Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

02/02/2021

Transition démocratique et continuité monarchique.

 

La démocratie n’est pas toujours un long fleuve tranquille, et les récents événements survenus aux États-Unis autour et au sein même du Capitole en sont une preuve indéniable, du moins pour ceux qui cherchent le sens des choses plutôt que l’écume des seuls faits. La difficulté de M. Trump à accepter de quitter la Maison Blanche et les émeutes du 6 janvier (qui ressemblaient plus à un mouvement de colère qu’à une conjuration réfléchie) nous rappellent que la transition démocratique dépend aussi d’un contrat politique dans lequel la défaite est possible et le pouvoir issu de l’élection remis en cause à chaque nouvelle élection, deux éléments constitutifs des régimes démocratiques et, a priori, non négociables. Or, ces éléments doivent être intégrés autant par les dirigeants désignés par le suffrage (appartenant au « pays légal » sans en être toujours les véritables maîtres) que par les électeurs eux-mêmes (issus du « pays réel » sans en incarner toutes les dimensions et diversités). Dans le récent cas états-unien, c’est l’ancien président qui, bien que défait par le suffrage de façon assez nette (malgré les fraudes possibles, qui semblent néanmoins s’équilibrer de part et d’autre), a brisé le consensus autour de la nécessaire acceptation du sort des urnes, laissant souffler l’esprit de suspicion sur l’ensemble du scrutin et risquant de ruiner ses possibles chances d’un nouveau mandat dans quatre ans, tout en donnant raison à ceux de ses détracteurs qui, pour certains d’entre eux, avaient jadis contesté le résultat de novembre 2016 favorable à M. Trump. Bien sûr, la déception devant un résultat qui ne correspond ni à vos attentes ni à ce qui semblait promis par les sondages dans certains cas (Mme Clinton avait remporté tous les sondages sans emporter les suffrages suffisants…) peut entraîner des réactions d’émotion que la raison recouvre généralement le lendemain. Dans le cas de M. Trump, l’émotion est restée intacte jusqu’au 6 janvier, au point de menacer la transition démocratique et de fragiliser durablement ce processus et ce consensus d’acceptation parmi la population des États-Unis qui, désormais, seront peut-être moins certains lors des prochains scrutins.

 

Ce qui est vrai aux États-Unis peut-il l’être en France, aujourd’hui profondément déchirée entre des camps qui, depuis la révolte des Gilets jaunes, ne se parlent plus et se côtoient à peine et, en tout cas, ne se comprennent pas, leur langage et leurs principes étant de moins en moins communs ? Un indice inquiète : lorsqu’un sondage de la semaine dernière a placé Mme Le Pen à courte distance de la victoire à la prochaine présidentielle de 2022, les réactions (beaucoup moins nombreuses qu’attendues, au regard de ce qu’avait déclenché la qualification de M. Le Pen père en avril 2002) n’ont guère rassuré les tenants de la légitimité démocratique, nombre de citoyens (en particulier fonctionnaires d’État) annonçant qu’ils ne se soumettraient pas à un tel résultat et qu’ils entreraient en résistance active, sans que l’on sache exactement jusqu’où cette résistance autoproclamée pourrait aller… Le même discours est régulièrement tenu par nombre d’artistes, prêts à s’exiler d’une France « lepeniste » tel Victor Hugo se réfugiant à Guernesey pour ne pas avoir à saluer le nouvel empereur issu à la fois de l’élection (1) et, plus tard, du plébiscite démocratique à défaut d’être très régulier (2) ! L’on semble oublier que, lors de l’élection de Nicolas Sarkozy au poste suprême en mai 2007, de nombreuses grandes villes avaient assisté à des manifestations de protestation et de non-reconnaissance du résultat du scrutin, avec quelques dégâts à la clé, et que, après celle de François Hollande, un mouvement « Hollande n’est pas mon président » avait rapidement émergé et fait florès au cœur des manifestations hostiles au mariage homosexuel avant que de muer, avec une base élargie dès l’automne 2018 par le mouvement des Gilets jaunes, en mouvement « anti-Macron ».

 

Ce mouvement n’est sans doute pas inédit au regard de l’histoire de la démocratie en France, mais il semble prendre, depuis quelques temps, une ampleur nouvelle, au risque de fragiliser, non seulement les bases de la démocratie elle-même, mais aussi et surtout toute possibilité d’une transition paisible d’un président à un autre, la minorité électorale se sentant lésée et non plus seulement perdante « à la régulière ». Or, la démocratie et toute vie politique équilibrée nécessitent une reconnaissance de la défaite comme de la victoire, non pour s’en féliciter forcément (en particulier dans le premier cas…), mais pour permettre la possibilité d’une « revanche » (non pas dans le sens d’une vengeance mais, au contraire, d’une alternance ou, mieux, d’une alternative qui puisse satisfaire le camp du vainqueur sans humilier inutilement le camp du vaincu). Vaille que vaille, c’est ce modèle qui prédomine en France sous la Cinquième République, et il faut s’en féliciter, en particulier en tant que royaliste attaché à l’unité du pays et au concert des libertés. Ce qui ne signifie pas qu’il faille s’en contenter, bien évidemment !

 

Mais les remises en cause contemporaines de la légitimité démocratique doivent inciter à réfléchir aux meilleurs moyens (3) d’assurer une transition politique entre deux parties différentes (au regard de leurs propositions et pratiques institutionnelles, économiques ou sociales) de la nation sans menacer l’ordre et l’unité du pays. La virulence des débats dans la Cinquième République, virulence qui n’est pas toujours une mauvaise chose si la passion alimente la vie politique sans la détruire, s’explique aussi et peut-être principalement par la volonté de conquérir la « première place », ce faîte de l’État qui, dans une République centralisée comme la française et « monocratique » (certains diraient « monarchique ») comme la Cinquième, est parée de tous les attributs du prestige et de la puissance et, donc, attire toutes les convoitises et, parfois, les prédations… En libérant la « première place », cette magistrature suprême de l’État aujourd’hui livrée au Suffrage et à cet éternel combat des chefs qui transforme la vie politique en une « présidentielle permanente », la Monarchie royale remet les ambitions au niveau inférieur mais aussi nombre de pouvoirs indûment détenus par l’État (aujourd’hui trop envahissant) aux collectivités locales, professionnelles ou universitaires, ce que l’on pourrait nommer « les républiques françaises ». En fait, la Monarchie assure à la fois la continuité (voire la perpétuité) de l’État « par le haut » sans empêcher les transitions démocratiques entre des gouvernants d’obédiences différentes, voire adverses : le Royaume-Uni, au-delà de ce qui peut séparer son régime monarchique de celui, éventuel, de la France, montre bien tout l’intérêt de cette magistrature suprême qui ne doit rien aux querelles politiciennes et les surplombe sans renoncer à ce qu’elle est historiquement et traditionnellement, capable d’écouter et, dans le secret du salon royal, de conseiller le chef du gouvernement en exercice. Si la Monarchie royale « à la française » accorde plus de pouvoirs au souverain, elle n’en reste pas moins, une fois instaurée et enracinée (4), ce système institutionnel qui permet la continuité et l’arbitrage, ce trait d’union permanent entre les gouvernements qui se succèdent et les générations qui se suivent, sans empiéter sur les libertés « à la base » qui, garanties sans être livrées à elles-mêmes, assurent la libre circulation et l’équitable confrontation des idées…

 

 

 

 

 

 

 

 

Notes : (1) : Louis-Napoléon Bonaparte a été élu à la première élection présidentielle au suffrage universel masculin, en décembre 1848.

 

(2) : Après son coup d’État du 2 décembre 1851, le président « putschiste » l’a fait approuver par un plébiscite (nom ancien du référendum) qui a eu lieu du 14 au 21 décembre 1851, et qui l’a confirmé électoralement.

 

(3) : « Meilleurs » ne signifiant pas forcément « parfaits », la logique humaine étant parfois bien éloignée de la notion de perfection…

 

(4) : Le grand enjeu d’une instauration monarchique prochaine sera de réussir à s’établir et à s’enraciner, et il y faudra sans doute deux à trois générations de monarques (la durée de chacune pouvant varier sous l’effet de nombreux facteurs) pour s’assurer d’une continuité « perpétuelle ». Les échecs précédents, sur ce point particulier, de la Restauration et de la Monarchie de Juillet, tout comme le succès de la Cinquième République depuis le général de Gaulle, doivent servir de leçons et permettre d’envisager la suite avec humilité mais sans crainte pour qui saura appliquer un sage empirisme organisateur…

 

 

 

09/09/2011

La crise, vers la "Grande transition".

 

Il y a presque trois ans, à l'automne 2008, je publiais une note de blogue sur la crise qui s'était déclaré quelques mois auparavant, note qui fut reproduite et diffusée à quelques milliers d'exemplaires dans le cadre de mes activités militantes monarchistes : L'actualité récente m'incite fortement à la republier telle quelle, car j'ai l'impression qu'elle reste fort crédible ! A vous de juger !

 

 

La crise financière continue à se développer sans que l’on sache combien de temps elle va durer et quelles en seront toutes les conséquences. La dégringolade des places boursières donne l’impression d’une vaste panique incontrôlée et d’une perte de confiance généralisée dans le système financier mondial. Mais, au-delà des évènements, il me semble important de chercher à comprendre ce qui se passe, condition indispensable à toute stratégie économique crédible et à toute réponse politique.

 

En fait, il n’est pas inutile de se rappeler que le terme même de crise est la traduction française du mot grec « krisis » qui signifie « séparation » : c’est bien de cela dont il s’agit, une séparation entre un avant et un après, une forme de transition en somme entre deux situations, deux réalités, deux mondes.

 

Ainsi, nous assistons au « passage de témoin » de la puissance financière et économique, des pays du Nord (Etats-Unis, pays européens, principalement) à certaines nations d’Asie, en particulier l’Inde et la Chine, ce que soulignent quelques (rares) articles qui évitent de tomber dans le piège d’une lecture simpliste et seulement idéologique, pas toujours suffisante pour comprendre la situation présente : si crise du capitalisme il y a, cela ne signifie pas la fin de celui-ci mais son transfert dans de nouveaux espaces dominants, dans de nouvelles zones de réalisation et d’expansion. Le centre du monde se déplace vers l’Asie et, comme tout déracinement de ce que l’on a cru éternel et inexpugnable, cela se fait dans de grands craquements et dans la poussière soulevée par ces grands arbres qui s’abattent sur un sol devenu aride… L’argent est désormais ailleurs que dans nos pays qui, en caricaturant un peu, se contentent juste de consommer des produits fabriqués en Asie, serrant par là-même la corde autour du cou de nos économies.

 

La question posée dans « Le Monde 2 » dans son édition du samedi 4 octobre : « Au décours de cette crise, les actuels maîtres du monde seront-ils toujours ceux de demain ? » trouve ainsi sa réponse dans un autre article du « Monde » du même jour : « La crise renforcera l’Asie », article de l’économiste Jean-Raphaël Chaponniere qu’il conviendrait de découper et de conserver dans son portefeuille, non comme un talisman mais comme un avertissement, et qui confirme mes prévisions déjà anciennes.

 

Ainsi, est-il expliqué que « la crise financière, la plus grave depuis 1929, accélérera le glissement du centre du monde vers l’Asie », glissement commencé depuis les années 80-90 et freiné par la crise de 1997. « Cependant, tous les pays asiatiques ont tiré les leçons de la crise de 1997 et ont accumulé des réserves pour se protéger. Investis en bons du Trésor américain, elles ont permis aux Etats-Unis de maintenir des taux d’intérêt bas et aux ménages américains de s’endetter davantage. L’Asie a ainsi profité de la boulimie de consommation aux Etats-Unis. Ces excès ont conduit à la crise. (…)

 

Depuis l’été 2007, les Etats-Unis souffrent de la grippe des subprimes et, si les marchés asiatiques ont souffert, les économies réelles ont été épargnées. En 2009, elles seront bien sûr affectées par la récession qui s’annonce. Pour autant, elles connaîtront un rythme de croissance supérieur à celui des économies américaines, européennes et japonaises.

 

(…) L’attention portée aux échanges occulte l’essentiel : la croissance asiatique repose bien davantage sur la demande domestique. L’investissement et la consommation sont les principaux ressorts de ces pays. Ils ne seront affectés qu’à la marge par la crise. (…)

 

Les Etats et les ménages asiatiques qui en ont les moyens financiers continueront d’investir et de consommer. S’ils ont pâti de la crise financière, les fonds souverains asiatiques vont quant à eux probablement saisir cette opportunité pour acquérir des actifs aux Etats-Unis et en Europe.

 

(…) En accélérant le basculement vers l’Asie, la crise actuelle accouchera d’un monde multipolaire. ».

 

Comprendre ce transfert de richesses et de puissance économique, c’est en prévenir aussi les conséquences et en amortir le choc : le capitalisme libéral, s’il se retire de nos terres pour aller fleurir ailleurs, pourrait bien laisser la place à de nouvelles formes, traditionnelles ou inédites, d’économie et de société, mieux orientées vers le partage et la sobriété. Pour en finir, non pas avec l’Argent, mais avec son règne indécent et cruel…

 

 

 

 

 

 

30/06/2009

La crise profitera à l'Asie (réédition 2009)

Au mois d’octobre dernier, j’ai écrit un texte sur la crise actuelle, texte qui a été imprimé et diffusé à plusieurs centaines d’exemplaires en région parisienne et en Bretagne et qu’il me semble utile, aujourd’hui et avec quelques mois de recul, de republier sur ce blogue. Je n’y ai pas changé une ligne, et je pense que l’article ici cité de Jean-Raphaël Chaponniere prend de plus en plus de valeur au fur et à mesure du temps qui passe : il me faudra en reparler prochainement car « la crise continue », avec toutes les ambiguïtés, d’ailleurs, qu’elle révèle, dans sa définition comme dans ses développements…

 

 

 

La crise financière continue à se développer sans que l’on sache combien de temps elle va durer et quelles en seront toutes les conséquences. La dégringolade des places boursières donne l’impression d’une vaste panique incontrôlée et d’une perte de confiance généralisée dans le système financier mondial. Mais, au-delà des évènements, il me semble important de chercher à comprendre ce qui se passe, condition indispensable à toute stratégie économique crédible et à toute réponse politique.

 

En fait, il n’est pas inutile de se rappeler que le terme même de crise est la traduction française du mot grec « krisis » qui signifie « séparation » : c’est bien de cela dont il s’agit, une séparation entre un avant et un après, une forme de transition en somme entre deux situations, deux réalités, deux mondes.

 

Ainsi, nous assistons au « passage de témoin » de la puissance financière et économique, des pays du Nord (Etats-Unis, pays européens, principalement) à certaines nations d’Asie, en particulier l’Inde et la Chine, ce que soulignent quelques (rares) articles qui évitent de tomber dans le piège d’une lecture simpliste et seulement idéologique, pas toujours suffisante pour comprendre la situation présente : si crise du capitalisme il y a, cela ne signifie pas la fin de celui-ci mais son transfert dans de nouveaux espaces dominants, dans de nouvelles zones de réalisation et d’expansion. Le centre du monde se déplace vers l’Asie et, comme tout déracinement de ce que l’on a cru éternel et inexpugnable, cela se fait dans de grands craquements et dans la poussière soulevée par ces grands arbres qui s’abattent sur un sol devenu aride… L’argent est désormais ailleurs que dans nos pays qui, en caricaturant un peu, se contentent juste de consommer des produits fabriqués en Asie, serrant par là-même la corde autour du cou de nos économies.

 

La question posée dans « Le Monde 2 » dans son édition du samedi 4 octobre : « Au décours de cette crise, les actuels maîtres du monde seront-ils toujours ceux de demain ? » trouve ainsi sa réponse dans un autre article du « Monde » du même jour : « La crise renforcera l’Asie », article de l’économiste Jean-Raphaël Chaponniere qu’il conviendrait de découper et de conserver dans son portefeuille, non comme un talisman mais comme un avertissement, et qui confirme mes prévisions déjà anciennes.

 

Ainsi, est-il expliqué que « la crise financière, la plus grave depuis 1929, accélérera le glissement du centre du monde vers l’Asie », glissement commencé depuis les années 80-90 et freiné par la crise de 1997. « Cependant, tous les pays asiatiques ont tiré les leçons de la crise de 1997 et ont accumulé des réserves pour se protéger. Investis en bons du Trésor américain, elles ont permis aux Etats-Unis de maintenir des taux d’intérêt bas et aux ménages américains de s’endetter davantage. L’Asie a ainsi profité de la boulimie de consommation aux Etats-Unis. Ces excès ont conduit à la crise. (…)

Depuis l’été 2007, les Etats-Unis souffrent de la grippe des subprimes et, si les marchés asiatiques ont souffert, les économies réelles ont été épargnées. En 2009, elles seront bien sûr affectées par la récession qui s’annonce. Pour autant, elles connaîtront un rythme de croissance supérieur à celui des économies américaines, européennes et japonaises.

(…) L’attention portée aux échanges occulte l’essentiel : la croissance asiatique repose bien davantage sur la demande domestique. L’investissement et la consommation sont les principaux ressorts de ces pays. Ils ne seront affectés qu’à la marge par la crise. (…)

Les Etats et les ménages asiatiques qui en ont les moyens financiers continueront d’investir et de consommer. S’ils ont pâti de la crise financière, les fonds souverains asiatiques vont quant à eux probablement saisir cette opportunité pour acquérir des actifs aux Etats-Unis et en Europe.

(…) En accélérant le basculement vers l’Asie, la crise actuelle accouchera d’un monde multipolaire. ».

 

Comprendre ce transfert de richesses et de puissance économique, c’est en prévenir aussi les conséquences et en amortir le choc : le capitalisme libéral, s’il se retire de nos terres pour aller fleurir ailleurs, pourrait bien laisser la place à de nouvelles formes, traditionnelles ou inédites, d’économie et de société, mieux orientées vers le partage et la sobriété. Pour en finir, non pas avec l’Argent, mais avec son règne indécent et cruel…

 

 

(8 octobre 2008)