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21/07/2015

La dette espagnole...

La question de la dette empoisonne l'Europe, et la Grèce vient à nouveau d'en faire les frais, et ce n'est évidemment pas fini : nous en reparlerons dans quelques mois, et la tragédie risque bien d'être, une fois de plus, à l'ordre du jour. Le malheur des uns nous ferait presque oublier nos propres problèmes et défauts : or, notre dette publique équivaut à plus de 97 % de notre PIB, et risque bien d'atteindre 100 % l'an prochain, ce qui n'est guère rassurant. Mais il y a sans doute pire et encore plus inquiétant en Europe : un article des Echos du lundi 20 juillet nous explique ainsi que « la dette extérieure espagnole ne cesse d'enfler », ce qui « augmente la vulnérabilité du pays aux chocs externes ».

 

Le plus intéressant dans cette information est que ce n'est pas la conséquence d'une crise qui ne trouverait pas d'issue, mais au contraire d'une « forte croissance espagnole, prévue de 3,3 % en 2015 » : « à mesure que s'intensifie l'activité augmente aussi la dette extérieure espagnole. Ainsi, la dette extérieure brute s'élevait à 1.800 milliards d'euros au premier trimestre, soit 168 % du PIB du pays. Cela représente une hausse de 83 milliards d'euros par rapport à décembre 2014 (…). D'après un rapport du FMI, publié en 2014, l'Espagne est le pays au plus fort endettement extérieur, après les Etats-Unis, en termes absolus. » C'est une logique diabolique : quand la production augmente, la dette se creuse un peu plus, pour quelques raisons simples, dont, particulièrement, la dépendance du pays aux énergies fossiles et aux matières premières importées. Logique de la mondialisation qui se veut fluide et transfrontalière, au risque d'entraîner des interdépendances négatives quand elles ne s'équilibrent pas...

 

Ainsi, la croissance espagnole est-elle piégée par ce système mondialisé et son modèle énergétique principalement « fossile », alors même que l'Espagne est un pays qui dispose de ressources importantes et plutôt bien (mais visiblement insuffisamment) exploitées en énergies renouvelables, éolienne et solaire. Mais, au-delà, c'est le pays, ses métiers et ses habitants qui se retrouvent prisonniers d'un cycle infernal et d'une « croissance » en définitive mortifère : cela rompt avec le préjugé fort répandu qui veut que cette dernière soit « la solution » à nos crises économiques actuelles... Il est bien possible que cela soit, en fait, « le problème » de nos sociétés et de nos économies !

 

En tout cas, cela doit nous inciter à réfléchir à un modèle d'économie qui rapproche le plus possible les sources d'énergie des grandes unités de production manufacturée, mais aussi des marchés de consommation. Comment ? Entre autres, par l'investissement majeur et massif dans les énergies de proximité et renouvelables, si possibles peu ou pas polluantes, pour se dégager de l'emprise des énergies fossiles qui sont désormais épuisées (ou presque) dans les pays européens et qui sont, de toute façon, trop dangereuses pour la qualité de l'air et la santé des populations. Mais il faudra y rajouter les efforts nécessaires pour diminuer les besoins énergétiques industriels, agricoles et domestiques, de nos sociétés : en somme, engager une forme de décroissance raisonnée et, surtout, ordonnée, celle-là même que le pape François nous invite à penser et à pratiquer dans nos pays précocement et anciennement industrialisés : cette urgence écologique est aussi, à bien y regarder, une urgence économique... Ne serait-ce que pour diminuer le poids de la dette des pays de l'Union européenne, celle que nous sommes appelés, sans le vouloir vraiment, à porter collectivement, Europe oblige !

 

 

 

 

 

20:38 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : espagne.euro, dette, économie.

09/09/2011

La crise, vers la "Grande transition".

 

Il y a presque trois ans, à l'automne 2008, je publiais une note de blogue sur la crise qui s'était déclaré quelques mois auparavant, note qui fut reproduite et diffusée à quelques milliers d'exemplaires dans le cadre de mes activités militantes monarchistes : L'actualité récente m'incite fortement à la republier telle quelle, car j'ai l'impression qu'elle reste fort crédible ! A vous de juger !

 

 

La crise financière continue à se développer sans que l’on sache combien de temps elle va durer et quelles en seront toutes les conséquences. La dégringolade des places boursières donne l’impression d’une vaste panique incontrôlée et d’une perte de confiance généralisée dans le système financier mondial. Mais, au-delà des évènements, il me semble important de chercher à comprendre ce qui se passe, condition indispensable à toute stratégie économique crédible et à toute réponse politique.

 

En fait, il n’est pas inutile de se rappeler que le terme même de crise est la traduction française du mot grec « krisis » qui signifie « séparation » : c’est bien de cela dont il s’agit, une séparation entre un avant et un après, une forme de transition en somme entre deux situations, deux réalités, deux mondes.

 

Ainsi, nous assistons au « passage de témoin » de la puissance financière et économique, des pays du Nord (Etats-Unis, pays européens, principalement) à certaines nations d’Asie, en particulier l’Inde et la Chine, ce que soulignent quelques (rares) articles qui évitent de tomber dans le piège d’une lecture simpliste et seulement idéologique, pas toujours suffisante pour comprendre la situation présente : si crise du capitalisme il y a, cela ne signifie pas la fin de celui-ci mais son transfert dans de nouveaux espaces dominants, dans de nouvelles zones de réalisation et d’expansion. Le centre du monde se déplace vers l’Asie et, comme tout déracinement de ce que l’on a cru éternel et inexpugnable, cela se fait dans de grands craquements et dans la poussière soulevée par ces grands arbres qui s’abattent sur un sol devenu aride… L’argent est désormais ailleurs que dans nos pays qui, en caricaturant un peu, se contentent juste de consommer des produits fabriqués en Asie, serrant par là-même la corde autour du cou de nos économies.

 

La question posée dans « Le Monde 2 » dans son édition du samedi 4 octobre : « Au décours de cette crise, les actuels maîtres du monde seront-ils toujours ceux de demain ? » trouve ainsi sa réponse dans un autre article du « Monde » du même jour : « La crise renforcera l’Asie », article de l’économiste Jean-Raphaël Chaponniere qu’il conviendrait de découper et de conserver dans son portefeuille, non comme un talisman mais comme un avertissement, et qui confirme mes prévisions déjà anciennes.

 

Ainsi, est-il expliqué que « la crise financière, la plus grave depuis 1929, accélérera le glissement du centre du monde vers l’Asie », glissement commencé depuis les années 80-90 et freiné par la crise de 1997. « Cependant, tous les pays asiatiques ont tiré les leçons de la crise de 1997 et ont accumulé des réserves pour se protéger. Investis en bons du Trésor américain, elles ont permis aux Etats-Unis de maintenir des taux d’intérêt bas et aux ménages américains de s’endetter davantage. L’Asie a ainsi profité de la boulimie de consommation aux Etats-Unis. Ces excès ont conduit à la crise. (…)

 

Depuis l’été 2007, les Etats-Unis souffrent de la grippe des subprimes et, si les marchés asiatiques ont souffert, les économies réelles ont été épargnées. En 2009, elles seront bien sûr affectées par la récession qui s’annonce. Pour autant, elles connaîtront un rythme de croissance supérieur à celui des économies américaines, européennes et japonaises.

 

(…) L’attention portée aux échanges occulte l’essentiel : la croissance asiatique repose bien davantage sur la demande domestique. L’investissement et la consommation sont les principaux ressorts de ces pays. Ils ne seront affectés qu’à la marge par la crise. (…)

 

Les Etats et les ménages asiatiques qui en ont les moyens financiers continueront d’investir et de consommer. S’ils ont pâti de la crise financière, les fonds souverains asiatiques vont quant à eux probablement saisir cette opportunité pour acquérir des actifs aux Etats-Unis et en Europe.

 

(…) En accélérant le basculement vers l’Asie, la crise actuelle accouchera d’un monde multipolaire. ».

 

Comprendre ce transfert de richesses et de puissance économique, c’est en prévenir aussi les conséquences et en amortir le choc : le capitalisme libéral, s’il se retire de nos terres pour aller fleurir ailleurs, pourrait bien laisser la place à de nouvelles formes, traditionnelles ou inédites, d’économie et de société, mieux orientées vers le partage et la sobriété. Pour en finir, non pas avec l’Argent, mais avec son règne indécent et cruel…

 

 

 

 

 

 

08/11/2008

Définition et dénonciation maurrassienne du libéralisme.

Ce matin, j’évoquais avec ma classe de 1ère S les « alternatives sociales et politiques au libéralisme », dans le cadre du cours sur les sociétés à l’époque des révolutions industrielles, et j’ai développé la première partie qui portait sur « Traditionalisme et catholicisme social », avant de traiter au prochain cours « les syndicalismes », puis « les socialismes utopiques et le marxisme ». Je débutais cette partie par une tentative de définition du terme même de « libéralisme », en rappelant qu’il n’y avait pas qu’une seule définition ou conception possible, et qu’il fallait se méfier des « réflexes » qui font détester ce terme ou cette idéologie en se fondant sur le seul moment présent et sur les emballements médiatiques qui voient des journalistes brûler ce qu’ils ont hier adoré…

Cela m’a donné l’idée de rééditer la note ci-dessous, rédigée il y a deux ans, dans laquelle j’évoquais déjà ce thème :

 

Aujourd’hui, la simple évocation du mot « libéralisme » provoque des réactions plus passionnelles que raisonnées : les uns y voient la cause de tous nos malheurs, les autres la solution aux blocages de notre société ou, plus simplement, l’expression politique et économique de la « Liberté ». J’entends les uns et les autres, et il me semble nécessaire de préciser quel sens je donne à ce terme quand il m’arrive de l’employer, cela pour éviter des malentendus sur ce que je pense, malentendus qui peuvent gêner le bon déroulement des débats.

Si l’on s’en tient à la définition classique, le libéralisme est la théorie, politique et/ou économique, qui place la Liberté au principe de tout et, en particulier, de la vie individuelle comme sociale. En somme, elle peut s’entendre comme une forme d’individualisme étendue à toutes les activités humaines. En fait, dans la réalité, la théorie est souvent « aménagée », limitée même par les données historiques, politiques, économiques et, tout simplement, humaines. Et les penseurs libéraux les plus intéressants (comme Tocqueville ou Aron), d’ailleurs, sont fort conscients des ambiguïtés de cette idéologie mais aussi de la simple évocation du terme…

Cela étant dit, je reste plus que réservé à l’égard du libéralisme et je fais miennes les critiques que Maurras avance dans le court texte souvent reproduit : « Libéralisme et libertés », dans lequel il s’en prend au libéralisme et au mythe de la « liberté-principe » au nom des libertés plurielles, en particulier dans le domaine économique : « Dans l’ordre économique, la liberté-principe veut que la concurrence des libertés individuelles, d’où le bien doit sortir inévitablement, soit œuvre sacrée. Il n’y a qu’à laisser faire et à laisser passer. Toute intervention de l’Etat ou de la société mérite le nom d’attentat et presque de profanation. Le statut du travailleur doit donc être individuel. Autant par respect pour sa liberté propre que par vénération de la mécanique du monde, l’ouvrier doit respecter les injonctions du décret Le Chapelier et s’interdire sévèrement toute association, corporation, fédération, tout syndicat d’ordre professionnel, de nature à troubler le libre jeu de l’offre et de la demande, le libre échange du salaire et du travail. Tant pis si le marchand de travail est un millionnaire maître absolu du choix entre 10 000 ouvriers : liberté, liberté ! La liberté économique aboutit donc, par une déduction rapide, à la célèbre liberté de mourir de faim. J’oserais l’appeler une liberté négative, abstraite ; mieux : une liberté soustraite. Toute liberté réelle, toute liberté pratique, tout pouvoir libre et certain de conserver sa vie, de soutenir sa force, est refusé à l’ouvrier tant qu’on lui refuse la liberté d’association. » Cette analyse reste d’une étonnante actualité comme me le signalait il y a peu un ami revenant de Chine et ayant vu « l’envers du décor » de la croissance chinoise, et comme on peut aussi le lire dans le livre de Philippe Cohen et Luc Richard (dont je conseille vivement la lecture) « La Chine sera-t-elle notre cauchemar ? ». Cela ne veut pas dire que je sois pour le dirigisme d’Etat ou l’étatisme, véritable tyrannie de l’Etat sur la société et ses citoyens, mais je reste attaché au rôle d’un Etat capable de corriger les excès de l’économie et de garantir les libertés et les droits des travailleurs, qu’ils soient salariés ou indépendants. En somme, je suis pour un juste équilibre entre la libre initiative et l’action protectrice de l’Etat quand elle s’avère, en dernier recours, nécessaire.

Pour ce qui est du libéralisme politique, sans doute serai-je moins sévère que Maurras à l’égard, non pas tellement du libéralisme proprement dit que de certains penseurs libéraux, ou considérés tels, qu’ils s’agissent des monarchiens de 1789 (partisans de la Monarchie constitutionnelle, voire parlementaire) ou de Constant, Tocqueville, Aron, ou Pierre Manent, un « libéral-conservateur » contemporain fort intéressant. Cela ne signifie que je sois tocquevillien ou aronien, mais seulement que je considère que leur pensée ouvre quelques perspectives qui méritent attention et débat.

Il est, en particulier, une question que François Huguenin aborde dans son livre « Le conservatisme impossible » paru il y a quelques mois et qui me semble très intéressante, c’est celle du dialogue (inachevé ou manqué ?) entre les « traditionalistes » et les « libéraux » en France, et, question annexe à laquelle il n’est pas encore répondu, celle d’une synthèse (possible ou impossible ?) entre l’Etat monarchique fort et les aspirations politiques libérales… En somme, une forme de « Monarchie aronienne » ?