mesure du temps qui passe : il me faudra en reparler prochainement car « la crise continue », avec toutes les ambiguïtés, d’ailleurs, qu’elle révèle, dans sa définition comme dans ses développements…

 

 

 

La crise financière continue à se développer sans que l’on sache combien de temps elle va durer et quelles en seront toutes les conséquences. La dégringolade des places boursières donne l’impression d’une vaste panique incontrôlée et d’une perte de confiance généralisée dans le système financier mondial. Mais, au-delà des évènements, il me semble important de chercher à comprendre ce qui se passe, condition indispensable à toute stratégie économique crédible et à toute réponse politique.

 

En fait, il n’est pas inutile de se rappeler que le terme même de crise est la traduction française du mot grec « krisis » qui signifie « séparation » : c’est bien de cela dont il s’agit, une séparation entre un avant et un après, une forme de transition en somme entre deux situations, deux réalités, deux mondes.

 

Ainsi, nous assistons au « passage de témoin » de la puissance financière et économique, des pays du Nord (Etats-Unis, pays européens, principalement) à certaines nations d’Asie, en particulier l’Inde et la Chine, ce que soulignent quelques (rares) articles qui évitent de tomber dans le piège d’une lecture simpliste et seulement idéologique, pas toujours suffisante pour comprendre la situation présente : si crise du capitalisme il y a, cela ne signifie pas la fin de celui-ci mais son transfert dans de nouveaux espaces dominants, dans de nouvelles zones de réalisation et d’expansion. Le centre du monde se déplace vers l’Asie et, comme tout déracinement de ce que l’on a cru éternel et inexpugnable, cela se fait dans de grands craquements et dans la poussière soulevée par ces grands arbres qui s’abattent sur un sol devenu aride… L’argent est désormais ailleurs que dans nos pays qui, en caricaturant un peu, se contentent juste de consommer des produits fabriqués en Asie, serrant par là-même la corde autour du cou de nos économies.

 

La question posée dans « Le Monde 2 » dans son édition du samedi 4 octobre : « Au décours de cette crise, les actuels maîtres du monde seront-ils toujours ceux de demain ? » trouve ainsi sa réponse dans un autre article du « Monde » du même jour : « La crise renforcera l’Asie », article de l’économiste Jean-Raphaël Chaponniere qu’il conviendrait de découper et de conserver dans son portefeuille, non comme un talisman mais comme un avertissement, et qui confirme mes prévisions déjà anciennes.

 

Ainsi, est-il expliqué que « la crise financière, la plus grave depuis 1929, accélérera le glissement du centre du monde vers l’Asie », glissement commencé depuis les années 80-90 et freiné par la crise de 1997. « Cependant, tous les pays asiatiques ont tiré les leçons de la crise de 1997 et ont accumulé des réserves pour se protéger. Investis en bons du Trésor américain, elles ont permis aux Etats-Unis de maintenir des taux d’intérêt bas et aux ménages américains de s’endetter davantage. L’Asie a ainsi profité de la boulimie de consommation aux Etats-Unis. Ces excès ont conduit à la crise. (…)

Depuis l’été 2007, les Etats-Unis souffrent de la grippe des subprimes et, si les marchés asiatiques ont souffert, les économies réelles ont été épargnées. En 2009, elles seront bien sûr affectées par la récession qui s’annonce. Pour autant, elles connaîtront un rythme de croissance supérieur à celui des économies américaines, européennes et japonaises.

(…) L’attention portée aux échanges occulte l’essentiel : la croissance asiatique repose bien davantage sur la demande domestique. L’investissement et la consommation sont les principaux ressorts de ces pays. Ils ne seront affectés qu’à la marge par la crise. (…)

Les Etats et les ménages asiatiques qui en ont les moyens financiers continueront d’investir et de consommer. S’ils ont pâti de la crise financière, les fonds souverains asiatiques vont quant à eux probablement saisir cette opportunité pour acquérir des actifs aux Etats-Unis et en Europe.

(…) En accélérant le basculement vers l’Asie, la crise actuelle accouchera d’un monde multipolaire. ».

 

Comprendre ce transfert de richesses et de puissance économique, c’est en prévenir aussi les conséquences et en amortir le choc : le capitalisme libéral, s’il se retire de nos terres pour aller fleurir ailleurs, pourrait bien laisser la place à de nouvelles formes, traditionnelles ou inédites, d’économie et de société, mieux orientées vers le partage et la sobriété. Pour en finir, non pas avec l’Argent, mais avec son règne indécent et cruel…

 

 

(8 octobre 2008)

20/01/2009

L'Etat et son rôle dans l'économie.

Ma précédente note sur « la République impuissante face aux Fouquet » a suscité un commentaire qui me permet de préciser un peu ma pensée sur le rôle de l’Etat en économie. Il m’a semblé fort intéressant, à la réflexion, de publier directement sur ce blogue la réponse que j’ai apportée à Romain, ainsi, évidemment, que son commentaire initial. Le débat continue…

 

Commentaire de Romain :

Je ne comprends pas ce qu'un roi pourrait changer au problème...
En effet le rôle d'arbitre suprême que vous lui attribuez ne lui permettra pas de s'opposer à la libre circulation des capitaux et on revient donc à la situation actuelle que vous décriez.
Le roi que vous proposez n'aura pas (du moins je l'espère) le pouvoir de dicter leur conduite aux entreprises. La question se pose donc : comment un roi pourrait-il sauver les entreprises françaises de la crise et du machiavélisme ? Car si j'ai bien compris votre message c'est ce que vous semblez affirmer.

 

Ma réponse :

Il ne s’agit pas de tomber, je vous rassure, dans un étatisme qui serait forcément vain et tout aussi néfaste que peut l’être le libéralisme à tout crin : que cela soit en monarchie ou en république, l’Etat ne peut pas tout et n’a pas à tout régenter, en économie comme dans d’autres domaines. Mais l’intérêt d’un Etat qui dispose d’une légitimité extérieure aux jeux politiques (et à leur financement) est de pouvoir parler haut et fort, sur le plan intérieur comme extérieur, et cela peut être tout à fait utile pour avancer dans des négociations internationales qui permettraient de mieux contrôler certains flux financiers et économiques : il s’agit bien de changer le rapport de force pour que « la fortune anonyme et vagabonde » ne soit pas la seule puissance mondiale… La limiter est possible, sans tomber, là aussi, dans la démagogie et la seule contrainte.

La libre circulation des capitaux doit, surtout en temps de crise, pouvoir être régulée, au moins provisoirement, et n’oublions pas le rôle que peuvent jouer les banques centrales sur la gestion des monnaies. En fait, le principal problème en France et en Europe est bien l’indépendance de la BCE de Francfort qui, souvent, oublie les intérêts des peuples et des Etats, sans pour autant empêcher les dérives des finances publiques : que le Politique retrouve sa place éminente de création et de souveraineté (ne serait-ce que par le biais d’un Conseil européen de la Monnaie, par exemple, qui est tout à fait envisageable) dans le cadre de la Monnaie, est nécessaire. Et l’Etat français, par le poids de son économie, peut jouer un rôle véritable d’impulsion et de direction, en lien avec ses partenaires en Europe et ailleurs. Je suis conscient que cela n’est pas forcément facile mais c’est largement possible : il y faut la volonté politique et celle-ci doit trouver une part de sa force et de sa légitimité par cette externalisation de la source du pouvoir de l’Etat, c’est-à-dire par l’indépendance de la magistrature suprême de l’Etat permise par le mode de transmission héréditaire de celui-ci.

Le roi que je propose n’a pas à se faire chef d’entreprise à la place des chefs d’entreprise. Mais l’Etat a des devoirs économiques et sociaux, et des pouvoirs politiques et législatifs, qu’il s’agit d’ordonner au Bien commun. Par une politique de d’impulsion et de décision, l’Etat peut agir, concrètement, par la proposition de lois au Parlement et l’organisation de grandes politiques de chantiers structurels : en somme, fixer de grands axes d’action qui n’empêchent pas les entreprises de vivre mais qui limitent les risques de dérives et qui forcent les grands financiers et entrepreneurs à une certaine responsabilité devant l’Etat et l’Opinion prise à témoin

Bien sûr, la Monarchie n’est pas une solution-miracle qui résoudrait tous les problèmes économiques et sociaux mais elle a devoir de préserver les liens entre « économique » et « social », par cette médiation du Politique qu’elle incarne, mieux que le président d’une République qui a souvent du mal à se séparer de ceux à qui il doit sa présidence. Je ne promets pas (cela serait malvenu et d’une grande suffisance de ma part !) que la Monarchie va en finir avec la crise qui touche la France comme d’autres pays, mais je pense qu’elle peut en amortir les effets et donner des possibilités aux entreprises et aux commerces de notre pays de retrouver du souffle et des champs d’application divers et variés, en France comme à l’étranger. Il y a un grand vivier d’emplois encore inexploité dans l’aménagement intelligent du (des) territoire(s), et il y a de nombreuses pistes que l’Etat peut emprunter pour « débroussailler » le passage à l’économie…