Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

19/07/2023

Pour une Monarchie sociale "à la française".

 

Relire les articles écrits il y a presque une vingtaine d’années déjà est parfois un brin désespérant : la situation du pays et de notre société est encore plus dégradée après les quatre derniers quinquennats, et chaque jour qui passe semble aggraver les maux dont souffre la France. Pourtant, je me répète la fameuse formule de Georges Bernanos à ce sujet, « l’espérance est le désespoir surmonté » qui complète si bien celle de Maurras, « le désespoir en politique est une sottise absolue »… Ainsi, tout est possible, même le meilleur…

Voici ci-dessous un article rédigé une première fois en 2005, et légèrement réactualisé ici…

 

 

L'économie française ne crée plus de véritables emplois pérennes, constataient Le Figaro et Les échos il y a quelques mois : cela n'est guère rassurant, car cela signifie que le travail précaire se renforce au détriment des métiers enracinés et des emplois stables. Le triomphe du « nomadisme industriel » se marque aussi par des délocalisations de plus en plus fréquentes (et cela malgré les efforts du ministre de l’économie, vains par système en fait) et des drames sociaux qui touchent, directement ou indirectement, de plus en plus de familles et de personnes, peut-être demain à Rennes avec les risques qui pèsent sur l’usine d’automobiles Stellantis, de La Janais. Certains, au nom du « Libre Marché », se satisfont de cette situation en comptant sur l'auto-régulation de l'économie : c'est faire preuve d'un grand optimisme, pas exactement confirmé par les faits jusqu'à présent.

 

Pourquoi ne pas poser, alors, la question du régime politique le plus approprié pour relever les défis de la mondialisation et proposer une alternative économique qui renforce la France sans affaiblir les droits sociaux ? La République étant désormais à bout de souffle et ne croyant plus elle-même en sa capacité à incarner une alternative crédible au système actuellement dominant et, disons-le, oppressant, il n’est pas inutile d’ouvrir de nouvelles pistes de réflexion et d’imagination politiques, en proposant un système institutionnel qui, dans notre histoire, a permis la naissance de l’État et de la nation dans ce qui est devenue, grâce à celui-ci, la France : la Monarchie royale, dite de façon élargie « capétienne » même si la dynastie d’Hugues capet cède la place à celle des Valois en 1328.

 

Il importe d’abord de bien saisir qu’une Monarchie telle qu’elle peut être souhaitée, c’est-à-dire sociale « à la française » ne laisserait pas faire les seules forces du Marché, ne serait-ce que pour une raison simple : la Monarchie, qui repose sur la transmission familiale, sur le caractère le plus naturel de la condition humaine (la naissance au sein d'une famille), peut résumer son éthique sociale par la formule « L'économie doit être au service des hommes, et non l'inverse ». Cela signifie que la Monarchie, dont le principal devoir est d'assurer la protection (diplomatique et militaire, comme économique et sociale) du pays et de ses habitants, ne peut accepter que l’Économique s'impose au Politique et néglige ses obligations sociales premières.

 

Cela signifie-t-il dire ou affirmer que la Monarchie ne respecterait pas la « liberté économique » (dans son acception de libre initiative entrepreneuriale et d’échanges multiples entre producteurs, négociants et consommateurs) ou imposerait une « dictature étatiste » ? Bien sûr que non ! Mais il s'agit pour l’État monarchique de faire respecter et de valoriser, par l'action déterminée et raisonnée de ses institutions, conseils et organes, les grandes valeurs humanistes et personnalistes (au sens premier du terme, fort distinct de l'individualisme propre à l'idéologie libérale) et l'intérêt commun de notre pays et de ses citoyens.

 

Mais comment faire ? Sans doute l'une des premières tâches de la Monarchie sociale sera-t-elle d'impulser une grande politique d'Aménagement du territoire et de « relocalisation des activités productives » (y compris dans le domaine agricole qui peut s'avérer très intéressant au regard des nouvelles tendances alimentaires et énergétiques) : il n'est pas à négliger que la France dispose d'un vaste territoire terrestre et maritime, doté d'un réseau fort complet de voies de communications et de transports, et d'un maillage communal qu'il serait dommage de ne pas mettre en valeur. Plutôt que regarder délocaliser les entreprises à l'étranger ou d’accepter qu’elles partent sans retour, il s'agirait, par une politique d'incitation fiscale ou financière plus audacieuse que celle d'aujourd'hui, de les maintenir sur notre territoire, et pas forcément dans les seuls grands centres urbains aux loyers trop élevés (en particulier pour les populations ouvrières). Ce n'est qu'un exemple parmi d'autres propositions: ce ne sont pas les idées qui manquent en France, mais la volonté politique pour les mettre en pratique, pour briser un certain nombre de carcans administratifs inadaptés aux enjeux contemporains et pour « faire bouger les lignes »...

 

La Monarchie serait, non une fracture, mais une rupture avec la politique de la Démission propre à l’État actuel. Sans doute devra-t-elle prendre des risques, mais la Monarchie active « à la française » n'a pas vocation à l'immobilisme et à la facilité, et ce sera particulièrement vrai dans les premiers temps de « l'Instauration monarchique ». Face à la globalisation et au néo-nomadisme financier et industriel, la Monarchie, de par la continuité inscrite dans son principe dynastique, peut « parler de plus haut » et agir, non contre les forces économiques, mais au-delà des féodalités financières et industrielles.

 

Dans l'Histoire de notre pays, l’État royal a montré, maintes fois et parfois contre le cours même de l'idéologie dominante (hier religieuse, aujourd'hui économique), ses capacités d'adaptation et d'action : c'est d'ailleurs ainsi qu'il a fondé la France, qui n'était pas encore une évidence au Moyen-âge, et qu'il a forgé sa puissance. La Monarchie, pour réussir son Instauration populaire, se devra d'être sociale. Les Français ne lui pardonneraient pas de renoncer à sa principale mission, à ce qui peut fonder une nouvelle légitimité : la justice sociale.

 

 

 

25/05/2021

Plaidoyer contemporain pour la Monarchie.

 

Le magazine Reines & Rois m’a invité dans ses colonnes à présenter les arguments contemporains pour l’établissement d’une Monarchie en France, et ma tribune a été intégralement et fidèlement publiée dans le numéro de Mai-juin-juillet 2021, ce dont je remercie la rédaction et Olivier C. en particulier. En voici le texte ci-dessous…

 

 

 

Un récent sondage nous apprenait que 17 % des Français étaient favorables à l’établissement d’une Monarchie en France, et cela plus de deux siècles après la fracture révolutionnaire et plus d’un siècle et demi après le départ en exil du dernier roi ayant effectivement régné. Entretemps, cinq Républiques sont nées et quatre ont disparu, souvent dans des affres peu glorieuses, du coup d’Etat à la défaite militaire, sans oublier deux empires et un « Etat français » : deux siècles durant lesquels la question institutionnelle ne cesse d’être posée, et cela même si l’actuelle République, cinquième du nom, semble avoir réussi une certaine synthèse entre les différentes traditions politiques du pays, synthèse néanmoins remise en question aujourd’hui par les nostalgiques de la IIIe (ou de la IVe) République qui la trouvent « trop monarchique » quand les royalistes la trouvent, eux, trop républicaine ou « monocratique », trop jacobine ou laxiste…

 

Plusieurs éléments peuvent, en tout cas, expliquer et motiver la persistance d’un courant d’opinion favorable à la Monarchie royale, même si celui ne se traduit ni dans les urnes ni dans le paysage politique lui-même, apparemment monopolisé par les seuls républicains (ou proclamés tels) de toutes les couleurs du prisme politique. L’actuelle campagne présidentielle, un an avant le premier tour de l’élection, agite déjà les milieux politiques et médiatiques, mais, à bien y regarder, ne sommes-nous pas, depuis que le quinquennat a été établi au début des années 2000, en « présidentielle permanente » ? Or, cette élection à la magistrature suprême de l’Etat apparaît toujours comme « la reine des élections », la plus courue en tout cas pour les partis et les politiciens, et la plus mobilisatrice des électeurs, désormais fort boudeurs lors des scrutins parlementaires, régionaux ou, même, municipaux. Paradoxalement, cela peut accréditer l’idée que les Français veulent élire un Chef de l’Etat auquel ils attribuent des pouvoirs importants, quasi-monarchiques, comme s’ils avaient besoin de cette autorité de type monarchique pour sentir qu’ils appartiennent au même peuple, à la même nation… L’élection du président au suffrage universel direct était, jadis, vue par ses opposants comme le signe d’une « monarchisation » du pouvoir, et, du temps du général de Gaulle, Le Canard enchaîné décrivait celui-ci comme un roi versaillais et absolu et son gouvernement comme une Cour à ses ordres, en attendant celui que le journal satirique annonçait comme le « dauphin » : le comte de Paris…

 

Quelques autres indices peuvent signaler la persistance d’une opinion monarchiste, et l’actualité nous en a fourni une nouvelle preuve avec l’émotion soulevée dans notre République lors du décès du prince Philippe, époux de la reine Elisabeth d’Angleterre, et les cinq millions de téléspectateurs hexagonaux des funérailles princières, en un après-midi ensoleillé, ne sont pas totalement anodins, y compris politiquement parlant. Car, à défaut de vivre en Monarchie, nombre de Français regardent celle de nos voisins avec des yeux émerveillés pour certains, seulement curieux pour d’autres, et beaucoup de ceux-ci se disent peut-être, au fond de leur cœur, « pourquoi pas la Monarchie chez nous ? ». Après tout, la question mérite bien d’être posée, et cela même si l’advenue d’une instauration royale en France paraît, sinon totalement compromise, encore fort lointaine…

 

En ces temps de crises et de trouble, la Monarchie royale « à la française » ne serait pourtant pas si choquante et, même, elle pourrait bien conjuguer espérance et nécessité, tout en renouant avec le fil d’une histoire qui, tranché violemment hier, pourrait à nouveau réunir des Français aujourd’hui soucieux de concorde et de tranquillité, y compris politique… Quelques arguments plaident en sa faveur comme celui de l’unité nationale au-delà des querelles politiques et des grands intérêts de ce qu’il n’est pas incongru de qualifier de féodalités financières et économiques : car le roi ne doit rien à un choix électoral forcément clivant et séparateur qui divise en clans idéologiques, et son indépendance vient du principe même de la transmission héréditaire de la magistrature suprême de l’Etat, la naissance ne pouvant s’acheter ou se forcer. Bien sûr, c’est l’argument parfois le plus difficile à entendre pour nous qui sommes habitués à choisir le Chef de l’Etat que nous semblons sacrer de notre vote avant que de le dénoncer dès les mois suivants dans un élan d’ingratitude qui, visiblement, n’appartient pas qu’aux princes… Néanmoins, l’avantage de la succession royale est qu’elle accompagne le temps et qu’elle est l’humilité devant la nature humaine et ses propres limites : dans la tradition française, ce mode de transmission de la magistrature suprême de l’Etat se résume en une formule « Le roi est mort, vive le roi ! ». C’est-à-dire que c’est de la disparition physique du prédécesseur que naît le pouvoir du successeur. D’un drame, la mort, la royauté fait un passage vers une autre vie, une autre personne, celle-là même qui savait qu’un jour elle régnerait mais qui ne savait ni le jour ni l’heure, dans une incertitude qui, pourtant, n’ouvre pas vers l’inconnu mais vers le « prévu ». Cela explique l’autre formule traditionnelle de la royauté en France : « Le roi ne meurt jamais ». En effet, la mort physique d’un monarque n’est pas la mort de l’Etat, mais son renouvellement : le fils succède au père, naturellement, tel que cela était annoncé depuis sa naissance et son titre de dauphin. Quand la République déchire autour de l’urne, la Monarchie royale unit autour du cercueil, et du trône…

 

Bien sûr, certains y verront une injustice ou un risque : injustice (« pourquoi lui plutôt qu’un autre ? ») et risque (« est-il vraiment à la hauteur de la charge ? »). En fait, la pire injustice n’est-elle pas que ce soit l’Argent qui, désormais, fasse les élections présidentielles, au risque d’affaiblir la nécessaire indépendance de l’Etat ? A l’inverse, cette sorte de « tirage au sort » du destin qui fait de la naissance au sein de la famille royale historique la carte d’entrée à la tête de l’Etat n’est-elle pas le meilleur moyen de garantir le meilleur pouvoir arbitral possible, au-delà même des passions du moment et des pressions des factions ou des ambitions ? Un ancien ministre centriste d’il y a quelques décennies faisait remarquer qu’en Monarchie, la première place étant prise, cela limitait les appétits de pouvoir des politiques et les forçait à se concentrer sur les questions gouvernementales… Quant au risque d’une incompétence du roi, il est limité pour au moins trois raisons : tout d’abord, ce qui compte pour le roi n’est pas la compétence ni le mérite mais bien plutôt l’indépendance liée à sa position, celle d’un arbitre et non d’un joueur, et qui l’oblige à une impartialité de fait, ce qui n’exclue pas, évidemment et bien au contraire, la liberté de décision dans le cadre des règles du jeu institutionnel et politique ; Deuxièmement, en tant que « roi à venir », l’héritier putatif du trône est préparé tout au long de sa jeunesse (voire un peu plus…) à ses fonctions de monarque et son éducation est organisée en fonction de son règne futur : cela garantit qu’il a, très tôt, les « codes » de la politique ; enfin, en France et malgré la concentration des pouvoirs régaliens entre les mains de l’Etat royal dès l’époque de François Ier, la Monarchie a une tradition plutôt « fédéraliste », précédant historiquement et pratiquement l’actuelle devise de l’Union européenne qui lui va comme un gant : « Unie dans la diversité ». Cela signifie que nombre de pouvoirs et d’administrations aujourd’hui indûment aux mains de l’Etat central seraient redistribués aux Régions, Communes et Chambres économiques (entre autres), en application d’une subsidiarité bien comprise et qui aurait évité, sans doute, bien des errements et des incompréhensions depuis le début d’une crise sanitaire sans fin débutée l’an dernier…

 

De plus, de par son principe et son histoire, la Monarchie royale a pour règle de servir et non de « se servir », ce que le général de Gaulle avait déjà relevé en son temps et qu’il avait tenté de pratiquer dans une République qui, en définitive, ne lui en sera pas toujours reconnaissante. Marcel Gauchet, quant à lui,  évoquait en 2018 la différence entre la logique macronienne et l’esprit royal : « Mais [Macron] s’est trompé sur ce que l’on attendait d’un roi. Un roi, ce n’est pas un manager, pas un patron de start-up qui secoue ses employés pour qu’ils travaillent dix-huit heures par jour pour que les Français, par effet d’entraînement, deviennent tous milliardaires ! Dans la tradition française, un roi, c’est un arbitre. Quelqu’un qui est là pour contraindre les gouvernants à écouter les gouvernés. Quand les gens accusent Macron d’être le président des riches, ils lui reprochent surtout de ne pas être l’arbitre entre les riches et les pauvres. » N’est-ce pas là, en quelques lignes, la meilleure définition du roi « à la française » ?

 

Mais il est, au-delà de toutes les argumentations politiques, un élément fondateur de la Monarchie, élément qui n’est d’ailleurs pas limité à la France : c’est la puissance du sentiment. Tout l’enjeu pour les royalistes est de faire resurgir ce sentiment qui, longtemps, a lié tous les Français, personnes comme communautés, entre eux : que la Monarchie française est d’abord une famille, celle qui incarne la France par-delà les générations et les siècles, au-delà des différences et des antagonismes… Cette famille dont, pour l’heure, la France est orpheline, regardant au-delà des frontières celle des autres avec, parfois, la larme à l’œil et une certaine nostalgie, à moins qu’il s’agisse d’une secrète espérance…

 

 

 

Jean-Philippe Chauvin

 

 

08/11/2020

De la République gaullienne à la Monarchie capétienne ?

 

Le 9 novembre 1970, il y a cinquante ans, s’éteignait, d’un coup, le général de Gaulle, foudroyé par une mort rapide qui ne s’annonça pas avant d’emporter celui qui avait tant résisté à l’adversité durant sa longue histoire. J’avais 8 ans, et je me souviens encore de ces émissions consacrées au général et les images d’un cercueil drapé de tricolore sortant de La Boisserie pour se rendre à l’église de Colombey-les-Deux-Églises. Baigné dans l’histoire de par mon entourage familial et ses traditions historiennes, je sentais confusément ces jours-là qu’une page venait de se tourner et que la nostalgie du Commandeur me suivrait longtemps, comme elle flotte encore dans l’air de France…

 

Aujourd’hui, cinquante ans après la chute du grand chêne gaullien, que dire encore de l’œuvre du général et de sa pérennité, voire de sa nécessité ? Le général de Gaulle a cherché à « sauver l’Etat », à le préserver des manœuvres et des manipulations, et l’élection au suffrage universel direct du Chef de l’État lui semblait un moyen efficace de contourner les appareils partisans et de distinguer celui qui aurait le plus grand « charisme d’État », reconnu par le peuple souverain. Mais Charles de Gaulle avait une légitimité qui ne lui venait pas, d’abord, du suffrage mais bien plutôt de sa place dans l’Histoire, de ce 18 juin 1940 où il avait appelé une France envahie, défaite et humiliée par l’Allemagne, à ce grand sursaut de la liberté nationale, « la plus précieuse des libertés humaines » selon Maurras, son ancien inspirateur des années 30 (Maurras auquel il avait adressé et dédicacé ses ouvrages sur l’armée de métier et les conditions de la paix et de la victoire dans le monde incertain de l’entre-deux-guerres). C’est en prenant le contre-pied de l’opinion publique française d’alors (mais aussi du théoricien de l’Action Française, inquiet du risque de division française), qui s’était réfugiée dans les bras d’un vieux maréchal paternaliste et républicain, qu’il avait sauvé l’honneur avant de reprendre, ou plutôt de poursuivre, le combat indépendantiste. De Gaulle n’avait que mépris pour les « politichiens » comme il les appelait (héritage de sa formation monarchiste et militaire), mais il savait qu’après lui, qu’après son règne d’une décennie (1958-1969), les petits jeux partisans reprendraient, dans les assemblées comme dans les allées du Pouvoir républicain. Au moins pensait-il avoir garanti le faîte de l’État de ces « intrigues indignes », puisque l’élection présidentielle se devait, selon lui, d’être « la rencontre d’un homme et d’un peuple ». Mais sa mise en ballottage en décembre 1965 lui avait fait perdre ses illusions sur ce point-là. Les présidentielles suivantes ont, depuis, confirmé que la magistrature suprême de l’État elle-même n’était pas à l’abri des appétits et que le « peuple souverain » ne coïncidait pas forcément ni exactement avec l’intérêt national et celui de l’État…

 

Le général de Gaulle était monarchiste, au moins de cœur, et ses rapports avec le comte de Paris ont montré qu’il a, un bref instant, pensé à rétablir la Monarchie en France. Cela ne s’est pas fait, et il me semble qu’au regard (et au-delà) de la présente campagne présidentielle permanente instituée par le quinquennat, parfois passionnante dans les débats (quand ils ont vraiment lieu, ce qui est loin d’être toujours le cas), souvent affligeante dans les images et les postures (sans parler des candidats eux-mêmes qui, dix-huit mois avant l’échéance, trépignent déjà dans leurs écuries), la « question royale » mérite d’être à nouveau posée.

 

En effet, la transmission héréditaire de la magistrature suprême de l’État, sans empêcher le bon fonctionnement et la liberté des élections législatives, régionales, municipales ou autres, aurait le mérite de délivrer l’État, en son sommet, des convoitises et de ces querelles qui le paralysent régulièrement, donnant l’impression, désagréable, d’une sorte d’éternelle fin de règne. Un roi qui n’aurait pas de « clientèle » à flatter serait mieux à même d’écouter chacun et d’être l’arbitre, au-delà des partis et des intérêts particuliers, dont le pays a besoin : cela n’enlève rien à la « difficulté politique » mais permet, en certaines situations délicates, de pacifier, autant que faire se peut, la scène politique nationale. Ce n’est pas négligeable, à l’heure des grands défis de la globalisation qui concernent aussi notre pays…

 

Et ne serait-ce pas là, tout compte fait, la conclusion institutionnelle que, dans le fond de son cœur, le général de Gaulle espérait sans oser y croire ? Le gaullisme partisan est mort avec de Gaulle, mais l’esprit gaullien, de tradition capétienne, n’y trouverait-il pas là une nouvelle actualité ?